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Il est fait mention, dès le XIe siècle, du château de
Grangues (qui s'écrivait Grengues) et de son seigneur; Pierre de Grangues
était porte-guidon normand à la première croisade, en 1099. En 1350, le
château et la seigneurie de Grangues appartiennent à la famille de Bouquetot;
en 1400, aux Cabourg; en 1437, aux des Champs; en 1570, aux Le Sellier; en
1618, aux Murdrac; en 1620, au sieur de Thieuville; en 1630, aux Regnault;
en 1640, à la famille de Longaunay. Toutes ces familles faisaient partie de
la vieille noblesse normande. En 1685, le château et la terre de Grangues
devenaient un fief de la famille Daniel, en la personne d'Henry-Daniel de
Gresens. Le nouveau seigneur de Grangues descendait d'une très ancienne
famille normande, dont le chef, Rogier Daniel, fut l'un des chevaliers
normands qui accompagnèrent Guillaume, duc de Normandie, à la conquête de
l'Angleterre, en 1066. La flotte normande partit, d'ailleurs, du port de
Dives, à 6 km de Grangues. Les descendants de Rogier Daniel tinrent pendant
longtemps un très haut rang parmi la noblesse anglaise, et ils s'allièrent
aux premières familles du royaume. La branche des seigneurs de Daresbury fut
particulièrement illustre. C'est de cette branche que descendait
Henry-Daniel de Gresens, qui revint, avec son frère Guillaume, se fixer en
Normandie, en 1635. Il obtint, en février 1675, du roi Louis XIV, avec ses
lettres de grande naturalisation, des lettres confirmatives de son antique
noblesse, qui l'agrégeait au corps de la noblesse française, après qu'il eut
fait ses preuves, et présenté les certificats du roi d'armes d'Angleterre.
Il acquit de nombreux fiefs de Normandie, entre autres celui de Moult, qui
fut l'apanage de son fils aîné, et qui resta assez longtemps dans sa
famille, et celui de Grangues qui y est encore.
Ses descendants devinrent marquis de Martragny et de Grangues. Ce fut son
petit-fils, Henry-Daniel de Grangues, marquis de Martragny, président de la
Cour des Comptes de Normandie, marié en 1696, à Catherine Le Maistre de la
Bretonnière, qui fit construire, en 1703, le château actuel de Grangues, et
tout auprès une chapelle sous le patronage de saint Henri. Cette chapelle
fut détruite en 1830. Le dernier marquis, Daniel de Grangues, mourut en
1876, en laissant sa terre patrimoniale à sa fille unique, Ada d'Eurville de
Grangues, mariée au colonel comte Henry Coustant d'Yanville, descendant
d'une ancienne famille du Beauvoisis. Le comte d'Yanville entreprit la
restauration du château, et l'on s'aperçut alors, en travaillant dans les
sous-sols, qu'avant 1703, le château de Grangues était beaucoup plus
important, et d'un tout autre style que le château actuel; car on découvrit
des fondations de tour ronde et de tour carrée. Le comte d'Yanville mourut
en 1882, et sa veuve termina les travaux et les embellissements intérieurs,
suivant les plans de M. Baumier, architecte de la ville de Caen. Le château
de Grangues appartenait à la fin du XIXe siècle au comte Raymond d'Yanville,
chevalier de Malte, marié à Madeleine Waddington, issue d'un rameau français
d'une vieille famille de l'aristocratie anglaise. Le château de Grangues est
de style Louis XIV, assez simple, quoique orné de motifs de l'époque. Le
toit est à la Mansard. La façade ouest est bordée de petits fossés qui
éclairent les sous-sols. La façade Est est ornée d'un perron. Le coté nord
est précédé d'une cour, où l'on descend par un escalier qui donne accès dans
les sous-sols. Enfin une terrasse Louis XIV, d'où l'on jouit d'une vue
magnifique, flanque le château du côté du midi et donne accès dans les
salons. Au-dessus des portes d'entrée sont sculptées, d'un côté, les armes
des Daniel telles qu'ils les portaient en Angleterre, et, de l'autre, les
armes modernes accolées à celles des Coustant d'Yanville.
L'architecte s'est inspiré, pour la décoration du château, du style Louis
XIV; seule la salle à manger est du style Louis XII. On remarque dans cette
dernière pièce: les boiseries des murs, la grande porte d'entrée en chêne
sculpté, la cheminée monumentale en pierre, rappelant une des cheminées du
château de Blois; le plafond à voûtes cintrées et à pendentifs, enfin la
frise qui court tout autour de la pièce et qui représente, peinte à fresque,
la fin de la tapisserie célèbre de la reine Mathilde, femme de Guillaume le
Conquérant, conservée au musée de Bayeux. Les corbeaux qui soutiennent les
arceaux des voûtes sont ornés de chimères qui tiennent des écussons aux
armoiries des principales familles alliées aux Daniel. Le tout est sculpté
dans la pierre. Les murs du grand salon sont garnis, dans leur partie
inférieure, de boiseries, et, dans leur partie supérieure, de tapisseries
anciennes. Le plafond est à grands caissons peints avec ornements dorés. La
grande cheminée est en marbre rare nommé "fleur de pêcher". L'escalier, tout
en pierre, est muni d'une belle rampe en fer forgé style Louis XIV. Les murs
sont garnis de tapisseries anciennes. L'antichambre est ornée de peintures,
et le plafond est à petits caissons Louis XIV peints et dorés. Le parc, qui
était jadis à la française, a été dessiné à l'anglaise depuis 1840. Il est
très accidenté et formé de grandes pelouses et de taillis. Devant et
derrière le château se trouvent de petits étangs. D'une grande terrasse, on
jouit d'une vue magnifique sur la vallée d'Auge et sur la coquette vallée de
Dozulé, au premier plan. D'une autre terrasse, située à l'extrémité du parc,
au bord de la route de Varaville à Touques, on découvre la côte normande
depuis le port de Dives jusqu'à celui de Courcelles, et, au milieu,
l'embouchure de l'Orne. (1)
château de Grangues 14160 Grangues, propriété privée, ne se visite pas.
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