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Château de Tauzia à Maignaut-Tauzia
 
 

  De tous les châteaux gascons, anglais ou français, dont les antiques ruines se pressent encore, les unes contre les autres, le long de la frontière de l'Armagnac et du Condomois, et qui tous furent construits dans les dernières années du XIIIe siècle, un des plus remarquables, aussi bien par sa pureté de style que par son état à peu près parfait de conservation, est à coup sûr le château du Tauzia, sis dans la commune de Maignaut, arrondissement de Condom (Gers). Il est évident qu'en attribuant l'Agenais, et par suite le Condomois qui en faisait partie, à la couronne d'Angleterre, le traité d'Amiens de 1279 établissait une limite nouvelle entre les possessions récentes du roi Edouard et celles du comté d'Armagnac, resté terre française, La conséquence immédiate de cet état de choses fut l'obligation imposée aux deux partis, qui forcément, plus tard, devaient en venir aux mains, de fortifier chaque point faible de celte ligne de démarcation et, par suite, d'élever sur ses bords toute une série de postes d'observation chargés de sur veiller l'ennemi. A peine le traité eut-il été signé que ces principes de tactique militaire furent aussitôt mis à exécution, et que des deux côtés de la frontière s'élevèrent ces constructions toutes d'une pièce. Sis sur un petit tertre élevé, au milieu du versant méridional du coteau d'Augé, le château de Tauzia regarde le midi et l'ouest, c'est-à-dire la frontière française et les possessions du comte d'Armagnac. Dès lors, il est de toute évidence que s'il avait appartenu à ce dernier, jamais ce prince n'aurait songé à l'édifier ainsi en contre-bas, dans une position aussi défavorable, alors que pour observer l'ennemi, c'est-à-dire le parti anglais, maître de Condom, sa position stratégique était tout indiquée sur le sommet du coteau d'Augé ou des coteaux voisins. Si donc son assiette a été ainsi établie, c'est qu'il était destiné à guetter les compagnies gasconnes qui se trouvaient renfermées tout autour de lui, à l'est, dans le château de Maignaut, au sud, derrière les rem parts crénelés de la nouvelle bastide de Valence, et, plus loin, dans la tour imprenable du Guardès, à l'ouest enfin, sinon dans l'abbaye fortifiée de Flaran, du moins dans l'antique château de Flarambel qui la domine, et, plus haut, dans le château-fort de Massencôme, un des postes les plus redoutables et les plus fidèles du parti national.
Jamais poste avancé ne fut plus habilement choisi. Le château de Tauzia doit être présenté ici comme le vrai type du château gascon de la fin du XIIIe siècle, servant en quel que sorte de transition entre l'ancien château-fort roman du XIIe siècle et l'imposant castel féodal des siècles suivants. Type unique, qui ne se trouve en France que dans le pays gascon, et dont quelques rares spécimens se voient seuls encore en Angleterre, comme s'il avait été importé directe ment chez nous, au début de l'invasion anglaise, par les conquérants d'outre-mer. Un simple parallélogramme de seize mètres de long sur douze de large à l'extérieur, avec deux tours d'angle, l'une à l'est, l'autre à l'ouest, cette dernière seulement en encorbellement, tel est dans toute sa simplicité le plan du château de Tauzia. Tel se trouve, du reste, également, sauf quelques légères modifications de détail, le plan de toutes ces forteresses du XIIIe siècle, spéciales à la Gascogne. L'idée qui a présidé à leur élévation est partout la même. Le but poursuivi est identique. La date de fondation pour chacune d'elles est aussi rapprochée que possible. Même épaisseur de murs. Mêmes dispositions intérieures. Même appareil, ce bel appareil moyen que le temps n'a pu attaquer, qui est resté jusqu'à nos jours aussi solide, aussi intact que lors de son emploi, et dont on s'est servi, on le sait, généralement en France du milieu du XIIIe siècle jusques vers la fin du siècle suivant. Construits, pour la plupart, sur des points culminants, ces châteaux ne sont presque jamais entourés de fossés. A peine un mur d'enceinte ou une simple palissade les préservent-ils des attaques de l'ennemi. Élevé sur une petite éminence, qui le préserve de toute surprise du côté du midi, de l'ouest et du nord, le château de Tauzia est facilement accessible du côté du levant, où il est dominé par les coteaux d'Augé et de Maignaut. C'est donc là le point faible, celui que l'on a dû principalement fortifier. Aussi est-ce là que se dresse la tour principale, la seule du reste qui serve véritablement de moyen de défense.
