châteaux de France
       Accueil        châteaux Val de Loire        châteaux pour réceptions        châteaux à l'abandon        Contact        Liens
 
 
 
Château de Hac - Le Quiou
 
 

   Jusqu'au XIVe siècle, l'histoire de Hac demeure très mystérieuse, Il est seulement possible de savoir que la région du Quiou faisait partie d un important domaine féodall dont le chef-lieu était Plouasne. Au XIe siècle, après les ravages des invasions normandes, des concessions furent faites par les Seigneurs locaux aux grandes abbayes de la Loire pour établir des prieurés et reconstruire des églises neuves: il subsiste deux de ces monuments, l'église de Mréfumel et les ruines de celle de Saint-André-des-Eaux, celle du Quiou, détruite aujourd'hui, était semblable à ces dernières. Autour des prieurés créés parles moines ligériens, le pays se réorganisa et la prospérité retrouvée suscita la convoitise des grands féodaux de la régiont; c'est ainsi que vers 1100 le village de Tréfumel fut pillé et détruit par le feu lors d'une expédition opposant Gildun de Dol et Geoffroy de Dinan. En 1123 la constitution de la vaste seigneurie de Dinan-Bécherel stabilisa la structure administrative et juridique locale. Le fief de Hac n'était à cette époque que l'un des petits domaines constituant l'important territoire du Dinan-Bécherel. L'emplacement actuel du château en était limitrophe mais n’en faisait pas partie. Le manoir primitif se trouvait vraisemblablement à quelques centaines de mètres à l’ouest, là où se voit maintenant le moulin de Hac. Les plus anciens seigneurs de Hac connus portent le non de Hingant; le premiers cité dans une pièce d'archives est Geoffroy, nommé dans une charte de Bosquen en 1292. La même famille, prenant au XIVe siècle une importance grandissante, a produit Jamet de Hac, archer d'Olivier de Montauban en 1356, Jehan de Hac, secrétaire d’État de Charles de Blois en 1359, Bertrand de Hac, écuyer de Du Guesclin en 1371.
Le château actuel, construit vers 1380-1390; appartenait à une seigneurie voisine beaucoup plus considérable, la seigneurie de Saint-Thual, elle aussi issue d’un démembrement du territoire de l'ancien Dinan-Bécherel. Ce grand domaine était fort apprécié de ses propriétaires, car il était, pour la plus grande partie, recouvert d’une forêt propice à l'exercice de la vénerie; les droits de chasse sur cette zone appelée "bouais de Hac". Bien qu'aucun texte d'archives ne vienne le confirmer, plusieurs preuves certaines montrent que le constructeur du château fut un clerc, Guillaume de Saint-André, appelé aussi Guillaume de Saint Judoce (Saint-Judoce et Saint-André-des-Eaux sont deux communes voisines du Quiou). Ce personnage important et mal connu était décoré de plusieurs titres; licencié en décrets, scolastique de Dol, notaire apostolique et impérial; secrétaire et ambassadeur du duc Jean IV, il fut son conseiller écouté, chargé des missions diplomatiques difficiles en Angleterre ou face au roi de France Charles VI, ainsi que de l'instruction des causes judiciaires délicates comme celle de l'assassinat de Jean de Beaumanoir en 1384, dans laquelle les familles de Beaumanoir et de Tournemine, toutes deux d'importance considérable, se trouvaient opposées. Mais surtout, Guillaume de, Saint André est connu pour son œuvre littéraire: deux textes nous restent de lui, le "LIBVRE DU BON JEHAN, DUC DE BRETAIGNE", biographie en vers du duc Jean IV, qui demeure un document de base pour la Bretagne de 1341 à 1382, et le "JEU DES ÉCHECS MORALISES" traité de morale politique développé à partir de la description des pièces de l'échiquier. Ces deux ouvrages montrent un style original dans lequel l'intellectuel de haute volée, souvent acteur des grandes heures politiques de son époque, se livre avec délectation à la crudité de notation des mœurs et du langage rustique. Clerc important de la cour ducale, Guillaume de Saint-André fit appel pour construire le château à un grand architecte du même milieu,le maître-d'œuvre Étienne le Tur, auteur du donjon de Dinan, et du manoir de la Grandcour à Taden qui appartenait à la famille de Beaumanoir.
