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Dans un joli repli
de vallée bordé au sud par les pentes boisées de la chaîne du Lévezou et de
la montagne de la Vaysse, à une demi-lieue du bourg de Recoules, s’étale,
entouré de prairies, le gros hameau du Méjanel. Ses maisons se pressent
autour d’un pittoresque manoir présentant un indiscutable cachet. Aucune
réparation n’a altéré la fière allure de ses pierres. Bâti dans un vaste
enclos, en bordure du village, séparé de la rue principale par une cour plus
longue que large, presque accolé seulement au nord à un bâtiment rural, le
château du Méjanel affecte la forme d’un carré long, flanqué au midi de deux
tours rondes et à l'angle nord-est d’une belle tourelle en cul-de-lampe.
Particularité assez curieuse, aucune ouverture ne se remarque sur ses
façades nord et sud. Sa façade principale présente au levant ses croisées
presque toutes encore ornées de meneaux et, par une disposition assez rare,
déborde sur la moitié de sa longueur à peu près, dans la partie joignant la
face nord, sur la partie terminée par la tour sud-est. Cette sorte de
renflement arrondi constitue la base d’une tour ronde de même diamètre que
les tours encadrant la façade du midi ne se détachant qu’à hauteur de la
toiture. A sa base s’ouvre une porte un peu basse, élégamment entourée de
moulures, donnant sur un escalier tournant en pierre desservant le manoir.
La pierre de taille employée pour les ouvertures et les corbeaux est la
pierre calcaire commune dans le pays; le moellon est de même nature. Une
toiture formée d’épaisses tuiles, également calcaires, "le tioulas" seul
usité autrefois dans toute la région, recouvre à la fois les corps de logis
et les tours, rasées à hauteur du bâtiment, soit égalitarisme
révolutionnaire, soit qu’elles n’aient jamais été terminées. La patine du
temps a donné à l’ensemble un coloris puissant que ne vient gâter aucune
note fausse.
Le castel du Méjanel, bâti semble-t-il au cours du XVIe siècle, appartenait
à la fin de ce siècle et pendant la plus grande partie du siècle suivant à
la famille du Claux, qualifiés seigneurs de la Grésière et de Galhac et
fixés à Compeyre. Ces du Claux étaient certainement un rameau de la très
ancienne famille des Jouery, seigneurs du Claux près Firmy, que le mariage
en 1460 d'Adhémar de Jouery avec Hélix de Guitard de Peyrelade avait
possessionnés et fixés dans la région millavoise de la vallée du Tarn où les
retint plus encore le mariage du fils aîné d’Adhémar et d'Hélix, Gaspard du
Claux, seigneur de Claux et coseigneur de Peyrelade, avec Antoinette de
Mostuéjouls, célébré le 29 janvier 1506. Cette affirmation s’étaie du fait
que les Guitard habitaient eux-mêmes Compeyre au XVe siècle, qu’aucune autre
famille noble du nom de du Claux ne paraît en Rouergue avant ces du Claux
fixés à Compeyre et que dans l’usage le nom patronymique de Jouery était
presque tombé en désuétude comme on le constate dans des actes nombreux. Des
Guitard les du Claux tenaient des intérêts dans cette région. En effet
Pierre de Guitard, grand-père d’Hélix, femme d’Adhémar du Claux, avait
épousé Aline de Prévinquières-Varès et du chef de sa femme possédait des
biens dans la vallée de l’Olip, car en 1446 par une reconnaissance nous
savons qu’il habitait à ce moment le lieu de Saint-Grégoire dans cette
vallée et à peu de distance du Méjanel. Auparavant même, les Guitard avaient
des droits dans ce coin du Sévéraguais puisque dès 1385 quelques titres
citent noble Ayméric de Guitard comme possesseur de divers biens au terroir,
dit du Ségalar, non loin de Lavernhe. Hélix de Guitard, seule héritière de
sa maison, en apporte aux du Claux tout le patrimoine. Mais le fief du
Méjanel, simple seigneurie directe sans justice relevant des Garceval en
leur qualité de coseigneurs de Prévinquières, avait été constitué par divers
fiefs et rentes démembrés de la seigneurie de Prévinquières, acquis d’abord
par les Monteils, passés par la suite aux Garnier, de Lavernhe et enfin à la
famille du Claux.
