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L'histoire du château de
la Tiffardière est mal connue, du fait notamment de la destruction de ses
titres seigneuriaux, brûlés en place publique à Saint-Liguaire en 1793. Il
est possible qu'un site habité, voire fortifié et protégeant d'autres
habitations tout autour, se soit développé là dès l'époque romaine puis au
début du Moyen Age. Du haut de son promontoire, il aurait alors permis de
contrôler cette partie de la vallée de la Sèvre où se trouvait un passage à
gué. Si le lieu-dit de la Tiffardière est mentionné pour la première fois
dès 1260, il faut attendre 1467 pour qu'un seigneur de la Tiffardière, nommé
Jean Chevalleau, soit cité, en l'occurrence dans un état des nobles du
Poitou appelés au ban. Archer, demeurant à Niort, il est marié à Louise de
Saint-Gelais. En 1533, Claude Chevalleau est également archer au ban des
nobles du Poitou. Condamné pour avoir tué un notable de Niort, ses biens
sont confisqués, parmi lesquels le château et le moulin à eau de la
Tiffardière. Ils sont restitués en 1541 à ses enfants. En 1587, un certain
Jean Chevalleau, seigneur de la Tiffardière et de Boisragon, est gouverneur
protestant de Saint-Maixent. Les Chevalleau de Boisragon s'éteignent dans la
première moitié du XVIIe siècle; leurs armoiries figuraient encore au début
du XXe siècle sur une porte du château. La Tiffardière change de mains au
début du XVIIe siècle par le mariage de Jehanne Chevalleau avec Pierre
Boisceau de la Borderye.
A cette époque le château prospère grâce notamment à ses dépendances, mises
en ferme par les seigneurs successifs: le moulin à eau, en contrebas à
l'est; la grande métairie (peut-être les bâtiments de la cour nord du
château) et la petite métairie. Les seigneurs de la Tiffardière tirent aussi
profit du passage sur la Sèvre Niortaise, à l'emplacement du pont actuel. Au
début du XVIIIe siècle, Olivier Garnier de Fontanon et sa famille succèdent
aux Boisceau à la tête de la seigneurie de la Tiffardière. A cette époque,
le logis de la "Pisardière" est mentionné par l'ingénieur Claude Masse sur
ses cartes de la région. Il y situe le château sur son promontoire,
présentant un plan en U ouvert vers l'ouest, et avec le pigeonnier
circulaire au nord. En 1783, les héritiers Garnier vendent la Tiffardière
pour 110.000 livres à Gabriel-Jean-Simon Berthelin, comte de Montbrun,
chevalier, seigneur d'Aiffres, Coulon, etc. Le domaine comprend toujours ses
deux métairies, le moulin à eau et divers droits dont certains exercés sur
le gué de la Tiffardière et sur des pêcheries. En 1791, le comte de Montbrun
profite de la vente des biens de l'abbaye de Saint-Liguaire comme biens
nationaux pour acquérir la métairie de l'Evescault, située face au château,
à l'ouest, de l'autre côté de la rue. Au comte de Montbrun succède son
gendre, Emmanuel Jean Armand Bénédicte, comte de Sainte-Hermine (1770-1850),
ancien page du roi Louis XVI, capitaine de cavalerie, maire de Niort de 1818
à 1826, conseiller général des Deux-Sèvres en 1830, député des Deux-Sèvres
de 1827 à 1831, préfet de la Vendée en 1830, de l'Allier entre 1832 et 1834,
pair de France de 1839 à 1848.