Après la mort de Guillaume de Saint-André, survenue à une date inconnue (probablement vers 1400), la seigneurie de Saint-Thual et les Bois de Hac revinrent à la famille ducale. Ainsi, en 1419, le domaine faisait partie de l'apanage d'Arthur de Richemont. Ce dernier, né en 1393, fut une des plus hautes figures guerrières du Moyen Age. Fils du duc Jean IV et frère des ducs François 1er et Pierre II, il avait entrepris très jeune une carrière militaire: fait prisonnier à Azincourt, il resta sept ans en captivité puis libéré, fut nommé par Charles VII, Connétable de France (1425); en 1429 il réunit une armée de douze cents hommes et rejoignit Jeanne d'Arc pour combattre à ses côtés; l'association de ces deux chefs devait aboutir aux succès du siège de Beaugency et de la bataille de Patai. Enfin, en 1450, il infligea aux Anglais une défaite historique à la bataille de Formigny: 3774 soldats anglais furent tués et 1200 faits prisonniers. Cette victoire française mettait fin à la guerre de Cent Ans. En 1457, ses frères aînés étant morts sans héritier, il devint à son tour duc de Bretagne sous le nom de Arthur III. Il conserva pourtant sa charge de Connétable de France malgré les remontrances de ses barons qui prétendaient qu'elle était au-dessous du rang d’un duc de Bretagne; il eut alors cette phrase remarquable: "Je veux honorer dans ma vieillesse une charge qui m'a fait honneur dans ma jeunesse ". Son règne ducal fut court; quatorze mois, car il mourut le lendemain de Noël 1458. Ses biographes ont laissé de lui l’image d’un homme laid et rude (il avait lui-même fait figurer dans ses emblèmes l’image d’un sanglier) d'un caractère intransigeant: il fit pendre nombre de soldats pillards et brûler force sorciers. Il était cependant juste et scrupuleux, fidèle en amitié et d'un abord franc.
Arthur de Richemont ne resta pas longtemps en possession de la seigneurie de Saint-Thual, peu après 1420, il s'en dessaisit au profit de Raoul de Bintin, seigneur de Maillé dont l'unique héritière, Guyonne de Bintin, épousa Jean Hingant, seigneur de Hac. Ainsi le domaine forestier fut-il réuni à la seigneurie de Hac, dont le château actuel devint le chef-lieu. Jean Hingant fut à son époque un personnage très important: son mariage avait fait du petit seigneur rural un des plus riches propriétaires de la région; son ambition fit le reste et la faveur ducale lui fut accordée. La dame de Hac est portée au compte du receveur général en 1432 et en 1445, comme ayant reçu des récompenses à la cour du duc de Bretagne: coupe, aiguière d'argent, tissus cramoisis... Jean Hingant, lui, fut nommé chambellan du duc et, en 1440, envoyé comme ambassadeur en Écosse pour négocier le mariage de l'héritier de Bretagne avec Isabelle, fille du roi d'Écosse Jacques 1er. Les vieilles chroniques ont gardé le souvenir du compte-rendu que fit de sa mission Jean Hingant au duc Jean V et des réflexions pittoresques de ce dernier. Jean V ayant demandé "quelle estoit la façon de ceste jeune princesse", Jean Hingant la décrivit comme "assez belle, le corps droit et bien: forme, semblant propre pour avoir enfants, mais au reste elle n'a pas grand discours en ses propos et semble assez simple". Le duc répondit alors: "retournez vite en Ecose et me l'amenez(...). Je n'en veux point d'autre: par Saint Nicolas, j'estime une femmeassez sage quand elle sait mettre différence entre sa chemise et le pourpoint de son mari". Ce mot plaisant est passé à la postérité grâce à Molière qui l'a réintroduit presque inchangé dans les Femmes Savantes.
