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En bordure de la
forêt domaniale de la Braconne, à deux pas de l'aire de repos de "la
Bécasse", s'élève le château des Ombrais, signalé par tous les ouvrages
comme rendez-vous de chasse où François 1er aimait courir le cerf. S'il est
des demeures dont "on ne sait rien", ici au contraire c'est l'abondance
puisqu'un ouvrage majeur de l'histoire angoumoisine lui est consacré;
synthétique, dense, il constitue une véritable mine de renseignements. La
gageure est donc pour nous de tirer d'un livre la "substantifique" moelle
jusqu'à la résumer en une page! En cinq siècles et demi, prestigieux
chevaliers et propriétaires obscurs se sont succédés sur la terre des
Ombrais tantôt florissante, tantôt tombée en quenouille. Une dizaine de
familles ont successivement possédé le castel depuis son édification au
milieu du XVe siècle par Jean de Valois, Comte d'Angoulême, au retour de sa
captivité en Angleterre. Charles son fils, père de François 1er fait un
cadeau princier à Jean Daly, fourrier, fidèle compagnon de son père dans les
geôles britanniques, qui devient ainsi le premier seigneur. Au XVIe siècle
la terre devient la propriété de François de Corlieu, lieutenant général
d'Angoumois, puis de son fils Joachim célèbre avocat au Parlement de Paris.
A la fin des guerres de religion sa deuxième fille Anne de Corlieu fait
établir dès 1573 un "terrier complet des appartenances et dépendances" (15
ans de travail).
Sa fille aînée Marguerite épousa Emery de La Croix en 1581. La famille de La
Croix ayant des difficultés financières, cédera en 1664 à Isaac Odet du
Fouilloux chef protestant. Un descendant de cette lignée Charles Isaac Odet,
ami de l'auteur des Maximes, sera assassiné sur la terre des Ombrais,
victime de son militantisme huguenot. Par mariage les Ombrais reviennent aux
Devezeau, seigneurs de Rancogne (1697 à 1740) qui, criblés de dettes,
vendent à Jean de Bertin puissant noble du Périgord voisin. Conseiller du
Roi, Comte de Bourdeilles, seigneur de Brantôme, riche spéculateur, Jean
Bertin n'a probablement jamais posé les pieds sur le domaine, qu'il vendra
reconstitué aux Rassat du Lacq (1766-1784) marchands explorateurs qui le
laisseront par mariage aux Faure de Saint-Romain (1784-1921). Une fille
Faure épousera M. de Montegut auteur de l'érudit manuscrit. L'actuel
propriétaire est, nous dit-on, un syndic, écuyer des temps modernes.
Construite à compter de 1445 par Jean de Valois, la noble habitation
conserve aujourd'hui globalement son aspect primitif.
L'élégance et la finesse des lignes du XVe siècle émergent encore: fenêtres
à meneaux fins, variété de sculptures; bancs de pierre sculptés, enchâssés
dans l'embrasure intérieure des fenêtres au deuxième étage, mais supprimés
par contre au rez-de-chaussée et au premier étage en 1819. Le mariage des
extrêmes, minceur des meneaux et croisillons et forte épaisseur des murs (un
mètre environ), est également typique du XVe siècle; ajoutez quelques
accolades gothiques et les indications des pierres deviennent synchrones
avec les écrits datés de cette époque. Le portail d'entrée, couronné d'un
parapet festonné de créneaux, semble légèrement postérieur fin XVe-début
XVIe siècle. Trois tours existaient découronnées en 1921. Aujourd'hui celle
du sud-ouest arasée est couverte, celle du sud-est est découronnée, dégradée
et porte des meurtrières: la tour du nord a disparu en grande partie. La
tour d'escalier flanquant à l'ouest le corps d'habitation est le véritable
clou de l'édifice; octogonale à l'extérieur et ronde à l'intérieur, elle
traduit assez le génie des bâtisseurs. La restauration intérieure, tant des
murs que des dalles monolithes légèrement érodées, est à reprendre mais
n'altère fondamentalement pas le chef-d'oeuvre qui déploie quatre mètres de
diamètre et compte soixante-sept marches. Spacieux, l'escalier est lumineux
grâce aux petites fenêtres équipées de meneaux et ornées de vitraux
polychromes. Une petite coiffe à facettes est posée au sommet.
Le bouleversement architectural est intervenu à la Restauration (1814-1819)
avec la démolition du troisième étage. Véritable mutilation, identique à
l'ablation subie par son voisin Puyvidal, l'opération a sans nul doute
changé la physionomie pourtant déjà élancée du corps de logis. Une toiture
basse et une galerie à l'italienne (mode héritée de l'Empire) ont remplacé
la défunte toiture pointue. Le chemin de ronde large de deux mètres, les
restes de l'enceinte, les fossés comblés et surtout le plan quadrangulaire
avec quatre tours initiales à meurtrières font penser à l'édification
ancienne des châteaux forts: la construction au sortir de la guerre de Cent
Ans explique ces choix architecturaux. Restent à noter les dernières
dégradations: incendie récent du bâtiment accolé au logis et dont le fronton
de porte arbore une superbe coquille Saint-Jacques sculptée, destruction de
la toiture de la chapelle (restaurée en 1932 nous dit une carte postale),
mais surtout pillage généralisé. Désolation et tristesse, révolte aussi,
nous envahissent au constat de la non-intervention des uns et de
l'intervention sacrilège des autres. (1)
château des Ombrais 16110 Saint-Projet-Saint-Constant, tel. 06 31 86 18
40, cadre exceptionnel pour vos réceptions...
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Nous remercions M. Vincent Tournaire,
site
http://webtournaire.com/paramoteurparapente.htm,
pour les photos aériennes qu'il nous a adressées. (photos interdites à la
publication)
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de la Charente" tous les châteaux répertoriés à ce
jour dans ce département. |
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