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Château de Puységur (Gers)
 
 

   Si vous allez de Fleurance à Auch, quand vous aurez dépassé le village de Montestruc, regardez à votre droite et, sur la hauteur, vous apercevrez un groupe de maisons et un vieux castel, encore d'imposante structure: c'est Puységur, berceau d'une grande et noble famille, qui a donné au pays bien des hommes illustres et de beaux exemples. Placé sur le coteau qui domine la vallée du Gers, Puységur a toujours servi de défense au pays d'alentour. Il est probable que ce fut un point stratégique des Romains, car on y a découvert récemment des urnes et des pièces de Domilien, et non loin de là, passait la voie romaine allant d'Auch à Lectoure. Quoi qu'il en soit, à l'époque féodale, Puységur était une véritable forteresse: murs et fossés existaient encore il y a un siècle; les vivants se rappellent d'en avoir vu les traces, et rien qu'à considérer les vieux murs du château seigneurial, on y distingue facilement trois âges différents; mais la première construction élevée en cet endroit, dut être certainement la grande tour carrée, car on voit qu'elle est, des deux tours, la plus ancienne, la primitive. Lors de la formation des grands fiefs de la Gascogne, vers l'an 904, Puységur fut compris dans les terres qui composèrent le comté de Fézensac. On sait que c'était le fief primitif de la maison comtale d'Armagnac, qui devint la plus riche et la plus puissante de l'Aquitaine. De tous les châteaux qu'elle possédait dans ses vastes domaines, ceux qu'elle habitait le plus souvent étaient le château de Lectoure et celui de Lavardens. Le château de Puységur était de moindre importance. Bernard VI, comte d'Armagnac, le donna vers l'an 1300 à sa jeune épouse, au moment où il allait passer en Italie. Avant son départ, il fit son testament et laissa pour douaire à Cécile de Rodez, le château de Lavardens, Puységur, Roquelaure et la Bastide de Barran.

Au XIVe siècle, la seigneurie de Puységur fut donnée à Bernard Maurin, dit Maurin de Biran. En effet, on trouve que Maurin de Biran, sénéchal d'Agenais, fils naturel de Jean 1er, comte d'Armagnac, fut apanage, en 1360, de la coseigneurie d'Auch avec les terres de Roquefort, de Casteljaloux, de Puységur et autres. En 1377, Maurin de Biran, seigneur de Puységur, assista comme conseiller du comte d'Armagnac, au traité de paix conclu à Tarbes, entre les maisons de Foix et d'Armagnac. Son fils Jean avait épousé l'héritière de Goas et donné naissance à l'illustre maison des Lamothe-Goas; mais il mourut jeune (1378), et l'on voit dans le Livre vert du chapitre d'Auch, que son père fonda un obit pour le repos de son âme. En 1420, les Anglais étaient maîtres de notre pays, et Puységur était devenue terre anglaise depuis que Philippe le Bel avait donné le comté de Gaure à Edouard 1er, roi d'Angleterre. La grande tour, placée à la limite des possessions ennemies, devait alors servir de forteresse. Si elle ne fut pas transformée à cette époque, elle le fut certainement en 1528, date à laquelle Nicolas de Castanet acquit la seigneurie de Puységur des curateurs de Jean de Biran de Verduzan. Cette famille de Castanet venait de Lectoure; car, ayant à faire les preuves de sa noblesse par devant M. Dorieu, intendant de la généralité de Soissons, le titre le plus ancien que produisirent les descendants, fut le testament de noble Nicolas de Castanet, seigneur de Puységur, reçu par Maître Darbens, notaire de Lectoure, le 29 janvier 1548; et le jugement de M. Dorieu fut confirmé en 1697 par celui de Samson, intendant de la généralité de Montauban. Par conséquent, Nicolas de Castanet est donc la tige de la famille de Castanet, plus tard de Chastanet et aujourd'hui de Chastenet de Puységur. C'était un marchand et un bourgeois de Lectoure, mais un homme de grande valeur. Il fut plu sieurs fois consul de celte ville, notamment en 1513-14 et en 1523-24. Dieu avait béni son commerce et il était devenu assez riche pour acheter le château et le domaine de Puységur.