L'histoire très dramatique du prince Gilles de Bretagne mit fin brutalement à la brillante carrière de Jean Hingant. Gilles, le dernier fils de Jean V, avait enlevé et épousé la jeune Françoise de Dinan, unique héritière de domaines considérables. Retiré dans la forteresse du Guildo, l’un des nombreux châteaux de son épouse, il forma l'ambition de jouer un rôle politique de premier rang et fit offre aux Anglais de leur ouvrir ses places fortes. Son frère, le duc François 1er, dépêcha alors Jean Hingant auprès de lui pour tenter de modifier sa position. Gilles refusa et fut alors arrêté le 26 juin 1446, puis pendant quatre ans, traîné de forteresses en prisons, de cachots en culs de basses-fosses. Enfin, le25 avril 1450, ses geôliers l'étranglèrent dans sa cellule, forts de l'indifférence, sinon de l'assentiment de son frère. La légende veut que le duc François, en pèlerinage au Mont Saint Michel, ait été alors assigné par un moine mystérieux, confesseur de Gilles, devant le tribunal de Dieu pour répondre du meurtre de son frère, dans un délai de quarante jours. Cette assignation avait été faite le 7, juin 1450: François 1er trépassa le 17 juillet suivant, au terme du délai imparti par la sinistre prophétie. Le duc Pierre II, frère et successeur de François 1er, entreprit immédiatement de châtier les coupables du meurtre: les hommes de mains furent pendus et mis en quartiers, mais Jean Hingant, considéré comme l'un des responsables, resta introuvable. Des perquisitions furent menées, toujours sans résultat; au cours de l’une d'elles, la fille de Jean Hingant mourut d'émotion. En fait, Jean Hingant se trouvait probablement là, dissimulé dans une cachette secrète qui existe toujours dans une des tours du château.
Dès qu'il le put, il s'enfuit en France et dut s'y constituer prisonnier pour obtenir du Parlement de Paris en 1458 un jugement lui permettant de rentrer en Bretagne. Ses biens, cependant, n'avaient pas été confisqués et ses descendants restèrent seigneurs de Hac jusqu'en 1540, date à laquelle on trouve la dernière de la lignée: Françoise, mariée à René de Tournemine, baron de la Hunaudaye. Hac suivit alors le destin de cette puissante maison riche d'un fief immense. En 1609, il échut en héritage à la petite fille de René de Tournemine, Jeanne-Hélène de la Motte Vauclerc qui s'était mariée en 1601 à Sébastien de Rosmadec. En 1631, leur fille l'apporta en mariage à Guy de Rieux. Le 15 mai 1686, Hac fut vendu pour la première fois par Jean-Gustave de Rieux, fils de Guy, à René de Lopriac, marquis de Cottmaden,et une seconde fois le 15 novembre 1770 au sieur Reslou de la Iisonnaye, par Louis-Joseph, comte de Kerhoent, qui le tenait de sa femme, Félicité de Lopriac, petite fille du précédent acquéreur. La Révolution fit peu de dégâts, Reslou étant maire de Dinan en 1792. Il conserva le château, les bâtiments, le moulin et les terres dont il avait pris solennellement possession le 21 janvier 1771, en même temps que de la juridiction, des titres, armoiries et enfeus tant sur les paroisses de Tréfumel que du Quiou. En 1782, il avait marié sa fille Thérèse, la dixième de ses enfants à Jacques Louis Poisson des Gastines qui vendit Hac en 1807 au marquis de Langle-Beaumanoir et le petit-fils de ce dernier, Louis Anne le céda à son tour, le 30 avril 1852, à Jean-Marie Larère. C'est dans la famille de ce dernier que Hac demeure depuis plus de 130 ans.
Après Jean-Marie, Alfred Larère le garda, en effet, de 1886 à 1913, date à laquelle il passa aux enfants d'Anne Larère, sa nièce, mariée au statuaire Arthur Guéniot en 1901. Ce dernier, né en 1866, fut un sculpteur de grand talent, élève du peintre Gustave Moreau et condisciple de Matisse et Rouault. Son œuvre, couronnée par plusieurs distinctions au salon des Artistes français, dont la médaille d'or en 1927, est représentée à Dinan par la remarquable statue en pied de Jean de Beaumanoir, héros du Combat des Trente, il fut par ailleurs un portraitiste très réputé, dont les bustes témoignent d'une rare maîtrise. En 1927, le château échoit en partage à Madeleine Guéniot, épouse d'Étienne Paillard. Il avait été habité par des fermiers durant le XIXe siècle; une grange ajoutée aux communs, et une écurie accolée à la plus orientale des tours avaient accusé sa destinée utilitaire. Entre 1927 et 1936, puis en 1961, des travaux de restauration furent menés par Étienne Paillard, historien