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Château de Chambray à Gouville
 
 

  Le domaine de Chambray, dans un des sites les plus ravissants de la belle vallée de l'Iton, appartient depuis le XIe siècle à l'illustre famille qui porte ce nom et que l'on peut compter parmi les plus célèbres de la Normandie. La maison de Chambray est issue des anciens barons de la Ferté-Fresnel, par Simon, seigneur de Chambray, second fils de Richard II, baron de la Ferté-Fresnel et d'Emmeline de l'Aigle, des anciens seigneurs de l'Aigle, fondus dans les ducs de Bretagne. Les descendants de Simon de Chambray sont les représentants directs des la Ferté-Fresnel, dont la branche aînée est éteinte depuis longtemps. Le château actuel s'élève sur l'emplacement de deux autres qui l'ont précédé, et dont les vestiges lui procurent un aspect grandiose et l'enrichissent de souvenirs glorieux. Le premier château, dont il ne reste que quelques débris, occupait une partie de la ferme voisine. Il fut sans doute construit par Amaury, seigneur de Chambray, qui accompagna à la croisade de 1096 Robert, duc de Normandie. Amaury s'attacha ensuite au roi Richard, qui lui donna la charge de grand officier. Plus tard, il se révolta contre Henri II et fut assiégé dans son château de la Ferté-Fresnel. Le repentir qu'il ressentit de sa rébellion le fit entrer dans un monastère pour y finir ses jours. Simon de Chambray voulut relever de ses ruines le château de son aïeul et protéger son domaine contre les attaques incessantes des seigneurs, ses rivaux. Il l'établit sur un bon pied de défense. C'était, comme on a tout lieu de le croire, un long parallélogramme, flanqué, à ses angles, de quatre grandes tours qui devaient le protéger, et qui lui donnaient un caractère tout particulier de grandeur et de noblesse. Deux de ces tours subsistent encore, comme un témoin des siècles passés.

La grande porte d'enceinte est également toujours debout; mais ce qui charme pardessus tout le touriste et l'archéologue, c'est cette gracieuse chapelle du XIIIe siècle, en si bon état de conservation, que Simon de Chambray et sa femme Eustache de Lombelon des Essarts firent bâtir en l'honneur de saint Laurent et qui fut dédiée en 1239. Dès la même année, Simon de Chambray aumôna aux moines du Désert le patronage de cette chapelle. Une charte signée de lui pour l'abbaye de Lyre et scellée de son sceau représentait une croix de Jérusalem. Peut-être, à l'exemple d'Amaury de Chambray, fit-il à son tour partie de la croisade de 1228 ? Notre notice deviendrait un volume, si nous voulions raconter toutes les gloires de cette illustre famille. Il en est toutefois qui, d'un intérêt plus local, ne peuvent être passées sous silence. Après avoir cité l'abbé Le Brasseur, qui dit, en parlant de cette famille, que "c'est une des plus illustres et des plus anciennes maisons de Normandie, alliée avec la première noblesse du royaume, distinguée par sa piété et par les hautes charges qu'elle a occupées dans l'Église, à la Cour et dans l'État" je me contenterai de signaler, dans l'ordre chronologique, quelques uns de ses membres les plus connus. Robert de Chambray, fils de Roger, était abbé de l'abbaye royale de Saint-Etienne de Caen. Ses vertus et ses talents lui ont valu la faveur du pape Clément VII, qui lui octroya, en 1383, le droit de porter la mitre et la crosse et de se servir d'habits pontificaux, avec la transmission de ces prérogatives à tous les abbés ses successeurs. Son frère, François de Chambray, après le siège d'Évreux, fut fait bailli et capitaine de cette ville par le roi Charles V, en 1379.

Au commencement de l'invasion anglaise, les Chambray restèrent fidèles à Charles VII et furent dépouillés de leurs biens. Le château de Chambray fut donné par lettres patentes de 1430 à Guillaume Staverton, favori de Henri V, qui le garda jusqu'en 1449. Le comte de Dunois le reprit après un siège de huit jours. Ceux dont les ancêtres ont partagé la mission et les épreuves de la Pucelle d'Orléans sont en droit de se glorifier aujourd'hui des hommages qu'on lui rend et de ceux qu'on lui prépare. Jeanne d'Arc n'a-t-elle pas toujours voulu que ses compagnons d'armes qui avaient été à la peine soient aussi à l'honneur. Le roi Louis XII, qui avait grand souci du bonheur de son peuple, confia la charge de bailli d'Évreux à Jacques de Chambray, son chambellan, dont il avait su apprécier les éminentes qualités. C'était un grand ami de l'évêque Raoul du Fou, qui vint de Condé, sa maison de campagne, au château de Chambray qui en est tout voisin, pour le féliciter sur sa nouvelle dignité. Jacques de Chambray, étant tombé malade à Magny, y fit son testament qui peut passer pour un modèle de sagesse, de simplicité et de douce piété (l'original de ce testament se trouve tout entier aux archives du château de Chambray). Il mourut peu de temps après, le 4 mars 1504, et fut enterré, selon son désir, dans l'église de Thevray.  Plus tard, en 1532, une chapelle fut bâtie à côté du chœur de l'église, en l'honneur de saint Jacques, son patron, et son corps y fut déposé sous un mausolée fort remarquable. Quelques monastères furent remis entre les mains des membres de cette maison. Oger de Chambray, entre autres, fut abbé de Cormeilles et prieur de Beaumont-le-Roger. Il vivait vers 1557.

