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Proche
de l'aqueduc romain du Pont-dû-Gard, le domaine de Saint-Privat recèle des
vestiges d'un habitat antique; c'était, en 1121, une "villa" où se fonda une
abbaye "Sancti Privati" dont une petite crypte, sous le sol de la cour
actuelle, rappelle probablement le souvenir, plus tard, ce fut un simple
prieuré, uni au Chapitre Collégial Saint-Didier d'Avignon (la chapelle
actuelle est entièrement moderne). Si la base d'une tour (dite tour de
guet), précisément située au-dessus de la crypte, présentant des bossages
caractéristiques de la fin du XIIe siècle, témoigne de l'édification, dès
cette époque, d'ouvrages défensifs, par contre la documentation écrite na
fait pas mention du château avant 1376, date à laquelle Delphine, fille de
Bertrand de la Roche, épousa Auzias, vicomte d'Alès, lui apportant
Saint-Privat en dot. Issu d'une famille originaire d'Italie, Jacques Faret
était seigneur de Saint-Privat en 1452. Lui succédèrent Pierre Faret en 1476
et Jacques II en 1532. Un frère de ce dernier, Honorât, fut un propagateur
de la Réforme. En 1578, Pierre II de Faret épouse une riche héritière,
Jeanne de Contour, fille d'un trésorier général de France, et transforme le
château en une somptueuse résidence. D'autres additions sont apportées aux
bâtiments par la suite, des jardins sont aménagés et la porte du jardin des
fleurs construite vers 1644. De grands travaux, sur lesquels on ne possède
aucun détail, étaient en cours en 1721, se rapportant peut-être au corps de
logis septentrional et à sa façade sur le parc. A Thomas Calderon, qui avait
acheté le château en 1865, succéda M. Rouché, directeur de l'Opéra, qui fit
procéder à d'importantes restaurations, fit bâtir l'aile orientale,
exhausser d'un étage le bâtiment nord, compléter le jardin des fleurs par
une orangerie, aménager le parc et son bassin et de plus, dota le château de
très beaux meubles anciens. La propriétaire actuelle, Madame André, est la
fille de M. Rouché. Parmi les événements marquants liés à l'histoire du
château, il convient de mentionner la visite de Charles IX et de Catherine
de Médicis, le 12 décembre 1564, les réunions des nouveaux réformés vers
1565, dans la salle dite "des Prophètes", la soumission de Rohan au
connétable de Lesdiguières en 1622, la signature par Richelieu de la paix
avec les protestants le 7 juillet L529. De la rive droite du Gardon, il
suffit de dépasser d'un kilomètre le Pont-du-Gard vers l'amont pour,
franchie une grille, trouver un chemin qui bientôt bifurque à droite vers la
Ferme, à gauche vers le Château. Cette séparation, qu'aujourd'hui rend
illusoire un chemin de traverse, devait se matérialiser jadis par une
enceinte fortifiée et des douves, que la création de jardins en terrasses a
abolies. Devant l'entrée du château, au sud de ce dernier, à gauche d'une
esplanade ombragée, la chapelle Saint-Vérédème rappellerait la dédicace de
l'ancienne église disparue, mais cette chapelle est entièrement moderne. En
pénétrant dans la cour, on laisse à gauche une construction de plan
triangulaire, abritant des communs dont la forme singulière est peut-être
due à la conservation de soubassements anciens, vestiges de la chemise
fortifiée. A droite, c'est une tour isolée, dite "tour de guet". L'étage
supérieur de cette tour barlongue est muni d'une série de corbeaux
quadruples supportant des arcatures. Au-dessus de ces mâchicoulis, les murs
du chemin de ronde sont percés de petites ouvertures à mousquets ou
arquebuses. Au pied de la façade sud-ouest, une partie en saillie présente
des parements à bossages rectangulaires. Le reste de la construction est
visiblement plaqué contre cette partie ancienne. Près de la base d'un
bâtiment adjacent a été scellé un autel, d'époque gallo-romaine. La salle
basse de la tour est voûtée d'un berceau brisé, d'axe nord-ouest sud-est. A
sept mètres au nord, se trouve la courte façade d'une aile (bâtie du temps