Cette tour est carrée et sert actuellement, au rez-de-chaussée, de principale porte d'entrée. Une large et haute baie, en plein cintre, donne accès dans l'intérieur de la tour. Elle ne conserve nulle trace de herse ni de portail. En revanche, elle était défendue par un mâchicoulis placé à l'étage tout à fait supérieur de la tour, par le crénelage du chemin de ronde, enfin par trois meurtrières, dont les deux plus basses sont en croix pattée. Une fenêtre trilobée, percée au-dessous du mâchicoulis, est la seule ouverture de cette tour, permettant à la vue de s'étendre au loin, dans la direction du levant. D'autres meurtrières, également en croix, sont aussi percées dans les murs latéraux qui fout face aux courtines. Une deuxième porte, basse cette fois et en arc brisé, donnait accès de l'intérieur de la tour dans la grande salle du rez-de-chaussée. Elle était défendue également par un autre mâchicoulis carré, creusé intérieurement au milieu de la voûte de la tour. La façade orientale du corps de logis était selon l'usage de tous ces châteaux gascons, hermétiquement close, ainsi qu'aux autres côtés, au rez-de-chaussée. A son premier étage, elle était percée de deux meurtrières, dont l'une est bouchée et dont l'autre a vu refaire son parement extérieur. Au second étage seulement est ouverte une élégante croisée, avec encadrement de moulures à tores ronds, qui a dû remplacer sans aucun doute, aux XVe ou XVIe siècles, lorsque de simple corps de garde le château devint une maison d'habitation, soit une petite porte ogivale, seul moyen peut-être d'accéder, à l'aide d'une échelle ou d'un escalier mobile, dans l'intérieur du château, soit une fenêtre géminée trilobée, semblable à celles que l'on voit encore aux châteaux de Massencôme et de Lagardère. Il est de notre devoir de signaler ici, en avant de cette façade orientale, un terrassement rectangulaire, à coins arrondis, destiné à supporter un corps de logis dont la charpente se reliait au mur du château à la hauteur du premier étage.
L'origine de ce petit bastion, très postérieur à la construction du château, serait à tout jamais pour nous restée énigmatique, si nous n'avions eu la bonne fortune de découvrir, dans les riches minutes du notariat de Valence, un acte d'une réelle importance, qui nous donne l'explication de cette bizarre construction. Il ressort, en effet, de ce document qu'en l'année 1652, ainsi que nous le verrons du reste dans la partie historique, le château de Tauzia était la propriété des seigneurs de Gelas, et qu'en l'absence du chef de la famille, son oncle et procureur fondé, Charles-Jacques de Léberon, évêque de Valence et abbé de Flaran, entreprit, à la suite sans doute des troubles de la Fronde et afin de parer à toute éventualité, de faire ajouter quelque nouvelle fortification au vieux manoir, en partie déjà démantelé. A cet effet, il s'entendit, le 23 février 1652, avec deux maîtres maçons de la ville de Valence, afin qu'il fut construit "un rabelin au pied de la porte qui est à l'entrée du degré dudit château de Tauzia, de pierre avec du mortier, de la hauteur de douze pans, et tout à l'entour du degré ou marchepied qui est au devant la dite entrée; ensemble y tailher audit rabelin une porte servant à l'entrée d'iceluy; ensemble en ycelle murailhe y fere deux canonieres pour la deffence dudit rabelin ou entrée susdite; ensemble fermer le portalh quivient du derrière dudit château du costé du septentrion de la haul teur de ladite porte; plus réparer un cotté du portai qui est à l'entrée de la seconde basse cour, en sorte qu'on y puisse mettre une barriere. Pour raison duquel travail, ledit Broqué audit nom a promis de donner et payer auxdits Serres et Granailhes la somme de dix livres tournoises, comptant vingt sous tournois pour chacune livre, ensemble de leur fere rendre toutes sortes de matériaux à pied d'oeuvre, moyennant quoi lesdits sieurs maçons promettent avoir fait et parfait ladite besogne dans le troisieme jour de mars prochain, à peyne de tous despens".
