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Le domaine de Perrier et son logis carré flanqué de
vastes dépendances, se blottit au midi, à 1100 mètres d’altitude, contre la
forêt protectrice qui recouvre un des plus hauts sommets de la région (1328
mètres). Située au centre du triangle formé par La Louvesc,
Saint-Pierre-des-Macchabées et Veyrines, à l’intersection des routes
muletières réunissant ces trois villages et reliant Saint-Pierre et La
Louvesc avec la Vocance et Mahun, de toute ancienneté cette construction dut
servir de relai et d’abri. Le nom même de Perrier doit indiquer ce rôle
(lieu traversé ou chaussée pavée) si nous lui donnons une interprétation
latine autorisée, semble-t-il, par le passage fort proche de la voie romaine
de Vienne au Puy, reconnu à Saint-Symphorien, et par les noms de semblable
origine semés le long de ces voies et que nous retrouvons dans notre cas
particulier à Veyrines (Vitrinis), aux hameaux Faurie (Fabrica), etc... Les
deux sens plus généralement attribués à ce mot: lieu du peirier ou carrière
de pierre, ne peuvent trouver ici leur application, faute de l’une et de
l’autre. Nous voyons seigneurs de la région, successivement les divers
barons de Mahun: après les Pagan, les Retourtour, les Tournon vers 1600, les
Lévis et les du Faure jusqu’à la Révolution, simultanément avec les moines
de Saint-Chaffre, puis les Jésuites du Puy nommant aux diverses cures sous
l’autorité religieuse suprême de Vienne. Issus de la fondation de
Saint-Honorat aux îles de Lérins au IVe siècle, les premiers protecteurs de
notre montagne adoptèrent bientôt la règle de Saint Benoît, et s’établirent
en l’an 641 près du Puy, dans une localité nommée primitivement villa
Carmery en l’honneur du gouverneur de Clermont, constructeur du couvent,
puis Monastier-Saint-Chaffre en souvenir d’un des premiers abbés, Saint
Theofredus, mis à mort par les Sarrasins en 732.
C’est au Monastier qu’Aymon Pagan, vers l’an 1050, alla chercher des
religieux pour animer les fondations pieuses nées de sa générosité. Dès
cette époque commencèrent à s’élever les premiers bâtiments nécessaires au
séjour des moines. (De Curley, Tombeau de Saint François Régis). Pour le
domaine qui nous occupe, à la destination première de refuge, où pouvait
s’exercer à propos leur charité foncière sur leurs frères, égarés ou las
d’une longue étape à travers ce pays accidenté rendu souvent dangereux par
les brumes trompeuses, ces vaillants bénédictins ajoutèrent sans doute un
but agricole utilitaire, poussèrent à des défrichements nouveaux et à la
culture en métayage alors pratiquée. Des armes fort anciennes, au-dessus
d’une porte gothique, prouvent tout l’intérêt que leurs abbés prirent aux
murs hospitaliers de Perrier-Saint-Chaffre. Les deux clefs en sautoir et la
tiare papale apparaissent encore sur le dur granit, rappelant très
probablement les armes mêmes du monastère, qui ne se confondirent avec
celles de Cluny, que le 9 avril 1668, lors de son agrégation à cet ordre,
époque à laquelle du reste, son influence sur nos montagnes avait disparu.
Le premier patron reconnu de l’ordre et du sanctuaire primitif du Monastier
en Velay, fut en effet le prince des apôtres, Pierre, détrôné dans la suite
par la vénération accordée aux reliques d'Eudon, premier recteur, et du
martyr Saint Théofroy. Ce patronage expliquerait ces armes anciennes, et le
nom de Saint-Pierre donné si souvent aux fondations de nos moines. Perrier,
domaine de Saint-Chaffre, suit le sort des trois paroisses voisines citées
comme possession des saints moines bénédictins le 1er avril 1779, dans la
bulle du Pape Alexandre, et l’an 1259 dans celle du Pape Clément IV.
