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Le château de Montaiguet, autrefois en Forez, aujourd’hui réuni au
département de l’Ailier, se compose d’un corps de logis rectangulaire de
dimensions assez restreintes, flanqué de quatre tours d’angle, d’inégale
grosseur. Les tours, malheureusement, ont perdu leurs toits aigus, mais la
forteresse conserve son aspect vigoureux et a gardé en grande partie sa
couronne de corbeaux, à la saillie puissante, qui la coiffe encore avec une
réelle majesté. Le corps de logis rappelant l’emploi de la grangia dont
parlent les vieux titres, se compose à tous les étages d’une vaste et unique
salle, sauf au rez-de-chaussée qui est divisé et dont la principale
division, voûtée en plein cintre, nous montre l’ancienne cuisine; cette
salle centrale du rez-de-chaussée, qui possède une vaste cheminée et a
conservé, fixés à la voûte, des crochets de suspension, est placée au dessus
d’une cave également voûtée, dans laquelle coule une source d’eau potable.
De la cuisine, comme aux étages supérieurs, on a accès dans les tours
d’angle, où l’on retrouve les embrasures des meurtrières. Au premier et au
deuxième étage, il existe un mur qui divise le fond de la salle (côté
nord-ouest), de façon à former un étroit couloir, reliant les deux tours du
nord et de l’ouest. Pierre de la Fin, changeant la grange en château,
changea aussi les greniers en pièces d’habitation. Chacune, éclairée sur
trois faces par des fenêtres à croisillon, est pourvue d’une grande cheminée
dont l’ample manteau est fort simple. La salle du troisième étage a seule
conservé apparentes les poutres et les solives de son plafond qui sont
ornées de filets et de rosaces peintes au poncif, à une époque très
postérieure aux travaux de l’abbé de la Fin. L’édifice est fort exactement
orienté par les angles, de telle sorte que ses tours, percées de
meurtrières, regardent les quatre points cardinaux.
Les visiteurs pénétraient anciennement dans le château par une porte,
pratiquée latéralement et au niveau du sol dans la plus petite des tours,
celle du midi, qui contient l’escalier principal à vis, éclairé par des
fenêtres en accolades. La fenêtre située entre le premier et le deuxième
étage a son embrasure occupée par un évier, sans doute le lave-mains des
moines se rendant au réfectoire. Les trois autres tours présentent, dans
leur construction, une particularité intéressante: uniformément rondes à
l’extérieur, elles diffèrent de forme, entre elles, à l’intérieur. C’est
ainsi que la tour de l’ouest est intérieurement carrée; celle du nord, au
premier et au deuxième étage de laquelle conduisait un escalier de petite
dimension ménagé dans la muraille, hexagonale, et enfin celle de l’est,
cylindrique. Cette dernière contient un élégant oratoire voûté sur membrures
prismatiques. Il est éclairé par deux baies en accolade et possédait
primitivement un pavement en carreaux vernissés, portant le nom et les armes
de Pierre de la Fin. Les douves du château sont en partie comblées; des
murailles régnaient en bordure, reliant le château aux communs, et formant
entre ces deux constructions, une cour close, spacieuse. A l'ouest, un
pont-levis permettait de franchir le fossé et d’atteindre la porte ménagée
dans la clôture, porte d’accès de la cour qui montre encore les rainures de
sa herse. L’angle est de cette clôture était armé d’une forte tour qui n’est
plus visible aujourd'hui que par quelques substructions. Cette tour
défendait un second pont-levis qui donnait accès en face de l’entrée
principale.
La Mure attribue au comte du Forez, Guy II, la donation du château de
Montaiguet, pour la grande partie, à l’abbaye de la Bénissons-Dieu, en 1138.
Toutefois, lors d’un procès qui avait commencé en 1313 et durait encore en
1349, les Bénédictins refusèrent de se soumettre à la justice des comtes de
Forez, sur leur territoire de Montaiguet, prétendant que cette terre leur
avait été donnée, ainsi que le château, pleinement et sans aucunes réserves,
par Artaud, vicomte de Mâcon, dont ils produisaient une charte du XIIe
siècle, consacrant cette donation. Dès le début de leurs difficultés, les
religieux mirent leur cause et leurs possessions sous la protection directe
du Roi. Ils avaient fait placer à l’extérieur de Montaiguet, que les pièces
du procès nomment modestement grange, un écusson royal que Pierre de Sury,
châtelain du comte de Forez, fit arracher en 1323, mais qui fut bientôt
replacé sur l’ordre direct du Roi, Charles le Bel. L’année suivante, les
moines obtinrent du châtelain du Roi à l’Espinasse la nomination d’un
sergent et gardiateur royal pour Montaiguet, le petit Bernard, ce qui
n’empêcha pas l’enseigne royale d’être enlevée de nouveau et remplacée
parcelle du comte de Forez. En 1329, les moines obtinrent la nomination de
trois sergents, Hugonet Gayioti, de Charlieu ; Hugonin Goyne, de Pouilly, et
Tachon, prévôt de Cusset, remplacés trois ans plus tard par Perronin de
Miribel et Guillaume Alestayre. Mais en janvier 1335, Tachon, prévôt de
Crozet, escorté d’une trentaine d’hommes armés, tant à pied qu’à cheval,
parmi lesquels Guillaume Fillet, damoiseau, Guillaume Gottolaz, Pierre et
Guiot Favre, frères, Gaufride de Chappe, etc, se présenta à la porte de
Montaiguet, et insulta l’écusson du Roi, puis un sergent, Étienne Raquin,
convoqua et contraignit les habitants à voir exercer la justice du comte de
Forez. Un larron qu’ils traînaient avec eux, fut hissé sur un tertre où on
lui coupa l’oreille, malgré les protestations du frère Aymon, maître de la
"grange", qui s’empressa de faire constater le tout, en un acte rédigé par
le curé de Sail, notaire commissionné de l’official de Clermont.