Le travail fut effectué de point en point. On procéda à cet effet à des arrachements dans les parements extérieurs, et on y appuya ce susdit ravelin, dont l'utilité ne se faisait nullement sentir, et qui, masquant tout ce côté du château et notamment l'entrée principale, fut peu de temps après démoli. Néanmoins, on voit encore les fondements de celle curieuse petite construction. La façade sud a été entièrement remaniée au XVIe siècle, ou peut-être même déjà à la fin du XVe siècle. C'est, en effet, de celte époque que datent, aux premier et deuxième étages, ces grandes et élégantes fenêtres à meneaux, toutes bordées de moulures rondes ou prismatiques, et dont les montants très finement taillés et en forte saillie portent sur des consoles, ornées, les unes de chardons et de feuilles frisées, les autres de têtes d'animaux ou de bustes humains. Ces belles fenêtres remplacèrent à cette date les meurtrières primitives du premier étage, ainsi que les fenêtres géminées du second, dont on ne retrouve plus de ce côté aucune trace. Seule se voit encore, au rez-de-chaussée, une meurtrière oblongue de l'époque de la construction. En revanche, on remarque, vers le milieu, une énorme brèche, demi-circulaire, dans laquelle s'ouvre une porte au second étage et qui n'est que la cage éventrée de l'escalier qui fut construit sans doute à la même époque, lors du remaniement complet du château. Ainsi que ses semblables, le château de Tauzia n'avait pas à ses débuts d'escalier intérieur. Il n'est plus permis d'ignorer en effet que dans ces sortes de châteaux-forts le rez-de-chaussée était entièrement muré; que le premier étage n'était ajouré que par de rares meurtrières; et qu'on n'accédait aux portes très basses du second étage que par des échelles mobiles ou par des ponts volants extérieurs que l'on relevait selon les circonstances. Notre opinion est donc qu'à Tauzia on ne dut fort longtemps se servir que d'échelles mobiles pour pénétrer dans l'intérieur.
Ce ne fut que longtemps après sa construction, à la fin du XVe siècle, et alors que les Anglais furent à tout jamais chassés du sud-ouest de la France, que la nécessité d'un escalier intérieur s'imposa aux propriétaires. C'est alors qu'ils prirent le parti d'éventrer le milieu de la façade méridionale et d'y adosser celte tourelle circulaire, ou peut-être octogonale. La façade ouest, très sévère, contient au rez-de-chaussée une meurtrière; au premier étage, une petite croisée à meneau horizontal, encadrée par des moulures rondes et deux culs de lampe du XVIe siècle; au deuxième, une fenêtre actuellement fermée. C'est à partir du chemin de ronde qui couronnait tout le château au-dessus du second étage, que vient s'adapter, au coin des façades nord et ouest, cette jolie tourelle polygonale en encorbellement, dont un côté repose sur un réduit en porte-à-faux destiné plutôt à des latrines qu'à un mâchicoulis. Cette tourelle, véritable tour de guet, permettait de suivre au loin, du côté de Valence, de Flarambel et de Massencôme, les mouvements de l'ennemi. Enfin, du côté du nord, le château de Tauzia a conservé intactes les meurtrières de son rez-de-chaussée. Des fenêtres à meneaux, les unes murées, les autres ouvertes, ont remplacé celles des étages supérieurs. Deux lignes extérieures de corbeaux, semblables à la ligne de la façade sud, se prolongent de ce côté à la hauteur des premier et deuxième étages, restant énigmatiques. On peut expliquer à la rigueur les corbeaux des étages supérieurs par l'application possible de hourds tout à l'entour du château. Mais cette conjecture est inadmissible aux étages inférieurs. Tout au plus pourrait-on se demander si les corbeaux de ces étages n'étaient pas destinés à supporter les poutres de quelque hangar mobile, que l'on adossait en toute hâte au mur extérieur, lorsqu'il s'agissait d'abriter des convois, des bêtes de somme, des chevaux. Il est à remarquer qu'isolé au milieu des champs, le château n'a jamais possédé la moindre écurie ou communs.
