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Le château de Brécourt est situé sur un plateau
s'étendant de la vallée de la Seine a celle de l'Eure, à peu près à
mi-chemin entre Vernon et Pacy. Ce château se compose d'un corps de bâtiment
flanqué de deux pavillons, s'alignant avec lui sur le parc, et formant, du
côté opposé, deux ailes encadrant une partie de la cour d'honneur. Aux deux
extrémités de la façade du parc, l'architecte a accroché deux tourelles
aériennes, de forme carrée, surmontées d'un toit aigu à quatre eaux. Le
rez-de-chaussée manque d'élévation, mais le premier étage, avec ses sept
grandes croisées, est d'une belle ordonnance, ainsi que le second, dont la
partie supérieure des fenêtres s'élève au-dessus du bas de la toiture, et se
transforme en lucarne. Bien que n'étant pas maison forte, le château de
Brécourt et sa cour d'honneur sont entourés de douves larges et profondes.
La grille d'entrée est placée sur le chemin allant de Douains à la Heunière.
Elle donne accès dans l'avant-cour, qu'un terre-plein relie à la cour
d'honneur. On ne sait à quelle époque ce château a été construit. Les fossés
qui l'enserrent permettraient de supposer qu'il remonte au temps de la
Ligue, époque pendant laquelle on avait besoin de se mettre en garde contre
les surprises que pouvaient tenter les partisans de l'une ou l'autre des
deux factions qui se disputaient la France. Brécourt (anciennement
Bréencourt et Braencourt) était une paroisse. Son église était placée sous
l'invocation de la Sainte-Vierge. Elle existe encore et sert de chapelle aux
châtelains, qui l'ont fait restaurer avec beaucoup de goût à la fin du XIXe
siècle. Elle se trouve à quelques mètres du château, dans le parc, où l'on
voit aussi l'ancien presbytère. Devant le choeur, à fleur des dalles, une
pierre tumulaire donne, tracée à la gouge, la représentation de deux
chevaliers. Le frottement des pieds a malheureusement effacé, en plusieurs
endroits, ce curieux dessin, ainsi que l'épitaphe latine qui se trouve au
bas et qui est illisible.
Un Geofroy de Brécourt, dans le XIIe siècle, signe, comme témoin, une charte
de Robert de Leycester. En 1205, Eudes et Jean de Brécourt déposent dans une
enquête sur les droits des usagers dans la foret de Merey. Nous pourrions
citer plusieurs autres seigneurs de Brécourt, mais il nous parait préférable
d'arriver à l'époque de l'invasion anglaise en Normandie. Brécourt fut alors
donné, avec d'autres fiefs, à Hervé Le Cornu, chevalier, qui devint Anglais.
Plus tard, Brécourt fut rendu à ses légitimes propriétaires, Simon Louvel,
puis à Charlot de Garennes, enfin à Jean Chartier, dit Limoges, écuyer,
vicomte d'Évreux, qui avait épousé la fille de Charlot de Garennes. En 1482,
le commandeur de Chanu présentait à la cure de Brécourt; mais vers 1531,
Jean Lecomte, possesseur de ce fief, voulut y nommer au préjudice dudit
commandeur. La même année, Henri Jubert achetait Brécourt, qui donna son nom
à une branche de cette maison. Ce seigneur possédait une grande fortune.
Nous serions assez disposé à croire que c'est lui qui fit construire le
château. Vers 1540, Michel Jubert, son fils, lui succéda. Il présenta à la
cure de Brécourt, concurremment avec Nicolas Fouquesoles, prieur de Chanu.
Puis, à la mort de Michel, Brécourt passa à son frère, Henri Jubert II, qui
fut père de Jean. Chailly appartenait aussi aux deux frères. Vers 1652, Anne
Jubert remplaça Jean, son père. Un président à la Cour des Aides de Rouen,
Alphonse Jubert, seigneur de Bouville, de la branche aînée de sa famille,
possédait la terre de Brécourt vers la fin du XVIIe siècle. Sa veuve,
Madeleine Legrand, mourut en 1706, laissant Brécourt au marquis François de
Mousseaux-d'Axy.
