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Le château de Théon était jusqu'à la Révolution le
siège d'une importante seigneurie du même nom. Situé sur une hauteur
dominant l'estuaire et les vallons et marais d'Arces, Barzan, Talmont, Cozes
et Epargnes, il occupait ainsi un point éminement stratégique dans
l'arrière-pays estuarien. Théon est mentionné pour la première fois en 1363
dans un dénombrement rendu par Rampnumobus de Laure, clerc, habitant à Arces,
fils de Pierre Ostende, valet de "Tayon". Dès cette époque, Théon appartient
à la famille du Breuil, une des plus anciennes lignées nobiliaires de
Saintonge. Vers 1360, Gombaud du Breuil, écuyer, est seigneur de Théon et du
Breuillet. Son fils, Florimond, mort après 1453 et marié à Jeanne Aymesie,
lui succède à la tête de Théon. Le 23 juin 1462, son fils, Guilllaume du
Breuil rend hommage de sa terre de Théon au sénéchal de Saintonge. Il
renouvelle cet hommage au roi en 1498. En 1505, par testament, il demande à
être inhumé dans l'église d'Arces où repose déjà sa seconde épouse, Julienne
de Château-bardon. De ses deux mariages successifs sont nés entre autres
Bernard, seigneur de Théon, qui rend hommage au roi en 1515, et Arnaud, chef
de la branche des seigneurs de Théon-de-Meschers et de Château-Bardon. A
Bernard du Breuil succède comme seigneur de Théon son fils, Jacques puis le
fils de ce dernier, Pierre, marié à Catherine Le Moyne, et ensuite leur
fils, Gilles. Tout en dérogeant à sa condition, ce dernier s'enrichit grâce
au commerce des céréales.
Entre 1589 et 1591, Pierre du Breuil fait construire la partie la plus
ancienne du château, soit le corps de logis qui, avec sa tour ronde et son
échauguette, occupe l'angle sud-ouest de la cour. On peut s'interroger sur
la période de construction de la seconde tour ronde qui occupe l'angle
sud-est du château: cette tour a pu être construite comme l'autre, à la fin
du XVIe siècle, et dans ce cas elle devait déjà être reliée au corps de
logis sud-ouest ; ou alors il s'agit d'une tour édifiée au XVIIe siècle ou
au XVIIIe pour assurer la symétrie avec l'autre tour; entre les deux, l'aile
sud du château semble avoir été édifiée dans la seconde moitié du XVIIe
siècle, tout en ayant donc pu en remplacer une plus ancienne. Au début du
XVIIe siècle, le château comprenait une chapelle (des baptêmes y sont
célébrés en 1622). Les puits charpenté (dont un seul subsiste aujourd'hui)
pourraient aussi remonter au XVIIe siècle. En 1638, Catherine du Breuil,
fille aînée de Gilles du Breuil et héritière de Théon, épouse Henri d'Achard,
seigneur de Vérac, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, et lui
apporte le château. Leur fils, Charles d'Achard, marié en 1669, dans la
chapelle du château, à Louise de Real, est seigneur de Théon. A la
génération suivante, en 1688, le château revient dans les mains de la
famille de Breuil lorsque Marguerite d'Achard épouse son cousin, Antoine du
Breuil (1660-1746), seigneur de Théon-de-Meschers et de Château-Bardon,
réunissant du même coup les deux branches de la famille. C'est probablement
à cette époque que l'aile sud du château est construite ou reconstruite. Le
reste des bâtiments semble remonter au XVIIIe siècle.
