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Sur le plateau calcaire nu et sec, sans arbre ni verdure, dominant à droite
la route de Sévérac au Massegros et non loin des sources de l'Aveyron,
s’élève, en avant du hameau de ce nom, le château de Sermeilhets encore
parfaitement conservé dans son ensemble. A l’aspect du midi, le château
ouvre ses deux ailes en équerre, élevées de deux étages, jointes à leur
intersection par une tour circulaire à quatre étages, renfermant un élégant
escalier de pierre. Une fenêtre de la tour, celle immédiatement au-dessus de
la porte, a gardé seule intacts son encadrement et son meneau: au-dessous
d’elle, la séparant de la porte un peu basse, la place béante de l’écusson
seigneurial arraché aux jours de terreur. Toutes les autres ouvertures ont
vu briser leur unique meneau ou la croix qu'elles encadraient; celles de
l’aile à gauche de la porte d’entrée au premier étage conservent leur cadre,
celles de l’aile droite, entièrement refaites ont perdu tout cachet. L'étage
supérieur n'était et n’est éclairé que par de petites ouvertures carrées.
L’intérieur du manoir a subi moins de transformations: le rez-de-chaussée,
voûté de voûtes basses, surbaissées, renferme encore une cuisine boulangerie
avec grande cheminée encadrée de fours, toujours utilisée comme fournil. Au
premier étage, les vastes pièces gardent leurs plafonds à poutrelles et deux
d'entre elles, deux hautes cheminées de pierre de bel aspect. Une voûte
ronde, presque plate, couronne l’escalier supportant une toute petite pièce
également ronde et voûtée, garnie d’une petite cheminée de pierre à
moulures, éclairée par quatre ouvertures ou plutôt meurtrières permettant de
surveiller au loin tout l’horizon; vrai poste de guetteur auquel on accède
par un minuscule escalier de pierre à demi gagné sur l’épaisseur du mur.
Les façades nord et ouest du château ont pleinement conservé tout leur
caractère et leur aspect primitif: trois tours rondes en flanquent les
angles; dans les hautes murailles quelques rares ouvertures, encore closes
par les mêmes grilles de fer, donnant au nord sur une étroite ruelle bordée
de bâtiments bas, dépendants et contemporains du château, réunis à celui-ci
par des arcs-boutants voûtés, dont l’un constitue un passage entre les
bâtiments bordant les deux côtés de la ruelle. De ce point, le vieux manoir
frappe par son aspect rude, imposant, une sorte de sévérité monastique
évoquant l’architecture religieuse et militaire des Templiers,
moines-soldats, ayant gardé dans leurs conceptions quelque chose des visions
de l’Orient, de ses étroites ruelles encadrées de hautes murailles aux pieds
desquelles viennent expirer tous les bruits du dehors, Tout ici a été
sacrifié au désir de sécurité, aux nécessités de la défense. Sur la façade
ouest, bordée par le chemin accédant au hameau, à peine séparée de quelques
mètres de la tour ronde couvrant l'angle nord-ouest, une autre tour de plus
grand diamètre, mais découronnée, s’encastre sans la dépasser dans la
muraille extérieure de ce corps de logis, cachant presque une fenêtre
gothique depuis longtemps murée, mais témoignage certain de la haute
ancienneté de cette construction. Des toitures coniques et basses en lourdes
tuiles calcaires, coiffent toutes les tours percées de petites ouvertures
carrées et grillées. La vaste cour sur laquelle ouvre actuellement la façade
sud du château bordée de bâtiments ruraux neufs et bien compris, n’a rien
laissé subsister de l’antique basse-cour qui devait certainement couvrir de
ses communs fortifiés l’unique entrée du manoir; les besoins d'une
importante exploitation agricole ont fait éclater la ceinture trop étroite
qui avait pendant des siècles, au temps de troubles, assuré la protection
des habitants et de leurs biens les plus précieux.
