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La Table théodosienne
mentionne, sur la voie romaine qui reliait les villes de Bordeaux (Burdigala)
et de Périgueux (Vesuna), une localité appelée Varatedo, comme première
station. D'Anville et Jouannet pensent que Varatedo est Vayres; il existe,
en effet, une route qui, pendant tout le Moyen Age, conduisait de Bordeaux à
Vayres et portait, dans la paroisse de Caillau, le nom de La Lebade. Il y a
dans le bourg de Vayres une maison sous laquelle on trouve des mosaïques.
Dans le jardin du château, on a découvert une si grande quantité de vases de
terre, qu'on a supposé, non sans raison, qu'il y avait là une fabrique de
poteries. Dans le même endroit, on trouve assez souvent des monnaies et
d'autres objets romains. Nous avons donc tout lieu de penser que si Vayres
n'est pas Varatedo, c'est du moins une localité qui a été occupée par les
Gallo-Romains, et dans laquelle il y avait une riche villa. Dans le courant
du XIe siècle, des seigneurs du nom de Gombaud possédaient la terre de
Vayres. L'abbé Baurein pense que ces Gombaud appartenaient à la même famille
que les Gombaud, seigneurs de Lesparre, et à celle de Gombaud, archevêque de
Bordeaux en 992. Entre les années 1060 et 1086, Raimond Gombaud, sa femme
Audenodis, et leurs fils Clair, Vigoureux, qui se fit moine, et Géraud,
firent des dons assez considérables à l'abbaye de Saint-Jean d'Angély. Ils
lui donnèrent, entre autres, l'église de Sainte-Marie de Vayres (de Variis,
ad varias), celles de Saint-Jean, de Saint-Pierre de Vaux (de Vallibus), de
Saint-Martin d'Izon et de Saint-Martin du Boisset (de Busseto). Dans le
courant du XIIe siècle, un autre Raimond Gombaud et son frère Clair, donnent
un droit de pêche dans la Dordogne à l'abbaye de La Sauve-Majeure. Au
commencement du XIIIe siècle, l'Entre-deux-Mers était infesté de brigands,
et la justice royale se faisant probablement assez mal, Henri III accorda ou
confirma, en 1238, le droit de haute justice aux plus grands seigneurs du
pays, entre autres à celui de Vayres.
Le 25 mai 1242, le même monarque, en guerre avec saint Louis, roi de France,
convoqua les seigneurs gascons. Il écrivit à Raimond Gombaud, seigneur de
Vayres, de se trouver à Pons avec trois chevaliers, le jeudi après la
Pentecôte. Le seigneur de Vayres prit probablement part à la révolte des
Gascons contre le roi d'Angleterre, qui, s'étant saisi du château de Vayres,
chargea, le 18 juillet 1253, Pierre Calhau, bourgeois de Bordeaux, de le
garder jusqu'à nouvel ordre. Il enjoignit en même temps aux habitants de
Vayres d'obéir à leur nouveau gouverneur. Pendant ce temps, Thomasse, fille
unique de Raimond Gombaud, s'était mariée avec Guitard de Bourg, seigneur de
Verteuil, fils de Jean de Bourg, et lui apporta la terre de Vayres; mais
Amaubin de Barès, qui, pendant la révolte des Gascons, était resté fidèle au
roi d'Angleterre, avait du se la faire céder en totalité ou en partie.
Guitard de Bourg et sa mère Rose, veuve de Jean de Bourg, s'adressèrent au
roi d'Angleterre pour régler le différend qui existait entre eux et Amaubin
à propos du château de Vayres. Il est assez probable que déjà, à cette
époque (1254), Guitard avait épousé Thomasse de Gombaud, avec laquelle il
eut une fille nommée Rose, qui, le 30 juillet 1260, épousa, en premières
noces, Eyquem Guillem, séigneur de Lesparre, et plus tard en secondes,
Amanieu d'Albret, à qui elle apporta en dot Vayres et ses autres
seigneuries. Il est dit, dans le contrat passé, le 1 5 janvier 1288, par
devant RaymondGontier, notaire, que le sire d'Albret avait dégagé, à ses
dépens, la terre de Vayres, sur laquelle il était dû 2,000 livres aux
héritiers de Guitard de Bourg, et qu'il avait fait hypothéquer son château
de Bore. Amanieu d'Albret, à peine marié, se fit rendre hommage par les
tenanciers et les divers seigneurs de la juridiction de Vayres.
