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Le site se compose d’un donjon du XIIIe siècle,
vestige de l’ancien château fort de la famille de Rupt, de fortifications
(notamment une tour carrée), d’une demeure du XVe ou du XVIe siècle appelée
le "vieux château" ou le "petit château", de celle de 1820 dite le " nouveau
château" ou la "gentilhommière" avec ses dépendances (ferme et chenil au
nord, serres, etc.), d’une orangerie des années 1860-1870 et d’un pavillon
bâti au sud peu avant 1877. Selon Louis Suchaux, la maison de Rupt apparaît
pour la première fois au XIIe siècle: en 1132, lors d'une donation aux
religieuses de Tart, deux des témoins sont Hugo de Rupe et son fils Wido.
Cette information est reprise par l'auteur de la notice de Rupt dans le
Nouveau dictionnaire des communes de la Haute-Saône. D'après ce dernier,
l'arrière-petit-fils de Guy de Pesmes, mort en 1160, Jacques de Pesmes
(1217-1248), prit le nom de Rupt qu'il transmit à ses descendants. Ce que
confirment les historiens Eric Affolter, Pierre Pégeot et Jean-Claude Voisin
qui, de plus, précisent que la mention "maison de Rupt" apparaît pour la
première fois en 1295 et que ce n'est qu'en 1342 que le mot de château
apparaît dans les textes. Le donjon, tel qu'il est parvenu jusqu'à nous,
date du XIIIe siècle comme le suggèrent le linteau sur coussinets de la
porte qui ouvre sur la salle du premier étage et la voûte d'ogives qui la
couvre. En 1340, un des membres de cette famille, Jean de Rupt, était au
service du duc de Bourgogne, Eudes IV. Le rédacteur de la notice sur Rupt
ajoute "qu'à la mort de ce sire, qui ne laissa point de postérité, son
héritage arriva d’abord à des collatéraux qui portaient également le nom de
Rupt, ensuite, par des alliances, à la maison de Goux, puis à celle de
Clermont d’Anjou, par le mariage de Philiberte de Rupt avec René de
Clermont-Gallerand, seigneur de Saint-Georges, le 25 février 1517".
Le château fort de Rupt est signalé, par Louis Suchaux, comme "l’une des
places fortes les plus solides de la contrée qui résista victorieusement à
plus d’une attaque, notamment à celle du sire de Craon en 1474, qui, au nom
du Roi de France, prenait et ruinait tous les postes fortifiés de la rive
droite de la Saône". Sa muraille sert d’appui à une demeure, appelée le
"vieux château" ou le "petit château", dominant le village. Bâtie à l’est au
XVe siècle ou au XVIe siècle, elle est modifiée par la suite (peut-être au
XVIIIe siècle). D’après Victor Trebillon et l’abbé Louis Ducros (dans leur
ouvrage Rupt-sur-Saône. Histoire d’une baronnie), le baron de Rupt Victor de
Clermont entreprend à partir de 1647 la reconstruction des bâtiments. Un
contemporain, Claude-Antoine de Vaudrey, seigneur de Bétoncour, déclare en
1659 "que le seigneur Marquis a dû dépenser des sommes considérables, pour
faire construire de nouveaux bâtiments et redresser presseoirs, bergeries,
murailles, murailles de jardins et de vignes, logements divers, grangeages".
Le cuvage, désigné localement sous le nom de "cuverie" ou "pressoir",
pourrait avoir été reconstruit dans la seconde moitié du XVIIe siècle au
niveau de la basse-cour, prolongé au sud-est par un logis et une bergerie
figurés sur le cadastre napoléonien de 1837 (qui montre en outre un corps de
logis en retour au nord-ouest, détruit depuis). Les encadrements chanfreinés
des baies rectangulaires de la tour à l’angle nord-est confortent cette
hypothèse; signalons par ailleurs la présence d’une meurtrière basse à
l'est.