En lui, d'ailleurs, le sentiment chrétien était vif et profond; ce qui le prouve, c'est la devise si chrétienne qu'on lit au frontispice de l'entrée triomphale du château seigneurial: Mon espoir est en Dieu. Si ce n'est lui qui la fit graver, c'est lui, du moins, qui en inspira la pensée à ses enfants. Nicolas de Castanet devint le père d'une grande et nombreuse famille. On en retrouva la généalogie exacte au château de Puységur, et voici dans quelles circonstances: En 1890, M. Espiau, instituteur de l'endroit, voulait écrire une monographie de cette commune. Il cherchait donc des documents, quand il découvrit un registre dans lequel on remarquait des écritures différentes: c'était le registre des naissances au château de Puységur. Chaque seigneur y avait inscrit, tour à tour, le nom, la date de naissance et parfois les principaux faits et gestes de chacun de ses enfants. Tel sera désormais notre principal guide, et l'on conviendra que nous ne pouvions en avoir de meilleur. Le nom du père de Nicolas de Castanet nous est inconnu; mais le testament de ce dernier, conservé aux Archives Nationales, nous apprend que sa mère se nommait Domenge de Sainct Lana et non Dominique de la Lande, comme le disent La Chenaye-Desbois et ses continuateurs. De son union avec Géraude Foassin, Nicolas de Castanet eut plusieurs enfants, dont quelques-uns moururent de son vivant et furent inhumés dans la cathédrale de Lectoure, au tombeau de leurs ancêtres; ceux mentionnés dans son testament sont Joseph, qui fut héritier universel de son père; 2° François, aîné, religieux dominicain a Lectoure; 3° Bernard, seigneur de Puységur à la mort de son frère aîné; 4° Jean, chanoine de Lectoure; 5° Anne, mariéea François Tappie, puis a Jean Duluc, contrôleur des tailles; 6° Géraude, mariée à Pierre Roux, procureur général en la sénéchaussée d'Armagnac; 7° Jean; 8° François.

Nicolas de Castanet mourut probablement à Lectoure, entre le 5 août 1551 el le 6 mars suivant. Il avait stipulé dans son testament qu'il voulait être enterré dans la cathédrale Saint-Gervais de Lectoure, au devant l'autel de Marie-Madeleine, "là où ses prédécesseurs et aucuns enfans ont esté ensèpulturés". A la mort de son père, Joseph de Castanet devint seigneur de Puységur; mais il mourut en 1591, sans laisser de postérité, et suivant les clauses de substitution, insérées dans le testament de Nicolas de Castanet, la seigneurie de Puységur échut à son frère Bernard. Digne fils de son père, Bernard de Castanet se fit remarquer par la pureté de sa vie et la grandeur de son caractère. Marié, le 30 août 1556, à noble demoiselle Marguerite de Pins, il vécut avec elle à la façon d'un patriarche. Il faut dire que la famille était alors plus simple et l'esprit chrétien n'était pas emporté par l'esprit de jouissance. Aussi, devoir et conscience étaient la règle invariable des nobles châtelains. C'est pourquoi ils reçurent une belle couronne de 13 enfants dont Anne, née le 25 juillet 1558, morte jeune; 2° Anne, née le 20 août 1559, mariée à messire de Montauriol; 3° Catherine, née le 20 mars 1531, mariée à noble Renier, seigneur de la Robertie; 4° Joseph, né le 7 octobre 1562, mort jeune; 5° Jean, né le 23 novembre 1563, qui hérita de Puységu; 6° Louise, née le 27 février 1565, mariée à noble de Caillau, trésorier de France; 7° Hérard, né le 28 mai 1566, seigneur de Bavrast, auteur de la branche des Comtes de Puységur, établie en Albigeois; 8° Nicolas, né le 21 mai 1568, mort au berceau; 9° Pierre, né le 5 janvier 1570, mort à Lectoure le 4 décembre 1642, auteur de la branche des Barons de Puységur, seigneurs de la Coupelle; 10° (illisible), né le 27 mars 1574, mort jeune; 11° Françoise, née le 10 septembre 1575, mariée à noble de Garros, lieutenant principal en la sénéchaussée d'Armagnac; 12° Marguerite, née le 7 mai 1579, qui épousa noble de Pérès, lieutenant particulier en la même sénéchaussée; 13° Marie, née le 12 juin 1583, religieuse au couvent de Prouillon lès Condom.