de M. Rouché) destinée à l'habitation et limitant la cour à l'est. Au pied
de cette façade se trouve un autre autel ou cippe. Pour prendre
connaissance de la façade orientale de cette aile, il convient de revenir en
arrière, de ressortir de la cour et de s'engager, en contre-bas, sur le
chemin de la ferme. Ce chemin est bordé par un mur de soutènement avec des
arcades successives, d'âges divers, murées pour la plupart. Au-dessus de ce
mur on voit l'ensemble des façades Est, lesquelles englobent une ancienne
tour carrée, dont les encorbellements sont restés dégagés. Comme à la tour
de guet, ce sont des corbeaux quadruples (mais aux listels très peu
saillants) supportant de petits arcs à mâchicoulis; au-dessus, le mur du
chemin de ronde est fendu de longues archères à étriers médians; l'arasement
des parties supérieures des merlons a fait disparaître le haut de ces
archères. Revenant à la cour intérieure, l'aile Est se trouve séparée par un
passage de 6m,20 des bâtiments formant le corps central, que l'on aborde par
une autre tour carrée, dite "donjon". Posée de biais par rapport aux
bâtiments adjacents, cette tour présente une base fortement talutée et
mesure cinq mètres de côté, les encorbellements de son couronnement sont
composés de corbeaux quadruples, sur lesquels les petits arcs des
mâchicoulis ne reposent pas directement, mais par l'intermédiaire d'une
pierre taillée en forme d'imposte, biseautée latéralement. L'étage situé
au-dessous a été aménagé en pigeonnier. A la base de cette tour, du côté
Est, un arc en forme d'enfeu abrite une coquille. Un peu plus haut, la
façade est percée d'une fenêtre étroite, encadrée de pilastres nus à
chapiteaux ioniques ornés d'oves, architrave et frise bombée supportant un
fronton triangulaire. A droite, s'élèvent des bâtiments disparates, mais
anciens, dont les murs de retour, face au sud et à l'est, supportent une
guette d'angle, dont ne subsistent que les encadrements, quadruples
également, supportant deux arcs; ce petit ouvrage se trouve à peu près de
niveau avec la fenêtre à fronton, c'est-à-dire à mi-hauteur de la tour. Les
autres façades méridionales sur cour n'offrant que peu d'intérêt, en raison
des remaniements subis. Le passage découvert situé entre le corps central et
l'aile Est, là près de l'angle avec le bâtiment transversal, on découvre une
magnifique porte d'entrée à bossages, accostée d'une fenêtre identiquement
décorée. Ces ouvertures ne sont pas de plain-pied, soit que le niveau de la
cour eût été abaissé. Actuellement, la porte n'est pas inaccessible, mais on
n'y parvient que par un étroit escalier, débouchant sur une minuscule
galerie. Le fronton circulaire rompu, au-dessus de la porte, encadre un
petit tabernacle à fronton arrondi; le blason qui en occupait le centre a
disparu. Sur la même façade, les étages supérieurs possédaient aussi des
fenêtres décorées, l'une visible, quoique murée, au premier étage et, au
deuxième étage, une autre bien conservée, les pilastres d'encadrements
bagués et décorés de feuillages découpés rappelant encore le flamboyant,
d'entrelacs géométriques, de volutes, les chapiteaux ioniques dont le
gorgerin et l'échine sont ornés d'oves, le balustre cannelé. Au-dessus, la
haute frise, divisée en compartiments par des diglyphes, présente rosaces et
feuillages; l'allège elle-même chargée d'entrelacs, entre deux consoles
d'acanthe soulignées de gouttes. Sur cette façade, il faut signaler la mitre
de cheminée, en pierre, s'élevant un peu en arrière, coiffure conique sur un
cylindre ajouré de six arcs. Les mutilations résultant des constructions
plus récentes, ne se sont pas bornées à l'extérieur; au-dedans aussi,
derrière la grande porte à bossages, on constate que des murs et cloisons
ont "mangé" ce qui correspondait au piédroit nord; toutefois, face à cette
entrée délaissée, ont été conservées deux travées d'un passage voûté sous
coupoles, dont les arcs doubleaux présentent aussi des bossages en trémie.
