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Tandis que d’autres
châteaux n’ont plus, pour marquer leurs heures de gloire, que des ruines
altières évocatrices de silhouettes jadis brillantes, mais trop atténuées
par les ans pour permettre une exacte reconstitution de leur existence
mouvementée, le château de Colombier-le-Cardinal, par ses débris de tours
d’entrée, ses murs élevés d’enceinte, les proportions gigantesques de ses
bâtiments actuels, donne bien encore, malgré les démolitions et
transformations successives, l’idée de son importance historique au point de
vue guerrier, religieux et seigneurial. Pour construire la grosse tour du
château, il ne fallut pas moins de dix ans, nous dit le Père Grasset. Les
premiers seigneurs connus sont, d’après La Chesnaye-Desbois, Jean Maleton,
vivant au milieu du XIIe siècle, époux de demoiselle de Beaufort, seigneur
de Colombier, Gurin et Gurinet, Jean II, Jean III, frère de Bonnet ou Gonnet,
fils de ce dernier, vivant en 1260, époux de demoiselle Chastillone; Bonnet
II, mort en 1292, marié avant 1248 à demoiselle d’Ozas; Jean IV, bailli du
prieuré d'Andance en 1300, mort en 1340, avait épousé demoiselle de la Tour
de Saint-Julien. Barthélemy, son fils, mort le 25 mars 1336, épousa en 1297
Marguerite Bertrand dont il eut entre autres deux fils: Barthélemy, seigneur
de Colombier, et Pierre, dit Bertrand le Jeune, né le 25 mars 1299, élevé
par son oncle et parrain, chanoine de Laon en 1317, évêque de Nevers en
1337, qui fit commencer la grosse tour du château du Colombier en 1339. La
famille Maleton de Colombier portait: d’argent au chevron d’azur, chargé de
deux colombes d’argent affrontées, accompagné de trois roses de gueules.
La transformation du château en monastère célestin fut décrétée en 1361, par
la volonté testamentaire de notre Pierre, cardinal du titre de Sainte
Suzanne et évêque d’Ostie, mort de la peste à Montaud-les-Ayignon le 13
juillet 1361. La seigneurie du Colombier ne lui était cependant pas échue
par héritage paternel. Son neveu, Jean Veyre, en était seigneur et laissa
son oncle libre d’en disposer par son testament du 21 mai de l’an 1346 où il
mourut d’une blessure reçue à l’armée. La première chapelle fut bâtie peu
après la fondation, en 1364, avant le priorat "d’Yvone Grossi, 1373, 1382".
En 1473, elle fut agrandie et consacrée de nouveau. En 1498, nouvelle
construction plus digne de la prospérité du couvent. Elle dut son élévation
au legs de 1800 florins d’or, d’un bourgeois de Tournon, Humbert Boveyronis,
venu finir ses jours au milieu des religieux, et exerçant pour eux les
fonctions de juge de Colombier et de Peaugres. Le testateur demandait, en
échange, la sépulture dans le nouvel édifice. Après ces années de
prospérité, viennent les vicissitudes extérieures et intérieures. Pierre
Guildon, prieur, en 1540, a beaucoup de peine à préserver son couvent de la
perversion hérétique. En 1557, eut lieu un important service funèbre, auquel
nous voyons prendre part une partie des protecteurs de Colombier, Christophe
de Saint-Chamond, et son frère cadet, Jean de Saint-Romain, de la famille de
Saint-Priest. Par la volonté de Saint-Chamond, Colombier va devenir quartier
général pour les troupes catholiques pendant toute la période troublée du
XVIe siècle, sans éviter pour cela, pillages et vexations. Le 21 octobre
1562 est marqué par la prise de possession du couvent par Henri de
Montmorency-Damville, du parti de la cour, accompagné de Christophe de
Saint-Priest dit Saint-Chamond, lieutenant du roi en Forez.
Peyraud, qui occupait auparavant le monastère, sur l’ordre de Damville
d’évacuer la place dans les vingt-quatre heures, s’était exécuté.
Saint-Chamond, dès lors, commença à fortifier le Colombier. Les travaux
durèrent huit mois, et les frais en furent supportés par les paroisses
environnantes. De là, il présida à l’investissement d’Annonay, puis
s’éloigna le 2 novembre, laissant dans les murs du couvent, une garnison
sous les ordres du bailli Jarnieu. Fleury de Jarnieu résista à toute
tentative jusqu’au retour de Saint-Chamond, renvoyé par Nemours avec 4000
hommes. Ici se place la deuxième prise d’Annonay, son pillage, celui de
Boulieu, le retour au Colombier le tout terminé par l’édit de pacification
d’Amboise, 19 mars 1563. En 1567, nouvelle crise. Saint-Chamond n’apparaît
cependant qu’en 1568, ne passant qu’un jour à Annonay. Le couvent eut à
héberger, alors, le 13 septembre, outre sa garnison ordinaire, le sénéchal
de Lyon, Jacques d’Urfé, le chevalier d’Apchon, Saint-Priest, les capitaines
Le Blanc et Clair-Imbert avec leurs argoulets et gens d’armes. La garnison
fixe du château se composait de 120 fantassins et 60 cavaliers commandés par
François de la Barge; elle causait des dépenses si considérables aux Pères
Célestins, que les états du Vivarais, réunis à Tournon en 1568, votèrent une
somme annuelle de 1800 livres pour les soulager, à condition toutefois, que
les six paroisses les plus rapprochées contribueraient au payement de cette
somme. Les violences de cette seconde période de luttes intestines prirent
fin, à l’édit de pacification de Saint-Germain-en-Laye, le 15 août 1570.
