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Le sort funeste attaché aux vieilles
pierres et hôtel noble de Mursay serait très ordinaire si ce petit monument
n'était pas un des hauts lieux de l'histoire littéraire et politique de
notre pays. Et il ne s'agit pas simplement du séjour qu' Henri de Navarre y
fit en 1576, quelque temps après sa fuite de la cour et son retour à la
religion réformée... Le grand poète huguenot Agrippa d'Aubigné qui y vécut
par intermittence en fit dans ses satiriques Aventures du baron de Faeneste,
imprimées à Maillé en 1616, la demeure du "bon homme" Enay (Aubigné
lui-même), enfermée "d'un parc et d'une rivière". Plus tard, sa petite-fille
Françoise d'Aubigné, future Madame de Maintenon et secrète reine de France,
y connut les rigueurs d'une éducation protestante et de bonne famille, en
1642 puis à partir de 1646 : "J'étais chez une de mes tantes, assez riche
pour avoir un carosse à six chevaux. Cependant, nous n'avions dans la maison
que des sabots et on ne nous donnait des souliers que lorsqu'il venait
compagnie. Je me souviens encore que ma cousine et moi, qui étions à peu
près du même âge, nous passions une partie du jour à garder les dindons de
ma tante. On nous plaquait un masque sur notre nez, car on avait peur que
nous ne nous hâlassions, on nous mettait au bras un petit panier où était
notre déjeuner, avec un petit livret des quatrains de Pibrac dont on nous
donnait quelques pages à apprendre par jour. Avec cela, on nous mettait une
grande gaule dans la main et on nous chargeait d'empêcher que les dindons
n'allassent où ils ne devaient point aller".
Elle fit aussi, en compagnie du docte chevalier de Méré, intime de Pascal,
un premier apprentissage des conversations honnêtes, telles qu'on en
pratiquait l'art dans les salons de Paris. Très attachée à sa famille
qu'elle chercha obstinément à convertir à la religion du roi, elle revint au
moins une fois à Mursay, chez ses cousins de Villette, dans le courant de
l'automne 1676. C'est lors de ce dernier séjour qu'elle remarqua la vive
intelligence de sa petite nièce Marthe Marguerite de Valois de
Villette-Mursay, alors âgée de trois ans. Elle en organisera l'enlèvement
sept ans plus tard, avec la complicité de la propre mère de l'enfant, afin
de lui assurer un avenir plus radieux que ne pouvait le lui laisser espérer
sa religion prétendue réformée, comme on disait à l'époque. Devenue comtesse
de Caylus, cette petite châtelaine de Mursay laissera des souvenirs que le
grand Voltaire jugera bon de publier. En 1698, le marquis de Villette,
Philippe de Valois, lieutenant général des armées navales du roi, commencera
d'aliéner son domaine qui se retrouvera, en 1776, tout entier entre les
mains d'une famille d'échevins et de riches commerçants niortais, les Martin
de Niort. Jusqu'à la Première Guerre mondiale, durant laquelle le château
servit pour la dernière fois de résidence à son propriétaire, Mursay
présentait encore, dans une relative intégrité, l'architecture que lui avait
donnée François de Vivonne, à la fin du XVIe siècle. Puis vint l'abandon et
les premiers appels aux pouvoirs publics.
En 1935, la Société Historique des Deux-Sèvres demande le classement de
l'édifice qu'elle obtient le 6 février 1952. Entre-temps, l'inoccupation des
murs, le vandalisme et le désintérêt général auront achevé la ruine du
château, et ce sont bien ses ruines que l'on classe alors officiellement.
Voici, pour terminer, l'état des lieux établi à cette occasion par
l'administration : "Le château est construit sur une terrasse édifiée dans
le lit de la Sèvre, et qui est limitée par quatre échauguettes. Plan
rectangulaire, flanqué de quatre tours entre lesquelles, à l'est et à
l'ouest, se trouvent de grands balcons. L'escalier d'honneur occupe la plus
grande partie du pavillon central, pavillon plus élevé que les autres, qui
divise l'édifice en deux parties inégales. Le corps de bâtiment n'a qu'un
rez-de-chaussée et un étage. A l'intérieur restent quelques vestiges des
décorations: deux cheminées du XVe et du XVIIe siècles, trois cheminées
Louis XVI. Il subsiste aussi quelques peintures: dessus de portes ou
trumeaux encore très visibles en 1930, en particulier dans l'appartement dit
de Madame de Maintenon où l'on voyait des bergeries. Dans l'escalier est une
inscription: "difficile imo". Les balcons datant du XVIIe siècle sur les
façades sud et nord ont été rapportés après la construction. L'édifice est
bâti en moellons, les tours en pierres appareillées. Le pavillon et les
tours sont couverts d'ardoises, le corps de logis en tuiles". Il ne reste
aujourd'hui que des pans de murs, demain que la seule mémoire des hommes,
seule et combien fragile. (1)
Éléments protégés MH : le château de Mursay (ruines) : classement par décret
du 6 février 1952.
château de Mursay 79410 Échiré, il a été racheté par la communauté
d'agglomération niortaise, il ne ressemblait plus qu'à une ruine romantique,
envahi de ronces, il est en cours de restauration.
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