En 1674, l’édifice est démantelé lors de la conquête de la Franche-Comté par
Louis XIV. En 1730, Jean-Baptiste Louis de Clermont et de Cheverny, marquis
de Resnel, vend le château et la terre de Rupt au fermier général Pierre
Grimod du Fort. Par lettres patentes d'août 1770, la seigneurie est érigée
en comté sous le nom d'Orsay au profit de son fils Pierre Marie Gaspard
Grimod d'Orsay (Paris, 14 décembre 1748, Vienne, Autriche, 1er janvier
1809). L'auteur de la notice sur Rupt dresse la liste des villages
appartenant alors à la terre de Rupt: "outre Rupt, les villages de Chantes,
Cubry-lès-Soing, Delain, Nervezin, Oigney, Ovanches, Preigney, Saint-Albin,
Soing, Vauconcourt et Vy-le-Ferroux". A la Révolution, le château est
saccagé par des émeutiers dans la nuit du 30 août 1792. La charpente de la
flèche prend feu et "une masse d'archives des plus intéressantes pour
l'histoire de la Franche-Comté, fut dilapidée ou brûlée et des pièces
historiques de valeur inestimables", qu'énumère l'auteur de la notice,
"furent volées ou détruites". Lors de cet épisode, Pierre Marie Gaspard
Grimod d'Orsay est en Allemagne. Considéré comme émigré, il voit ses biens
confisqués puis meurt en Allemagne laissant deux fils. L'un d'eux, le futur
général d'Empire Jean François Louis Marie Albert Grimod d'Orsay (Paris, 19
mai 1775-Rupt-sur-Saône, 26 décembre 1843), rachète le site.
A sa mise en réserve de l'armée, il y résidera de façon permanente à partir
de 1830 jusqu'à son décès le 26 décembre 1843. Il entreprend la restauration
du donjon et fait construire en 1820 une nouvelle demeure, dite le "nouveau
château" ou la "gentilhommière", et diverses dépendances: ferme (remplaçant
celle dessinée sur le plan cadastral de 1837) et chenil au nord, serres,
etc. Acheté le 16 décembre 1844 par Marie Stanislas de Buyer, le site passe
à son fils Joseph de Buyer, maître de forges à Vy-le-Ferroux, marié en 1851
avec Alphonsine Boutechoux de Chavannes. C’est certainement Joseph qui fait
bâtir l’orangerie, sans doute vers 1860-1870 comme le laissent supposer les
arcs surbaissés de ses baies, et transférer les serres de part et d'autre du
bâtiment. Le Livret d'accueil du château de Rupt-sur-Saône apporte les
indications suivantes: "la serre était dotée d'eau courante, grâce à une
machine à vapeur et à une citerne enterrée dans le champ au-dessus; en
outre, elle bénéficiait en hiver d'une chaleur constante grâce à un fourneau
à braises chauffant des plaques de fonte". Joseph de Buyer est aussi à
l’origine du pavillon bâti au sud (sur une tour de la muraille) dans le
quatrième quart du XIXe siècle, certainement peu avant 1877 (cette date est
inscrite sur la peinture monumentale du peintre Joseph Garret, de Vesoul,
ornant la salle du rez-de-chaussée). Autre construction de cette deuxième
moitié du XIXe siècle la conciergerie dans l'angle sud-est du site. Vendu en
1902 par la famille de Buyer, le site passe en 1921 à Jules Jacquemin,
industriel à Besançon, puis à sa fille Madeleine (épouse Nappez). La
propriétaire actuelle, descendante de Madame Nappez, a ouvert le site à la
visite.