et archéologue très averti. Ils ont porté principalement sur la réfection des fenêtres qu’on avait murées en grand nombre pour échapper à l'impôt, sur celle des dallages et sur celles des lambris du second étage. Ces travaux, exécutés exclusivement par des artisans locaux, se sont inspirés des restaurations effectuées à Langeais par la famille Siegfried: loin des reconstitutions "troubadour" fréquentes dans les châteaux bretons, ils sont un modèle de sobriété et d’exactitude archéologique. Les propriétaires de la génération actuelle s’attachent à garder cet esprit. Depuis 1984, le château est ouvert au public. Le château de Hac accueille en outre des animations culturelles diverses, séminaires, expositions d'art et d'artisanat, concerts, soirées littéraires et artistiques.
Le château de Hac est un long bâtiment comprenant deux niveaux surmontés d'un étage de combles à surcroît; le plan forme un rectangle dont l'extrémité orientale à peu près carrée, est légèrement en saillie en façade, mais fortement en retrait à l’arrière en raison de sa plus faible profondeur. Trois tours rondes couvertes en poivrière flanquent la façade principale. Celle de gauche, la plus étroite, est à l’angle et repose, grâce à un cul de lampe garni de moulures toriques, sur une colonne dont la bague formant chapiteau est décorée d’une guirlande végétale; à mi-hauteur un larmier se détache sur la nudité du mur. Au centre de la façade, la seconde tour, plus épaisse, est aussi la plus haute; on y voit un larmier à la hauteur du premier étage; la partie haute est d’un diamètre légèrement supérieur, la transition étant marquée par une moulure torique qui continue celle qui marque sur la façade la jonction avec la couverture; une petite tourelle, portée en encorbellement sur un cul de lampe mouluré saillant de la façade, est suspendue à droite de la tour comme une échauguette. Enfin, la troisième tour, et la plus épaisse, est à l'angle de droite; elle porte un larmier et une partie supérieure de plus fort diamètre, à la même hauteur que ceux de la tour centrale. La façade postérieure est flanquée de deux tours. La première est à l'angle nord-ouest et porte un larmier à mi-hauteur; l’autre au centre, s'élève sur un plan outrepassé; un larmier marque la moitié de son élévation et la partie supérieure s'élargit comme celles des deux plus grosses tours de la façade sud; cet épaississement, toutefois, se fait à une hauteur inférieure à celui de ces dernières; la couverture de cette tour, moins élancée que celle des autres, adopte la forme d’un toit d'abside.
Malgré le bouleversement au XVIIe siècle d’une partie des percements, en particulier sur la totalité du premier étage, une grande part des ouvertures primitives a été conservée. Au rez-de-chaussée, tout d'abord, entre les deux premières tours de la façade principale, se voient deux vastes fenêtres rectangulaires garnies d'épaisses grilles pendantes; aux pieddroits et aux linteaux, les arêtes sont abattues en un large chanfrein que soulignent deux moulures toriques parallèles séparées par un cavet; ces moulures sont de diamètres différents, la plus forte étant à l'extérieur, et s'amortissent sur l'appui en bases polygonales. A droite de ces fenêtres, la porte d'entrée, que surmonte une archivolte ogivale développe un joli décor: les pieddroits en pans coupés portent chacun trois colonnettes à base et chapiteau polygonaux; au-dessus, les colonnettes sont prolongées par des moulures toriques de même diamètre qui se rejoignent en ares brisés, formant un tiers point; colonnettes et moulures sont d'épaisseurs décroissantes de l'extérieur vers l’intérieur, créant ainsi une illusion de profondeur. Au second étage les fenêtres anciennes subsistent aussi. Elles se présentent en façade principale, comme de hautes lucarnes dont l'ouverture rectangulaire assez médiocre est surmontée d’un gâble très aigu au pants garnis de sculptures, sommé d'un fleuron et cantonné de deux pinacles. On en compte trois de ce côté et trois également au-dessus de la façade arrière Au même étage, la tour centrale de l’arrière montre une fenêtre en tiers point dont le remplage forme deux lancettes trilobées surmontées d’une fleur de lys. Il s’agit là d’un fenestrage tardif car le dessin primitif attesté par une pierre retrouvée lors des travaux de restauration, consistait en deux lancettes trilobées surmontées d’un quatrefeuille.
