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Le château de
Mussegros, dont le nom s'écrivait primitivement Mucegros, existait au XIe
siècle. La prononciation normande de Muchegros a donné naissance à une
tradition locale, suivant laquelle Louis le Gros, après le combat de Bremule,
le 20 août 1119, se serait caché ou muché dans les bois environnants, avant
d'atteindre les Andelys. Muchegros aurait eu ainsi pour origine un incident
relatif à la défaite du roi de France. En réalité, le nom de Mussegros, dont
l'étymologie est incertaine, est bien antérieur à l'événement dont il vient
d'être parlé. Un Roger de Musegros figure comme témoin dans une charte de
Guillaume le Conquérant de 1050, et c'est sans doute le même personnage qui
prit part, en 1066, à la bataille d'Hastings et dont le nom est écrit
Mucegros, en 1086, dans le Doomsday book, comme tenant un fief en
Angleterre. Une branche de sa famille y a même subsisté pendant plusieurs
siècles, d'après le Monasticon Anglicanum. Mussegros, réuni depuis 1834 à
Ecouis, était une ancienne paroisse du Vexin normand, placée sous
l'invocation de la Sainte-Vierge et de saint Prix, évêque de Clermont, en
Auvergne. Le pays a été occupé à l'époque gallo-romaine ou tout au moins fut
le lieu de passage de légions au temps de Gallien. On a trouvé, en effet,
vers 1879, dans les bois du Fay, près des murs du parc actuel, un vase
contenant une quantité considérable de monnaies, dont le plus grand nombre
était à l'effigie de Gallien, sans doute le trésor d'une légion, enfoui à la
suite de quelque défaite.
Le château et le fief de Mussegros ont successivement appartenu, en 1170 et
1180, à Mathieu de Mucegros ou Muchegros; à Jean, en 1210; à Robert, en
1232, et, en 1252, à un autre Jean, alors écuyer, qui eut avec l'archevêque
de Rouen, Eudes Rigaud, des démêlés, consignés par lui dans le Registre de
ses visites pastorales, en janvier 1252. Plus tard, Jean de Mussegros,
devenu chevalier, se réconcilia avec Eudes Rigaud et se reconnut son vassal,
malgré les réclamations du seigneur de Quitri, qui prétendait que son fief
relevait de lui. Mussegros passa ensuite à la famille de Sacquenville.
Pierre de Sacquenville, en 1370, et après lui ses descendants, Guillaume et
Jean, en furent propriétaires. Lors de l'occupation anglaise, le château
appartenait à Marguerite de Calleville, à laquelle on l'enleva pour le
donner à l'Anglais Guillaume Barton; mais, après l'expulsion des Anglais, il
revint à Jean de Calleville, puis à Jeanne, sa fille mariée à Robert Biotte
conseiller à l'Echiquier de Normandie. Jeanne de Calleville mourut sans
enfants, le 11 octobre 1467, laissant sa succession à sa nièce, Louise de
Longchamps. Cette dernière, devenue veuve de Jean Tiercelin, seigneur de
Brosse, épousa Louis Chauvin, chevalier, sieur de Birac, dont elle eut une
fille, Renée, mariée le 15 novembre 1509 à Pierre de Canouville, seigneur de
Raffetot. A la fin du XVIe siècle, le fief et le château étaient entrés dans
la maison de Gondy. Albert de Gondy, fils d'Antoine, qui avait accompagné
Catherine de Médicis en France et s'y était fait naturaliser, épousa, en
1565, Claude-Catherine de Clermont, baronne de Retz, veuve de Jean d'Annebaud,
tué en 1562 à la bataille de Dreux.