Quelques-uns, entre autres Guillaume de Montravel, seigneur de Jabastas, s'y
refusèrent, donnant pour raison qu'ayant fait hommage à Rose de Bourg, ils
ne devaient rien tant que cette dame vivrait. D'autres, au contraire, s'y
soumirent.
Nous trouvons, dans la liste qui fut dressée à cette occasion, les divers
devoirs et les sommes que chacun d'eux devait en faisant l'hommage. Les
hameaux de la juridiction étaient aussi chargés de certaines redevances,
entre autres de fournir des pieux pour fortifier les fossés du château.
Amanieu VII d'Albret tenait pour le roi de France; mais Bérard, son dernier
fils, ne suivit pas sa voie politique; il se ligua contre lui avec les
Anglais, s'empara de vive force des terres de Gironde et de Vayres. Amanieu,
pour le punir, le déshérita par un codicile ajouté, le 21 septembre 1324, à
son testament; mais, en vertu du dernier testament de Rose de Bourg, sa
mère, fait le 6 juin 1326, il resta seigneur de Vayres. Rose de Bourg mit
pour condition à ce legs qu'il donnerait à chacune de ses quatre sœurs:
Mathe, dame de Bergerac; Jeanne, dame de Ribérac; Thomasse, dame de
Surgères, et Salide, vicomtesse de Fronsac, 50 livres bordelaises de rente
prises sur le péage de Vayres, et, si le péage ne fournissait pas assez, sur
la châtellenie de Vayres. Bérard servit fidèlement le roi d'Angleterre, qui,
le 30 juin 1326, fit fortifier le château de Vayres, et lui écrivit, le 10
mars 1328 et le 17 avril 1330, pour le remercier de ses services et
l'engager à persister dans la même voie. Le 7 octobre 1341, il lui fit
hommage pour raison du château de Vayres et de toutes ses autres
seigneuries. Depuis longtemps les seigneurs de Vayres et ceux de Fronsac
étaient en procès à propos de certains droits que chacun d'eux prétendait
avoir sur le château de l'autre. Raimond, vicomte de Fronsac, disait que le
château et la châtellenie de Vayres, avec toutes ses appartenances et
dépendances, devaient tenir de lui; Bérard prétendait, au contraire, que,
sauf une motte sans seigneurie et sans justice haute ni basse, qui était
dans le château de Vayres, il ne tenait rien de lui, mais seulement du roi
d'Angleterre. Le vicomte ajoutait que la grande salle du château de
Puynormand mouvait de lui; Bérard prétendait avoir le même droit sur la
grande tour du château de Fronsac.
Ces diverses prétentions, probablement justifiées par des actes, étaient
fort gênantes pour les deux seigneurs et auraient pu amener des conflits
fâcheux; aussi résolurent-ils, de l'avis d'amis communs, de déterminer les
droits que chacun devait avoir. En conséquence, le 8 mai 1 341, ils
passèrent la transaction suivante: Bérard tiendra à l'avenir, à hommage
franc et gentil, du vicomte de Fronsac, le château de Vayres avec tous les
fosses vieux qui l'entourent et certaines choses qui sont dans les paroisses
de Notre-Dame et de Saint-Pierre d'Arveyres. Le reste de la châtellenie de
Vayres demeurera en entier à Bérard, ainsi que la grande salle du château de
Puynormand. De son côté, Raimond conservera, en toute propriété et sans
aucun hommage, la grande tour du château de Fronsac. Le même jour, après la
signature de la transaction, Bérard fit hommage au vicomte de Fronsac pour
raison du château de Vayres. Bérard fit son testament le 9 janvier 1345; il
avait épousé, en 1318, Guiraude de Gironde, fille d'Arnaud de Gironde et de
Thalésie de Caumont; il eut un fils qui porta le même nom que lui, et qui
épousa Brunissinde de Grailly, fille de Pierre II de Grailly, seigneur de
Bénauge et de Castillon, et d'Assalhide de Bordeaux. Dans son contrat de
mariage, Bérard II avait colloqué les droits de sa femme sur la terre de
Verteuil; mais, par son testament daté du 24 décembre 1374, il les avait
reportés sur la terre de Vayres. Après sa mort, Brunissinde demanda à Bérard
d'Albret, neveu de son mari, seigneur de Langoiran, fils et héritier d'Amanieu
d'Albret, la délivrance de Vayres; ce que celui-ci accorda, et, par acte
daté du 29 janvier 1375, il ordonna à Penot de Birac, capitaine du château
de Vayres, et aux habitants de la reconnaître pour dame et maîtresse.
