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Cette impressionnante forteresse, dont la
silhouette pathétique dresse ses magnifiquesvestiges comme un défi envers le
ciel et les hommes, fut construite du XIIIe au XVIIe siècle. Il semble que
la plate-forme où elle développe ses murailles ait été un site occupé dès le
VIIIe siècle. De nos jours, la campagne environnante, située sur un plateau
du causse proche de Cahors, est d’une singulière aridité où, durant l’été,
la texture de l’air rend l’atmosphère étouffante et où la terre,
caillouteuse à l’excès, semble impropre à toute exploitation humaine. Et
pourtant, au XIXe siècle, le château déjà réduit à l’état de ruines, était
entouré par des hectares de vignes, que l’épidémie de phylloxéra, en 1877,
allait entièrement détruire. Une famille de modestes chevaliers du nom de
Roussillon, venue de la Bouriane, semble avoir donné son nom à ce lieu. Un
Folc de Roussillon est mentionné comme seigneur du château au XIVe siècle.
Le dernier représentant de cette famille obscure meurt en 1366 dans une
maladrerie. Les Ratier, les d’Antéjac puis les de Jean, tous banquiers
caorsins, occupent ensuite les lieux un temps relativement bref, puisque les
Vayrols, famille de la bourgeoisie cadurcienne, sont déjà présents à
Roussillon en 1363. En 1430, le mariage de Marguerite de Vayrols avec
Guillaume d’Auriole fait passer à nouveau la forteresse dans l’escarcelle
des banquiers caorsins. Pendant la guerre de Cent Ans, la forteresse subira
l’occupation des compagnies "anglaises" de triste réputation. Les consuls
cadurciens, lassés, se résignent, d’après la tradition, à verser à ces
dernières une forte rançon afin qu’elles déguerpissent. En 1517, Anne
d’Auriole se marie avec Raymond de Gontaud-Cabrerets, plaçant ainsi les
lieux sous l’autorité d’une des plus illustres familles de cette époque. Les
Gontaud-Cabrerets épouseront la religion Réformée, la forteresse de
Roussillon devient de la sorte, la place forte du protestantisme pendant les
guerres de Religion.
Mais grandeur et décadence alternent au cours des ans: en 1679, les
Gontaud-Cabrerets se trouvent dans la gêne la plus extrême, à ne point
pouvoir payer "un cheval à poil gris et son harnais". Au siècle suivant,
Antoine de Gontaud-Cabrerets préfère résider en son château de Cabrerets,
plutôt qu’en son austère forteresse de Roussillon, qu’il afferme. En 1730,
le château est légué à Charles-Antoine de Gontaud-Biron, héritier d’une
famille célèbre n’ayant, semble-t-il, aucun lien de parenté avec leur
homonyme. Celui-ci passe sa vie entre sa belle demeure de Biron, en
Périgord, et son hôtel de la rue de Varennes, à Paris (actuel musée Rodin).
Il va se désintéresser totalement de ce legs qu’il maintient en fermage.
Progressivement, avec la lenteur d’un vieillard qui s’achemine vers le terme
de sa vie, la forteresse devient ruine. Au XIXe siècle, le maréchal de
Gontaud-Biron cède le domaine à son intendant. Sans vergogne, celui-ci va
entreprendre le démantèlement naturellement commencé. Les pierres ainsi
vendues serviront à la construction des hameaux environnants. En 1874, des
paysans du village voisin de Saint-Pierre-Lafeuille achètent l’édifice
démantelé avec un lot de vignes qui l’entoure. Les ruines sont livrées aux
chercheurs d’or et de pierres, qui, sans scrupules, détruisent les voûtes,
abattent les murs, à la recherche d’un hypothétique trésor que la légende
locale, comme partout ailleurs où résistent des vestiges de châteaux,
s’obstine à imaginer enfoui dans les vieux murs. En vain, bien sûr ! Les
choses auraient pu continuer ainsi, indéfiniment, jusqu’à la désintégration
complète; et le souvenir même de la forteresse se serait estompé dans les
replis de la mémoire humaine, si, en 1958, un couple de professeurs n’était
tombé sous le charme du lieu. Ils rachètent la ruine envahie par des tonnes
de gravats, de terre, où poussent des arbres tentaculaires et, dès lors,
vont s’employer à, patiemment, follement, faire resurgir de ses cendres,
l’édifice majestueux qui connut en d’autres temps une vie exaltante. Les
amoureux de vacances insolites et nostalgiques peuvent y séjourner dans un
appartement classé des Gîtes ruraux.
Le château épouse le relief du promontoire sur lequel il se dresse. Il est
cantonné par six tours rondes et massives, dont l’une subsiste seulement
dans son soubassement. Il était ceint à l’origine d’un profond fossé, et
protégé par d’épaisses murailles armées de canonnières et couronnées de
mâchicoulis. On accède à la première cour, ou basse-cour, par une porte qui
fut à pont-levis. Une courtine et deux tours circulaires, dont la seule
subsistante est appelée "barbacane", protégeaient le reste de la forteresse.
Une tour pentagonale, communément appelée "donjon", défendait l’accès à la
seconde cour. Percée de canonnières, elle date du XVe siècle. Les corps de
logis s’ordonnent en équerre autour de cette seconde cour, desservis par une
tour carrée qui loge un escalier en vis. Ils sont flanqués de quatre tours
circulaires de diamètres inégaux. La tour "des écuries", au nord-ouest, dont
le plan intérieur est carré, contient des canonnières, et des vestiges de
mâchicoulis. D’après une gravure ancienne, elle fut recouverte vers 1730 par
une voûte de pierre "à l’impériale" en remplacement de la charpente en bois.
La tour "de la chapelle", à l’angle nord-est, est nettement plus grosse que
les autres. Trois niveaux existent encore, dont le dernier comporte une
fenêtre à remplage, typique du gothique flamboyant. La tour "du carail", au
sud-est, est très altérée. On devine des baies repercées au XVIIe siècle,
voire au siècle suivant. À l’étage, on remarque les vestiges de latrines en
encorbellement, des baies et des cheminées. La tour "du pigeonnier", à
l’angle sud-ouest, montée en moellons de calcaire équarris, comporte, dans
sa partie basse, une petite salle ronde recouverte d’une voûte appareillée.
On y accède par une porte en arcade en tiers-point. Les pièces des étages
étaient, elles, de plan rectangulaire. Elles comportent des canonnières, des
restes de cheminée et de latrines. Quelques corbeaux de mâchicoulis
subsistent au sommet, ainsi que le vestige d’une porte du XVe siècle. C’est
très vraisemblablement l’époque de construction de cette tour. Le mur de
courtine au sud, qui relie la tour "de barbacane" à la tour "des écuries",
possède des pierres de calcaire blanc ornées de pointes de diamant
spécifiques du XVIIe siècle. Cependant, les murs est et sud, datant du XVe
siècle, comportent des surfaces en moyen appareil régulier de moellons
utilisés au XVIIIe siècle. En conclusion, si on peut constater que la plus
grande partie de la forteresse fut édifiée au XVe siècle, il subsiste
quelques traces d’une construction antérieure et des vestiges importants de
réaménagements datant du XVIe siècle, et même du siècle suivant, preuve s’il
en était besoin, de la constante modification apportée par les hommes à
leurs lieux fortifiés. (1)
Éléments protégés MH : le château de Roussillon en totalité : inscription
par arrêté du 29 mars 1929.
château de Roussillon 46090 Saint Pierre Lafeuille, tel. 06 70 11 27 91,
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