A Antoine du Breuil de Théon succède son fils, Jean (1689-1775), capitaine
de grenadiers au régiment de Normandie. Ses biens sont partagés en 1790,
partage qui sépare de nouveau Théon et Château-Bardon. Anne-Marie du Breuil
de Théon, fille de Jean, apporte le château de Théon à son époux, Louis de
Rigaud, comte de Vaudreuil (1728-1810), chef d'escadre des armées navales,
commandant du port de Rochefort (et dont la famille compte plusieurs
militaires actifs en Nouvelle-France : son grand-père et son oncle en furent
gouverneur). Théon quitte ainsi la famille de Breuil qui le détenait depuis
au moins la fin du XIVe siècle. Même si le comte et la comtesse de Vaudreuil
sont incarcérés à Saintes en 1794, le château demeure dans les mains de la
famille par-delà la Révolution (une légende assure cependant qu'une dame de
Théon aurait été brûlée dans sa cheminée par les paysans révoltés). En 1830,
lors du partage des biens du comte de Vaudreuil et de son épouse, le château
est attribué à leur fils, Jean-Louis (1768-1845), comte de Vaudreuil, qui
demeure à Théon, et la métairie échoit à son frère, Pierre-Louis
(1770-1853), secrétaire d'ambassade, demeurant à Paris puis à Angoulême.
Acte de partage des biens de Louis de Rigaud, comte de Vaudreuil, et de son
épouse, Anne Marie du Breuil de Théon, le 30 janvier 1830 (Archives
départementales de Charente-Maritime).
Le partage est fait entre Jean Louis de Rigaud, comte de Vaudreuil,
demeurant au château de Théon; Pierre Louis de Rigaud, comte de Vaudreuil,
demeurant à Paris, 10 rue Bourbo ; Louise Thérèse de Vaudreuil, demeurant à
Saintes, rue du Palais; Marie Catherine Louise de Calvimont, épouse de
Pierre Jean Nicolas marquis de Puiferrat, Marie-Joséphine et Marie Geneviève
Louise de Calvimont, filles de feue Marie Magdeleine Louise de Rigaud de
Vaudreuil, marquise de Calvimont, demeurant à Montagnes, près Libourne; tous
enfants et héritiers de Louis de Rigaud, comte de Vaudreuil, lieutenant
général des armées navales, et de défunte Anne Marie Dubreuil de Théon,
leurs père et mère. Le premier lot, attribué à Jean-Louis de Rigaud de
Vaudreuil, comprend le château de Théon, avec jardin, cours et servitudes,
fuie comprise, le champ de la garenne, la pièce de terre des Richards, la
garenne et tout le bois, le tout évalué à 30000 francs. Le deuxième lot,
attribué à Pierre-Louis de Rigaud de Vaudreuil, comprend la métairie de
Théon consistant en une maison pour le colon, une grange, une étable, des
toits et autres servitudes, des terres, prés et vignes, le tout estimé à
30000 francs. Le troisième lot, attribué à Louise Thérèse, de Rigaud de
Vaudreuil, comprend la métairie de Preselle, évaluée à 22000 francs. Des
marais salants situés à Meschers, d'une valeur de 8000 francs, sont partagés
entre les lots 2 et 3. L'ensemble des biens est estimé à 180000 francs.
Dès 1831, Jean-Louis de Vaudreuil revend le château à son frère
Pierre-Louis. Le domaine de Théon, détenu par la famille de Vaudreuil,
figure sur les plans cadastraux d'Arces et de Cozes, établis en 1833. Comme
aujourd'hui, le château est relié aux Richards et au hameau de Théon par une
longue allée d'arbres qui, à l'époque, traverse au nord une garenne. Une
autre allée, plus courte, appelée "allée des soupirs", part des communs vers
le nord-ouest (là où subsiste un chemin). Le château avec ses deux tours
rondes, ainsi que la mare (aujourd'hui asséchée) et la grange-étable au sud
(reconstruite par la suite) apparaissent aussi sur le plan. A côté de la
mare, le plan indique la présence d'un pigeonnier circulaire, aujourd'hui
disparu. En 1847, les Vaudreuil se défont de Théon, hérité de leurs aïeux de
Breuil. L'acquéreur est Louis Thomas, demeurant au hameau de Javrezac
voisin, également propriétaire des métairies du Coudinier et du Colombier.