Brunissinde, à sa mort, laissa pour héritier son frère Archambaud de
Grailly, dont le fils, Gaston de Foix, se mit en possession de la terre de
Vayres.
Alors Marguerite d'Albret, sœur et héritière de Bérard, intervint et demanda
que Vayres lui fût livré; mais Gaston répondit que cette terre étant
hypothéquée à la dot de Brunissinde, il ne la retenait que pour garantie des
droits qu'y avait son père; que, cependant, ne voulant pas que Marguerite
fût dépouillée de ses droits, il consentait à lui donner 400 livres
bordelaises la première année, 100 livres les autres années, avec le droit
d'habiter le château de Vayres avec une suite de douze personnes, pourvu que
ces personnes jurassent de ne rien faire contre les droits de Gaston.
Celui-ci restait seigneur en partie de la terre de Vayres, sur laquelle il
lui revenait, du droit de sa sœur, 10,000 écus d'or. La transaction fut
passée au château de Vayres le 30 juin 1411. Depuis longtemps le sire
d'Albret, connétable de France, et son frère Louis, avaient pris le parti du
roi de France, ce qui leur faisait craindre la confiscation de celles de
leurs terres qui comme Vayres, étaient situées au milieu des possessions
anglaises. Ils ne trouvèrent rien de mieux, en 1406, alors que le duc
d'Orléans allait entrer en Guienne à la tête d'une armée française, que de
confier la garde de Vayres à Marguerite d'Albret, dame de Mussidan. Ils lui
écrivirent, en conséquence, pour la prier de faire le serment au connétable
d'Albret de lui conserver son château; de le lui rendre quand elle en serait
requise; de ne faire supporter aucune taille aux habitants de la seigneurie
de Vayres; d'employer une partie des revenus aux réparations dudit lieu; de
ne faire aucun tort, pour quelque cause que ce fût, à ceux qui tiendraient
le parti de la France; de ne garder dans le château que les gens de son
hôtel et les habitants de la seigneurie, et surtout de faire avoir au
connétable l'assurance, signée par le sénéchal de Bordeaux, le sire de
Montferrand, et ses enfants, et les autres barons de la Guienne tenant le
parti des Anglais, que, pendant tout le temps que Vayres serait en sa main,
ils ne feraient aucun tort aux habitants de cette seigneurie.
Marguerite se trouvait ainsi dans une fausse position; elle prit le parti le
plus raisonnable: ses neveux étaient loin, Vayres était au milieu des
possessions anglaises, à quelques lieues de Bordeaux, centre de leur
puissance; Gaston de Foix, son parent, en grande faveur auprès du roi
d'Angleterre, avait une forte hypothèque sur la terre de Vayres. Ne voulant
pas se mettre mal avec les jurats de Bordeaux, elle leur communiqua, le 6
août 1406, la correspondance de ses neveux, et, le même jour, elle fit
soumettre à leur examen, par le cardinal-archevêque de Bordeaux, qui paraît
avoir été son conseiller dans cette affaire, une pièce qui portait le nom
des 21 hommes qu'elle avait choisis pour garder le lieu de Vayres:
c'étaient, entre autres, Amanieu d'Anglades, Laurant de Sancta-Massa,
Perinot de La Tour, Baudinot de Pommiers, Relies de La Campena. Nous avons
vu plus haut que Gaston de Foix avait des droits sur la terre de Vayres. Le
15 mars 1417, elle fut confisquée au sire d'Albret par le roi d'Angleterre,
et donnée à ce même Gaston, qui en devint ainsi seigneur en totalité. Peu de
temps après, le 16 janvier 1421, une transaction fut passée entre le roi
d'Angleterre et la famille d'Albret. Celle-ci devait remettre toutes les
terres qu'elle avait prises au roi, qui, de son côté, devait rendre la
pareille aux d'Albret, et leur restituer en même temps tous leurs
privilèges. Des réserves étaient faites cependant pour Vayres et plusieurs
autres terres que les d'Albret réclamaient. Cette dernière seigneurie fut de
nouveau concédée à Gaston de Foix, le 28 juin 1426 et le 14 août 1433.