En 1623, les Jésuites du collège du Puy avaient été mis aux lieu et place
des religieux du Monastier. Si nous ignorons exactement quand et comment se
fit cette succession de pouvoirs, nous constatons qu’elle ne nuisit en rien
à la vie religieuse du pays. En 1475, la foi est intense, et ses
manifestations (nombreuses vocations et legs pour le service divin)
indiquent une longue hérédité ininterrompue de pratiques pieuses. Le "Jésus
hominum salvator", gravé après coup au-dessus de l’écusson des anciens
moines, rappelle le patronage bi-centenaire des Jésuites à Perrier
Saint-Chaffre. Les habitants de ce domaine étaient paroissiens de
Saint-Pierre-de-Machebœuf, et justiciables des cours royales de Velay,
Boucieu et Montfaucon, ordinaire de Mahun, sénéchaussée de Beaucaire et
Nîmes, au parlement de Toulouse. Sous ses nombreux seigneurs, protecteurs et
multiples administrations, Perrier Saint-Chaffre resta entre les mains de
quelques familles dont les noms se confondirent toujours et rapidement avec
celui du lieu, suivant l’usage local, les notaires eux-mêmes ne laissant
subsister dans les actes que le nom de terre, pour leurs clients comme pour
leur propre signature. La première famille que nous connaissions est celle
des Bouchon. Sous Louis XI, le 10 juillet 1465, Pierre, fils de Pierre
Bouchon de Périer, épouse, par acte passé au-dessous de sa demeure (la
disposition inclinée des lieux rend ce terme de circonstance), Marguerite,
fille de Benoît de Ser, par devant Maître de Manso et de nombreux témoins de
la paroisse et de la Vocance. Le parchemin relatant plusieurs donations en
fait des personnages pour l’époque. Cette répétition du prénom de Pierre
témoigne de la vénération continue du chef des apôtres, patron primitif des
moines prieurs, puis du hameau de Machebœuf devenu paroisse.
Postérieurement, à la date du 16 décembre 1475, nous relevons la trace de la
cé lébration des mariages de Marguerite, fille de Pierre Bochon de Périer,
avec Jacques Faurie, (Jacobum de Fabrica) et de Sigismonde, son autre fille,
avec Berthon Périer, en présence de Jehan Bochon, frère aîné, probablement
resté dans la demeure paternelle de la Boche. Une alliance avec Agathe de
Perrio, morte le 1er mai 1475, avait fait sans doute entrer un des domaines
de Périer dans la famille Bouchon. Une autre alliance avec Suzanne del Béat
lui donna d’autres terres voisines. Pierre Bochon del Béat près le Crozet
tenait un bois, appelé de Cornu, en indivis avec Pierre de Bayle du Bouvey (Bajuli
de Boveirio) (acte du 11 mai 1490, archives de Perrier Saint-Chaffre). En
1534, nous trouvons encore Jeanne Rochone, épouse de Jean Malaval, héritier
de Jeanne Vialleta del Béat. Malval est situé immédiatement au pied de
Perrier, sur les bords du ruisseau du Crouzet. Une de leurs terres est dite
"confrontantem ab occasu solis cum terra pétri Rochon a bisa pariter". Le
patrimoine des de Roche, arrondi par alliance, s’était dessaisi à son tour
de quelques lambeaux de terres, pour doter une fille établie dans le
voisinage. Les Rochoni, de Roche, originaires d’une des localités portant ce
nom, furent donc, nombre d’années, possessionnés à Perrier, dont nous les
voyons maintes fois qualifiés. Nous ne savons cependant si c’est la même
souche, oublieuse de son nom patronymique que représentait récemment la
famille Perrier, de Perrier. Ces familles: les Rayle, (dont nous connaissons
trois branches, celle du Chier, de Fauritas et du Rouveit), les Faurie et
les Roche-Perrier, en y ajoutant quelques autres comme les Crouzet, Planial,
Polly et Freichet, se passèrent successivement par alliance ces domaines les
unes aux autres, sans qu’aucun événement politique ne rejaillisse dans ces
montagnes pour troubler les successions normales. Au milieu du XIXe siècle,
Perrier Saint-Chaffre était devenu hameau, divisé au hasard des partages de
famille exécutés selon la loi, mais non toujours selon l’intérêt de la
propriété elle-même. Le nom de Perrier n’y était plus représenté que par Mme
Buisson-Perrier et ses trois sœurs, également mariées. Un fronton de porte
aux initiales des Buisson et à la date de 1797, mais placé à terre devant
l’entrée, marque le passage de cette ancienne famille. Jacques-Mathieu
Perrier, fils des précédents, dernier du nom, héritier de sa fille
Marie-Louise, morte après sa mère Marie-Anne Fourboul, habitait alors le
Rouvey, très ancien péage qualifié parfois de château, et occupé encore par
une des plus vieilles familles du pays, les Faurie. C’est à cette époque
(1856) que M. Gabriel de Soras se rendit acquéreur du domaine. Il était ,au
début du XXe siècle la propriété de Madame Poidebard, sa petite-fille. (1)
château du Perrier Saint-Chaffre 07520 Saint-Pierre-sur-Doux, propriété
privée, ne se visite pas.
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