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Il n'y a pas de date
précise en ce qui concerne l'édification de ce château ni dans les
modifications dont il a manifestement fait l'objet, fût-ce dans un laps de
temps court après sa construction. En revanche, il est certain que son
premier propriétaire, Joseph de Raimond ou de Raimondis, seigneur d'Eoulx et
du Bourguet, a adressé une supplique à l'intendant de la marine l'autorisant
à réaliser des coupes de bois dans le but, entre autres, de mettre en oeuvre
"un chasteau que veut fère bastir". Cette demande a été dûment enregistrée
dans les délibérations du conseil d'Eoulx en date du 28 septembre 1687. Cela
fournit un terminus ante quem. Par ailleurs, deux sources indirectes mais
fiables puisque objectives fournissent un terminus ante quem. Il s'agit de
deux visites pastorales de monseigneur Joseph Soanen, évêque de Senez. La
première date du 10 mai 1697. L'homme d'église évoque son arrivée dans
l'ancien village d'Eoulx et précise que son logement prend place "dans le
chateau du seigneur d'Eaux". Quelques années plus tard, lors d'une autre
visite pastorale datée du 9 novembre 1704, il évoque brièvement "le vilage
ou est aujourd'huy le nouveau chateau de Monsieur de Raimondis". Il faut
donc envisager une construction rapide qui aurait pris moins d'une décennie
entre la demande officielle et l'édifice en élévation et opérationnel
puisque l'évêque y est logé par le seigneur (demande à l'automne 1687,
château en place au printemps 1697).
Il semble qu'il y ait eu une voire deux phases supplémentaires, réalisées
durant le XVIIIe siècle dans un temps peut-être très court. La première, qui
peut avoir été très proche chronologiquement de la première phase,
concernerait les deux tours cornières qui flanquent la façade sud. La
seconde concerne un élargissement des flancs ouest et est. Des travaux
d'agrément et d'agrandissement aux abords; une terrasse, ainsi qu'une
dépendance accompagnent le château lui-même: l'ensemble a vraisemblablement
été réalisé tardivement, dans la décennie 1770 comme en attestent des dates
portées: 1773 et 1775 et 1779. Lorsqu'éclate la Révolution française, le
seigneur de Raimondis dispose à Eoulx de son château de plaisance,
accompagné d'autres bâtiments, liés à l'agrément mais surtout à
l'exploitation et pourvoyeurs de revenus. Le rapport d’encadastrement
provisoire de la commune d’Eoulx pour les possessions privilégiées établit
le 24 août 1790 que les biens fonds de Raymond d’Eoulx comportaient
également des éléments de rapport à vocation agricole en premier lieu des
"bastides" bien sûr, en réalité des fermes, (bastide du Plan, bastide de
Rayaup, bastide du Colombier). On dénombre aussi un moulin à farine non
banal.
Ces bâtiments commandent ce qui importe le plus, à savoir le foncier mis en
exploitation au profit du seigneur en différents lieux de la commune: terres
cultes et incultes, arrosées ou non, prés, aires à battre, portions
forestières. Ces biens, château exclu, furent estimés en 1790 à hauteur de
2543 écus et 43 sols, d’après les mêmes sources. La période révolutionnaire
a entraîné un changement de propriétaire, mais les états de section du
cadastre levé en 1834 montrent qu'une partie du domaine seigneurial (dont le
château) est passé entre les mains d'un autre membre de la noblesse
appartenant à une branche des Villeneuve: il s'agit de Jean François Marie
Désiré de Sauteron de Seranon (1787-1869), domicilié à Aix-en-Provence et
rentier de son état, qui ne racheta qu'une partie des biens du précédent
propriétaire, notamment la "bastide du Plan". Le château a en outre et par
la suite fait l'objet d'aménagements secondaires qui ont contribué à
dégrader son apparence extérieure, surtout sur la partie postérieure. La
distribution intérieure a par ailleurs évolué dans le sens d'un lotissement
pour créer des lots différents avec plusieurs appartements par étage
d'habitation. Ces modifications ont entraîné des dégradations surtout
observables dans le décor de gypserie. Le château est toujours actuellement
en multipropriété.
Le château se présente sous l'apparence d'un bâtiment dont la base affecte
un plan régulier symétrique de forme carrée flanquée sur sa façade
principale sud de deux tours cornières de forme ronde. Un agrandissement est
intervenu sur les flancs est et ouest. Le toit couvert en tuile creuse est à
longs pans à croupe. La mise en oeuvre consiste en une maçonnerie de moellon
calcaire de taille moyenne, non équarri ou de façon très grossière, lié au
mortier de chaux et recevant un enduit lisse de couvrement. Implanté sur une
pente douce, le bâtiment se déploie sur cinq niveaux: un étage de
soubassement accessible directement depuis la façade principale sud, un
rez-de-chaussée surélevé accessible directement depuis la façade postérieure
nord, deux étages carrés et un étage de comble. Ces deux entrées
communiquent avec l'escalier de distribution dans-oeuvre, central, qui
occupe pourtant une position reculée par rapport à la façade principale sud:
un vestibule permet d'en rejoindre la cage. Seule la façade méridionale est
régulière et symétrique, présentant une élévation à sept travées dont les
deux extrêmes sont parfaitement alignées sur tout le développé. La façade
septentrionale a fait l'objet de remaniements au niveau de ses ouvertures,
dont certaines ont été murées et parfois partiellement remplacées par
d'autres qui ne correspondent pas toutes aux différents niveaux
d'habitation.
Latéralement, sur les adjonctions, les ouvertures alignées de dimensions
plus modestes désignant des pièces d'habitation déterminent des espaces plus
réduits, de moindre hauteur sous plafond, ce qui permet d'accroître le
nombre d'étages. Des jours désignent de part et d'autre un escalier de
service réservé chacun à la domesticité. Depuis l'extérieur, on comprend
donc que la distribution intérieure est complexe, puisqu'elle détermine des
espaces "nobles" d'habitation auxquels se greffent, certes à l'écart (ailes
latérales) des espaces dévolus au personnel de service, par ailleurs logé au
premier étage de comble. S'ajoutent également des pièces à vocation agricole
et domestique. Sous une forme simple, le château témoigne d'une organisation
relativement complexe. La mise en oeuvre soignée des ouvertures cintrées,
toutes recevant un encadrement en pierre de taille calcaire légèrement
saillante (de façon inaboutie en façade nord cependant), favorise cette
impression d'ensemble. C'est d'ailleurs cet habillage qui permet de penser
que les deux tours furent ajoutées après coup, car l'encadrement des
ouvertures en pierre de taille, du moins à l'étage de soubassement, est en
partie "absorbé" par la maçonnerie de celles-ci. On notera également que le
traitement de l'avant-toit harmonise l'ensemble: il est à triple rang de
génoise filant sur le pourtour du bâtiment, à l'exception des deux
adjonctions latérales, où il n'est plus que double, et même simple sur le
retour en pignon. (1)
château d'Eoulx 04120
Castellane, propriété privée, ne se visite pas.
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