Cependant, le moment arrivait ou tout allait être bouleversé en Guienne.
Dunois, à la tête d'une armée française, après avoir pris Blaye et Bourg,
assiégeait Fronsac (1451). A cette nouvelle, les Bordelais, voyant que la
cause des Anglais était perdue et ne voulant pas irriter le vainqueur,
promirent de livrer Vayres et plusieurs autres places importantes s'ils
n'étaient pas secourus dans trois semaines.
On sait comment les Français s'emparèrent de la Guienne. Gaston de Foix,
d'accord avec son fils Jean, vendit à Dunois et à autre Gaston de Foix, son
neveu, qui commandait un des corps de l'armée française, ses terres de la
Guienne, parmi lesquelles se trouvait Vayres, et se retira à Meille en
Aragon, ou il mourut. Peu de temps après, Gaston racheta la portion de
Dunois. Il paraît cependant, si l'on en croit un extrait informe de lettres
patentes de Charles VII, que les terres de Vayres et de Verteuil furent
restituées, le 21 décembre 1451, au seigneur d'Albret, dont les descendants
restèrent seigneurs de Vayres, malgré les réclamations de Gaston de Foix et
de ses héritiers. Le 18 octobre 1461, Charles d'Albret dit le Cadet fit
hommage à Louis XI, pour raison de la seigneurie de Vayres, et à Charles,
duc de Guienne, le 21 février 1469. En 1471, il recevait, comme seigneur de
Vayres, les hommages de ses vassaux. Ayant pris le parti de Jean d'Armagnac,
qui s'était révolté contre Louis XI, il fut fait prisonnier, conduit à
Poitiers, jugé et condamné à mort. Le roi confisqua les terres qui lui
avaient appartenu, et les donna, au mois de juin 1473, à Alain d'Albret, ne
voulant pas, dit-il, qu'elles sortissent de cette famille. De 1474 à 1479,
des reconnaissances étaient faites en faveur d'Isabeau de La Tour, dame d'Orval,
de Lesparre et de Vayres, comme mère et tutrice de Jean d'Albret, son fils
mineur, seigneur d'Orval. Alain d'Albret était cependant seigneur de Vayres
en 1520, puisqu'il assista, en cette qualité, à la réunion chargée
d'approuver les Coutumes de Bordeaux, et en 1521, puisque, à cette époque,
il donna procuration au sieur de Lussan pour vendre la seigneurie de Vayres.
Nous ne savons si elle fut vendue; mais, dans tous les cas, elle ne sortit
pas de la famille d'Albret, car, en 1529, on trouve des reconnaissances
passées en faveur de Henri, roi de Navarre, seigneur d'Albret, etc, et de la
duchesse de Valentinois, tous deux absents; mais celle-ci avait donné, avec
le consentement du roi de Navarre, le 12 septembre 1528, procuration à Jean
Bonnet pour les recevoir.