L'intérieur du château ne devait former, croyons-nous, à l'époque primitive, qu'une seule et vaste salle rectangulaire de quatorze mètres de long sur dix de large. Une fois de plus, sous ce rapport, il était semblable à ses voisins les châteaux de Massencôme, Balarin, Larressingle et plus loin Sainte-Mère, où l'on ne retrouve nulle trace de mur primitif de séparation. Le mur de refend, qui actuellement, sépare les deux corps de logis, a été croyons-nous, ajouté au XVIe siècle, lors des modifications qui vinrent transformer entièrement l'aménagement du château. Il est donc difficile, faute de documents, de déterminer aujourd'hui d'une façon absolument précise, l'affectation de ses différentes salles. On peut toutefois affirmer que dans l'esprit de l'architecte, le rez-de-chaussée était destiné à abriter les munitions, les voitures, les chevaux; peut-être même à servir de cuisine. En tout cas, il n'était éclairé que par de sombres et étroites meurtrières. Tout aussi sombre était le premier étage, qui constituait probablement le corps de garde, ou plutôt le logement, le dortoir des gens de guerre. Seul était bien ajouré le deuxième étage, où se trouvait la grande salle d'armes, chambre d'honneur ou logement du chef, qui, de là, pouvait communiquer avec les hommes postés sur le chemin de ronde ou les sentinelles juchées au sommet des tours. Tel qu'il était constitué primitivement, le château de Tauzia, présentait un système suffisamment défensif. Il pouvait facilement contenir deux cents hommes d'armes qui, placés aux bons postes, devaient arrêter quelque temps la marche d'une compagnie ennemie, à une époque surtout où les armes à feu étaient inconnues, et où l'arbalète, avec le courage personnel, jouait le principal rôle. Mais, nous le répétons, sa raison d'être était bien moins d'avoir à supporter un siège que de surveiller attentivement l'autre côté de la frontière, et de prévenir en temps opportun les corps plus importants massés derrière lui, soit à Condom, soit à Larressingle, soit à Saint-Orens, ou dans toute autre garnison anglaise. A ce titre seul, il mérite, croyons-nous, une attention particulière.