Bernard de Caslanel mourut en 1600, et son fils Jean lui succéda à Puységur. Jean de Castanet épousa une femme au coeur vaillant et de vertu solide: ce fut Madeleine d'Espagne-Ramefort. Jamais union plus pleine d'honneur et de gloire. Les deux époux comprirent combien il y a de la dignité et de la grandeur à se mettre à la tête d'une famille. Jean el Madeleine le eurent 18 enfants. Dans ce quart de siècle (1590-1613), quelle vie incomparable dans ce château de Puységur. S'il y avait parfois disette de biens matériels, des lettres de l'époque en témoignent, il y avait abondance d'honneur et de vertu, ce qui est plus glorieux et méritoire. Des nombreux enfants de Madeleine d'Espagne, certains moururent et d'autres furent l'ornement de sa maison et la gloire de la France. De son côté, Jean de Chastanet se faisait aimer de tout le monde. Les transactions qu'il passa, revêtent toutes le caractère d'un père qui traite avec ses enfants, et l'on voit que rien ne coûtait au seigneur de Puységur lorsqu'il s'agissait du bien être des habitants. Le père de cette grande famille, si noble et si belle, mourut en 1612; il avait à peine 49 ans. Son héritier et successeur à Puységur fut Jean de Chastanet, le troisième de ses enfants. Ce dernier avait embrassé la carrière militaire; mais, à la mort de son père, il rentra à Puységur et prit en mains l'administration de ses terres; toutefois, le métier des armes ne cessa point d'avoir ses préférences. Il devint gentilhomme ordinaire de la chambre du roi; fut nommé, à peine âgé de 28 ans, vice-sénéchal d'Armagnac; et en 1626, le duc d'Epernon, gouverneur de la Haute-Guyenne, le chargea de dresser un état des places fortes de cette province. Alors lui écrivit souvent un familier du château de Cadillac, où habitait le duc d'Epernon: c'était Jean de Montferrand, vicomte de Foncaude. Rien de plus délicat et de chaud comme ces lettres, que retrouva, au château de Puységur, M. l'abbé de Carsatade du Pont.

Jean de Chastanet avait épousé damoiselle Marie de Gère, fille de Jean Cère, bourgeois de Lectoure, et de Françoise de Bordis, ils eurent huit enfants et la plupart moururent en bas âge: Jean-Hérard, né le 10 mai 1615; il partit pour l'armée à 15 ans, et alla en Italie, où il contracta la maladie qui l'emporta le 13 novem bre 1630; 2° (illisible), née le 19 novembre 1616, religieuse au couvent de Sainte Ursule, à Auch, où elle mourut en 1634; 3° Mathias, né le 24 février 1618; 4° Jeanne, née le 25 avril 1619, morte jeune; 5° Jean, né le 25 mars 1620, mort en bas-âge; 6° Antoine, né le 2 juin 1622, il embrassa la carrière militaire, devint major au régiment de Piémont et mourut au service du roi en mai 1659; 7° Bernard, né le 9 décembre 1627; 8° Jacques, né le 29 juin 1629, mort à l'âge de 6 ans. Ayant perdu plusieurs de ses enfants ainsi que sa femme, Jean de Chastanet contracta une nouvelle union, le 24 juillet 1631, avec Gabrielle de Tersac de Montberaud, qui lui donna un fils, Jean-Louis, né le 14 avril 1632. De son alliance avec noble Louise d'Aignan, contractée le 8 août 1655, Jean-Louis de Chastanet eut 12 enfants dont Gabrielle, née le 1er mai 1656, qui se fit religieuse; 2° Jean-Alexandre, né le 27 juillet 1657, mort jeune; 3° Claire, née le 2 décembre 1658; 4° Jean-Jacques, né le 1er lévrier 1660; 5° Catherine, née le 13 février 1661; 6° Louis, né le 21 juin 1653; il fut l'héritier de Puységur; 7° Françoise-Marguerite, née le 4 septembre 1664; 8° Gabrielle, née le 8 novembre 1665; 9° Jeanne, née le 24 avril 1667; elle se fit religieuse; 10° Guillaume, né le 6 septembre 1668; 11° Marie, née le 27 février 1670; 12° Perrette, née le 20 avril 1671. Après les cinq générations que nous venons d'énumérer, et en les voyant si nombreuses, on ne peut s'étonner de trouver la noble famille de Chastenet de Puységur grandement multipliée, et de voir plusieurs branches, détachées du tronc, former d'autres souches soit à Buzancy, près de Soissons, soit à Bernonville près de Guyse, soit à Beugny, près de Tours, soit à Rabastens en Albigeois.