Le 7 juillet 1541, Henri, et sa femme, Catherine de France, sœur unique du
roi François 1er, donnèrent procuration à leur oncle, le sieur Rollet,
bâtard d'Albret, sieur de Sauros, gouverneur de la terre d'Albret, pour
recevoir, en leur nom, les hommages des prélats, gens d'église,
gentilshommes et autres qui tenaient d'eux noblement dés fiefs et
arrière-fiefs dans toute la seigneurie d'Albret. Ainsi aux mois de septembre
et d'octobre suivants, les vassaux de la terre de Vayres firent hommage
entre les mains de Rollet. En 1556, à la même époque où la seigneurie
d'Albret fut érigée en duché, Antoine, roi de Navarre, et Jeanne sa femme,
vendirent, à pacte de rachat de douze ans, la terre de Vayros à Jean de
Pontac, notaire et secrétaire du roi, greffier civil et criminel en la Cour
de Parlement de Bordeaux. En 1662, Jeanne, voulant retirer la terre des
mains de Mre de Pontac, chargea Bertrand de La Vie, avocat au Parlement de
Bordeanx, de la revendre, pour la même somme et à pacte de rachat de vingt
ans, à François Monsieur de Foix-Candale, qui lui avait prêté 12,000 livres
tournois, plus 500 livres pour les loyaux coûts. Cette vente fut faite, par
acte passé devant Caslaigne, notaire à Bordeaux, le 25 février 1562. Le 19
mars 1579, Henri, roi de Navarre, racheta la terre de Vayres à François
Monsieur de Foix, qui, depuis l'acquisition qu'il en avait faite, était
devenu évêque d'Aire. Il la vendit, le 10 avril 1580, à condition de rachat
de trente ans, à demoiselle Marie de Chaumont, femme de M. Me Bertrand
Arnoult, seigneur de Nieuil, conseiller du roi en la Cour de Parlement de
Bordeaux, moyennant 8,000 écus d'or sol. Marie de Chaumont étant morte,
cette terre passa à son fils unique et héritier, Henri Jaubert, sieur de
Barrault, sénéchal de Bazadais. Il ne la garda pas longtemps, car elle lui
fut rachetée par le roi de Navarre, qui, par suite de quelques arrangements
de famille, la revendit à Ogier de Gourgues, seigneur baron de Leige, La
Rochechandry et autres lieux, conseiller, maître d'hôtel ordinaire du roi,
et président au bureau de la trésorerie générale de France en Guienne, par
acte passé devant Castaigne, notaire à Bordeaux, le 19 juillet 1583.
Cette vente fut faite purement, simplement, à perpétuité et à jamais,
moyennant la somme de 50,000 livres tournois, à la condition seule "que
ledit sieur de Gourgue et ses successeurs, seigneurs dudit Vayres, seront
tenus recognoistre tenir, à foy et homage dudit sieur roy de Navarre et ses
successeurs roys de Navarre inséparablement, ladite terre et seigneurie de
Vayres et ses appartenances et dépendances, au devoir d'une paire de gans à
muance du roy de Navarre ou de vassal, d'une part et d'autre". Le 30 août
1583, Ogier de Gourgues prit possession de son acquisition. A cette époque,
les terres qui sont situées entre le château et l'église de Vayres
appartenaient à divers particuliers. Ogier, voulant sans doute envelopper
son château d'un parc, faire des jardins et des promenades, acheta, surtout
en 1587, toutes ces terres. On le voit, dans les années suivantes, recevoir
les hommages de ses vassaux et tenanciers, et faire de nombreuses
acquisitions dans la juridiction de Vayres. Depuis 1583, la terre de Vayres
était restée dans la famille de Gourgues; elle n'en est sortie que pour
passer dans les mains de M. le baron Albert de Bony, par son mariage avec
demoiselle Eugénie-Cécile-Jacqueline de Gourgues, fille d'Armand
Dominique-Ange-Louis,marquis de Gourgues, et de demoiselle Albertine de
Montboissier, petite-fille de l'illustre Malesherbes. Quoique appartenant à
la famille d'Albret, et en dernier lieu à Henri, roi de Navarre, qui fut
plus tard Henri IV, le château de Vayres ne joua aucun rôle pendant les
guerres de religion du XVIe siècle; il n'en fut pas de même au XVIIe. En
1649, le château appartenait pour un tiers à Olive de Lestonnac, femme de
Marc-Antoine de Gourgues, et pour les deux autres tiers à son neveu
Jean-Jacques de Gourgues, dont le cousin, appelé le capitaine de Gourgues et
avec lequel il était en procès depuis longtemps à propos de l'héritage de
leurs ancêtres communs, s'en était emparé, après en avoir chassé le fermier.