Dès le XIe siècle la terre de Tauzia avait donné son nom à une famille. Bernard de Polignac, seigneur de Pouypetit, en Gaure, marié à demoiselle N. de Tauzia, et Guillaume de Montaut, archevêque d'Auch, prirent pour arbitres les sires d'Armagnac et de Fezensac, l'an 1095. Son fils Léandre fit par testament de l'année 1145, donation du quart de la dîme de Pouypetit aux recteurs de ladite paroisse, pour qu'ils priassent Dieu pour le salut de son âme, celle de Bernard son père, et celle de la dame de Tauzia, sa mère. Si le fief de Tauzia et une famille de ce nom comptaient déjà dès le XIIe siècle, le château, dans tous les cas, tel du moins que nous le voyons aujourd'hui, n'existait pas encore, sa construction ne remontant, d'après son type architectonique, qu'à la fin du XIIIe siècle. Le château de Tauzia appartient au XIVe siècle à l'illustre famille de Barbazan. Le 1er avril 1362, en effet, "Manaud de Barbazan rend hommage au comte d'Armagnac, et déclare entre autres terres, tenir de lui, en fief, dominium seu senhoria de Tauziano cum pertinentiis suis". Jamais peut-être en Gascogne famille ne fut plus guerrière et plus illustre que celle des Barbazan. Originaire du pays de Nébouzan, elle doit son nom au fief de Barbazan, situé sur les derniers contreforts des Pyrénées. Fièrement campé sur un des promontoires du massif du pic de Gar, le château de Barbazanatteste par sa forte position et son assiette imprenable la puissance et la magnificence de ses héroïques seigneurs. La vie des sires de Barbazan au moyen âge est en effet toute une épopée. Sans cesse sur les champs de bataille, au premier rang dans les combats célèbres, alliés fidèles des comtes d'Armagnac, ils luttent pour la fortune de la France; et ce n'est que forcés par la loi du vainqueur qu'ils courbent momentanément la tête devant la bannière du roi d'Angleterre. Nous n'entreprendrons pas d'écrire ici leur histoire, ni même leur généalogie, devant laquelle ont reculé de plus habiles que nous: "Voici une maison si ancienne, écrit Lachesnaye des Bois, qu'on n'en peut parler que confusément sans même en pouvoir donner la généalogie".
Sous la vigoureuse impulsion de Charles V et de Duguesclin, les Anglais perdaient peu à peu toutes leurs conquêtes; et nous voyons les Barbazan toujours au premier rang parmi les défenseurs de la cause nationale. Le duc d'Anjou sut les en remercier, en nommant, en récompense de ses signalés services, le chef de la famille, Manaud de Barbazan, maréchal du Languedoc, en 1370, puis capitaine du Poitou, de la Saintonge et de l'Angoumois, et en lui servant une pension de trois cents livres d'or par mois. Marié à Jeanne de Lambert, Manaud de Barbazan en eut trois enfants dont Arnaud-Guillem; Jeanne, que nous verrons habiter le château de Tauzia et Jean, mort avant son père. Arnaud-Guillem de barbazan trouva la mort le 2 juillet 1431, sur le champ de bataille de Belleville, près Nancy, où se rencontrèrent les armées de René d'Anjou et d'Antoine de Vaudemont, tous deux se disputant la Lorraine. En 1429, le château de Tauzia était habité par Jeanne de Barbazan, fille de Manaud et soeur d'Arnaud-Guillem. A la mort de celui-ci, arrivée comme on le sait en 1431, il passa dans la succession de sa fille Jeanne, mariée au comte d'Astarac, à qui il fut attribué. Il devint donc, durant quelques années, la propriété de cette illustre famille des comtes d'Astarac, qui était représentée par Jean II, fils de Jean 1er comte d'Astarac et de Philippe de Comminges, sa troisième femme. Le nouveau seigneur de Tauzia rendit hommage et fidélité au nom de sa femme Jeanne de Barbazan, le 1er octobre 1452, et comme son procureur fondé en l'église de Saint-Jean-de-Braibières, à Jean, comte de Foix et de Bigorre, pour la baronnie de Barbazan, comme dépendante de la succession de son père, et pour laquelle il plaidait le 7 septembre 1454, devant le Parlement de Toulouse, contre Beraud de Faudoas, à qui, nous l'avons dit, elle fut attribuée. Jean II d'Astarac mourut en 1458.
