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Symbole du pouvoir local depuis les
origines d'une ville à laquelle il a donné son nom, Château-Raoul existe dès
le Xe siècle sur un site fortifié par les seigneurs de Déols. Sept seigneurs
portèrent le nom de Raoul, d'où le nom de Château-Raoul et de la ville de
Châteauroux formée de quatre bourgs juxtaposés: Saint-Martin et Saint-Denis,
Saint-Gildas et Saint-Christophe, la rue de l'Indre et la rue Grande. Au
moment de la fondation de l'abbaye de Déols en 917 par Ebbes le Noble,
seigneur de Déols, le castrum Dolis est déjà édifié et il y a, au-dessous,
une chapelle Saint-Martin qui est donnée avec son enclos à l'abbaye. Le
château est sur une éminence naturelle dont l'intérêt stratégique explique
le choix. Il est situé sur la rive gauche de l'Indre, à 1,5 km de
l'agglomération de Déols, vicus antique, siège de paroisse depuis l'époque
mérovingienne, en amont, sur la rive droite. Dès lors il y eut à Déols le
Burgus Dolis, Burgus Dolensis, traduit par Bourg-Déoulx ou, par une
déformation tenant compte de la prééminence ecclésiastique, Bourg-Dieu, et
le Bourg du Château, une agglomération ancienne et une nouvelle, qui connut
un essor rapide. C'est seulement au début du XIIe siècle que le château de
Déols prit le nom de Raoul. On a longtemps attribué à tort au fils d'Ebbes,
Raoul le Large, premier de la famille à porter ce prénom, et seigneur de 935
à 952, la construction du château. Le récit du siège de Châteauroux par
Philippe Auguste en 1187 témoigne de la valeur stratégique de ce castrum qui
dominait la vallée: "l'intérieur de la place forte semblait protégé de tout
ennemi par des tours, des murs très hauts et des fossés profonds et semblait
être imprenable".
Destructions et incendies n'ont rien laissé subsister du donjon primitif, ni
des constructions qui suivirent. L'hostel et donjon seigneurial est encore
dévasté par un incendie en 1366. À son emplacement fut élevée, au XVe
siècle, par Guy III de Chauvigny, une nouvelle demeure seigneuriale, en
partie conservée. Elle est flanquée de trois tourelles rondes à l'ouest et a
gardé des portes en ogives, des fenêtres surmontées d'ornements en
tiers-points et de fins décors de pierre sculptés. La porte d'entrée est
surmontée d'un écusson parti de Chauvigny et de Déols, vraisemblablement
recomposé par Alfred Dauvergne. À l'intérieur, le large escalier en vis a
été refait à l'identique en 1884. Un peu négligé au XVIIe et XVIIIe siècle,
le bâtiment devint, sous Louis XIV avec le château du Parc, la résidence de
Claire-Clémence de Maillé-Brézé, princesse de Condé, exilée par son mari, le
Grand Condé, duc de Châteauroux. Le roi Louis XV, qui rachète le duché à la
famille de Condé, l'offre à sa favorite, Marie-Anne de Mailly-Nesle, mais la
jeune duchesse de Châteauroux meurt brusquement (1744). Le Château-Raoul est
alors la résidence des administrateurs du duché et de leur famille: en 1773
Henri-Gatien Bertrand y voit le jour. Il sera grand maréchal du palais de
Napoléon 1er, compagnon d'exil de l'empereur, puis homme politique aux idées
libérales. C'est ensuite la demeure du fermier général Louis-Claude Dupin de
Francueil, grand-père paternel de George Sand.
En 1790, Châteauroux est choisi comme chef-lieu du nouveau département de
l'Indre. Le Château-Raoul, bien national de l'ancien apanage du comte
d'Artois, frère de Louis XVI, est acheté par le "conseil général du
département" pour dix mille livres le 8 août 1792, soit environ trois cent
cinquante mille francs actuels, peut-être un peu moins avec la dépréciation
commençante des assignats. Un plan du château et de ses dépendances, levé en
1791 par le géomètre Jean-Baptiste Crochet, donne une idée de son état
antérieur, où il y avait "cour principale et talus, cour d'honneur, escalier
du donjon, antichambre et cabinet, salle du directoire, bureau de
l'expédition, chartrier, chambre et cabinet de l'agent du ci-devant duché,
salle de compagnie, chambre à coucher, cuisine voûtée, entresol au-dessus,
salle de l'assemblée du département aussi voûtée, même disposition pour les
trois étages et appartements de même grandeur, écuries et magasins, fossés".
À partir de l'An VIII, la présence d'un préfet donne un nouveau lustre au
Château-Raoul. En 1823 commence la construction d'un hôtel de style
néoclassique avec communs en demi-sous-sol. Œuvre de Murison, il est achevé
en 1826. La colonnade en avant-corps est surmontée d'un fronton qui porta
d'abord les armes royales, puis l'aigle impérial, enfin la République, par
Girault-Dupin (1898). À côté, l'antique manoir a continué à abriter
l'administration. Pour caser de petits bureaux, les volumes d'origine furent
défigurés par des entresols et des cloisons, traversés par des conduits de
cheminée menaçant de mettre le feu.
En 1824, il fallut détruire le donjon, ébranlé par des tassements de terrain
du côté de l'Indre, et édifier les actuels murs de soutènement. Ce donjon,
situé entre le Château-Raoul actuel et l'hôtel du préfet, était le seul
reste de la forteresse antérieure à Guy de Chauvigny. Il avait abrité dans
la salle du Trésor les titres du duché de Châteauroux; le conseil général du
département de l'Indre y avait tenu sa première séance le 3 novembre 1790.
Retrouvant une partie du pouvoir sous la Ille République, le conseil général
décide la restauration du château dans le goût néo-médiéval. Commencés en
1879 par Alfred Dauvergne, qui restitue les lucarnes gothiques, les travaux
ne sont achevés qu'en 1914 par son fils Henri. Une remarquable restauration
s'achève en 2011. Il subsiste de cette époque la salle de réunion du conseil
général (1897, terminée en 1914), avec ses grands tableaux et ses vitraux,
toute à la gloire du Berry rural. Henri Dauvergne arrange aussi les abords,
aligne la pittoresque rue de la Vieille-Prison, jugée mal famée, et aménage
les jardins et la place de la Préfecture, bordée d'un nouveau bâtiment
d'archives en 1894. On peut admirer dans l'escalier de la préfecture un
Berger debout, et devant la grille de la Place de la Victoire-et-des-Alliés
Les Pleureuses, monument aux morts de la guerre 1914-1918, deux œuvres
d'Ernest Nivet, sculpteur d'inspiration paysanne. La construction d'une
nouvelle préfecture, inaugurée en 1972, permet la restauration progressive
du Château-Raoul, lieu de prestige pour les réceptions officielles et signe
de la continuité du Bas-Berry et de l'Indre du Moyen Âge à nos jours. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château Raoul :
inscription par arrêté du 26 janvier 1927.
château Raoul, place de la Victoire et des Alliés, 36000 Châteauroux,
préfecture, visite des extérieurs uniquement.
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