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Situé à mi-cote, au pied du grand bois de sapins qui
porte son nom, "la Sapée de Reux" comme on dit dans le pays, en avant d'un
étang dans les eaux limpides duquel se mirent de vieux peupliers, le château
de Reux, par sa position pittoresque et aussi par sa construction, est
certainement un des plus curieux monuments des environs de Pont-l'Évêque.
Avant les travaux, très importants, de restauration et surtout
d'agrandissement qu'y a fait exécuter son possesseur, M. Borel, à la fin du
XIXe siècle, connu comme ingénieur du canal de Suez, et dont la veuve, fille
de M. de Formeville, savant historien de l'ancien diocèse de Lisieux,
l'habitait encore à cette époque. Le château de Reux se composait d'une
unique tour, remontant à la fin du moyen âge, tombant presque en ruines et
s'élevant au milieu de douves alimentées par les eaux de l'étang voisin.
Cette tour est bâtie en pierres extraites d'une carrière qui se voit encore
à côté du château, sous le coteau qui porte l'église. Qu'on nous permette de
citer ici la description que faisait de ces constructions antiques un
document judiciaire du milieu du XVIIe siècle, que le hasard; cette
providence des chercheurs, a mis en nos mains il y a quelques années, "L'Etat
du décret de la terre et châtellenie de Reux en 1641". Cette description
était encore, avant les restaurations, de la plus grande exactitude: "Une
pièce de terre en court et plant sur laquelle est construict le chasteau et
maisons encloses dedans les murailles et mottes dudict chasteau, consistant
de present icelluy chasteau en une tour a laquelle ledict sieur de Reux
faict de présent sa demeure, un autre corps de logis y joignant consistant
en écuryes, chambre, greniers couverts de thuille et autres aistres du tout
en ruinne, ne paroissant de present que les murailles et deux cheminées
estant encor debout, le tout estant dans l'enclos dudict chasteau; et hors
l'enclos dudict chasteau il y a dans ladicte court un jardin à porée, trois
corps de logis, l'un à usaige de chapelle couvert en thuille, l'autre à
usaige de four et l'autre à usaige de grange et tasserye couverts en
chaume".
A la fin du XIXe siècle, tout était changé. Les murailles branlantes sont
relevées; un magnifique jardin les entoure et le luxe des appartements
répond à celui de l'extérieur. Du reste, le cadre est digne de l'édifice. Au
sud, le bois; à l'ouest, l'église de Reux dominant le château; au nord, le
mont Canisy, Trou ville Deauville, la mer et son horizon infini; à l'est, la
vallée de la Touques, dont la forêt de Saint-Gatien couronne les verdoyants
coteaux, Pont-l'Eveque, la vallée de la Calonne, Saint-Julien et Manneville;
tel est le panorama splendide qu'on découvre du château. Disons maintenant
quelques mots des possesseurs de la terre de Reux qui avait encore, au
XVIIIe siècle, une grande importance. Elle fut d'abord la propriété d'une
famille portant son nom qui, sans doute, la posséda dès l'origine des fiefs
jusqu'à la fin du XIVe siècle. C'est le savant auteur de l'Histoire de la
maison d'Harcourt, qui nous révèle cette particularité, en relatant le
différend qui avait surgi au sujet de la terre de Reux, en 1459, entre Jean
de Boileau et Jean 1er de Murdrac dit Bobois. Alors intervint un arrêt en
faveur de ce dernier, qui fut déclaré "seigneur et châtelain de Reux" du
chef de sa bisaïeule, Marie de Reux, femme de Nicolasde Grosparmy. Nous
ignorons si Reux demeura à cette famille Murdrac; mais, en 1551, le 30
octobre, nous trouvons Jacques Carbonnel, chevalier, seigneur et châtelain
de Reux, qui en avait sans doute hérité de François de Murdrac, vivant en
1523, issu au troisième degré de Jean II Murdrac et de Perrine Carbonnel. A
la fin du même siècle, les Carbonnel étaient remplacés à Reux par Jacques du
Saussey (on écrivait aussi du Saulcey), fils de Jean et de Marie de
Thieuville.
Cette famille du Saussey, originaire de la presqu'île du Cotentin, vint sans
doute à Reux par acquisition et s'y maintint même plus d'un demi-siècle.
Notre Jacques du Saussey avait épousé Antoinette Le Marquetel, fille de
Jean, escuyer, seigneur et patron de Saint-Denis-le-Gast en Cotentin et de
Marguerite Martel, et tante du fameux philosophe Saint-Evremond. Après la
mort de son mari, elle épousa Jean Le Thenneur, sieur de Quartemont, d'une
famille ancienne de Pont-l'Evêque, puis François de Borel, escuyer, seigneur
de la Viparderye. A Jacques du Saussey succéda Josué, son fils; il fut
seigneur et châtelain de Reux, pendant que son frère, Antoine du Saussey,
était curé de la paroisse. C'est sur Josué du Saussey que fut décrétée la
terre de Reux, en 1641. Et alors elle passa par acquêt dans la famille Marc
de la Ferté; en 1668, Charles Marc de la Ferté était seigneur de Reux: il
descendait par les femmes des Baudouin, et par ceux-ci des ducs de
Bourgogne. Madame de Staal-Delaunay, qui vint à Reux (qu'elle appelle Roux)
avec Mademoiselle de la Ferté dans les premières années du XVIIIe siècle,
nous a laissé dans ses mémoires, une description assez exacte du château et
de ses environs. Au milieu de ce siècle, l'héritière de cette famille de la
Ferté porta la terre de Reux dans celle de la Myre-Mory: ce sont les
héritiers de Madame de Wissel, née de la Myre-Mory, qui ont vendu le château
et ses dépendances à M. Borel en 1868; et M. le comte de Laurencin-Beaufort,
neveu de cette dame, possédait encore à la fin du XIXe siècle une très
importante portion de l'ancienne seigneurie de Reux. Parmi les rentes
féodales de la terre de Reux, on remarquait deux tenanciers qui devaient au
seigneur "un bœuf blanc quand ils se mariaient pour la première fois",
singulière redevance qui existait encore au milieu du XVIIe siècle. (1)
château de reux 14130 Reux, propriété privée, ne se visite pas.
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