Entre 1819 et 1823, le comte de Sainte-Hermine fait reconstruire le château
de la Tiffardière, lui donnant son aspect général actuel. Il conserve
toutefois son organisation en promontoire, ses murs de soutènement, quelques
éléments intérieurs (escalier en vis, médiéval ou du XVIe siècle; peut-être
le décor sculpté du vestibule, de style du XVIIIe siècle) ainsi que le
pigeonnier (XVIIe siècle). Il est possible qu'avant ces travaux, le logis du
château ne comprenait pas de niveau de soubassement, à l'est, côté Sèvre
Niortaise; cela pourrait expliquer la présence d'une niche aménagée dans ce
niveau de soubassement, dans un mur qui aurait alors été extérieur à
l'origine. Le comte de Sainte-Hermine fait par ailleurs réaménager le parc
qui s'étend sur le coteau entre le château et les bords de Sèvre (ce parc
apparaît sur un plan de la Sèvre dès 1811). En 1818, il fait planter deux
rangées d'arbres le long du fleuve, dans son parc. A la mort du comte de
Sainte-Hermine, en 1850, la Tiffardière revient d'abord à sa fille, Zoé
Angélique épouse Bodet de La Fenestre, décédée sans enfants en 1861; puis à
son autre fille, Marie-Anna, mariée au baron Sylvain Pétiet, ancien page de
Napoléon 1er, officier de cavalerie, conseiller général des Deux-Sèvres. Le
domaine passe ensuite à leur fils, Armand Pétiet, auditeur au Conseil d'Etat,
conseiller de préfecture, conseiller général, député des Deux-Sèvres; puis à
son fils, le baron Henri Pétiet. Plusieurs membres des familles de
Sainte-Hermine et Pétiet reposent dans une chapelle funéraire au cimetière
de Saint-Liguaire. C'est à Armand Pétiet que l'on doit la construction de la
tour-belvédère en 1870, au milieu de la cour nord (date portée sur la
porte). Vendu en 1908 par Henri Pétiet à Roger Lévesque, acquis par le
Département qui y a établi en 1962 sa Maison départementale de l'enfance, le
logis du château a brûlé dans sa partie supérieure en 1984, perdant sa
toiture d'origine.
Le château est situé au nord du hameau de la Tiffardière, au sommet d'un
coteau qui surplombe, à l'est, la Sèvre Niortaise. Le domaine comprend
principalement deux ensembles de bâtiments, répartis autour de deux cours
successives. La cour sud est délimitée sur la rue par une clôture basse
(autrefois un muret) et un portail à piliers maçonnés, surmontés de deux
corbeilles de fleurs sculptées. Face à ce portail, de l'autre côté de la
rue, se trouve un espace en demi-cercle auquel aboutissait autrefois une
allée d'arbres (visible sur le plan cadastral de 1832). La cour est occupée
en son centre par une petite pièce d'eau, et elle est encadrée, au nord et
au sud, par deux ailes de communs, aujourd'hui occupées par des locaux
administratifs et d'accueil. Côté rue, les deux ailes se terminent chacune
par un ancien logement de gardien ou d'employé, à l'architecture d'époque
1900. L'architecture des deux ailes de communs est elle-même relativement
soignée, notamment pour le corps principal de l'aile sud dont la façade sur
présente une élévation en pierre de taille, de larges ouvertures à linteaux
à claveaux, et des pilastres soutenant une corniche. L'aile nord de communs
a été en grande partie reconstruite au XXe siècle (des cartes postales du
début du XXe siècle la montrent dotée d'un étage). Le logis du château
occupe le côté est de cette première cour. Dominant le coteau, il repose sur
un soubassement qui remonte probablement au château antérieur à la
reconstruction du début du XIXe siècle. Ce soubassement permet de compenser
la pente du terrain à l'est.