La famille Thomas conserve Théon jusqu'en 1916, date à laquelle le domaine
est acheté par Georges Andrivet, cultivateur. En 1931, il est acquis par
Jacques Verneuil (1899-1982), futur député puis sénateur de la
Charente-Maritime, et dont la famille possède déjà le château de Conteneuil.
Dès 1941 cependant, Théon change de mains et est acquis par Jean Camus, de
Saint-Georges-de-Didonne, qui s'installe comme agriculteur à Théon.
Le château de Théon comprend deux ensembles de bâtiments, le tout accessible
par une allée d'arbres au nord. Le premier ensemble s'organise autour d'une
vaste cour rectangulaire. Elle est fermée à l'est par un portail à piliers
maçonnés, encadré par deux portes piétonnes couvertes. Ce portail présente
un décor en bossage. Les deux piliers sont ornés chacun d'un pilastre et
d'un amortissement. Une cloche est suspendue au-dessus de la porte piétonne
à gauche. Au-delà du portail, la cour est délimitée au sud par le château
lui-même, au nord, à l'est et à l'ouest par des communs. De chaque côté du
portail, côté intérieur, un escalier extérieur donne accès à l'étage de
cette partie des communs. Un autre escalier extérieur est visible dans
l'angle nord-ouest des communs. La cour renferme par ailleurs deux puits.
L'un d'eux, le plus proche du château, dans l'angle sud-est de la cour, a
conservé son imposante margelle en pierre de taille moulurée, son mécanisme
et son toit en ardoise. A l'ouest de la cour, entre le château et les
communs, un autre portail à piliers maçonnés donne accès à une prairie. Au
nord de la cour, l'aile de communs est percée d'un passage couvert qui donne
accès à une seconde cour. Celle-ci est délimitée au nord et à l'ouest par
des dépendances de plan en L, et à l'est par un chai et un mur. Au-delà du
château, vers le sud, s'étend un parc clos de murs. A l'est du château,
subsistent les vestiges d'une mare. Au sud se trouve le second ensemble de
bâtiments : une vaste grange-étable à façade sur le mur pignon, à laquelle
est accolé à l'arrière un fournil.
Le château lui-même comprend deux ailes, chacune de plan en L, dans le
prolongement l'une de l'autre, le tout formant un U flanqué de deux tours
rondes aux angles sud-ouest et sud-est. Chaque tour est couverte d'un toit
en poivrière et en tuile plate. L'aile ouest du château, la plus ancienne
(fin du XVIe siècle), est couverte d'un haut toit à croupes et à égoût
retroussé, en tuile plate, duquel émergent de hautes cheminées, un petit
mur-clocher à l'ouest et, à l'est, une lucarne. Celle-ci présente un élégant
décor sculpté: appui et encadrement moulurés, corniche, fronton en accolade
orné de volutes et d'une boule. Côté est également, dans l'angle, un
emmarchement donne accès à la porte, surmontée d'une corniche. Les
ouvertures (comme celles de l'autre aile du château) ont un appui et un
encadrement saillants. Une échauguette en pierre de taille, couverte d'une
coupole, est accolée à l'angle nord-ouest de cette aile du château. L'aile
est du château (fin du XVIIe siècle ou début XVIIIe siècle) a pour points
communs avec la précédente, le décor et la taille des ouvertures ainsi que
l'emmarchement en angle, menant à une porte. Côté cour, une descente de cave
trahit l'existence d'un sous-sol, en plus de la présence de soupiraux. Cette
aile du château se distingue de la première par son toit, beaucoup plus bas,
à longs pans et en tuile creuse. Côté parc, les différences entre les deux
ailes s'effacent derrière l'homogénéité de la façade sud du château.
Encadrée par les deux tours rondes, cette façade, très sobre, seulement
ornée d'une génoise double, présente six travées d'ouvertures. La troisième
travée à gauche, presque centrale, comprend une porte accessible par un
emmarchement qu'enserrent deux murets formant un fer à cheval. Au-dessus de
la porte se trouve un cadran solaire. (1)
château de Théon 17120 Arces-sur-Gironde, propriété privée, ne se visite
pas.
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