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Le château du
Bouchet réserve une surprise au milieu des étangs du plat pays de la Brenne,
car il est situé sur l'une des rares éminences rocheuses de cette région, un
"button". Les premiers seigneurs connus à la fin du XIIe siècle sont
d'origine poitevine: Guillaume Sénebaud à partir de 1180, puis ses fils Guy
et Aimery au début du XIIIe siècle. La terre échoit ensuite, par alliance,
aux familles Clairbaud et de Maillé et en 1318, la veuve de Guillaume de
Maillé, est dite dame du Bouchet. Faute d'héritiers, le fief passe au XIVe
siècle à Pierre IV de Naillac, l'un des plus grands seigneurs du Berry, du
Blanc et de Buzançais, mais sa veuve, Héliotte de Prie, livre Le Bouchet aux
Angjlais. Lors des derniers combats, la forteresse est reprise par la
famille d'Oradour, propriétaire entre 1428 et 1451, date à laquelle elle est
vendue à la famille Taveau. Après le mariage, en 1519, de Renée Taveau avec
François de Rochechouart-Mortemart, baron de Tonnay-Charente, l'histoire du
Bouchet sera liée à celle du royaume puisqu'au XVIIe siècle, la troisième
fille de Gabriel de Mortemart, Françoise-Athénaïs, devient la maîtresse de
Louis XIV et reçoit le titre de marquise de Montespan. À sa mort, la terre
du Bouchet revient à l'un de ses fils naturels, le duc de Vivonne-Mortemart,
dont les descendants sont propriétaires jusqu'en 1808, malgré l'épisode de
l'émigration: le domaine, saisi le 24 Thermidor An II, est adjugé à Pierre
Huard de la Vignauderie (ancien capitaine des chasses du duc) qui le
restitue au duc de Vivonne au début du XIXe siècle. Mais en 1808, celui-ci
vend Le Bouchet à la famille Hérault de La Véronne, dont les descendants
sont toujours propriétaires.
Le château du Bouchet mérite une étude détaillée à cause de sa complexité et
de l'imbrication de constructions qui s'échelonnent entre la fin du XIIe
siècle et la deuxième moitié du XVIIe siècle. L'allure extérieure est celle
d'une forteresse entourée d'un profond fossé où des fouilles ont mis au jour
des fragments de poteries et des monnaies qui attestent une occupation du
site antérieure au XIIe siècle. Le plan d'ensemble forme aujourd'hui un
quadrilatère irrégulier, ouvert côté est, composé de quatre parties: à l'est
l'ancien donjon, cantonné au sud par la tour dite des Anglais, elle-même
accolée à un pavillon XVIIe siècle, à l'ouest un grand logis, flanqué au sud
d'un bastion d'angle, enfin deux bâtiments autour de la cour au nord-ouest
et au nord, repris au XVIIe siècle mais terminés par une tour ronde dite de
"la prison", à l'est, vestige de la fin du XIVe siècle. L'ensemble est
entouré au nord et au nord-ouest d'une courtine haute et massive, flanquée
de deux tours rondes, dont la date reste imprécise entre le XIIIe et le XIVe
siècle. La partie la plus ancienne du château est le haut donjon édifié à
l'extrême fin du XIIe siècle qui conserve, malgré des remaniements, des
vestiges originels: la porte d'entrée étroite (reprise au XVIIe siècle) avec
les flèches du pont-levis, et une portion de mur au-dessus du chemin de
ronde, preuve que ce donjon devait être beaucoup plus élevé. Il était sans
doute la première rési- dence, avec salles aux étages supérieurs, réservées
au seigneur. Outre l'arasement des parties hautes, ce premier donjon a été
modifié au début du XVe siècle par l'ajout d'un chemin de ronde à
mâchicoulis et par le percement d'une grande croisée à arc en accolade
surmontée d'une lucarne gothique.
Le donjon des "Anglais", situé à l'angle sud-ouest, ne semble pas antérieur
à l'extrême fin du XIVe siècle ou au début du XVe siècle, édifié peut-être
au moment où Héliotte de Prie livre la forteresse à l'ennemi. Calé entre
l'ancien donjon et le pavillon XVIIe siècle, il présente une façade
extérieure demi-circulaire et est surmonté d'un chemin de ronde identique à
celui du donjon; ses baies inférieures sont étroites et dépourvues de décor,
mais la demi-croisée du dernier niveau et la lucarne gothique confirment la
date avancée plus haut. D'autres vestiges médiévaux subsistent, en
particulier la tour dite de "la prison", à l'angle est, qui communiquait
avec une chapelle, mais nous ne connaissons pas la date de leur édification,
due sans doute à la famille Taveau. Celle-ci entreprend, en effet, dans la
seconde moitié du XVe siècle, d'importants remaniements, difficiles à
apprécier, car depuis le XVIIe siècle, il n'en subsiste que quelques
vestiges: la tour d'escalier circulaire, à l'angle de l'ancien donjon et du
pavillon XVIIe siècle, est éclairée de petits jours, mais possède une belle
porte à arc et gable gothiques, avec écu aux armes des Taveau. Cet escalier
devait sans doute desservir un logis, côté sud, qui a disparu. Enfin, lors
des guerres de Religion, le château, pillé et incendié, fut protégé par un
ouvrage défensif, le gros bastion de l'angle sud-ouest, percé de meurtrières
et de bouches à feu, mais pourvu, après-coup, de croisées dans la partie
supérieure.