Le logis possède une aile en retour d'équerre au nord. Bien que largement
remaniée, cette aile conserve au rez-de-chaussée les vestiges, dit-on, d'une
ancienne chapelle (baie en arc brisé) et d'un portail qui donnait sur la
cour nord (pilier accolé au bâtiment). L'aile est par ailleurs flanquée
d'une tour d'angle, au nord-est. De plan quadrangulaire, cette cour est
couverte d'une haute toiture à croupes et en ardoise. La tour présente
plusieurs ouvertures à encadrement chanfreiné, et pourrait remonter au XVIIe
siècle. Il est probable qu'une autre aile également perpendiculaire au logis
fermait la cour au sud (on en devine l'emplacement sur le plan cadastral de
1832). Le corps principal du logis est un long édifice de plan
rectangulaire, double en profondeur, entièrement construit en pierre de
taille, et aujourd'hui couvert d'un seul toit à longs pans et à croupes. Ce
toit est issu de la reconstruction qui a suivi l'incendie de 1984.
Auparavant, le bâtiment était couvert de trois toits différents, tous à
longs pans brisés et à demi-croupes, et percés de lucarnes en pierre et à
fronton. Ces trois toits correspondaient aux trois corps de bâtiments qui
composent en fait le logis : un corps central, à trois travées d'ouvertures,
formant une légère avancée côté ouest comme côté est, entouré de deux
pavillons latéraux, à deux travées d'ouvertures chacun. Du toit d'origine,
on a conservé des épis de faîtage en zinc.
Côté cour, à l'ouest, le logis semble ne comprendre qu'un étage, surtout
depuis la disparition de l'étage de comble après 1984. Le décor se limite à
la corniche à denticules, aux bandeaux et à l'encadrement de la porte,
mouluré et surmonté d'une corniche. Côté est, sur le coteau, on constate que
le logis comprend en plus un étage de soubassement, utilisant la structure
ci-dessus mentionnée, destinée à compenser la pente du terrain. Au niveau du
corps central, ce soubassement présente un décor d'assises de pierre en
joints continus, autour d'une porte en plein cintre avec encadrement
saillant et harpé. Encadrée par deux petites baies en demi-cercle, cette
porte donne sur une terrasse qui domine le coteau (le panorama d'origine sur
le parc en pente et sur la Sèvre Niortaise est désormais occulté par la
végétation). A l'intérieur, le rez-de-chaussée du corps central du logis
comprend un vestibule qui dessert plusieurs pièces situées à l'arrière et
aux extrémités, au rez-de-chaussée des deux pavillons latéraux. Un autre
vestibule se situe dans l'étage de soubassement, au centre, derrière la
porte en plein cintre qui ouvre sur la terrasse. Dans ce vestibule, un
escalier tournant en pierre, à volées droites et à limon en crémaillère,
donne accès aux étages. Sous le pavillon nord, un autre escalier relie les
étages et le soubassement. Il s'agit d'un escalier en vis suspendu (d'époque
médiévale ou du XVIe siècle ?), avec noyau hélicoïdal.
Le niveau de soubassement comprend par ailleurs cinq caves voûtées. Au même
endroit, une niche semblant faite pour accueillir une statue est aménagée
dans l'épaisseur d'un mur. Elle pourrait indiquer que ce mur était extérieur
à l'origine, peut-être avant la construction du niveau de soubassement; on
peut alors émettre l'hypothèse selon laquelle ce niveau n'existait pas avant
la reconstruction du logis en 1819-1823. La cour nord du domaine, plus vaste
que la cour sud, est fermée à l'ouest par d'anciennes dépendances remaniées
(écurie, séchoir à tabac...). Un hangar à piliers en pierre se trouve au
nord. La cour est occupée en son centre par une tour-belvédère octogonale,
construite en 1870 (date portée sur le linteau de la porte). Cette tour est
en pierre pour l'essentiel mais se termine par des pans de bois. Elle est
ceinte d'une coursière en bois soutenue par des aisseliers, et sous laquelle
est placée une horloge, côté sud. Au nord, la coursière est interrompue par
une petite pièce en pans de bois. Au sommet, la flèche polygonale, à large
débordement et à égout retroussé, est surmontée d'un clocheton, sommé d'une
girouette. A l'intérieur, le sommet de la tour est accessible par un
escalier en vis en bois. Sur le côté est de la cour nord, un imposant
pigeonnier circulaire en pierre (XVIIe siècle) est construit sur une
surélévation en terre. Le pigeonnier a perdu son toit, qu soulignait une
corniche, et la partie supérieure de son mur côté sud. Un larmier,
partiellement dégradé, court tout autour du bâtiment, à mi-hauteur. La
porte, à l'ouest, est encadrée par des pilastres à chapiteaux ioniques qui
soutiennent une corniche et un fronton.