Peu après, le duc d'Épernon, voyant que les Bordelais levaient sérieusement
des troupes et équipaient une flotte, résolut de se rendre maître de ce
château, qui était une des clefs de Libourne et dominait la Dordogne.
Aussitôt que le Parlement eut connaissance de ce projet, il fit tous ses
efforts pour mettre la place en état de défense. Il crut, sans doute, être
assuré de la participation du capitaine de Gourgues, comme il était sûr de
la fidélité du président, et il lui laissa le commandement du château. Des
troupes éprouvées furent envoyées à Vayres; on dressa des barricades aux
abords du bourg, en face des chemins qui se dirigeaient sur Libourne et sur
Bordeaux, et une demi-lune fut construite devant le château. Quand les
épernonistes arrivèrent, la désunion s'était mise entre les chefs; les
barricades furent mal ou faiblement défendues; le bourg fut pris. La prise
de Vayres fut une grande perte pour les Bordelais et favorisait, par contre,
les projets du duc d'Épernon; aussi Pontac, seigneur d'Anglade, qui avait
fortement contribué à la prise de Vayres, soit par les intelligences qu'il y
entretenait, soit par des secours matériels, fut condamné à mort par les
Bordelais et exécuté en effigie. Le château ne tarda pas à rentrer au
pouvoir des parlementaires. Le cardinal de Mazarin, connaissant toute
l'importance de cette position, et désirant surtout faire le plus de mal
possible aux Bordelais, qui ne cachaient pas la haine qu'ils ressentaient
pour lui et pour le duc d'Épernon, donna au maréchal de La Meilleraye
l'ordre de s'en saisir et de l'assiéger dans les formes, s'il ne pouvait
l'emporter autrement. A son arrivée devant Vayres, le maréchal de La
Meilleraye fit sommer Richon de se rendre, le menaçant, s'il était pris
l'épée à la main, de le faire pendre avec les hommes de sa suite. Richon
répondit qu'on lui avait confié la place et qu'il tâcherait de la garder. Le
maréchal ouvrit la tranchée du côté du bourg où la brèche était plus facile
à faire, et donna, le 3 août 1650, un assaut qui fut repoussé. Après cette
affaire, les assiégeants firent demander une trève. Elle leur fut accordée;
mais un nommé Thévenin, cousin germain de Richon, et qui, en cette qualité,
avait le commandement d'un poste avancé, se laissant séduire par les
promesses que lui firent le marquis de Biron, trahit son cousin et
introduisit les ennemis dans le retranchement. Richon, se voyant dans
l'impossibilité de résister, se rendit à la condition qu'on laisserait la
vie à lui et aux siens.
Le maréchal de La Meilleraye, le marquis de Biron et M. de Théobon, se
portèrent garant de ce traité, qui cependant ne fut pas exécuté, car Richon,
conduit à Libourne, fut pendu aux halles. Après ce siège, le château de
Vayres se trouvait dans un état déplorable; les. murs étaient partout
lézardés; les meubles, les portes, les planchers, les toitures, en partie
enlevés, et, malgré toutes les réparations qu'on y fit, il ne put reprendre
son ancienne splendeur En juin 1659, Louis XIII, en considération des
services rendus par le président de Gourgues et sa famille, érigea la terre
de Vayres en marquisat, et confirma tous les privilèges dont ses seigneurs
avaient joui auparavant. Depuis cette époque, le château de Vayres n'a été
le théâtre d'aucun fait intéressant. Le seigneur de Vayres avait le droit de
haute, moyenne et basse justice; droit de litre et de banc dans toutes les
églises de la juridiction; de lever quatre fourches patibulaires; droit
d'amende et de sceau, et autres revenus et émoluments en dépendant; pouvoir
de créer des officiers, procureurs, sergents et notaires; droit de baillage,
prévôté, greffe, geôlerie; droit de tenir quatre foires par an et un marché
par semaine au bourg de Vayres; droit de poids et mesure, de guet et garde,
carnelage, boucherie et halle; les cens, rentes, dîmes inféodées et agrières,
en blé, avoine, vin, deniers, chapons, gélines, pains, manœuvres et corvées
d'hommes et de bétail. Tous droits de seigneurie directe et foncière; droits
de lods et ventes, prélation ou retrait par puissance de fief sur les
vassaux, tenanciers et hommagers de ladite seigneurie; droit de vinée
pendant le mois de mai et aux quatre jours de foire; la quatrième partie de
la dîme de Fronsac; dîme de cochons, d'agneaux, blé, chanvre, vin, millet et
avoine, dans Vayres; droit de tenir justice au milieu de la rivière durant
toute l'étendue de la terre; droit de pêche et de chasse, deux moulins
banaux, garenne, parc, prés, vignes, bois taillis, forêt, glandage, lande,
marais, grands et petits raux, vacants, paduensage; droit de petit péage et
de grand péage dans la ville de Libourne; celui de lever cinq mines de sel
sur cinq muids sur toutes les barques qui passent devant le château sur la
Dordogne; droit de bac et passage au port de Saint-Pardon, au port de Vayres
et à celui du Noyer.