Ce fut par ce mariage qu'il devint propriétaire de la première portion de la
baronnie d'Ecouis, séparée de la seconde, depuis le partage des héritiers
d'Enguerrand de Marigny, et probablement du domaine de Mussegros. Dans tous
les cas, il résulte d'anciens documents originaux que "messire Albert de
Gondy, chevalier des ordres du Roy, conseiller de Sa Majesté en ses conseils
d'État et privé, pair de France, premier maréchal et général des galères de
France, duc de Retz, etc., et dame Claude-Catherine de Clermont, son
épouse", étaient propriétaires des fief et seigneurie de Mussegros. Lors du
mariage de leur fille, Françoise de Gondy, avec Lancellot dit Groignet de
Vassé, chevalier des ordres du roi, baron de Vassé, etc., ils avaient par
contrat promis de leur donner diverses terres et valeurs, mais ils moururent
avant la réalisation de leur promesse. Leur fils Charles étant également
décédé, ce fut leur petit-fils et principal héritier, Henry de Gondy, duc de
Retz et de Beaupréau, pair de France, etc., qui remplit leurs engagements.
La baronne de Vassé reçut de lui, le 1er avril 1617, entre autres
propriétés, la seigneurie de Mussegros pour 6000 livres. Le château actuel
fut probablement édifié vers cette époque. Sa construction en briques et
pierres, ses toits couverts en ardoise, son architecture et son style, à
défaut de date certaine, annoncent le temps de Louis XIII. Il a peu de
profondeur, mais se développe en façade sur une assez grande étendue et se
compose d'un pavillon central avec deux grands corps de logis à droite et à
gauche, terminés par deux pavillons. Le grand salon du milieu est
remarquable par son dôme et ses tableaux. Des peintures de l'époque de Louis
XIV, dans un salon du rez-de-chaussée, méritent aussi d'attirer l'attention,
ainsi qu'un curieux plan colorié sur toile représentant à vol d'oiseau le
château, le parc, et les paroisses voisines.
Au milieu de ses séculaires avenues de magnifiques tilleuls, ce château a
conservé l'aspect des vieilles demeures seigneuriales. On assure que saint
Vincent de Paul a reçu de la famille de Gondy l'hospitalité à Mussegros, ce
qui n'a rien d'étonnant, puisqu'il était devenu, en 1613, le précepteur des
enfants de Philippe-Emmanuel de Gondy, troisième fils d'Albert, et que le
chef de la famille, comme co-patron de la collégiale d Ecouis, l'en avait
fait nommer l'un des chanoines et même le trésorier. Maître Vincent de Paoul
ou Paul, comme on l'appelait alors, avait pris possession de sa charge par
procuration, en 1615, mais le marquis de Roncherolles, autre patron d'Écouis,
voulut faire respecter les règlements du chapitre, auquel il se plaignit de
ce que les sieurs Desmay, doyen (l'un des grands vicaires de l'archevêché de
Rouen), Paoul, trésorier, et Blondel, chanoine, ne résidaient pas. A la
suite d'une décision du chapitre, Vincent de Paoul se présenta en personne
le 16 septembre 1616, prêta serment de fidélité, s'engagea à remplir les
devoirs de sa charge et invita la Compagnie à dîner, suivant la coutume. De
la famille de Vassé, Mussegros passa en août 1661, par échange, dans celle
de Charles Paviot, procureur général à la Chambre des Comptes de Rouen, dont
le fils, conseiller au Parlement de Rouen, lui succéda comme procureur
général, en 1716, et mourut en 1723, et dont le petit-fils, devenu seigneur
patron de Mussegros, maria sa fille et unique héritière, le 9 mars 1732, à
Nicolas de Frémont d'Auneuil, président aux enquêtes du Parlement de Paris.
La famille d'Auneuil conserva Mussegros jusqu'en 1830, époque où ce domaine
fut acquis par M. Bouctot, de Rouen. Le mariage de Mademoiselle Bouctot avec
le comte Matheus fit entrer Mussegros dans cette dernière famille, qui le
possédait à la fin du XIXe siècle. C'est à M. Matheus qu'est due la
restauration du château. (1)
château du Mussegros 27440 Écouis, propriété
privée. Le parc se visite aux Journées du
Patrimoine. Dans le parc, aux belles allées
de tilleuls, on peut voir quatre socles de statues, celles-ci évoquaient les
quatre éléments: l'eau, la terre, l'air et le feu. Elles furent vendues par
un marchand de biens au Métropolitan Muséum de New-York où elles sont encore
visibles...
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