Il laissait une fille unique, Catherine, qui devint héritière de toutes ses propriétés, et par suite de la terre de Tauzia. Cette Catherine d'Astarac avait épousé, neuf ans auparavant, le 23 juillet 1449, Pierre de Foix, vicomte de Lautrec, de la branche cadette de la grande maison de Foix. Le château de Tauzia passa donc, par ce mariage, de la maison d'Astarac dans celle des Foix, vicomtes de Lautrec. Pierre de Foix, vicomte de Lautrec et de Villemur était en effet le deuxième fils de Jean, comte de Foix et de Jeanne d'Albret sa femme. Il eut en partage les vicomtés de Lautrec et de Villemur, par testament de son père, de l'an 1429, et devint ainsi le chef des vicomtes de Lautrec. De son mariage avec l'héritière des Barbazan et des comtes d'Astarac, Catherine, il eut deux enfants: Jean de Foix qui et Madeleine de Foix, dame de Castillon en Médoc. Jean de Foix épousa Jeanne d'Aydie, fille aînée et héritièr d'Odet d'Aydie, comte de Comminges et vicomte de Fronsac. Il en eut cinq enfants. L'aîné, Odet, fut ce fameux vicomte de Lautrec, ami inséparable de François 1er. Jean de Foix, vicomte de Lautrec, vendit, en 1479, la seigneurie de Tauzia. En moins de cinquante ans, la seigneurie de Tauzia était donc passée des mains des Barbazan dans celles des comtes d'Astarac; de celles-ci dans l'illustre famille de Foix, des vicomtes de Lautrec; et enfin dans la famille de Marestang, beaucoup moins illustre, quoique ses membres se fussent plusieurs fois distingués dans les guerres anglaises, et qu'un récent mariage les eût même alliés aux Barbazan. Nous voyons en effet que Mengette de Foix, sixième fille de Jean de Foix, seigneur de Fornets et de Rabat, et de Léonore de Comminges, épousa en secondes noces, vers 1475, Géraud de Marestang, fils de Jean, seigneur de Marestang et d'Agnès de Faudoas Barbazan. Une alliance s'était donc formée au XVe siècle entre ces deux familles, qui facilita la transmission définitive entre les mains des Marestang, en 1479, de la seigneurie de Tauzia.
La branche collatérale qui acheta la seigneurie du Tauzia aux Barbazan et qui s'y fixa, pendant tout le XVIe siècle et une partie du siècle suivant, n'égala pas en éclat et en fortune la branche aînée. Elle se contenta de résider sur ses terres, ne donnant qu'en de rares occasions signe de vie. Elle était alliée aux premières familles du pays et aux Lasseran de Massencôme, aux Bèon, et, aux Faudoas. Ce fut Jean de Marestang qui, en 1479, fit l'acquisition de la seigneurie de Tauzia avec toutes ses dépendances, notamment les métairies du Plaichac et du Petit-Tauzia. Rentrés dans leur domaine, après les campagnes d'Italie, les Marestang durent, à l'exemple de leurs voisins et de toute la noblesse française, imbus des goûts artistiques déjà en pleine floraison de l'autre côté des monts, modifier du tout au tout leur demeure, et l'approprier aux nouveaux besoins de l'existence. C'est à ce moment que le château de Tauzia subit sa transformation. Ses murailles furent percées d'ouvertures. Au rez-de-chaussée, on ouvrit la grande porte de la principale tour. Sur la façade méridionale fut dressée la cage octogonale de l'escalier. Et les étages supérieurs furent ajourés par ces belles et élégantes fenêtres à meneaux dont on admire encore les fines moulures et les capricieux ornements. L'influence de la femme, condamnée à habiter toute la vie ces tristes prisons, doit compter en première ligne dans ces importantes modifications; et c'est certainement aux nobles châtelaines de Tauzia que nous devons de pouvoir admirer l'agencement nouveau de cette si intéressante petite forteresse. Jean de Marestang lesta le 29 avril 1569 au château de Tauzia, sénéchaussée de Gascogne. Son fils aîné fut Amanieu de Marestang, seigneur de Tauzia. Dans les plus ancien registres du notariat de Valence, nous retrouvons plusieurs fois son nom. Le 6 mai 1558, nous le voyons, entre autres choses, donner en faisande "dans le château noble deu Tauzia", la borde dite de Tauzia, construite par son grand-père.
