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La première mention de
Saint-Cassien est celle d'une cella (prieuré primitif où résident les
moines) dépendant de l'abbaye Saint-Victor de Marseille grâce à une donation
de 1043. D'après le cartulaire de Saint-Victor, cette donation comprend un
château à Amirat et une église Saint-Cassien, ainsi que les terres en
dépendant. Le territoire ainsi donné est décrit par rapport au col Avenos et
à la rivière Calvaniam. Baratier en déduit que le lieu d'implantation de la
cella, ne se trouve pas nécessairement à l'emplacement actuel du hameau de
Castellet-Saint-Cassien mais entre ce lieu et Amirat. Tout porte à croire
que l'église offerte à l'abbaye est déjà à cet emplacement, tant par la
description du lieu dans l'acte de donation que par les informations
ultérieures données par les pouillés. Ainsi, dans les pouillés du diocèse de
Glandèves, cet édifice est mentionné dès 1376 comme ecclesia de Casteleto
sancti Cassiani, ou encore, au XVIe siècle, ecclesia Castri Sancti Cassini.
Une chapelle, se trouvant à l'emplacement du cimetière actuel, a été
détruite avant 1840, elle apparaît sur le cadastre napoléonien. Il pourrait
s'agir, sinon de cette ecclesia du XIVe siècle, du moins de ses vestiges, ou
de la mémoire de son emplacement. Les Glandevès (ou Glandevez) sont
seigneurs de ce fief à partir de 1231 et jusqu'à la Révolution. Dès 1232, on
trouve mention du Castelletum Sancti Casiani, à nouveau en 1252 du castrum
de sancti Cassiani ou castrum de Castelleto, à nouveau en 1419.
Sur la carte de Cassini, vers le milieu du XVIIIe siècle, il est nommé le
Castellet de Glandeve. Le château actuel est probablement construit dans la
première moitié du XVIIe siècle (une cheminée porte la date de 1659) à
l'emplacement du château médiéval, le seigneur en est alors Honoré de
Glandevès (né en 1539, marié en 1584) ou plus probablement son fils Horace
(qui se marie en 1612 et teste en 1644). Cette même inscription sur la
cheminée contient trois initiales H.D.G. qui pourraient être celles du
commanditaire. Il est sans doute dès l'origine conçu comme une bastide
fortifiée avec un corps rectangulaire flanqué de deux tours circulaires au
sud, forme architecturale fréquente dans les Alpes-de-Haute-Provence à cette
période. L'inventaire réalisé en 1792 au moment de la vente du château comme
"bien de l'émigré Glandèves", donne une description détaillée de la
disposition intérieure du bâtiment ainsi que de son ameublement. Le
rez-de-chaussée semble dévolu à la domesticité et au travail, le vestibule,
orné "d'une fontaine avec un grand bassin le tout en airain", ouvre sur un
"salon tapissé en cuir doré" avec décor coloré, visiblement meublé comme un
bureau, sans doute la pièce au sud (non divisée à l'époque). Ce salon est
attenant à "l'office" (sorte de cellier au vu de son contenu), la plus
petite pièce à l'est (qui ne communique pas avec le vestibule). Enfin du
cellier, il est possible de passer à la "cuisine", au nord. Aucune
description n'est spécifiquement donnée des pièces à l'intérieur des tours.
Au premier étage, l'étage noble, la "grande salle tapissée en cuir doré" est
meublée de meubles de repos mais aussi de tables de jeu; la cheminée est
munie de "deux gros chainets en pesant environ cinq livres". Il s'agit sans
doute, si l'on tient compte du sens de visite lors de l'établissement de
l'inventaire, d'une seule grande pièce au nord. De cette salle, on pouvait
accéder à la "chambre rouge tapissée de damas ou étoffe de faye rouge et
blanc", meublée comme telle avec notamment "une couchette en noyer à la
duchesse". Cette salle est nommée, un peu plus tard dans un récolement
précédant la vente, "la chambre rouge". Cette chambre communique également
avec "un autre appartement appelé la tour tapissée d'une toile peinte de
plusieurs couleurs", une seule grande pièce au sud; il est également
mentionné "un autre appartement", communiquant avec le précédent, peut-être
la pièce occupant le premier étage de la tour, servant de salle de repos. Au
deuxième étage, l'espace est divisé en sept "appartements" ou chambres
meublées de lits en baldaquin ou "à tomberau" ou encore munis d'un ciel de
lit dont les étoffes et les couleurs sont à chaque fois décrites, le
mobilier semble globalement en assez mauvais état. Les tours sont aménagées
en "cabinet" ou bureau. Ainsi l'appartement "à la gauche" contient deux
lits, l'un à baldaquin, l'autre avec un ciel de lit "garni et entouré d'une
étoffe en faye couleur verte fort usée" et le "petit appartement nommé la
tour" attenant est sans doute un petit bureau. L'appartement symétrique,
celui du sud-ouest, est "tapissée d'une étoffe brochée en laine représentant
des paysages", il s'agit également une grande chambre avec son "cabinet
attenant".