Les fenêtres des tours sont de petites ouvertures rectangulaires aux arêtes abattues dont la plupart étaient garnies de grilles encastrées comportant une large bague pour le tir; celles de la tour centrale de la façade sont disposées de manière à révéler un escalier en vis intérieur. Dans les parties hautes les fenêtres sont nettement plus grandes et presque carrées. On notera que certaines des ouvertures des tours portent, de part et d'autre du linteau, des crochets de métal qui supportaient les gonds de volets pendants, permettant un tir fichant sans exposer le tireur. Mentionnons enfin les souches de cheminées qui surmontent les couvertures. Elles sont rectangulaires et élancées: certaines ont à leur sommet des fines moulures et des plaques d’ardoise incrustées qui simulent des évidements. A l'arrière, à droite de la tour centrale, s'élève une très haute souche qui repose sur le mur gouttereau et dont le fut élancé s'appuie sur une base talutée. Ces cheminées jouent un rôle plastique dans la vision que l'on a du château lorsqu'on vient des collines auxquelles il s'adosse au nord et à l’est. De ce point de vue que l'on découvre brusquement, on est saisi par un effet, sans aucun doute voulu, de pittoresque. En effet, le décalage d’alignement de l'extrémité orientale du bâtiment créé une silhouette animée dans laquelle la lumière joue de contrastes entre le sombre des couvertures et le clair du pignon de l'est et de celui du corps principal; cette silhouette est compliquée par les trois tours du sud-est et de l'arrière et, au-dessus, est hérissée des flèches des autres poivrières et des sept cheminées car on distingue de là toutes les souches du bâtiment. Cette profusion de volumes divers concentrée en un seul monument est presque romantique. Tout autre est l'impression que donne le château vu de la plaine qui s'étend au sud et à l'ouest. De ce côté, deux plans de composition: la façade sud et le pignon occidental. Ce dernier est soigneusement conçu. Les deux tours qui l’encadrent vont en se rétrécissant insensiblement vers le haut, ce qui confère à cette face un caractère élancé.
D'autre part, le maître d'œuvre a su composer un ensemble harmonieux alors que les deux tours sont très nettement différentes de diamètre. Pour cela, il les a posées à des distances inégales de l'axe Vertical du pignon, la plus grosse, à gauche, en étant la plus éloignée, et il a compensé la différence de niveau entre les hauteurs de jonction des tours avec les rampants par l'emploi d'un petit toit d’ardoise couvrant le raccord du rampant de gauche avec la tour correspondante. Ce dispositif sert aussi à établir un équilibre horizontal car l'axe parallèle au sol de ce petit toit passe par le point de contact du rampant de droite et de la petite tour; cette liaison est d’ailleurs répétée plus bas par les larmiers qui sont à la même hauteur sur les deux tours. Le pignon, primitivement aveugle, accentuait le caractère géométrique de cette composition en présentant une vaste surface nue. Une grande fenêtre percée au XVIIe siècle au premier étage, rompt quelque peu le charme. La façade, qui se voit de fort loin, est rythmée par ses trois tours que séparent des distances égales, et qui élèvent leur chambre supérieure à la hauteur d’un niveau au-dessus du second étage. Mais c’est à l'observation en perspective qu'apparaît surtout l'habileté de l’architecte. Le diamètre des tours va en s'accroissant d'ouest en est suivant une progression géométrique qui suscite, suivant le point de vue, un sentiment de profondeur ou au contraire de tassement. D'autre part, des liaisons visuelles complètent le