Le 6 octobre 1669, Jacques du Claux sieur de Galhac rend hommage à
Jean-François de Garceval, seigneur de Recoules, La Roque-Sainte-Marguerite,
Saint-Geniez-de-Verteran et autres places de tous les cens, rentes, quarts,
quints, demi-quints, lods, ventes et autres droits seigneuriaux qu’il tient
et possède en foi et hommage du seigneur de Recoules à raison de sa place de
Recoules et mandement de Prévinquières, relevant de sa directe. Vers la fin
du XVIe siècle, M. du Claux de Galhac fut marié à Marie de Micheau, fille du
noble François de Micheau seigneur de Comps et de Léonie de Montcausson, qui
fonda un service du Rosaire dans l’église de Saint-Naamasy. Leur fils, noble
Jacques du Claux sieur de Galhac habitant au château du Méjanel, veuf sans
enfants de Catherine de Loubeyrac, par son testament olographe du 26
novembre 1673 institua son héritier universel, Charles de Micheau seigneur
de la Coste et de Cabanes, son cousin, auteur de la branche des Micheau de
Cabanes près Ségur. Le Méjanel reste dans la famille de Cabanes, jusqu’en
1793, elle y réside fréquemment. Le 7 septembre 1693 Louise-Madeleine de
Murat, veuve de Jean de Baldit, seigneur de Verrières y mourut chez sa fille
Marguerite de Baldit mariée depuis le 15 janvier 1692 à Louis-Antoine de
Micheau, seigneur de Cabanes et de Marzials. Le nom de cette petite
seigneurie servit même à distinguer selon l’usage du temps, plusieurs filles
de cette maison: dans le testament du 11 août 1738 de Jean-Jacques de
Micheau de Cabanes, sieur de Polentines, prêtre, une de ses nièces,
Madeleine de Micheau, est appelée "Madeleine du Méjanel". Le septième enfant
et la quatrième fille de Amans-Joseph de Micheau, seigneur de Cabanes et de
Jeanne-Madeleine de Loupiac: Antoinette-Ursule de Micheau, morte sans
alliance au château de Verrières, était appelée "Mademoiselle du Méjanel".
Charles-Augustin de Micheau, seigneur de Cabanes, garde du corps du roi,
habitant à Cabanes, déclare en 1786 le fief du Méjanel dans la communauté de
Prévinquières pour un revenu noble de 248 livres 14 sols 16 deniers. Acquis
nationalement par une famille de cultivateurs très anciennement fixée au
Méjanel, les Maurel, le vieux manoir reste encore leur propriété. Non loin
du Méjanel, au pied des bois de Cayzac, on découvre encore dans un étroit
ravin une antique chapelle appelée Notre-Dame de Vallée-Claux. On ignore par
qui et à quelle date elle fut fondée, mais dès le milieu du XIVe siècle "les
dames moinesses del Vernhe" petit monastère situé dans la région
Saint-Christophe-Auzits, possédaient le mas de Vaissac et l'affar de
Vialacause en seigneurie directe indivise avec les Luzençon, ce qui permet
de supposer qu’une fille de la maison de Luzençon, religieuse à la Capelle
del Vernhe, avait pu apporter ces petits fiefs à son monastère. Cette
possession est prouvée par divers titres de 1341, 1395, 1525, etc., aucun ne
mentionne la chapelle. Une quittance de lods de l’an 1605, faite
conjointement par François de Garceval seigneur de Recoules, successeur des
Luzençon dans la coseigneurie de Prévinquières et Antoine Maurel, du Méjanel,
sous rentier "des dames religieuses del Bern", dénombre un certain nombre de
pièces de terre relevant de ce seigneur et des dames religieuses sous les
charges anciennes et accoutumées. La chapelle existait au XVIIe siècle et
était qualifiée la chapelle ancienne; dans son testament ouvert et publié le
26 novembre 1673, noble Jacques du Claux, sieur de Gailhac donnait une somme
de 500 livres pour que le revenu en fût employé à dire chaque semaine deux
messes dans la chapelle de Notre-Dame de Valleclause, paroisse de
Saint-Naamas, en l’honneur de la Sainte Vierge, et qu’il soit dit à l’avenir
et à perpétuité que c’est la fondation de noble Jacques du Claux et de
demoiselle Catherine de Loubeyrac voulant que la nomination du prêtre soit
faite par son héritier. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures, la cheminée monumentale
à deux conduits de la grande salle au premier étage donnant au Sud :
inscription par arrêté du 17 juin 1991. (2)
château de
Méjanel 12150 Recoules-Prévinquières, propriété privée, visible de
l'extérieur.
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