Toutes ces branches ont donné à la France de grands personnages, comme des conseillers et chambellans du roi, des maréchaux de camp, des grands sénéchaux, un archevêque de Bourges, plusieurs chevaliers, des littérateurs, etc. Mais à Puységur, après la mort de Jean-Louis de Chastanet, la vie se fit rare à ce foyer si bruyant naguère. Louis de Chastanet, successeur à Puységur de Jean-Louis, son père, avait 25 ans, quand il épousa, le 20 octobre 1688, Marguerite de Roquette, qui ne lui donna qu'une fille, Anne-Thérèse; et le père l'attendit longtemps; il avait près de 40 ans quand il l'obtint. Aussi, rien ne fut négligé pour l'héritière d'un grand nom et d'une grande fortune; tout fut prodigué à Anne-Thérèse. Devenue grande et adulte, ses qualités et sa haute situation sociale lui attirèrent force prétendants; mais, entre tous, fut choisi messire Gilles-Gorvais de La Roche-Loumaigne, marquis de Gensac. Il habitait, près de Montauban, un château nommé Le Claux ou château de Gensac. Le mariage fut béni dans l'église de Puységur, le 12 août 1717; les registres en font foi. Après leur mariage, les époux allèrent habiter le château de Gensac, plus important à cette époque que celui de Puységur. La vie sembla d'abord leur sourire et reprendre son glorieux cours; il eurent sept enfants, mais la mort vint les faucher de bonne heure et les enlever tour à tour: Louis, né le 9 mai 1719; il vendit la terre de Preignan pour acheter la charge de colonel du régiment de Ségur, il mourut à 26 ans; 2° Henri-Louis-Gervais, né le 8 septembre 1720; il devint capitaine au régiment de Beaucaire, il mourut jeune; 3° Anne-Thérèse, née le 24 mars 1723; 4° Jean-Antoine, né le 8 octobre 1721; il entra dans les ordres; 5° Jacques, né le 4 janvier 1728; 6° Paul-Emmanuel, né le 13 septembre 1729; il vécut 35 ans, ne laissant qu'une fille, Anne-Thérèse-Joseph, héritière de Puységur; 7° Marie-Thérèse, née le 13 décembre 1730. Messire Gilles de La Roche, marquis de Gensac, mourut en 1732; plusieurs de ses enfants l'avaient déjà précédé dans la tombe et d'autres ne tardèrent pas à l'y suivre. Affligée de tant de deuils, la marquise de Gensac prit en aversion le château du Claux et revint habiter celui de Puységur. Elle y reçut de ses amis une foule de lettres de consolation, très belles et très touchantes.

C'est à cette époque que fut transformé le château de Puységur: les restaurations portent la date de 1735. La description du château va nous donner une idée de leur importance. Dominant la vallée du Gers, le château de Puységur est placé à l'extrémité d'une colline naturellement fortifiée, au levant et au nord, par des pentes abruptes; le village le couvre au midi, et une descente à pic protège le village. L'entrée du château est au couchant, magnifiquement encadrée par les granges, l'orangerie, l'église et une belle pelouse. Un gigantesque portail, soutenu par de gros piliers, s'ouvre sur une vaste cour carrée, d'environ 200 mètres de côté. A droite, se trouvaient les remises, dont il ne reste que les murs; vous lisez sur les piliers le chiffre "1735"; c'est la date de leur construction. A la suite des remises, sont les écuries, encore bien conservées, quoique anciennes; d'autres décharges, basses et en voûte, font face aux remises. Quand vous êtes entré dans la grande cour, tournez le dos au midi et regardez au nord: Vous avez en face les deux tours du château; la grande et haute tour carrée, à gauche, la plus solide et aussi la plus ancienne; l'autre, à droite, plus petite et bien maltraitée par le temps. De la grande cour, vous passez par la porte d'honneur: elle est entre deux belles colonnes d'ordre toscan; considérez l'entablement qui est au-dessus; vous y lisez, en lettres bien gravées: Dieu est mon unique espoir. En entrant, vous vous trouverez dans une autre cour, plus petite que la première: c'est la cour d'honneur. Elle est pavée de gros cailloux et contient un puits très profond, bâti de briques. Pour visiter le corps du logis, vous avez deux entrées: l'une à votre droite, l'autre à votre gauche; à droite, vous avez le type moderne; à gauche, vous avez le cachet féodal: pièces vastes, ouvertures petites, meurtrières et mâchicoulis, murs d'une grande épaisseur.