jeu. Vu de l’ouest, deux grandes lignes de fuite se croisent, l’une formée par l’enfilade du toit des tours, l’autre par le larmier de la première tour, la moulure marquant la partie supérieure de la seconde et le cavet qui souligne le bord de la couverture de la troisième. Cependant, de face, l'équilibre demeure car la tour du sud-est est moins haute que la tour centrale grâce à quoi la progression du volume des tours se trouve neutralisée pour l'observateur; de plus, les larmiers et les décrochements des parties supérieures sont aux mêmes hauteurs dans les tours du centre et de droite, établissant ainsi un équilibre horizontal.
Composition pittoresque d’un côté, équilibre savant de l’autre, telles sont donc les caractéristiques de l'extérieur du château. L'intérieur aussi est celui d'une maison raffinée. Le plan présente la disposition des résidences ducales, inspirée des constructions royales françaises, c’est-à-dire d'ouest en est, pour chaque niveau, un ensemble salle/chambre/chambre. Au rez-de-chaussée, les deux grandes fenêtres grillées et la porte en tiers-point signalent une salle basse d’à peu près seize mètres sur huit, équipée d’une très vaste cheminée dans le pignon et de coussièges dans les embrasures de fenêtres. De là, une demi révolution de l'escalier en vis de la tour centrale conduit à la première chambre basse; celle-ci se trouve surélevée d’un mètre cinquante par la présence, au-dessous, d'une cave enterrée de deux mètres. Un guichet, autrefois protégé par une grille dont les attaches subsistent, et dont l'embrasure voûtée en plein cintre est garnie d'un banc de pierre, surplombe et contrôle la salle. On remarque, au bas de la fenêtre sud agrandie au XVIIe siècle, le seuil de la baie primitive, qui était un évier incliné vers l'extérieur avec un trou d'évacuation prolongé au dehors par une petite gargouille. Enfin, la seconde chambre est de plain-pied par rapport à la première. Le manteau et les pieddroits de sa cheminée ont disparu, mais le renfoncement dus foyer, se voit un ancien four à pâtisserie qui montre que cette chambre était primitivement la cuisine. Les deux étages supérieurs répètent la même disposition mais sont de plain-pied d’un bout à l'autre de la maison; cependant les salles et les chambres centrales ne communiquent pas directement mais sont articulées séparément sur l'escalier de la tour centrale.
Les salles ont deux cheminées, l’une dans le pignon ouest, l’autre dans le mur nord, chacune correspondant au chauffage d'un volume de plan carré. Au second étage, une chapelle contenue dans la tour centrale de l'arrière, qu'éclaire la fenêtre ogivale à remplage fleurdelisé, s'ouvre sur la salle grâce à une grande baie en arc surbaissé. L'orientation judicieuse de l'autel et un large pan coupé à l’arête de la baie de communication font que les offices peuvent être suivis depuis les deux tiers de la surface de la salle; d'autre part, la tour étant à cheval sur le mur de refend, un guichet étroit permet de voir l'autel depuis la chambre centrale. Au même niveau, l'appartement des deux chambres se complète d'une petite chambre à feu établie dans la partie supérieure de la tour sud-est, à laquelle on accède par un étroit escalier en vis percé dans l'épaisseur du mur; on y voit une charpente à clé pendante décorée de moulures. Tout ce second étage a conservé son caractère gothique: les embrasures des fenêtres sont équipées de coussièges et un lambris en berceau couronne les trois pièces. L'œuvre de charpenterie mérite d'être signalée. Pour éviter de briser l’espace l’intérieur du berceau, le charpentier a réalisé une construction sans entrait mais très fortement liée dans ses parties hautes: les fermes sont nombreuses et peu écartées les unes des autres, et, au-dessus de l'entrait retroussé, que des pièces obliques maintiennent sous l'aisselle sur les arbalétriers, se voient sous la panne faîtière trois rangs successifs de sous-faitages, fixés entre eux et au poinçon par des liens et des croisillons. Les vastes pièces