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Silhouette
puissante, ocrée, magique, la forteresse de Castelnau Bretenoux déploie ses
murailles imposantes au sommet d’une colline dominant le pays des quatre
rivières formé par le confluent de la Dordogne, la Cère, le Mamoul et la
Bâve. Nous sommes dans le haut Quercy, que se partageaient autrefois le
vicomte de Turenne et le baron de Castelnau. Hugues de Castelnau apparaît
comme le fondateur de cette construction gigantesque, qui succéda à un vieux
château démantelé situé en contrebas sur la commune de Bretenoux. Premiers
barons du Quercy, les Castelnau apparaissent dans les textes dès le XIe
siècle. Ils avaient pour cri de guerre "Dieu aide aux seconds barons
chrétiens" ! Les premiers étant les Montmorency. À partir d’Hugues et de son
frère Robert, deux branches se forment les Castelnau-Gramat, barons de
Gramat, et les Castelnau-Bretenoux, barons de Castelnau, dont les armes
étaient "De gueules au château d’or". En 1159, l’édifice est pris d’assaut
par Henri II de Plantagenêt. Les Castelnau restent fidèles au roi de France.
Au début du XIVe siècle, Hugues III hérite de sa mère les biens de Calmon
d’Olt, en Rouergue, dont il relève le titre et incorpore les armes à son
blason "Écartelé aux 1 et 4 de gueules au château d’or, aux 2 et 3 d’argent
au lion de sable". Ses deux mariages, l’un avec une nièce du pape Jean XXII,
l’autre dans la famille du cardinal de Toulouse, renforcent considérablement
sa puissance financière et politique. Au moment où s’annonce la guerre de
Cent Ans, il va procéder à d'importants agrandissements de la forteresse. Le
désastre de Poitiers, en 1356, et le malheureux traité de Brétigny qui en
résulte, font passer Castelnau sous la domination anglaise.
Mais dès 1369, Jean I de Castelnau, fidèle d’entre les fidèles du roi de
France, reçoit le titre de Gouverneur de Guyenne et Capitaine Général du
Languedoc. La province est alors ravagée par les compagnies anglaises, mais
la forteresse ne sera jamais inquiétée. En 1395, en l’absence d’héritier
mâle, la baronnie échoit à un neveu, Pons de Caylus, qui relève le nom et
les armes de la lignée. Cette branche nouvelle conservera les titres et la
seigneurie jusqu’en 1530. L’un des barons, Jean II, sera conseiller et
chambellan de Louis XI. À l’extinction des Caylus, la baronnie revient à un
parent, Pierre de Castelnau, de la maison de Clermont-Lodève. Ces derniers
vont faire procéder à d’importantes modifications de la forteresse,
renforçant notamment ses défenses, et transformant le corps de bâtiment en
somptueuse demeure. La femme de l’un d’eux, Louise de Bretagne, première
dame d’honneur d’Élisabeth de Valois, reine d’Espagne, puis de Catherine de
Médicis, influera par son caractère et ses décisions la vie à Castelnau.
Très attachée à la forteresse, elle s’y retirera après la mort de son fils
unique Guy I, tué en 1580, lors de la prise de Cahors par Henri de Navarre.
Son petit-fils Alexandre donnera ensuite des fêtes magnifiques dans les murs
de Castelnau, évoquées par le poète François Maynard dans ses souvenirs. Il
décide aussi d’ôter à la vieille demeure son caractère particulièrement
défensif. La branche des Clermont-Lodève s’éteint en 1715. Lui succède dans
les lieux la famille de Luynes, grâce à Jeanne d’Albret de Luynes, veuve de
l’avant-dernier baron. Mais les nouveaux seigneurs désertent les campagnes,
et la Révolution approche. En 1782, le domaine est affermé pour 42000
livres.