Amanieu de Marestang épousa demoiselle Paule de Vize, qui, soit par la mort prématurée de son mari, soit par son éloignement de ses domaines pour cause de guerres religieuses, géra presque toujours seule, à cette époque, la terre de Tauzia. Le 31 mai 1572, en effet, demoiselle Paule de Vize, dame de Tauzia, "reçoit un aveu de dettes pour 3 cartauds de bled, 3 sacs d'avoine et 2 cartaux de milhet". Le 19 mai 1572, elle donne en faisande la borde du Plaichac, par acte passé au château noble de Tauzia. Enfin elle renouvelle cet acte, le 10 octobre 1575, se qualifiant alors de mère de Jean de Marestang, seigneur de Tauzia. A partir de 1578, et durant de longues années, c'est Jean de Marestang, fils d'Amanieu de Marestang et de Paule de Vize, qui est qualifié seigneur de Tauzia, et qui administre cette seigneurie. Jean de Marestang conclut, le 28 janvier 1595, au château de Tauzia, un arbitrage avec son frère Savaric et ses trois soeurs, Anne, Marguerite et Catherine de Marestang "afin de fere juger amyablement iceulx differends que lesdites parties ont entre eux". Il semble que le Petit-Tauzia fut donné à la suite de ce pacte de famille à Savaric de Marestang, puisque nous le voyons, le 23 décembre 1608, dans un aveu de dettes, qualifié de seigneur du Petit-Tauzia. Ce seigneur de Marestang continua pendant les vingt premières années du XVIIe siècle à résider dans son château de Tauzia. Il avait épousé demoiselle Dominique de Boyer, dont il eut six enfants dont Guillaume, qui lui succéda; Jean; Jeanne; Madeleine; Marguerite et Anne. Jean de Marestang, déjà fortement endetté, avait été forcé de se dessaisir du plus beau morceau de la seigneurie de Tauzia. Le 15 septembre 1597, il avait vendu au sieur Dudrot la terre et métairie du Plaichac, juridiction de Tauzia, et attenante au château. La fille aînée du sieur Dudrot, Cécile, épousa en 1604 Bernard de La Forcade, seigneur du Pin, dont la famille vint ainsi habiter le Condomois.
Ce furent leurs descendants qui, un siècle plus tard, et grâce à la proximité des deux terres, devenir les acquéreurs définitifs du château de Tauzia. Jean de Marestang dut mourir vers l'année 1632. En effet, il ne vivait plus en 1633, année où il fut procédé dans la grande salle du château de Tauzia, entre sa veuve et ses enfants, au partage de sa succession. Cette opération donna lieu à de nombreuses réunions de famille, qui furent suivies d'inventaires, de cessions, de liquidations, de ventes innombrables et successives. Déjà avaient été vendues ou cédées les terres du Plaichac et du Petit-Tauzia. A la suite de ce dernier partage, il ne resta plus à Guillaume de Marestang que le château de Tauzia, la métairie et le moulin. Guillaume de Marestang fut obligé de suivre l'exemple de son père, et pour pou voir conserver le fief patrimonial, pour pouvoir même subvenir aux besoins de sa famille, il s'endetta. Le 3 mars 1632 et le 9 décembre 1633, nous le voyons donner en afferme le moulin de Tauzia. Mais ces minces revenus ne pouvaient suffire à son existence. C'est alors qu'il s'adressa, lui et les siens, à son voisin le seigneur de Léberon, et qu'il lui engagea sinon la totalité, du moins une grande partie de sa fortune. Charles-Jacques de Gélas, évêque de Valence et de Die, frère de messire Hector de Gélas de Voisin, marquis de Léberon et d'Ambres, vint en aide au seigneur de Tauzia, et qui, durant les premières années qui suivirent la mort de Jean de Marestang, subvint, par l'argent qu'il leur prêta, aux besoins de toute la famille de Marestang. Entièrement ruiné, Guillaume de Marestang dut, pour faire honneur à ses engagements, se dessaisir de la terre de ses ancêtres, et l'abandonner à son puissant créancier le marquis de Léberon, qui, pris de pitié pour les malheurs de son noble voisin, lui assura le vivre et le couvert. Ainsi passa, en cette année 1640, le château de Tauzia, avec toutes ses dépendances, des mains des Marestang, qui le détenaient depuis près de deux siècles, dans celles des seigneurs de Gélas, marquis de Léberon. A partir de cette époque, le château de Tauzia, croyons nous, ne fut plus habité.