du château sont augmentées de tout un réseau d'éléments annexes. Ce rôle est joué par les tours. Celles du nord-ouest et du sud-est renferment à chaque étage (sauf au rez-de-chaussée pour la première) des cabinets de latrines dont les sièges sont en retrait d'un étage à l’autre vers le haut. Celles du sud-ouest et de la chapelle dans ses niveaux inférieurs, sans cheminée, contenaient des pièces de rangement et des garde-robes. Les deux tours qui flanquent le pignon occidental ont une particularité curieuse: au-dessus des réduits qu’elles contiennent. au, second étage existe une petite pièce accessible par une trappe et une échelle.
Enfin, l'escalier de la tour centrale est surmonté d'une chambre de guet avec cheminée, sous un lambris ogival. Cette chambre, à laquelle on accède par un petit escalier en vis logé dans le tourillon en encorbellement, est supportée par une croisée d'ogives dont les nervures moulurées et soulignées d'un listel très saillant reposent sur des culots; l'un des quatre compartiments ainsi limités est percé d'une trappe qui contrôle le grand escalier. La qualité d'habitat de cet ensemble se traduit aussi dans le décor, et plus particulièrement celui des cheminées: pieddroits à colonnettes soulignées d’un listel frontal, hotte saillante portant un arc de décharge, seuil porté à l'étage inférieur par un support, formé d'un arc tendu ou de gros tores superposés. La plus grande, celle de la salle basse, a un linteau appareillé et les deux colonnes décroissantes qui constituent chaque pieddroit ont un chapiteau commun fait d’une série de moulures superposées et s'élargissant vers le haut sous les extrémités de la hotte; celle de la chambre centrale du rez-de-chaussée possède des chapiteaux décorés de serpents entrelacés, très proches du "chapiteau aux serpents" dans le chœur de l'abbatiale de Saint Méen. Au premier étage et dans la salle du second, les cheminées, dont les chapiteaux portent des motifs végétaux, sont très décorées. L'une d'elles surtout, au pignon de la salle du premier étage, est remarquable. Ses pieddroits sont garnis d'une colonnette centrale qu'encadrent deux autres plus petites sur les côtés; sous les corbeaux, les tailloirs polygonaux sont très discrets, tandis que les astragales, fort saillantes, sont circulaires et soulignées d’un listel; les corbeilles rétrécies vers le bas sont profilées en talon renversé et portent des feuilles aux lobes larges et arrondis, soulignés d'une nervure saillante, qui se plaquent étroitement sur la surface; les bases, polygonales, reposent sur des plinthes à plusieurs ressauts, dont les arêtes diagonales s'élèvent vers le centre en plan incliné pour pénétrer les pans de la base de la colonnette centrale: La qualité d'exécution de cette cheminée s’accorde à l'habileté du dessin: les éléments de mouluration qui marquent les différentes parties des colonnettes sont placés à des hauteurs différentes entre celles du centre et celles des côtés, ce qui confère une grande vigueur à la composition.
On disait, à la fin du siècle dernier, que le château de Hac était du XIIIe ou du XVIe siècle, et même qu'il avait été commencé sous les Hingant et jamais achevé. Comme il manquait une partie des planchers du second étage, l'imagination avait libre cours et on parlait de revenants… une autre légende mentionnait l'existence d'un trésor caché dans un souterrain sous le château, il s'agissait d'un jeu de quilles en or massif, qui aurait donné son nom au Village du Quiou. Cependant, l'évocation des fantômes romantiques n’est pas indispensable pour que le château de Hac frappe l'imagination. Sa silhouette hautaine et mystérieuse, dressée comme un vaisseau au-dessus de la plaine, est l'une des plus caractérisées de Bretagne. Son exceptionnel état de conservation en fait aussi une sentinelle du passé, au cœur d'un pays riche d'histoire. Mais surtout, Hac est, pour l'amateur éclairé des vieilles pierres, un témoin de l'art breton d'avant-garde aux grandes heures du Moyen-Age gothique. (1)

