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La première mention du fief de Nitray remonte au XIIIe
siècle, où il appartenait à Pierre de Brosse en 1263. Aucune construction de
cette époque ne subsiste. En 1453, il appartint à Jean Lopin puis en 1516 à
Emery Lopin, maître des requêtes de Louise de Savoie et maire de la ville de
Tours en 1516. C’est à lui que l’on attribue la construction du grand corps
de logis, où la date 1516 est portée sur la lucarne à droite de la porte
d’entrée. Cette date coïncide avec celle de l’entrée solennelle de François
1er à Tours. Sa fille, Marie Lopin, épousa Jean Binet dont la descendante,
Marie Binet, par son mariage avec Charles Daen fait entrer le domaine dans
cette famille qui le conserva jusqu’à la fin du XVIIe siècle. En 1789 Nitray
fut racheté par Philippe-Jean-Baptiste Mignon, procureur du roi au bureau
des finances de Tours, puis fut acquis en 1807 par le général d’Empire
Jean-Jacques Liébert (qui fit don d’un retable à l’église d’Athée), décédé
en 1814. En 1816, Charles-Pierre Henry Liébert hérite du domaine qu'il
transmet en 1856 à son fils Charles-Antoine-Joseph. La famille Liébert reste
propriétaire de Nitray jusqu'en 1922. Des restaurations importantes ont été
effectuées au cours du XIXe siècle, notamment sur le grand corps de logis,
mais les archives n’ont pas été retrouvées.
Situé en rive gauche du Cher, le château s’insère dans un parc à l’anglaise
de 43 hectares; c’est également un domaine viticole depuis le XVIIIe siècle,
où sont produits des vins du Val de Loire labellisés A.O.C. Touraine.
L’entrée principale était située au nord, en direction du Cher, défendue par
un ouvrage d’entrée constitué de deux tours (actuellement fruitier et
chapelle) séparées par une double porte cochère et piétonne, construit
vraisemblablement au XVe siècle et remanié au XVIe siècle. Des embrasures de
tir sont visibles à l'intérieur de la tour du du fruitier. A mi-hauteur
chaque tour est ceinturée par un gros cordon en pierre de taille mouluré en
cavet; les corniches sobrement moulurées supportent les toits en poivrière
couverts en ardoise. Un colombier massif bâti en moellons enduits s’élève au
nord-ouest. Des boulins en brique et pierre occupent toute sa hauteur. Une
fois franchi l'ouvrage d'entrée, on pénètre dans une cour rectangulaire
fermée à l’est par le grand corps de logis et à l’ouest par deux bâtiments
accolés en pignon. Au sud-est se dresse un pavillon doté d’un haut toit en
ardoise et de deux grandes souches de cheminée. Le grand corps de logis,
orienté nord-sud, ne présente aucun élément défensif. La dénivellation du
terrain à l’est a nécessité la création d'un niveau de soubassement, l’accès
au rez-de-chaussée s’effectuant par un escalier à double volée convergente.
Le bâtiment forme un quadrilatère sans saillie; les escaliers en vis sont
tous situés dans œuvre. Les proportions de la façade sur cour présentent une
particularité: les deux-tiers gauche comprennent cinq travées ordonnancées,
symétriques par rapport à la porte d’entrée, tandis que le tiers droit ne
comprend que deux travées, celle du sud étant surmontée par une tourelle de
plan carré. Outre son plan, la modernité de la construction s’illustre par
ses éléments décoratifs où s’épanouit le répertoire ornemental de la
première Renaissance du Val de Loire. La façade, rythmée horizontalement par
deux bandeaux ininterrompus séparant le rez-de-chaussée de l’étage, est
scandée verticalement par une alternance de croisées et de demi-croisées
surmontées de lucarnes dont les galbes curvilignes, assortis d’un fronton en
coquille, sont abondamment sculptés. Toutes les baies sont encadrées de
pilastres ornées d’un motif de cercle et demi-cercle ou bien losange et
demi-losange; leurs chapiteaux finement ouvragés sont meublés de têtes de
petits personnages aux angles et à la fleur de tailloir. Bien qu’une partie
de ce décor soit restauré, sa richesse est remarquable tout autant que sa
discrétion. L’exubérance s’exprime, sur les deux façades, dans le décor des
lucarnes à fronton curviligne encadrés de candélabres en acrotère.
Un incendie s’est déclaré dans le grand corps de logis en 1890. On en a
déduit, un peu rapidement, qu’une grande partie du bâtiment avait été
refaite. Si des modifications sont indéniables, notamment dans les
aménagements intérieurs et sur la façade est, l’incendie n’a cependant pas
détruit les charpentes. Le grand corps de logis, orienté nord-sud, comprend
deux charpentes à chevrons-formant-fermes couvrant toute la longueur du
bâtiment et séparées par un mur de refend. La partie nord compte quarante
fermes et la partie sud seize. Les deux parties sont de même facture, avec
un faîtage et deux niveaux de sous-faîtage recevant un contreventement
longitudinal en croix de Saint-André. Les analyses dendrochronologiques
indiquent que ces deux charpentes sont contemporaines et ont été mises en
place en 1522 (ou dans une année postérieure très proche). Les bois utilisés
pour la construction du logis proviennent d’une forêt dense, présentant des
caractères de haute futaie dont les arbres ont commencé à pousser vers
1340-1350.