Pendant le priorat de Gonsolin, mort en 1574, les attaques ordinaires des
hérétiques continuent cependant, et ce n’est que grâce à sa prudence et à
son économie, que la ruine totale du temporel put être évitée.
Nicolas Longueval, son successeur, devant la continuation de perpétuels
assauts joints à l’irrégularité de la discipline, demande son changement. Au
milieu d’octobre 1574, la garnison de Colombier opère une sortie contre les
hommes de Meaussé installés à Pigneu. Le 22 octobre, apparition de
Saint-Chamond, une trêve intervient enfin entre lui et de Meaussé le 6
décembre; deux jours après, les troupes regagnent le Forez et le Lyonnais.
En avril 1575, Saint-Chamond abandonne le commandement du Haut et Bas
Vivarais que lui avait conféré Henri III; mais le pli était pris, et La
Barge qui le remplace, garde l’habitude d’établir son quartier général au
Colombier. Un troisième édit de pacification est censé ramener le calme.
L’édit de Beaulieu est publié à Annonay le 12 juin 1576. Le prieur d’alors,
nommé Balliet, est déposé au mois d’août 1577, au passage du provincial. En
1586, Jean Petit est à la tête du monastère; très capable, il défend ses
intérêts temporels contre les seigneurs voisins qui coupent les bois et
refusent de payer la dîme. En 1590, il est menacé, par le sieur de Tournon
voulant à son tour imposer une garnison, d’être pendu à la porte de son
couvent, et finalement gardé prisonnier à Tournon. Au mois de mai, des bœufs
sont enlevés pour conduire des canons; Montmorency les fait rendre. En
raison de cette protection efficace, ce puissant personnage est réélu la
même année gouverneur du Colombier, par l’assemblée capitulaire des
religieux. Après le récit des guerres, funestes en plus d’un point, le Père
Grasset signale quelques inconvénients inhérents à la position du couvent:
les étangs à poissons nuisaient à la salubrité du site; les prieurs
mouraient généralement en été, de la fièvre continue. En 1614, sous le
vicariat de notre historien, s’élève une discussion touchant la prééminence
des familles protectrices du couvent.
Melchior Mitte de Saint-Chamond, ne veut tolérer en sa chapelle d’autres
armes que celles de sa maison; celles du cardinal de Colombier sont alors
placées à la voûte de la première église pour éviter tout conflit avec les
Saint-Priest, sans cependant leur reconnaître les droits exclusifs dont ils
se réclamaient "nec solum nec ejus dominii eis datum fuerat". En 1655, à la
diligence du même religieux, l’image de la Vierge fut posée dans la niche
qui surmonte la grande porte du monastère: "l’image a esté faite à Lyon, et
a cousté deux cents livres". En 1675, l’ancien bâtiment du couvent des
Célestins, et le château de Colombier furent en partie démolis. On éleva sur
leurs ruines le bel édifice que l’on admire encore. Une partie des
précédentes constructions, et particulièrement l’église dont la solidité
remarquable avait résisté aux injures du temps, furent respectées. Au moment
de cette entreprise, les religieux, dit-on, n’avaient que 13000 livres
d’avances, mais leur foi ne fut point trompée, non plus que quelques années
après, lors du grand hiver de 1709 qui entraîna une funeste disette, les
religieux Célestins se signalèrent par leurs prodigieuses libéralités. Ils
allèrent même, nous dit l’abbé Filhol, jusqu’à emprunter des sommes
considérables pour nourrir les pauvres d’Annonay. En 1820, M. François Lioud,
d’une famille originaire du Péage de Roussillon, frère de Mère Marie Lioud
de la Providence, en était propriétaire. C’est de la famille Lioud que M. de
la Lombardière de Canson fit l’acquisition des vastes domaines du Colombier,
Sarameille, Gurin, petit Gurin, etc..., qui venaient compléter les
possessions de sa famille dont l’ensemble justifiait le dicton populaire:
"depuis Annonay jusqu’à Peaugres, tout est à M. de Canson". Au début du XXe
siècle Colombier-le-Cardinal était habité par Madame Jean de la Lombardière
de Canson et ses enfants (1). En 1961, la famille de Canson vend le château
et des terres attenantes à la société Saint Gobain. Celle-ci le revend en
1982 au Syndicat départemental de l’équipement d’Ardèche, qui dépend du
conseil général, et confie sa gestion à la Fédération départementale des
familles rurales d’Ardèche afin d’œuvrer au développement du tourisme social
dans une région, le nord-Ardèche, où cette activité n’est pas encore
valorisée. Naît alors une maison familiale de vacances.
Éléments protégés MH: la salle de compagnie et la salle à manger au
rez-de-chaussée du corps de bâtiment Sud, y compris les parties de façade
extérieure et de toiture correspondant à ces pièces : classement par arrêté
du 8 février 1963. (2)
château de Colombier ou des Celestins 07430
Colombier-le-Cardinal. Tel. 04 75 34 83 31, location de salles pour
réceptions, ouvert au public sur demande.
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