Éléments protégés MH : le château : classement par arrêté du 9 septembre 1993. Les abords du château, à savoir les sols d'assiette et les murs de soutien ou de clôture de la cour, des anciens jardins et de l'avenue d'accès : inscription par arrêté du 15 février 2012. (2)

château de Hac 22630 Le Quiou, tél. 02 96 88 17 90, ouvert au public de mai à août du dimanche au jeudi. Un guide vous accompagnera tout le long de la visite des intérieurs et des extérieurs du château, suivi d’une visite découverte des jardins galants du château.

Ce site recense tous les châteaux de France, si vous possédez des documents concernant ce château (architecture, historique, photos) ou si vous constatez une erreur, contactez nous.
Licence photo©webmaster B-E, photos ci-dessous interdites à la publication sur Internet, pour un autre usage nous demander.
A voir sur cette page "châteaux des Côtes d'Armor" tous les châteaux recensés à ce jour dans ce département.

 
 
 
 
 château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou
 
 château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou
 
 château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou  château de Hac - Le Quiou
 
   
 
 


(1)
    Sources : Archives départementales des Côtes-du-Nord, à Saint-Brieuc. Seigneuries de Hac et de Carmeroc. Archives Nationales, Paris. Plaidoirie en faveur de Jean Hingant, le 25 mai 1458.
E.M. Paillard : "Le Château de Hac", Paris, 1952: Études inédites sur Guillaume de Saint-André et un procès en 1450
concernant le droit de chasse dans les bois de Hac.
M. Déceneux : "Manoirs Gothiques Bretons, 1364-1420": Thèse de Doctorat soutenue le 10 décembre 1982 à l'Université de Rennes.


(2)     source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

Sur ce site, tous les châteaux, châteaux forts, manoirs, maisons-fortes, ruines et vestiges importants, chateau hôtel-restaurant, chateaux avec chambres d'hôtes, gîtes, et les châteaux avec salles pour réceptions, vous trouverez la liste de tous les départements en page d'Accueil, mais également une page réservée aux châteaux à l'abandon, en péril, et les châteaux du val de Loire nous avons recensés aussi les châteaux dans les pays francophones, Suisse, Belgique et Grand Duché du Luxembourg voir châteaux Étrangers, et également les châteaux dans des bourgs classés parmi les plus beaux villages de France.

 
 
(IMH) = château inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, (MH) = château classé Monument Historique
Nos sources proviennent à 60% de la base Mérimée, culture.gouv.fr/culture/inventaire/patrimoine, que nous remercions vivement
Copyright ©chateauxdefrance@orange.fr     Tous droits réservés.