Autres témoins du même style, mais moins sûrs parce que dans une partie très
habilement restaurée, des arcs à bossages divisent en compartiments voûtés
d'arêtes un couloir perpendiculaire au précédant, situé face à l'entrée
actuelle sud et donnant accès au grand escalier. Même si ces arcs sont
d'époque, ceux de l'escalier ne le sont certainement pas, étant hors
d'échelle, d'autant plus que ce bel escalier sur arcs et piliers a été
exécuté dans le style encastré et muni d'une agréable, mais récente,
ferronnerie. S'il subsistait quelques doutes, ils disparaîtraient à l'étage
supérieur, ou l'on retrouve une volée ancienne, étroite, construite sous
berceau rampant appareillé, débouchant sous les mêmes arcs à bossages,
demeurés de proportions normales. Bien qu'il ne reste que quelques témoins :
une grande porte, une croisée, quelques fenêtres, des arcs et une volée
rampante d'escalier, de ce style homogène, la beauté de ces éléments épars
permet d'imaginer ce que devait être la résidence seigneuriale que fit
construire l'opulent Pierre II de Faret dans les dernières années du XVIe
siècle, car l'aspect de la façade orientale se restitue assez aisément dans
son ensemble, grâce aux traces laissées par les baies murées, l'étage de
base séparé du premier étage par un double bandeau continu, très larege, des
fenêtres très décorées quoique étroites, un décor intérieur parfaitement
adapté. Mais il reste au sud très peu de traces de cette campagne, aucune au
nord où tout a été repris plus tard, rien de visible du dehors à l'ouest,
mais peut-être de ce côté la résidence s'appuyait-elle contre le mur
fortifié très épais, existant là depuis le moyen âge. Après avoir
constaté les oblitérations apportées par le bâtiment transversal, il faut
remarquer que cette construction du XVIIIe siècle présente d'agréables
proportions et complète, heureusement, au moins du côté des jardins,
l'ensemble des façades nord. C'est de ce côté en effet que s'est porté tout
l'effort de cette importante campagne, ayant abouti à créer, à côté d'un
parc boisé, un grand jardin fleuri en contre-bas, le parc au-devant de la
façade principale, le jardin devant l'aile latérale de hauteur moindre. On
peut accéder directement au jardin du bas en partant de la cour et
descendant un degré en arc de cercle, pour traverser le bâtiment par un
passage voûté d'arêtes. C'est tout au fond de ce jardin que M. Rouché a fait
construire une orangerie. Le bâtiment latéral, de même que la façade
principale sont délimités verticalement par des chaînes à refends, percés de
hautes fenêtres, les niveaux soulignés par des bandeaux. L'étage supérieur
de la grande façade, établi en retraite, aurait été ajouté assez récemment,
dit-on, quoique rien dans l'aspect et la patine de la pierre ne montre une
différence. L'angle nord-ouest est calé contre une tour carrée, dont les
superstructures et les créneaux sont manifestement modernes, aucun indice
visible ne permettant de présumer de l'ancienneté des bases, ancienneté
possible, en raison de la situation de la tour. Située à 300 mètres au nord
du château et accessible par le chemin, la ferme enserre une longue cour
étroite entre deux bâtiments que relie une construction transversale, à
usage de grenier à fourrage. Dans l'angle nord-est, s'élève une tour carrée
couronnée de merlons d'âge incertain. Les étages sont éclairés par des
fenêtres simples, chacune divisée en deux par un meneau vertical sans décor.
Éléments protégés MH : le château, à l'exception des pièces classées ; la
tour isolée ; la cour d'honneur avec son sous-sol et l'aile est en
contrebas, dite des caves : inscription par arrêté du 1er septembre 1992.
Dans le château, les trois pièces décorées de boiseries du XVIIIe siècle :
le salon des échos, la salle des Gardes ouvrant sur la façade nord, le salon
de la Paix (ou salon des quatre cheminées) ; la chapelle avec son décor ;
l'enclos muré situé derrière la chapelle ; l'avant-parc avec les douves ; le
parc ou terrasse haute avec les douves, les murs de soutènement ainsi que le
bassin et l'ensemble de la statuaire ; le jardin ou terrasse basse avec sa
porte d'entrée dite porte des fleurs, les murs de soutènement, la statuaire
ainsi que l'orangerie et le nymphée ; le moulin et son bief ; la ferme
fortifiée ; l'ancienne magnanerie accolée à un bâtiment de logements dit
l'ancienne métairie et la serre située face au potager, ainsi que le potager
; la glacière ; le sol de l'ensemble des parcelles du domaine : classement
par arrêté du 17 février 1995.
château de Saint
Privat 30210 Vers-Pont-du-Gard, propriété privée, visite des extérieurs
uniquement.
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