Le pigeonnier est percé dans sa partie supérieure (au-dessus du larmier) par
quatre petites ouvertures à fronton. A l'intérieur, le pigeonnier possède
quatre niveaux de boulins à pigeons, séparés par des larmiers. Chaque niveau
compte huit rangées de boulins. Un cinquième niveau semble tronqué. Près du
pigeonnier, un sentier descend le long du coteau en direction de la Sèvre
Niortaise et du moulin de la Tiffardière qui dépendait autrefois du château.
Un autre bâtiment se trouve dans l'angle nord-est de la cour nord. Il a
remplacé un bâtiment de plan en L visible sur le plan cadastral de 1832.
Probablement construit dans la seconde moitié du 19e siècle (comme la
tour-belvédère octogonale), il s'agit d'un important bâtiment dédié à
l'activité équestre, appelé "hôtel des cavaliers". Il présente un plan en T,
sous un toit en ardoise muni d'épis de faîtage et de demi-croupes que
soutiennent des aisseliers, sur les murs pignons ouest et est. Le mur pignon
sud, au-dessus de l'entrée principale, présente quant à lui une ferme de
charpente apparente. L'intérieur comprend plusieurs volumes autrefois
habitables. Le domaine de la Tiffardière comprend enfin au nord deux maisons
des années 1950-1960 (logements de fonction). A l'ouest, de l'autre côté de
la rue, se trouve une ancienne exploitation agricole (avec étable et/ou
écurie), probablement une des métairies qui étaient liées au château.
A l'intérieur du château chacune des quatre portes qui se trouvent dans le
vestibule au rez-de-chaussée, présente un riche décor sculpté en bois,
d'époque Restauration comme le logis, mais inspiré du XVIIIe siècle (à moins
qu'il ne s'agisse d'éléments de décor du XVIIIe siècle, conservés lors de la
reconstruction du château en 1819-1823). Les quatre portes sont encadrées
chacune par des pilastres, sous une suite de guirlandes de fleurs et de
rubans, une frise de volutes et une imposte décorée de médaillons
enrubannés, de corbeilles de fleurs et de branches de lauriers. Les portes
qui donnent sur les pièces à l'arrière sont entourées de miroirs, inspirés
de la galerie des Glaces de Versailles. Dans une des pièces situées à
l'arrière se trouve une cheminée à manteau et jambages en marbre gris, et à
hotte en bois. Des motifs de volutes et de chardons ornent le linteau. Le
trumeau de la hotte présente un miroir au-dessus duquel sont sculptés des
symboles de la chasse (un arc, un carquois, une torche), une palme et une
branche de laurier. La pièce située à gauche du vestibule, au
rez-de-chaussée du pavillon latéral nord, comprend des boiseries et une
imposante cheminée en bois. Celle-ci est ornée de guirlandes de fleurs, d'un
fronton à volutes brisé sur le manteau, et de deux paires de colonnes à
chapiteaux ioniques encadrant la hotte. Dans le foyer de la cheminée se
trouve une plaque de cheminée en fonte, aux armes du comte Charles-François
de Broglie (1719-1781), marquis de Ruffec, chevalier de l'ordre du
Saint-Esprit en 1757, et de son épouse, née Louise-Augustine de Montmorency.
Cette plaque de cheminée a été mise au jour en 1908 par le propriétaire
d'alors du domaine, Roger Lévesque. (1)
château de la Tiffardière 79000 Niort, abrite la maison départementale de
l'Enfance
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