Commençons notre visite par la gauche, c'est-à-dire par la grande tour carrée. Elle a trois étages: au rez-de-chaussée, deux pièces obscures, probablement la cave et le bûcher. Montez l'escalier d'honneur; au premier étage, vous trouvez les prisons; au second étage, vous avez quatre pièces d'un grand intérêt: on y retrouve les grandes cheminées de pierre avec colonnes et chapiteaux; les murs sont couverts de peintures, les poutres sont en saillie ainsi que les poutrelles, équarries à la hache; elles sont ornées de volutes, entrecoupées de médaillons aux gracieux paysages. Ces diverses chambres étaient d'abord dépendantes l'une de l'autre; mais plus tard on les rendit indépendantes par la construction de galeries et de vestibules immenses. Cette construction est en ruines au troisième étage: on ne peut plus y pénétrer. Il n'y avait d'ailleurs de remarquable que la façon des portes, munies de heurtoirs. Si de la cour d'honneur vous tournez à droite, vous entrez dans la partie moderne du château. Elle date certainement de 1735. Il n'y a que deux étages; mais, au levant, l'habitation présente une magnifique façade avec deux rangs de hautes et larges croisées; sept en haut, six en bas, et au milieu un beau portail, d'où le coup d'oeil sur le Gers est incomparable. Au rez-de-chaussée, dans le vestibule, se trouve l'escalier de service et, par côté, vous avez trois vastes chambres, suivies de quatre petites ; plusieurs de ces chambres ont des lambris, et des plâtres en relief encadrent les cheminées. Au premier, c'est comme au rez-de-chaussée; répétition des mêmes chambres, grandes et petites. Le château de Puységur, aujourd'hui si délabré, fut restauré à neuf en 1735. C'est alors que la marquise de Gensac, jeune encore, revint l'habiter. L'enfant qui devait continuer sa race, Paul-Emmanuel de La Roche Gensac, reçut une instruction solide; c'était de tradition dans la famille. Les Chastenet de Puységur ont toujours donné des preuves de leur application à la culture de l'intelligence et aux travaux de l'esprit.

Quant il fut en âge de se marier, le jeune marquis de Gensac épousa noble demoiselle de Grammont; mais son mariage fut à peu près stérile comme celui de son grand-père maternel. Une seule fille en naquit: Anne-Thérèse-Joseph de la Roche Gensac. D'ailleurs, le père mourut en 1764, ayant à peine 35 ans; il était grand croix de l'ordre de Malte. La mort frappait donc à coups redoublés sur la maison de Puységur. Les enfants de la marquise de Gensac s'en allaient l'un après l'autre; restait seulement Anne-Thérèse-Joseph de la Roche-Gensac. Cette enfant était très jeune à la mort de son père, et il fallut peut-être, pour la faire vivre, entourer sa santé de soins minutieux. Il semble qu'à 16 ans, Anne-Thérèse avait l'âme fière; c'était dans tous les cas une riche héritière; sa noble naissance et les exploits de ses ancêtres étaient trop connus, pour que sa main ne fût pas recherchée des plus grands seigneurs du royaume. Elle fut accordée au comte Louis-Adélaïde-Anne-Joseph de Montmorency Laval, qui descendait d'une des plus anciennes familles de France; mais si cette alliance flatta l'amour-propre des deux familles, elle n'en fit pas le bonheur. Le mariage eut lieu en 1772 ou 1773; on dit qu'un vulgaire motif brouilla les deux époux le soir même des noces, au point de se quitter de suite pour ne plus se revoir. Les actes anciens qui les concernent affirment qu'ils étaient séparés de corps et de biens. Attirée par des parents à Paris, la comtesse de Montmorency-Laval confia le soin de son domaine à Alexandre Révolat et alla s'établir dans la capitale. Il est probable qu'elle y était aux jours de la Révolution. Le spectacle de la Terreur lui ouvrit les yeux. Elle devint si charitable, que le pays n'a gardé que le souvenir de sa charité. Elle partagea ses biens aux pauvres, à ses serviteurs et à ses métayers infirmes, laissant à tous des rentes; mais les héritiers attaquèrent son testament et en firent modifier les dispositions. La comtesse de Montmorency-Laval mourut à Paris en 1824, et le tribunal de la Seine fit vendre tous ses biens l'année suivante.