Le site occupe une hauteur dominant le village, étagée en terrasses et
faisant face à la colline où s’élève l’église paroissiale. La propriété
comprenait aussi des terrains au nord-ouest, notamment au lieu-dit la
Garenne enclos à l’époque du comte d’Orsay par un mur. Du château fort
subsistent le donjon, quelques tours et une partie des murailles, dont le
tracé se lit encore au niveau de la demeure dite le "vieux château" et du
bâtiment appelé la "cuverie". L’entrée principale s’effectue au nord par un
portail moderne, fermé par une grille en fer forgé cantonnée de deux piliers
en pierre de taille. Un autre accès est visible sur une aquarelle du début
du XIXe siècle signée François Lempereur: un chemin en zigzag monte depuis
l'actuelle rue du Pâquis jusqu'à la tour (dite tour carrée) sur laquelle a
été construit le pavillon. Une entrée a aussi été créée par la famille de
Buyer, au bas de la rue de la Garenne, gardée par une conciergerie à
laquelle on accède par un escalier à double volée en pierre. Depuis l’entrée
principale, une allée droite conduit au donjon et aux demeures situées à
l’est. La première construction rencontrée, à gauche de l’allée, est le
cuvage. Viennent ensuite le chenil (sur la gauche) puis la ferme (à droite),
au sud de laquelle est implantée l’orangerie. L’allée aboutit au donjon,
établi sur une motte, face auquel se dresse le nouveau château, construit
contre le mur de soutènement de la terrasse. Derrière ce dernier, au
nord-ouest, le vieux château est lui bâti sur la muraille fermant la
deuxième terrasse. Le pavillon est implanté sur une tour au sud-ouest.
Circulaire, le donjon est bâti en pierres de taille calcaires. Il comporte
un sous-sol, un rez-de-chaussée et quatre étages carrés. L’entrée d’origine
se trouvait au premier étage au sud/sud-est, où la porte haute est encore
visible, mais au XIXe siècle un nouvel accès, précédé d’un large escalier
extérieur droit en pierre, a été réalisé à l’ouest au rez-de-chaussée.
Attribué par la tradition locale au comte d’Orsay, l’aménagement énigmatique
du sous-sol correspond peut-être à une utilisation comme glacière. Un
escalier droit en pierre, parallèle au mur, relie le rez-de-chaussée au
premier étage tandis que la desserte des autres niveaux s’effectue à l’aide
d’un escalier ménagé dans l’épaisseur du mur. Le premier étage est couvert
d’une voûte d’ogives, le troisième a perdu son plancher. La tour est coiffée
par un dôme en matière plastique, invisible de l’extérieur. Les traces
d'arrachement d'une ancienne construction (peut-être celle figurée sur un
terrier du XVIIIe siècle de la Bibliothèque nationale) se lisent encore en
hauteur au sud-est. De plan rectangulaire, le cuvage est orienté
nord-ouest/sud-est avec une tour demi-hors-oeuvre à l’angle nord, il est
construit en moellons calcaires partiellement enduits.
La façade ouest est percée de quatre petites baies rectangulaires tandis que
la façade est l’est de soupiraux éclairant des caves disposées par groupe de
deux au nord-est et au sud-est. La façade sud-ouest est percée d’une porte
en plein cintre ouvrant sur l’espace intérieur en vis-à-vis d’une ouverture
identique au nord-ouest. Un escalier extérieur, droit, en pierre conduit au
rez-de-chaussée surélevé de la tour, dont la pièce comporte une cheminée en
pierre. De là, un escalier moderne en béton conduit à l’étage. La salle
sud-est située au premier étage est actuellement accessible par une échelle
depuis l'intérieur du bâtiment. La charpente apparente est en bois et le sol
en terre battue. Le toit à longs pans, à large croupe au nord-est et
demi-croupe au sud-est, est couvert de tuiles mécaniques, tandis que le toit
conique à égouts retroussés de la tour possède une couverture en écaille.
L’orangerie possède des murs en moellons calcaires enduits et un toit à
longs pans, croupes et tuiles mécaniques. Sa façade sud-est, contre laquelle
s’appuie la serre subsistante, est largement percée de baies en arc
surbaissé.
Éléments protégés MH : les façades et les toitures de l'ensemble des
bâtiments ; le pavillon dit le billard ; la ferme ; la tour ; le corps de
bâtiment appelé Petit Château : inscription par arrêté du 28 octobre 1991.
château de Rupt sur Saône, 5 rue de la Garenne, 70360
Rupt-sur-Saône, tel. 03 84 92 70 41, le parc est ouvert toute l'année,
samedi, dimanche, lundi et jours fériés. Tous les jours du 14 au 31 juillet,
de 10h à 12h et de 14h à 18h.
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