La juridiction de Vayres s'étendait sur les paroisses de Saint-Jean de
Vayres et de Saint-Pierre de Vaux dit d'Arveyres tout entières, et sur
quatre demi-paroisses, savoir: Saint-Germain du Puch, Saint-Sulpice du
Bernac, Caillau et Izon. Elle confrontait, du côté du levant, à la rivière
de Dordogne, commençant en amont à l'estey appelé la Moulinasse, autrement
de Barbeyrac, paroisse d'Arveyres, et descendant jusqu'à celui de Lamirau,
paroisse d'Izon, et à la pierre de marbre qui était en 1686, dans le bourg
d'Izon, devant la maison de Me Florent La Fargue, notaire royal, faisant
séparation de ladite juridiction d'avec la prévôté royale d'Entre-deux-Mers;
du couchant, aux portes des églises de Saint-Sulpice et de Caillau, allant
au lieu appelé au Ruisseau de La Barède (La Barrade) qui conduit au moulin
appelé de Canlerane, situé en la paroisse de Saint-Sulpice, faisant de ce
côté la séparation de la prévôté royale d'Entre-deux-Mers d'avec la
juridiction de Vayres; au canton de Lareille, paroisse de Caillau, et au
ruisseau qui descend de Caillau au lieu de La Barède; du midi, à l'estey de
la Moulinasse, qui fait la séparation de la juridiction de Vayres d'avec
celle de Génissac et de la prévôté d'Entre-deux-Mers; au chemin de La Regue,
paroisse de Cadarsac; dans les paroisses de Saint-Germain du Puch et de
Nérigean, et au lieu appelé de Graveyron, où il y a une pierre plantée entre
deux esteys, près du moulin du Graveyron; aux quatre chemins appelés de La
Regue de Rey, et au pas du ruisseau appelé de La Gourgue, oil de son côté
s'arrêtaient les limites de la prévôté royale d'Entre-deux-Mers. Parmi les
hommages qui étaient dus aux seigneurs de Vayres, il en était un assez
original et que l'on appelait l'hosanne; il se rendait tous les ans, le jour
des Rameaux. (1)
Éléments protégés MH : le château, les dépendances et le moulin, à
l'exception des parties classées : inscription par arrêté du 18 septembre
2000. Les façades et les toitures du château, du moulin et des dépendances,
les jardins : classement par arrêté du 4 octobre 2001, modifié par arrêté du
9 avril 2002. (2)
château de Vayres 33870 Vayres, tel. 05 57 84 96 58,
ouvert au public de Pâques à la Toussaint de 14h à 18h30.
Ce site recense tous les châteaux de France, si vous possédez des documents
concernant ce château (architecture, historique, photos) ou si vous
constatez une erreur, contactez nous. Nous remercions chaleureusement Madame
Cathy du site
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pour les photos qu'elle nous a adressées pour illustrer cette page.
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de Gironde" tous les châteaux répertoriés à ce jour
dans ce département. |
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