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Au milieu du XIVe siècle, un château fort est élevé en cet endroit
stratégique, face à la confluence de la Dordogne et de la Garonne, comme en
témoigne l’unique tour de guet subsistante dans le parc du château, non loin
des rives. Au 15e siècle, il en possession de la famille de Dreux : en 1503,
Regnier de Dreux était qualifié de "seigneur de la Maison Noble de Tayac".
Un terrier de l'an 1562 est également mentionné : "ce terrier, composé de
143 feuilles de parchemin, artistiquement écrit, contient le dénombrement
des biens de Tayac, qui étaient considérables. Il est relié avec soin et
conservé aux archives du département". Acquisition en 1598 par François de
Fournel, écuyer et baron de Grateloup et de Foucarville, de la maison noble
de Tayac appartenant alors à Anthoine Benoist, écuyer, seigneur de Tayac et
Saugeron. Elle consiste alors en "maison, granges, chays, offices et autres
bastimens, mestairies, moulin, domaynes, vignes des "gogues", prédz, bois de
haulte fustaye, coudrées et autres taillis, ensemble la pièce de terre quy
est sur la roque appellée la pièce de la Roque". Au début du XVIIe siècle,
Raphaël de Fournel, conseiller au parlement de Bordeaux, est dit baron de
Tayac et de Grateloup. Son fils, également prénommé Raphaël, reprend le
titre de baron de Tayac, tandis que son second fils Jean Jacques est baron
de Puyseguin. Le fils de Raphaël, Ardouin, se marie le 29 décembre 1687 avec
Marguerite Baillet : il est seigneur de Tayac et d'Abzac. Leur fils
Guillaume Augustin est baptisé dans l'église de Bayon le 14 novembre 1699.
Un dénombrement de la terre de Tayac est fourni le 9 février 1685. Il
existait probablement dès cette époque un château avec son colombier, en
partie conservé.
L'une des cloches de l'église, bénite en 1780, portait les noms de "messire
Desaigues de Sales ancien cape d'infanterie Baron de Labardemont (Laubardemont)
seigneur de Sales, Tayac et autres lieux et de Marie Gabrielle de Fourneau (Fournel)
son épouse". Des bâtiments figurent à cet emplacement, au lieu-dit Tayac,
sur le plan cadastral de 1820. Le domaine appartient alors à la famille
Marceau ou Marseau, à la tête de l'un des deux premiers crus de la contrée,
produisant de 60 à 70 tonneaux. Le "port de Tayac" se trouvait un peu plus
au sud, à Saint-Seurin-de-Bourg ; deux chemins en permettaient l'accès. Un
abri était ménagé dans la rive, semble-t-il maçonné, et un peyrat facilitait
l'accostage des embarcations. Une maison et un bâtiment rural y sont
construits. En 1875, la maison est démolie. Il ne reste aujourd'hui aucune
trace de ce port. D'après Edouard Guillon, "le manoir de Tayac a été
remplacé par une maison bourgeoise construite au commencement de ce siècle
par M. Marsaud, père du propriétaire actuel ; elle fut terminée vers 1829 ;
n'a d'extraordinaire que sa position magnifique, et se compose d'un
corps-de-logis à deux étages dans lequel est encastré un vieux mur de
l'ancien château. C'est tout ce qu'il en reste : le terrain a été nivelé et
les douves remplacées par des cours, des servitudes, des chais, des
parterres et des arbres qui répandent de tous côtés un ombrage délicieux..."
En 1850, Tayac appartient toujours à la famille Marceau (ou Marseau ou
Marsaud), avec une production de 100 tonneaux, la plus importante de la
commune. Le château est illustré dans l'édition de 1874 de l'ouvrage de
Cocks et Féret. On y voit une demeure à étage avec toit à croupes dominant
l'estuaire, qui correspond à la demeuré édifiée au début du XIXe siècle. Il
est par ailleurs indiqué que "le sous-sol pierreux de ce domaine est
exploité sur une grande échelle, et produit des pierres plus ou moins dures,
de première qualité".
En 1871, Marie Blanche Philomène Eudoxie Marsaud épouse le négociant
Ferdinand Dessandier (contrat de mariage du 03.08.1871 passé par devant Me
Isidore Antoine Thierrée, notaire à Bordeaux). D'après les augmentations et
diminutions des matrices cadastrales, Ferdinand Dessandier fait construire
l'actuel château en 1892. La construction de deux maisons est également
indiquée en 1890. La construction de trois maisons en 1889 est aussi
mentionnée. Dans l'édition de 1893 de l'ouvrage de Cocks et Féret, il est
précisé : "Le Château-Tayac a une ancienne origine. Élevé et agrandi avec un
goût exquis, un luxe sévère, un confort parfait, qui font le plus grand
honneur à son propriétaire, il est aujourd'hui une des plus belles et des
plus agréables résidences du département". Le domaine comprend 40 hectares,
avec une production de 150 tonneaux qui semble avoir résisté au phylloxéra.