Le fief de Brécourt, après avoir appartenu à Claude Daniel, seigneur de Bois
d'Ennemets, fut racheté par la famille de Bouville. En 1764, Nicolas-Louis
Jubert de Bouville obtint l'érection de Brécourt en marquisat, sous le nom
de Bouville; mais, comme en 1708, Jubert, marquis de Bisy, avait vendu la
terre de Bouville au sieur Grossin, conseiller au Parlement, celui-ci, qui
se faisait appeler M. de Bouville, attaqua cette érection et parvint à faire
admettre son opposition. Le 14 juillet 1793, un semblant de combat eut lieu,
sur le territoire de Brécourt, entre les confédérés de l'Ouest et l'armée
conventionnelle. Les confédérés s'étaient réunis à Caen, sous le
commandement en chef de Wimpffen, ancien député de la noblesse. Cette armée
se composait d'environ deux cents volontaires fournis par la ville de Caen;
de deux bataillons bien équipés et connaissant le maniement des armes, venus
du département d'llle-et-Vilaine; d'un petit corps des dragons de la Manche;
d'un autre corps, peu nombreux, de chasseurs à cheval, et de six petits
canons servis par des artilleurs inexpérimentés. De son côté, la Convention,
informée de tous les mouvements des confédérés, fit marcher sur Vernon un
corps de troupes d'environ deux mille hommes. C'était à peu près le chiffre
de l'armée que les conventionnels avaient à combattre. Il y avait dans ce
corps des volontaires de la garde des canonnıers de l'Yonne, et un peloton
de nationale parisienne, des grenadiers de la Dordogne, des canonniers de
l'Yonne, et un peloton de hussards de la liberté. Le chef de brigade Humbert
commandait ces troupes.
Les 11 et 12 juillet, les confédérés occupaient Pacy-sur-Eure, et les
conventionnels, Vernon. Ils firent des reconnaissances autour de ces villes
et répandirent, les uns des exemplaires de la Constitution, les autres la
proclamation de Wimpffen. Ce dernier, craignant sans doute de trop engager
sa personne, ne voulut pas "marcher vers Paris, pour Paris, et non pas
contre Paris". Il donna le commandement de son armée à Joseph Puisaye,
ancien député de la noblesse à la Constituante, royaliste militant qu'on
croyait propre à diriger un corps de partisans. Le 13 juillet, entre trois
et quatre heures de l'apres-midi, Puisaye et ses troupes marchèrent sur
Vernon. Arrivés à Brécourt, ils s'emparèrent du château où ils ne trouvèrent
que le concierge et sa femme. On fit halte. Il était six heures du soir. La
soif tourmentait les hommes. Ils vidèrent les caves du château et les
celliers des villages voisins. Il fallait passer la nuit à Brécourt. Puisaye
se rendit à Ménilles, à environ trois kilomètres de là, dans un château
appartenant à sa femme. "Vers le soir, au moment où commence le long
crépuscule de juillet, l'armée parisienne arrivait sur la lisière de la
forêt de Bizy. Une reconnaissance, exécutée par un peloton de hussards
rouges, renseigna Humbert sur la position de ses ennemis, et il fit avancer
son artillerie. L'apparition des hussards avec leur éclatant uniforme avait
jeté l'alarme dans le camp des calvadosiens. Parmi les soldats, quelques-uns
étaient ivres, d'autres, couchés dans les grands blés, étaient déjà à moitié
endormis. Le cri de aux armes! se fait entendre; mais un affreux tumulte se
produit. On appelle le général de tous côtés, et le général ne parait pas.
Pourtant, Leroy, avocat de Bayeux, qui avait dans l'armée le titre de
colonel, ayant pris le commandement, quelques rangs commencent à se former,
lorsque trois coups de canon éclatent et un boulet vient briser, au-dessus
de la tête des insurgés, les branches d'un pommier. C'en fut assez pour
décider du sort de la campagne". Infanterie, cavalerie, artillerie, toute
l'armée prit la fuite, et, chose incompréhensible, les conventionnels, au
lieu de la poursuivre, s'enfuirent précipitamment et rétrogradèrent jusqu'à
Mantes. Cette affaire est connue sous le nom de déroute de Brecourt, et
aussi de bataille sans larmes; Il n'y eut pas de blessés; seuls, les caves
du château et les celliers de Douains et de la Heunière, eurent à souffrir
en cette occasion. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château et des
communs, l'avant-cour (y compris le pont d'accès et ses douves) et la cour
d'honneur, les douves entourant le château : inscription par arrêté du 28
juin 1967 (2)
château de Brécourt, route de Vernon, 27120 Douains, tél.
02 32 52 40 50, authentique château hôtel 4 étoiles, proche des Jardins de
Claude Monet à Giverny.
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