Le château est vendu comme bien national le 2 Frimaire an III (22 novembre
1794), il appartient, avant sa saisie, à Pierre-Raimond de Glandevès. En
1817, au moment de la réalisation du cadastre napoléonien, le château est
divisé en deux parcelles. Vers 1840, un appartement du château est loué au
sieur Aillaud d'Entrevaux (l'un des copropriétaires du château) par la
commune pour loger le desservant de la paroisse et servir donc de
presbytère. Il est décrit comme "passable mais très exigu" se composant de
"trois pièces strictement dont une sert de salon, de cuisine et de chambre à
coucher, l'autre de chambre de la domestique et la troisième, très exiguë
sert de cabinet de provisions, il y a de plus une cave". Par la suite, à
partir de 1865, le rez-de-chaussée du château est loué par la commune pour
servir d'école et de logement de l'instituteur. En 1875 la commune
renouvelle le bail pour 9 ans, le bail est régulièrement renouvelé avec les
propriétaires successifs et en 1910, l'école est toujours au rez-de-chaussée
du château : dans la partie sud, la salle d'école (avec une ouverture à
l'ouest et une au sud) et une chambre (ouverture au sud); une autre chambre
à l'arrière de la cage d'escalier; la cuisine demeure au même endroit.
L'école quitte finalement le château en 1962.
Le château de Castellet-Saint-Cassien a été construit au sommet d'un
promontoire rocheux. On accède au petit hameau et, en premier lieu au
château, par une allée arborée qui ouvre sur la façade nord du château, la
façade principale étant à l'ouest, vers la vallée de la Chalvagne. Le
château présente un plan massé rectangulaire accoté de deux tours rondes
engagées aux angles nord-ouest et sud-ouest, un peu plus basses que le corps
de logis principal. Jean-Luc Massot nomme ce type d'édifice "bastide
fortifiée" plutôt que château. Le gros-oeuvre est constitué d'un blocage de
moellons bruts en calcaire local, lié au mortier de chaux. L'enduit lisse
est encore présent sur la façade ouest, il portait un décor de faux-appareil
de pierre de taille (restitué sur la façade ouest). Les pavements,
lorsqu'ils sont encore en place, sont en terre cuite, tomettes ou mallons
carrés. Les toits sont couverts de tuiles creuses avec un toit en pavillon
sur le bâtiment central et des toits coniques sur les deux tours, sur deux
rangs de génoise. Le château possède cinq niveaux: un étage de soubassement
auquel on accède uniquement par la façade est, un rez-de-chaussée surélevé
avec accès à l'ouest, deux étages carrés surmontés de combles. L'étage de
soubassement ne couvre que les deux-tiers sud de l'emprise au sol du
château: il s'agit de deux pièces en contrebas, allongées, parallèles, sans
communication et voûtées en berceau. Par la pièce sud, on accède, par une
porte avec encadrement façonné de gypse rouge, au sous-sol de la tour
sud-ouest, dont la voûte maçonnée d'arêtes quasi plates à six quartiers.
Dans le bas du mur, l'accès avec ébrasement en biais, muré, à la bouche à
feu occulté par un volet en bois.
Le rez-de-chaussée surélevé et le premier étage carré présentent une
composition similaire déterminée par deux murs de refend transversaux
divisant l'espace oblong en trois. L'escalier intérieur, placé en façade,
légèrement décentré, dessert deux grandes pièces, au nord et au sud, la
première ouvre ensuite sur une plus petite pièce, à l'arrière de l'escalier,
à l'est. Chacune de ces deux pièces offre un accès à une des deux tours.
L'escalier est un escalier en vis suspendu, à l'origine avec jour (le limon
étant orné), avec donc un limon porteur. L'élévation ordonnancée de la
façade principale ouest se structure autour de la porte centrale, seul
ornement de la façade avec encadrement harpé de pierre de taille, en une
travée de part et d'autre de cette ouverture. Cette dernière est surmontée
d'une baie éclairant l'escalier intérieur. Les tours possèdent des
canonnières étroites, circulaires ou rectangulaires, en pierre, aujourd'hui
murées, disposées non verticalement alignées de manière à couvrir tous les
angles de tirs. Elles sont ceintes d'un cordon de pierre à un tiers de leur
hauteur. La façade orientale est percée actuellement de trois baies
éclairant les petites pièces à l'arrière de l'escalier. On observe également
les fragments d'une échauguette à l'angle sud-est ornée d'un décor de
gypserie. La façade sud est percée de sept baies non ordonnancées. Les
décors intérieurs de gypseries sont riches: ils ornent l'ensemble de la
voûte d'escalier et le limon, ainsi que les paliers. On les trouve également
à l'étage noble sur les cheminées. Sur les parois de l'escalier accédant aux
combles, et sur les enduits de plâtres des murs de ce niveau se trouvent de
nombreux graffitis et notamment des croquis incisés ou des dessins au fusain
dont certains pourraient dater du XVIIIe siècle et de l'époque
révolutionnaire. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château, l'escalier,
la cage d'escalier, la pièce principale du premier étage et la cheminée, le
bassin : inscription par arrêté du 18 décembre 2012.
château de Castellet Saint Cassien 04320 Val-de-Chalvagne, propriété de la
commune.
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