Cet imposant château médiéval a été profondément modifié par Louis de
Mortemart qui entreprend d'importants travaux entre 1638 et 1669 en
construisant deux bâtiments et en reprenant les façades sur cour selon une
ordonnance régulière. Les premiers travaux concernent la suppression d'une
portion de la courtine à l'est, entre l'ancien donjon et la tour de "la
prison", afin de ménager une large entrée sur la cour. Le pavillon sud est
édifié peu après pour abriter les nouveaux appartements et une chapelle,
mais la tour d'escalier XVe siècle est conservée, desserte pourtant
archaïque à cette date. L'œuvre maîtresse de cette reconstruction est le
bâtiment ouest édifié sur un haut soubassement taluté qui abrite au premier
étage une longue galerie de vingt mètres sur sept mètres; l'étage supérieur
est occupé par une grande salle sous comble couverte d'un berceau de
charpente cintré. Ces nouveaux logis sont desservis par un vaste vestibule
et par un escalier monumental. À cette même date, les façades sur cour sont
entièrement reprises dans un esprit de régularité, d'une grande sobriété.
Les grandes baies superposées sont encadrées d'une moulure simple agrémentée
de crossettes et d'une clef plate, mais cette élévation verticale devait
être prolongée par des lucarnes qui ont disparu, les façades étant
actuellement surmontées d'une corniche à consoles et côté ouest de lucarnes
en œils-de-bœuf XVIIIe siècle. Le seul luxe ornemental de la cour ouest est
la porte d'entrée à encadrement mouluré à crossettes, surmonté d'un fronton
triangulaire interrompu, avec décor de draperies et de palmes qui porte au
centre l'écu des Mortemart. Des Mortemart, il reste un tableau anonyme
représentant les trois filles de Gabriel de Mortemart, en particulier la
future Madame de Montespan. De la terrasse on peut jouir d'un immense
panorama sur toute la Brenne avec, à peu de distance, l'étang de la Mer
Rouge, ainsi nommé, selon la tradition, en souvenir de la croisade d'un des
premiers seigneurs du Bouchet; il existe encore à cet endroit une petite
chapelle voûtée avec statue de la Vierge, qui demeure un lieu de pèlerinage.
La Grand-Cour du Bouchet fut construite vers 1782 pour Victor Hérault de La
Véronne, fermier du seigneur du Bouchet, le duc de Mortemart. La demeure est
construite selon un plan régulier en U délimitant une grande cour carrée.
Tous les bâtiments sont construits en moellons de grès rouge et couverts de
tuile plate. L'imposant corps de logis est coiffé d'un toit à longs pans et
croupes brisés renfermant des combles à double niveau. Les autres bâtiments
à destination agricole sont couverts de simples toits à croupes, tandis que
le colombier, installé à l'extrémité d'une aile en retour est sommé d'un
toit en pavillon. La Sénéchalerie était, comme son nom l'indique, la
résidence du sénéchal du Bouchet. Parmi ces sénéchaux figurent Henri-Louis
Mornet, seigneur de Rouilly (fin XVIIe siècle) ou, deux seigneurs de
Nervault homonymes, Antoine-Jérôme Delacoux de Marivault (1697 et
1765-1771). Composée d'imposants bâtiments cernant une cour trapézoïdale, la
propriété renferme surtout un corps de logis quadrangulaire datant du XVe ou
XVIe siècle, flanqué en milieu de façade d'une tour d'escalier circulaire.
Le logis est prolongé au sud par un bâtiment à niveau unique construit à la
fin de l'Ancien Régime. Quant aux autres constructions, ayant pour la
plupart une vocation agricole, elles remontent principalement à la limite du
XVIIIe et XIXe siècle. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château : classement
par arrêté du 23 septembre 1955. La cheminée et le médaillon la surmontant
qui se trouvent dans le petit salon : classement par arrêté du 4 janvier
1960.
château du Bouchet 36300 Rosnay, tél. 06 72
01 62 15, ouvert au public du 5 juillet au 31 août, tous les jours de 10h30
à 12h et de 14h à 19h (fermé le dimanche).
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