Le château de Puységur fut racheté par une des nombreuses branches de la famille de Chastenet, établie depuis longtemps près de Tours. Cette branche habitait le château de Beugny, dans la commune de Saint-Benoît (Indre-et-Loire). Elle était représentée à ce moment par Anne-Jacques-Ladislas de Chastenet, comte de Puységur. C'est lui qui voulut racheter le château de Puységur, berceau de sa famille. A 1.700 hectares de terre qu'il possédait à Beugny, il ajoutait le domaine de Puységur, composé de quinze métairies: cinq dans Préchac, trois dans Preignan et sept dans Puységur. On vendit le mobilier aux enchères; mais si l'on croit qu'il était de grande valeur, on se trompe. Le luxe actuel ne remonte guère au-delà de 1840 et le besoin d'un confortable n'avait pas encore envahi nos maisons. Aussi, à Puységur, les étoffes et les tentures avaient seules quelque valeur. D'ailleurs, le château n'était plus habité depuis longtemps que par un chargé d'affaires, et le comte Ladislas de Chastenet n'y venait qu'à de rares intervalles et toujours en passant. Il avait épousé Pauline de Charitte, qui lui donna sept enfants dont Jacques-Marie-René qui, marié deux fois, mais n'eut pas d'entants, à la mort de son père, il eut en partage le château de Puységur et mourut au château de Beugny, le 3 février 1895; 2° Marie-Pauline-Elisabeth; 3° Antoinette-Charlotte-Apollonie; 4° Marguerite; 5° Xavier-Armand; 6° Jacques-Léopold; 7° Jacqnes-Philippe-Auguste. Le comte Ladislas de Chastenet de Puységur mourut en 1860, laissant ses biens à tous ses enfants. Jacques-Marie René, l'aîné de la famille, eut pour sa part le château de Beugny et celui de Puységur avec la métairie de Loume et la Grande prairie; ses frères et soeurs se partagèrent les autres métairies, et elles furent mises en vente. Dès ce moment le vieux château de Puységur déclina rapidement. Personne ne s'en occupait; ni le maître qui était loin et y paraissait à peine tous les 20 ans, ni le surveillant qui y résidait toujours. En 1868, nous l'avons vu habité par la famille Carrère qui n'y faisait rien, parce qu'il y avait trop à faire.

Ce qu'était le château de Puységur cinq ans avant la mort du dernier propriétaire, M. l'abbé de Carsalade du Pont va nous le dire; c'était en novembre 1890: "A Puységur, ni portes, ni fenêtres, des plafonds et des planchers crevés, des pans de murs écroulés, des ronces, des herbes envahissantes; en un mot, le spectacle d'une maison qui est en train de crouler et à laquelle le temps n'a pas encore donné le charme et le pittoresque d'une ruine achevée. Mais sur ce triste château planaient de grands souvenirs, et dans ces vastes salles délabrées, avaient vécu d'illustres personnages, de vaillants capitaines, de nobles dames, des familiers de mes études, dont les noms m'étaient connus et dont le souvenir m'attirait. J'entrais avec eux dans ces ruines, et ce qu'ils me disaient, ces chers disparus, m'absorbait tellement, que je n'entendais point gémir sous mes pas les escaliers rompus et les poutres branlantes. J'allais et venais des souterrains aux combles, cherchant si dans cet abandon général, il ne restait point quelque trace du glorieux passé que j'évoquais. Quelle heureuse surprise! Dans une chambre moins misérable que les autres, ouverte cependant à tous les vents, je découvris dans un coin un amoncellement de vieux papiers: toutes les archives de Puységur. Il avait plu la veille, il avait plu l'automne, vous devinez dans quel piteux état se trouvaient ces pauvres archives. Hélas il n'y avait pas que les vieux murs qui s'en allaient en ruines". Le marquis René de Puységur mourut le 3 février 1895, veuf et sans enfants, et ses héritiers firent vendre à l'enchère le château de Puységur, l'année suivante (juin 1896). Il resta à la famille Révolat, dont les ancêtres en avaient été longtemps les régisseurs. Depuis, le vieux château a été quelque peu réparé: puisse-t-il revoir ses beaux jours avec la famille Révolat et leur chère enfant d'adoption. (1)

château de Puységur 32390 Puységur, propriété privée, ne se visite pas.


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Crédit photos: Renaud Camus sous licence Creative Commons, source de la photo par satellite : https://www.google.fr/maps
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      Le château de Puységur, canton de Fleurance (Gers) par l'abbé J.-B. Escarnot, imprimerie centrale à Auch (1908)

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