Sur le passé de Sermeilhets les documents sont rares. Raymond de Sévérac,
frère de Déodat II, baron de Sévérac, dans le contrat de mariage de sa fille
Plaz avec Raymond d’Aigrefeuil de la "Ve lune", de l’an 1147, nomme parmi
les biens donnés tout ce qu’il possède à Sermeilhets, sans mention du
château, ce qui permet de conclure qu’il n’existait pas à cette époque si
lointaine. Les Sévérac en étaient encore les maîtres dans la deuxième moitié
du XIVe siècle, car on trouve dans les archives de Sévérac, recueillies par
le Docteur Molinié, une requête des habitants de Sermeilhets en date du 16
février 1372, adressée à Guy VIII de Sévérac au sujet des bestiaux trouvés
paissant dans les Devèzes. La construction du château paraît remonter vers
cette époque, fin du XIVe siècle ou commencement du XVe siècle. Les Guirard
jouissaient de la seigneurie de Sermeilhets au plus tard dans les premières
années du XVIe siècle. En 1525, noble Jean de Guirard, seigneur de
Sermeilhets passe un accord avec les habitants d’Huguiès, au sujet des
pâturages. Peut-être tenaient-ils Sermeilhets de la reconnaissante
bienveillance des d’Arpajon que les Guirard servirent si fidèlement. Jean de
Guirard était qualifié seigneur de Sermeilhets quand il épousa mademoiselle
Marceline d’Hugonet, dame d’Engayresque, sa toute proche voisine, et
consomma par ce mariage l'union de ces deux terres si longtemps maintenue.
Après l’extinction de la descendance masculine de cette branche des Guirard,
Sermeilhets passa comme Engayresque aux Vignolles. Messire Charles de
Vignolles, écuyer, seigneur de Saint-Bonnet et autres places, afferma par
bail passé devant notaire à Sévérac, en 1689, à Jean Cabiron, paysan du
village d’Huguiès, sa métairie de Sermeilhets, gérée précédemment par
Etienne Constantin, également paysan habitant d’Huguiès.
Ces Vignolles avaient eu une alliance avec les d’Arpajon, car François
d’Arpajon, qu’on ne voit figurer dans aucune généalogie peut-être parce que
issu d’une branche bâtarde ou lui-même fils naturel d’un d’Arpajon, avait
épousé Anne de Vignolles, fille de noble François de Vignolles, et tous deux
vivaient en 1618. Madeleine de Belval, vicomtesse de Vignolles, veuve de M.
de Mazeran-Lézignan, seigneur de Cros et autres places, Conseiller à la Cour
des Comptes Aides et Finances de Montpellier, déclara en 1785 ses terres et
seigneuries de Sermeilhets et Engayresque affermées ensemble à
François-Raymond Poujol, du Massegros, pour le prix total de 4.620 livres,
laissant un produit noble net de 3.790 livres. Au rôle supplémentaire de la
communauté de Saint-Dalmazy, pour 1789, Madame de Lézignan figure pour une
somme de 42 livres 16 sols 5 deniers pour la taille de sa partie de terre de
Sermeilhets, jusque là franche de taille comme terre noble. MM. Adolphe et
Jules de Portalès, de Montpellier, succédèrent à Madame de Lézignan et
vendirent, vers 1800, Sermeilhets à M. Chassary qui le céda lui-même, peu
après, à M. Gaspard Talon , de Saint-Geniez-d’Olt. Échu dans un partage de
famille à Mademoiselle Marie Talon, ce domaine fut légué par elle à ses
neveux, MM. Frédéric Talon, industriel, et Léon Talon, ancien sous-préfet.
Ceux-ci cédèrent Sermeilhets par un acte en date du 1er août 1868, en
échange avec des terres situées à La Rouvière, à M. Antoine Aigouy qui
exploite lui-même cette propriété. Longtemps avant cette vente, le château
de Sermeilhets, moins heureux qu’Engayresque , avait été abandonné en tant
que résidence et servait d’habitation au fermier. M. de Barrau mentionne cet
état de choses comme déjà ancien en 1853. Sermeilhets possédait une chapelle
dont Me Jean Boscary, prêtre, était régent en 1624. Armoiries des Guirard:
Parti au 1 d’azur au lion d’or au 2 de gueules à l'épervier d’argent
empiétant une perdrix du même, accompagné en chef d'une clochette d’argent
entre deux étoiles d'or. (1)
château de Sermeilhets 12150 Sévérac-le-Château, propriété privée, ne se
visite pas.
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