Les écuries actuelles ont été construites postérieurement au corps de logis
auquel elles sont accolées par le pignon et qui constituait peut-être le
premier logis. La charpente de ce logis n’a pas été analysée car remaniée.
Le bâtiment qui abrite les écuries en revanche a pu être daté. Sa charpente
de type à chevrons-formant-fermes repose sur une double sablière et comprend
20 fermes numérotées du sud au nord. Lorsque le plafond du rez-de-chaussée a
été mis en place (entrevous en brique reposant sur des poutrelles
métalliques), les entraits de la charpente ont été sciés. Il n’en reste que
les extrémités qui forment blochets. La datation dendrochronologique permet
de dire que la charpente a été mise en place en 1523 (ou dans une année
postérieure très proche). Il y avait à l’ouest une lucarne semblable à celle
qui donne sur la cour. Ce bâtiment présente encore un caractère médiéval
sans rapport avec la modernité du grand logis. Le pavillon sud-est,
communément appelé "pavillon de chasse" est une élégante construction dotée
de deux très grandes cheminées et qui ne comprenait à l’origine qu’un seul
niveau. La charpente de type à chevrons-formant-fermes, à croupes, a été
aussi datée par l’analyse dendrochronologique. Elle forme un ensemble
homogène dont la mise en place se situe en 1527 (ou dans une année
postérieure très proche). Sur la hotte de la cheminée, un décor, réalisé à
la mine grasse, a été découvert en 1975, date à laquelle il a été restauré.
Il représente une scène de chasse au cerf que l’on date de 1569.
La chapelle a été aménagée au cours du premier quart du XVIe siècle dans la
tour est de l'ouvrage d'entrée qui date vraisemblablement du XVe siècle.
L'intérieur a été redécoré entre 1807 et 1814 au moment où le général
Jean-Jacques Liébert était propriétaire de Nitray. Les verrières sont datées
et signées de l'atelier tourangeau Lobin, 1856. La tour de la chapelle
adopte un plan circulaire tronqué du côté de la cour. La chapelle voûtée
d’ogives est aménagée au rez-de-chaussée. Elle est éclairée par deux baies
en plein cintre. Au-dessus règne une petite salle à cheminée à laquelle on
accède par un escalier en pierre qui débouche sur une porte à linteau
mouluré orné d'une tête de putto à chaque extrémité. La tour est construite
en moellons de calcaire enduits, à l'exception de la face sud qui est en
pierre de taille de tufeau. Le chambranle de la porte de la chapelle est
orné du côté droit d'un pilastre à chapiteau à volutes rentrantes;
l'entablement sobrement mouluré porte en son centre un agrafe. La clé de
voûte de la chapelle est peinte d'une couronne d'épines dorée sur fond rouge
au centre de laquelle sont disposés les trois clous de la Passion. Les
armoiries du général Liébert de Nitray sont peintes sur les murs. On voit
d'une part les lettres N et L se détachant sur un disque d'azur au centre
d'un blason imitant un cuir et surmonté d'une couronne perlée; d'autre part
un écu portant les armes: "d'or à la barre de gueules chargée d'un lion
passant d'argent, au comble d'azur chargé de trois étoiles d'or, au franc
quartier de gueules à l'épée d'argent".
Si le plan cadastral de 1826 fait bien apparaître une basse-cour déterminée
par trois principaux bâtiments de communs (deux ailes est et ouest et une
grange à auvent au sud), ceux que nous voyons aujourd'hui ont été
reconstruits après cette date, tandis que l'aile est a disparu. L'aile ouest
a été réalignée dans le prolongement des écuries et du logis ouest, et
l'aile sud est plus longue que la grange qu'elle remplace. Ces travaux
semblent avoir été achevés en 1859 alors que Charles-Antoine-Joseph Liébert,
petit-fils du général d'Empire Jean-Jacques Liébert, était propriétaire de
Nitray depuis 1856, ayant reçu le domaine en dot à l'occasion de son mariage
avec Louise-Claire Cosson. L'architecte n'est pas connu. Les deux ailes
ouest et sud sont construites en moellons de calcaire enduits et couvertes
de toits à longs pans en ardoise. Les deux bâtiments sont en rez-de-chaussée
et l'accès au comble s'effectue par des lucarnes en façade interrompant
l'avant-toit. Le décor des façades est apporté par le jeu alterné de
l'appareil brique et pierre qui encadre toutes les ouvertures, y compris les
piédroits et frontons des lucarnes. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures ; l'escalier ; la porte
et les tours de l'entrée de la cour ; le bâtiment des communs du XVIe siècle
; le pavillon au Sud-Ouest de la cour ; la tourelle Sud-Ouest de l'enceinte
du parc ; le parc et son mur d'enceinte : inscription par arrêté du 17
décembre 1947.
château de Nitray 37270
Athée-sur-Cher, tél. 02 47 50 29 74, ouvert au public de janvier à juin et
de septembre à décembre de 10h à 19h en visite libre à l'aide d'une brochure
remise à l'entrée. Le W-E sur rendez-vous. De juin à septembre ouvert tous
les jours.
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