En 1793, un commissaire de la Convention décide de faire raser les tours,
combler les fossés, abattre le pont-levis. L’indolence quercynoise ramène
l’ordre donné à un résultat plus modeste: le pont-levis et le crénelage des
tours et des courtines sont détruits. Par contre, hélas, les archives sont,
là comme ailleurs, réduites en fumée. Plus tard, sous l’Empire et la
Restauration, des pillages sporadiques endommagent, entre autres, la
bibliothèque. En mars 1830, le château est vendu à des descendants d’anciens
fermiers de la baronnie. Ceux-ci entreprennent la démolition d’une partie de
l’antique forteresse, pour en revendre les pierres. En 1844, le conseil
général du Lot intervient pour essayer d’endiguer la destruction. En vain,
l’État refuse d’acquérir la forteresse. Au cours des années suivantes, les
choses ne s’arrangent pas, les refus d’intervenir, et même de classer aux
Monuments historiques la vieille demeure, se succèdent avec une constante
opiniâtreté. Dans la nuit du 28 au 29 janvier 1851, un incendie gigantesque
éclate, ravageant la plus grande partie des corps de logis. En 1853, la
forteresse est revendue à M. Dubousquet de Montanceaux qui aurait aimé la
transformer en abbaye. Le projet tombe à l’eau. En 1858, le conseil général
du département refuse une nouvelle fois le classement. L’abandon par son
nouveau propriétaire, le pillage des pierres par les habitants des
alentours, menacent tout simplement la survie même de l’édifice. Aussi le
curé du village décide-t-il de l’acquérir, en 1873. Après sa mort, en 1880,
un ancien préfet du Lot, préfet de l’Oise à ce moment-là, acquiert la vaste
ruine, afin d’éviter qu’elle tombe entre les mains de démolisseurs. En 1891,
ses héritiers revendent le château à un ténor de l’Opéra-Comique, originaire
du pays, Jean Mouliérat. Et c’est là que commence le miracle.
Contrairement à ses prédécesseurs dans les lieux, Jean Mouliérat est
richissime. Il va consacrer toute sa fortune, et sa vie, au service de
Castelnau, qu’il relèvera entièrement de ses ruines. En outre,
collectionneur avisé, il pourra remeubler somptueusement les logis qu’il
fait restaurer, avec quelques libertés, certes, mais au moins a-t-il le
mérite d’avoir sauvé d’une disparition totale l’antique forteresse des
barons de Castelnau. En 1909, il obtient enfin le classement du château. À
sa mort, en 1932, il lègue à l'État "son" château et toutes ses collections.
Devenu musée en 1935, la demeure est depuis cette date ouverte au public. La
forteresse, de plan triangulaire, est cantonnée sur trois frontons par des
tours cylindriques. L'entrée est située à l’est. C’est l’aile nord-ouest,
sud-est qui est la plus ancienne, avec sa haute tour carrée datant du début
du XIIIe siècle. Elle a une hauteur d’environ trente mètres et une épaisseur
de mur de près de deux mètres. Ses élévations extérieures sont divisées en
trois compartiments par des corniches extérieures servant de larmiers,
tandis qu’à l’intérieur quatre niveaux se superposent: une cave voûtée en
berceau, un rez-de-chaussée aveugle, voûté également en berceau, un premier
et un deuxième étage voûtés en ogives. Ces deux niveaux sont éclairés par
d’étroites fenêtres, et communiquent par un escalier en vis. Le couronnement
de mâchicoulis date du XIVe siècle. Le grand bâtiment rectangulaire, appelé
de nos jours l’auditoire, est construit dans un appareil identique à celui
de la tour. Il a été fortement remanié au fil du temps, particulièrement
lors des restaurations effectuées au XVIIe siècle. De cette époque dataient
aussi les plafonds à la française disparus lors de l’incendie de 1851.
Quelques cheminées et fenêtres ont heureusement résisté aux flammes. (1)
Éléments protégés MH : le château de Castelnau Bretenoux en totalité :
classement par liste de 1862.
château de Castelnau Bretenoux 46130 Prudhomat, tel. 05 65 10 98 00,
ouvert au public du 02 mai au 30 juin de 10h à 12h30 et 14h à 18h30, du 1er
juillet au 31 août de 10h à 19h, de septembre et avril de 10h à 12h30 et 14h
à 17h30, et du 1er octobre au 31 mars de 10h30 à 12h30 et 14h à 17h30, fermé
le mardi.
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