Gabriel de Chambray, fils de Nicolas, fut député de la noblesse du bailliage d'Évreux aux États de Blois; il était, en 1578, gentilhomme de la chambre de Henri III et panetier du roi en 1580. Henri IV, étant parvenu à la couronne et ayant apprécié sa valeur à la bataille d'Ivry, lui confia, en 1590, une compagnie de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances; il lui donna un commandement à Condé pendant la Ligue, et lui ordonna de négocier la reddition des ville et château de Dreux. C'est lui qui commença à édifier le château actuel sur les fondements de l'ancien. Son fils, Tanneguy, en fit une demeure somptueuse et dans les goûts de l'époque. Il était chevalier de l'ordre du roi, maréchal de camp et gouverneur de Pont-de-l'Arche. Ayant consacré une grande partie de ses biens au service du roi et au luxe de sa maison il fut obligé de vendre sa terre de Chambray, et reçut au château de Condé l'hospitalité de l'évêque d'É vreux, François de Péricard, dont il avait épousé la nièce. Parmi les membres de la famille de Chambray, il en est qui surent unir la science à la bravoure et se faire un nom dans les lettres. Nicolas-François, marquis de Chambray, né au château de ce nom en 1672, fut colonel d'un régiment d'infanterie qu'il leva à ses frais pour le service du roi. On a de lui un ouvrage intitulé: Fruits de la solitude, qui a été imprimé en 1839. Georges, marquis de Chambray, né le 24 octobre 1783, maréchal de camp d'artillerie, officier de la Légion d'honneur, auteur de l'Histoire de l'Expédition de Russie, de plusieurs ouvrages d'art, militaire et d'un traité des arbres résineux.

Son fils, propriétaire du domaine de Chambray à la fin du XIXe siècle, y poursuit dignement la noble tradition de ses ancêtres. Le marquis Jacques de Chambray, conseiller général de l'Eure pour le canton de Damville, fait gracieusement les honneurs de son château, où il possède une remarquable bibliothèque, composée de nombreux ouvrages et de précieux manuscrits. Par son mariage avec une noble descendante de l'illustre famille des Le Veneur de Carrouges et de Tillières, il entretient les plus belles relations sociales, dont il use volontiers pour rendre service à ceux qui réclament sa protection ou qui attendent son appui. Dans cette course si pleine d'intérêt et même d'attrait, au milieu d'un pays si riche en sites merveilleux et en constructions monumentales et pittoresques, on se plaît à admirer non seulement l'œuvre de la nature et de l'art, mais aussi les œuvres des hommes qui nous ont légué un passé glorieux (1). Entre 1810 et 1825, Jacques de Chambray fait bâtir la ferme du château, le pressoir et les fermes d’Aigremont en 1821, du Cormier en 1825 et le moulin de Varenne en 1825. Entre 1870 et 1885, Jacques de Chambray dit le Grand Veneur fait édifier la tour circulaire Nord-Est, le pavillon d’angle Nord-Ouest et les pavillons d’angle encadrant la façade sud qu’il fait orner de hautes lucarnes à meneaux en 1835. La mort du dernier héritier mâle de cette lignée des de Chambray va bouleverser la destinée du château, les parents en hommage à leur fils céderont le domaine à l'état français en 1944. La mort du dernier héritier mâle de cette lignée des de Chambray va bouleverser la destinée du château, les parents en hommage à leur fils céderont le domaine à l'état français en 1944. (1)

Éléments protégés MH: l'allée de tilleuls : classement par arrêté du 20 août 1941. Les façades et les toitures du château, de la chapelle, de la poterne, des trois tours de l'ancienne enceinte et de la chartreuse située dans le parc : classement par arrêté du 15 décembre 1972. (2)

château de Chambray 27240 Gouville, lycée agricole, visite libre des extérieurs du domaine toute l'année, de 9h à 18h. Visite guidée des intérieurs du château selon calendrier.

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Crédit photos : Trisnap sous licence Creative Commons
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château de Chambray 27240 Gouville  château de Chambray 27240 Gouville château de Chambray 27240 Gouville 
 
 
 


(1)
    source: La Normandie Monumentale et Pittoresque, (Eure) Lemale & Cie. Imprimeurs, Éduteurs, achevé d'imprimer le 25 septembre 1897.
(2)    source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

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(IMH) = château inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, (MH) = château classé Monument Historique
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