Les initiales MD (Marsaud/Dessandier) sont sculptées sur le fronton
chantourné du château côté estuaire. On remarque le traitement différent des
deux façades du château : la façade côté estuaire a peut-être été en partie
conservée et rhabillée d'un porche et d'un imposant fronton sculpté. Les
encadrements des baies moulurés et à crossettes ne correspondent pas aux
fenêtres à meneau et traverse des autres façades. Les chais et cuviers
datent sans doute de la fin du XIXe siècle, époque à laquelle la production
de Tayac atteint 150 tonneaux. En 1920, le domaine est racheté par Edmond
Boyer, député de Maine-et-Loire en 1924. Il était entrepreneur de travaux
publics et c'est probablement à lui que l'on doit la construction des
dépendances agricoles. La route départementale est aménagée en 1965-1966,
épargnant la terrasse du château et les jardins. Le château se situe à la
limite avec la commune voisine de Saint-Seurin-de-Bourg, dominant l'estuaire
de la Gironde et le Bec d'Ambès. Il est accessible au nord-est par un
portail formé de deux arches couronnées d'un entablement et de pots en
amortissement et par une longue allée encadrée de palmiers. De plan
rectangulaire, le château présente une façade sur cour marquée en son centre
d'un avant-corps à trois pans, percé de la porte principale encadrée de deux
colonnes à chapiteaux composites avec fronton interrompu à volutes
rentrantes. Le châssis de porte traité en fonte est orné des initiales MD,
que l'on retrouve également en agrafe sculptée au-dessus de la triple baie
de l'étage à traverses et double meneaux. De part et d'autre de
l'avant-corps, trois travées d'ouvertures sont composées au rez-de-chaussée
de porte et fenêtres avec un encadrement en pierre de taille à bossage en
table. Les portes sont ornées deux agrafes sculptées, l'une avec un portrait
d'homme, l'autre un portrait de femme, probablement les propriétaires qui
ont fait construire le château, Ferdinand Dessandier et Eudoxie Marsaud. A
l'étage, les fenêtres présentent également un encadrement à bossage
un-sur-deux, une traverse et un demi meneau, des allèges à balustres, un
linteau sculpté avec masques et têtes de dauphins, surmonté d'une corniche à
denticules avec consoles sculptées. La toiture brisée en ardoise est dotée
de lucarnes à traverse et demi meneau, encadrées de volutes et sommées
alternativement de frontons cintrés et triangulaires, sculptés de coquilles
et de denticules.
Côté jardin, la façade donnant sur l'estuaire est composée de huit travées,
les deux travées centrales étant marquées par un porche formant terrasse à
balustrade et surmontées d'un fronton monumental chantourné. Le porche est
composé de colonnes cannelées à bagues avec chapiteaux ioniques ; ils
répondent à des pilastres sculptés sur la façade, encadrant les deux
portes-fenêtres d'accès. Les baies du rez-de-chaussée présentent un
encadrement mouluré à crossettes avec agrafes sculptées. A l'étage, les
fenêtres sont également traitées avec un encadrement mouluré à crossettes et
surmontées d'une table sculptée et d'une corniche soutenue par deux consoles
sculptées. La toiture brisée en ardoise est soulignée d'une balustrade et
dotée de lucarnes à frontons cintrés. Le fronton monumental présente dans sa
partie supérieure un écu sculpté aux initiales MD des propriétaires se
détachant sur un cuir découpé. Les façades latérales larges de trois travées
sont traitées de la même manière que la façade nord-est (fenêtres et
lucarnes à traverse et demi meneau, masques sculptés, frontons cintrés ou
triangulaires). Une aile basse couronnée d'un balustrade est greffée sur la
façade latérale nord-ouest. La distribution et la décoration intérieures
sont conservées : le vestibule avec décor en stuc imitation marbre,
l'escalier et la galerie en bois desservant l'étage, les boiseries, les
plafonds peints, le salon principal avec plafond peint d'oiseaux et de
fleurs et lambris avec soieries. L'avant-corps présente des verrières ornées
aux initiales MD avec deux gentilshommes tenant des hallebardes. Les jardins
sont délimités au sud-ouest par une balustrade dominant la route
départementale et l'estuaire. Un puits est situé en contrebas, au pied de la
terrasse au sud. (1)
château Tayac 33710 Saint-Seurin-de-Bourg, tel. 05 57 68 40 60, propriété
vinicole.
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