Cette hâte réciproque à vouloir exercer le droit de justice, amenait un
excès de zèle qui ne connaissait plus de limites, c’est ainsi qu’un porc
coupable d’infanticide, fut bel et bien condamné et pendu en 1339. Un
jugement du 28 mai 1349 fut favorable aux religieux et ordonna le maintien
du panonceau royal en la grange de Montaiguet, mais les difficultés ne
furent point closes pour cela. Pierre de la Fin, l’opulent et magnifique
abbé qui reconstruisit le château de Montaiguet, était le 20e abbé de la
Bénissons-Dieu. Originaire du fief de la Fin, à Thiel en Bourbonnais, élu
abbé en 1460, il avait trois frères, Antoine, seigneur de Beauvoir et de
Pluviers, maître d’hôtel de Jean II de Bourbon; Hugues, seigneur de Fraignes,
du Vergier et de Beaudéduit; Gilbert, mort le 14 août 1540, commendataire de
la Bénissons-Dieu après son frère; et une sœur, Jeanne, mariée à Louis de
Viry, seigneur de la Forest. On retrouve partout, à Montaiguet, ses
armoiries: d’argent à trois fasces de sable; à la bordure denchée de
gueules. Le fils d’Antoine de la Fin, Jehan, fit une fondation, le 6 octobre
1546 à Montaiguet, à l’intention des défunts de sa famille. Il a pour
collaborateur dans cet acte "très révérend monseigneur Anthoine de Lévis de
Chàteaumorand" qui avait succédé à Gilbert de la Fin. En 1610, le
commandataire était Claude de Nérestang. Il imagina et réalisa l'échange
original qui fit de la Bénissons-Dieu une abbaye de religieuses. L’abbesse
Françoise de Nérestang fit quelques réparations au château de Montaiguet. Le
18 août 1790, Jean-Marien de Viry, président du district du Donjon, requit
le sieur Cossonnier, fermier de la seigneurie de Montaiguet, pour lui
représenter les effets mobiliers qui garnissaient le château, mais le
fermier déclara que le château n’était habité par personne, était même
inhabitable, et qu’en conséquence, il n’y avait aucun meuble de quelque
espèce que ce soit.
"Procédant ensuite à la visite du château, nous avons reconnu qu’il est
composé d’un pavillon flanqué de quatre tours rondes, dont l’une contient
l’escalier pour monter du rez-de-chaussée jusqu’au plus haut du château à la
naissance de la charpente. Le surplus du bâtiment contenant, par le bas, une
très ancienne cuisine accompagnée de trois cabinets dont deux communiquent
par un corridor, avec la même répétition d’appartements au deuxième et au
troisième étage, si ce n’est qu’au troisième étage les cabinets communiquent
immédiatement avec la grande pièce du milieu. Au-dessus duquel troisième
étage est un galetas à l’approche de la charpente; et une cave étant
au-dessous dudit château et qui se divise en quatre pièces, lesquelles sont
actuellement hors de service, étant presque entièrement submergées. A côté
duquel château est un bâtiment en très mauvais état servant de boulangerie,
composé d’une grande pièce et d'un petit cabinet à côté, et au-dessus la
répétition de la même distribution. Tous lesdits bâtiments couverts de
tuiles plates. Plus, dans la même cour, un autre bâtiment couvert de tuiles
creuses à un seul égout, composé d’une grande et petite écurie, au-dessus de
chacune desquelles est un grenier à foin dans les mêmes dimensions que le
bas. Le tout entouré de murs et de fossés. Plus dans l’avant-cour dudit
château est une grange couverte de tuiles creuses et en très mauvais état".
En 1891, le château de Montaiguet appartenait à M. Debort. M. Roger Simon de
Quirielle en a écrit l’histoire et habite à Montaiguet, un château moderne
voisin de l’ancien. Les armes de cette famille sont de gueules à six mains
apaumées d'argent, 3, 2 et 1. (1)
Éléments protégés MH : le château de Montaiguet en totalité : inscription
par arrêté du 13 juin 1927. (2)
château de Montaiguet
en Forez 03130 Montaiguet-en-Forez, tél. 04 70 55 20 01, visite des
extérieurs uniquement, propriétaire très accueillante. A signaler que la
porte fortifiée à l'entrée du village (les deux dernières photos ci-dessous)
est classée MH par arrêté du 17 janvier 1924. Aujourd'hui à usage de mairie.
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