Le nouveau propriétaire du château de Tauzia, Hector Gélas de Léberon, passa toute sa vie dans les camps au service du Roi. Nommé en 1638 gouverneur de la ville de Carcassonne et sénéchal du Languedoc, il mourut le 10 février 1645 à Narbonne, âgé de cinquante-quatre ans. En 1627, il avait épousé haute et puissante dame Suzanne de Vignolles, dont l'apport considérable accrut encore la puissance de cette famille. Son fils aîné, François de Gélas, marquis de Léberon, vicomte de Lautrec, hérita de la majeure partie de ses terres et devint par suite propriétaire et seigneur de Tauzia. Comme son père, il ne quitta guère les armées du Roi, qui remportaient alors les glorieuses victoires de Rocroy, de Fleurus et de Lens. C'est l'époque où Charles-Jacques de Léberon, évêque de Valence et de Die, abbé de Flaran, administrait, en sa qualité d'oncle du jeune marquis de Léberon et peut-être même de tuteur, ses riches domaines de l'Armagnac. Le marquis de Léberon mourut, chargé d'honneurs,à Paris, le 1er mars 1721, à l'âge de quatre-vingt-un ans. A cette date, le château de Tauzia ne lui appartenait déjà plus. En 1710 fut acquise par la famille de Laforcade du Pin la seigneurie de Tauzia. Les seigneurs de La Forcade, sieurs de la Prade, du Martiné, du Pin, qui habitèrent au XVIIe siècle le Bruillois, puis s'installèrent dans le haut Armagnac et le Condomois, et devinrent seigneurs de Tauzia, doivent être rattachés à la branche aînée des seigneurs de Forcade, originaires de la ville d'Orthez en Béarn, dont un des derniers descendants, Adolphe de Forcade de La Roquette, fut ministre des finances sous le règne de Napoléon III. Monsieur Gabriel-Victor de La Forcade de Tauzia était au début du XXe siècle propriétaire du château du Tauzia. Il n'en a gardé que l'ossature et la métairie qui en dépend. Nous devons ce miracle de conservation aux goûts si prononcés pour l'art de MM. de La Forcade, toujours respectueux de ce qui touche au passé. Fidèles dépositaires des vieilles gloires de leurs ancêtres et de celles de leurs prédécesseurs, ce beau spécimen de l'art militaire gascon au moyen âge ne périclitera pas, nous en sommes certain, tant qu'il se trouvera entre leurs mains. Puisse-t-il y demeurer toujours. (1)

Éléments protégés MH : les ruines du château de Tauzia : inscription par arrêté du 14 novembre 1942. (2)

château de Tauzia 32310 Maignaut-Tauzia, propriété privée, visite des extérieurs uniquement (vestiges)

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Château de Tauzia  Château de Tauzia  Château de Tauzia
 
 
 


(1)      Châteaux gascons de la fin du XIIIe siècle par Philippe Lauzun (1847-1920), Imprimerie et Lithographie G. Foix, rue Balguerie, Auch (1897)
(2
        source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/)  

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