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L’abbaye cistercienne du Val Richer est fondée en 1150
sur des terres données à Philippe d’Harcourt, évêque de Bayeux, par divers
propriétaires dont Richer de Montreuil. La charte de fondation, d’Henri II
Roi d’Angleterre, est signée de Thomas Becket, chancelier du Roi. Le Val
Richer traverse le Moyen-Age dans la prospérité et le rayonnement avant de
connaître les heures sombres de la guerre de 100 ans puis, au XVIe siècle,
des Guerres de Religion. La paix revenue, l’abbaye est négligée par son abbé
commendataire et, en 1613, elle se trouve dans un état déplorable. Le XVIIe
siècle marque le renouveau du monastère avec l’arrivée, en 1627, de
Dominique Georges, prêtre lorrain chargé par l’abbé de réformer la
communauté. Sa mort, en 1693, sonne le glas de l’abbaye qui survit
péniblement jusqu’en 1789 où seulement six moines vivent au monastère.
Abandonnée en 1790, l’abbaye est vendue comme bien national en 1797.
L’église abbatiale et le cloître sont démantelés, le logis de l’abbé,
reconstruit au milieu du siècle, est abandonné. En 1836, le ministre de
l’instruction publique de Louis-Philippe, François Guizot, qui cherche une
résidence dans la circonscription de Lisieux, où il est élu député, achète
le domaine. "Cette petite terre est jolie ; la maison est une ancienne
abbaye, grande, bien bâtie et assez bien arrangée ; il y a de beaux bois
autour, une source à côté de la maison et un fort ruisseau qui traverse les
prés". Pendant dix années il se consacre à la rénovation de la maison et
du jardin et se passionne pour les arbres, les fleurs et les pièces d’eau. A
partir de 1849, Guizot séjourne plus régulièrement au Val Richer où, entouré
de sa famille, il se consacre à ses livres ; il y décède le 12 septembre
1874. La vie familiale continue avec sa fille Henriette et son gendre Conrad
de Witt, puis sa petite fille Marguerite qui épouse Paul Schlumberger, un
industriel alsacien. Six enfants naissent dont l’aîné, Jean, qui fonde la
Nouvelle Revue Française avec André Gide. Conrad et Marcel, scientifiques,
inventent le procédé électrique de prospection pétrolière (essayé pour la
première fois au Val Richer). En 1926, les six enfants fondent la Société
Civile du Val Richer pour répondre au vœu de Paul et Marguerite Schlumberger
de conserver la propriété familiale de leur ancêtre Guizot. La Société
Civile du Val Richer ne cesse de fonctionner et aujourd’hui, plusieurs
centaines de descendants de Paul et Marguerite Schlumberger peuvent se
retrouver dans la propriété familiale qui est demeurée très proche des
aménagements créés par le ministre Guizot. Entre les bois de Bayeux et du
Val Richer, l’ancien logis abbatial surmonte une colline sur le versant
ouest d’une vallée parcourue d’un ruisseau qui, au passage, emprunte son nom
au lieu. Le parc est entouré d’un vaste domaine composés de bois et de
prairies complantées de pommiers. De la D 89, une grande courbe, bordée de
superbes pins laricio, monte vers l’entrée de la propriété. Une ancienne
ferme et des bâtiments agricoles à pans de bois ou de briques précèdent le
logis abbatial. Fermée par les communs et une aile en retour, la cour
d’honneur est occupée par une pelouse rase au dessin classique. Derrière
elle, s’élève la façade en pierre calcaire du logis, surmontée d’une toiture
en tuiles découpée d’un fronton triangulaire armorié. Devant la façade
sud-est, une vaste pelouse s’orne de deux tulipiers de Virginie, l’un est un
sujet vénérable et magnifique, l’autre, planté plus récemment, prospère en
suivant l’exemple de son aîné. Au nord de la pelouse, un bouquet d’arbres
rassemble deux hêtres pourpres et un hêtre à feuilles de fougère. Entre le
bâtiment des hôtes et un petit pavillon de jardinier, un platane plus que
centenaire ombrage une petite cour de service. L’accès au parc s’effectue
par l’allée des doctrinaires bordée des hauts futs de vieux marronniers
plantés serrés. A sa droite, le jardin potager et l’ancien jardin fruitier
dominent l’allée. La promenade dans le parc traverse un petit vallon humide
où la végétation est moins dense. Une source s’y écoule et alimente un plan
d’eau situé dans l’axe du logis. De part et d’autre du vallon, les essences
plantées par Guizot ont prospéré et elles sont de venues des sujets
d’exception : cèdres du Liban, de l’Atlas, mélèzes, séquoias géants, thuyas,
pins noirs d’Autriche, châtaigniers, chênes, hêtres, merisiers, charmes,
bouleaux... Chaque pas per met de découvrir des essences rares, ornementales
ou plus locales qui sont parfois devenues extraordinaires avec le temps.
Ainsi, en bordure Est du parc, un formidable thuya géant dresse ses branches
en candélabre tandis, qu’en face, de vieux hêtres déroulent sur le sol leurs
racines noueuses et tourmentées. L’un deux, enserre dans ses hautes branches
une petite maison de bois contemporaine, dans l’esprit des fabriques du XIXe
siècle. Les abords des bâtiments font appel à plus d’ornements avec des
massifs fleuris, des buis taillés et des arbustes à fleurs. Près du hameau
de Saint-Quentin, après avoir emprunté l’étroit chemin du bas de la roche,
le visiteur entre soudain dans la légende. Sous les grands arbres, dans une
semi pénombre, le Laizon s’échappe en cascades de l’étroite et profonde
gorge. A quelques pas, un pont de bois vermoulu franchit la rivière à
l’endroit où tournaient autrefois les roues des moulins. En contemplant les
murailles fissurées qui s’élancent vers le ciel, comment ne pas croire que
ce ne peut être que l’œuvre du diable. Les hommes ont abandonné depuis
longtemps les lieux. Les moulins ont disparus et l’endroit s’est boisé
depuis le début du XXe siècle. Chênes, châtaigniers, frênes, érables...
s’élancent vers les hauteurs et contorsionnent leurs troncs pour atteindre
la lumière. Seules quelques trouées dans la végétation révèlent d’énormes
pans verticaux de rochers fracturés. En montant sur la crête ouest, les
arbres deviennent moins hauts. Genêts et ajoncs accompagnent les chênes
rabougris qui poussent sur la hauteur. Le fond de la gorge est invisible,
seul le murmure de l’eau révèle la présence de la rivière. La vue est
magnifique sur la canopée des grands arbres d’où émergent quelques pans de
falaises abruptes. En face, au point le plus haut, le tombeau de Marie Joly
se dissimule derrière un if torturé qui s’accroche au rocher.
Éléments protégés MH : le logis avec l'ensemble de ses décors immobiliers,
les façades et les toitures de l'aile en retour d'équerre vers le
nord-ouest, les façades et les toitures du bâtiment principal (sud-est) de
l'ancienne ferme : inscription par arrêté du 3 décembre 1991. Les façades et
les toitures de la maison de gardien et de la maison de jardinier, le
laboratoire Schlumberger en totalité, le potager : inscription par arrêté du
16 juin 2008 (1)
château du Val Richer 14340 Saint-Ouen-le-Pin, propriété privée, ne se
visite pas. Nous remercions chaleureusement le propriétaire pour l'accueil
qu'il nous a réservé lors de notre passage.
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