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Dès avant le
XIIIe siècle, il semble qu'une tour féodale ait été implantée sur les
parties subsistantes de l'église Saint-Georges, impliquant l'existence d'un
fief dès cette époque. De fait, la seigneurie de Coanac n'apparaît dans les
documents qu'au milieu du XIIIe siècle. Elle était tenue à cette époque par
les Lapopie qui devaient rendre hommage pour cette possession aux comtes de
Toulouse. Au centre du fief était mentionnée en 1259, non pas un château
mais une "villa", terme qui évoquerait a priori un domaine agricole plutôt
qu'une demeure fortifiée mais qui pouvait également être employé en tant que
synonyme de "castrum". Le lieu de Coanac, ou Couanac, appartint
vraisemblablement initialement au domaine des vicomtes de Cahors et de
Saint-Cirq dont les suzerains étaient les comtes de Toulouse. Rien ne permet
de préciser si les Lapopie qui étaient implantés dans les lieux en 1259
furent leurs vassaux ou leurs successeurs et s'ils furent les constructeurs
de la tour féodale établie dès le XIIe siècle, sur l'extrémité sud de
l'église. On constate en effet que le logis médiéval qui a constitué le
noyau de leur château, était nettement dissocié de cette tour et de l'église
avec lesquelles il ne disposait d'aucune communication directe. Quoi qu'il
en soit, la tour, rendable par définition au comte de Toulouse qui disposait
de la seigneurie éminente sur les lieux, était vraisemblablement devenue la
possession d'un certain Bertrand de Lapopie et de ses frères en 1259,
lorsqu'ils firent hommage de Coanac à Alphonse de Poitiers. Extérieurement à
l'enclos de l'église, de son cimetière supposé et de la tour, l'un des
membres de cette famille aux ramifications complexes, peut-être à la suite
d'un partage, fit édifier un logis composé de deux ailes soudées sur une
tour carrée.
Vers 1400 (entre 1400 et 1405), le mariage de Marguerite de Lapopie, fille
et héritière de Guy, avec Arnaud Hébrard, a porté le domaine de Coanac dans
cette maison. Toutefois, la réédification du château sur un parti et un
développement nouveaux ne semble avoir été entreprise que près d'un siècle
plus tard, sans doute vers 1480, par Raymond Hébrard de Saint-Sulpice qui
modernisa d'abord l'ancien logis médiéval des Lapopie. Ses successeurs, Jean
II et Antoine Ier, qui fut écuyer de bouche du roi, furent sans doute les
promoteurs de la réorganisation générale du plan sur une cour carrée en
édifiant l'aile nord, en symétrie de l'ancien logis, en réunissant les deux
par des galeries et en ajoutant les tours d'angle. Ces grands travaux,
discrètement teintés d'italianisme, furent apparemment menés autour des
années 1520 si l'on en juge par le style d'une des fenêtres où le seigneur
des lieux et sa dame se firent représenter. Contrairement à ce que l'on
affirme généralement, il semble que leur fils, Jean Hébrard, qui fut
notamment ambassadeur du roi Henri III, membre du conseil privé de Catherine
de Médicis et gouverneur privé du duc d'Alençon, n'intervint pas
significativement dans la construction, pas plus que Claude de Biron son
épouse ou que l'abbé de Marcilhac, son frère.
Emmanuel de Crussol, duc d'Uzès, auquel Coanac avait été apporté en dot par
Claude Hébrard, épousée en 1601, poursuivit les travaux de modernisation
entrepris aux générations précédentes en redistribuant et en décorant les
logis, en ajoutant des commodités aux aisselles des tours et en couronnant
les élévations par des lucarnes monumentales timbrées de son chiffre.
L'ensemble de ces travaux de recomposition, menés en trois campagnes
principales, n'avait pu s'affranchir de la promiscuité contraignante de
l'ancienne église paroissiale. A l'époque (vers 1500) où celle ci fit
l'objet d'importants travaux d'embellissement, avec la réfection de sa voûte
centrale et le percement de deux nouvelles lancettes à verrières, elle était
toujours en service et tournait encore des élévations aveugles contre le
château attenant. Sa conversion en chapelle privée et son intégration dans
l'ensemble architectural, effectifs peut-être depuis les guerres de
Religion, ne semble ne s'être opéré réellement qu'au XIXe siècle.
Les Crussol-Saint-Sulpice firent encore exécuter quelques travaux de
réparation vers 1760 avant de céder Coanac en 1771 à Antoine Des Lacs
marquis d'Arcambal. Il fut acquis par la suite par un certain
Moreau-Gorenflau et, par la fille de ce dernier aux Helyot auxquels
succèderont les Armagnac de Castanet. Il faut vraisemblablement attribuer à
Louis d'Helyot et Clémentine d'Armagnac l'importante campagne de
restauration au cours de laquelle l'aile nord fut étoffée de nouvelles
adjonctions et partiellement réorganisée en respectant le style Renaissance
de l'édifice antérieur (réfection partielle de la façade sur cour,
remplacement par une cage d'escalier moderne de l'ancienne distribution
assurée jusqu'alors par des escaliers extérieurs et des galeries, réfection
des décors intérieurs et des cheminées, adjonction de nouvelles lucarnes à
l'identique de celle de l'aile sud, suppression de la galerie de l'aile
sud...).
Le château de Coanac offre a priori le cas assez habituel aux XVe et XVIe
siècles d'un château à la française comportant un ensemble de logis en U
disposés autour d'une cour quadrangulaire, flanqués de tours rondes aux
angles et intégrant une chapelle seigneuriale. A Coanac, ce parti général
est reconnaissable mais présente certaines anomalies remarquables. La plus
notable réside dans l'absence de la tour d'escalier qui flanque
habituellement le logis dans les édifices antérieurs au milieu du XVIe
siècle ou du pavillon qui a généralement pris sa place après cette date. Une
autre particularité réside dans le fait que le plan semble avoir été gêné
dans son développement par un obstacle qui aurait empêché l'achèvement de la
composition sur le front ouest. Enfin, la préexistence de bâtiments
médiévaux et, peut-être, celle de la "villa" attenante, peut expliquer un
certain nombre d'irrégularités du plan général. La turris de Coanac, de
dimensions modestes (5 x 5,5 m en moyenne) est venue se superposer au bras
sud du transept de l'ancienne église Saint-Georges. Dans son état primitif,
la tour semble avoir comporté cinq niveaux au minimum. Les deux premiers
niveaux, aménagés dans le bras du transept séparé du reste de l'église par
un mur, étaient accessibles par une porte haute percée au sud, puis par une
seconde porte percée à l'ouest à la fin du XVe siècle ou au début du XVIe.
On accédait aux trois étages supérieurs par une porte en plein-cintre
ménagée au niveau du deuxième étage. Les consoles qui couronnent encore la
tour supportaient des mâchicoulis, probablement sur arcs selon un procédé
employé avant la fin du XVe siècle.
Fait remarquable, la tour ne disposait d'aucun accès direct depuis le
château, ce qui peut s'expliquer par le statut particulier dont bénéficiait
en principe la turris, possession du suzerain, vis-à-vis du repaire,
possession du vassal. Il confirme l'hypothèse selon laquelle la tour a pu
être associée à un bâtiment d'habitation, aménagé dans les murs de l'église
primitive dans le courant du XIIe siècle, avant que celle-ci ne soit
réaffectée au culte. L'ouverture des portes basses de la tour, entre la fin
du XIIe siècle et la fin du XIIIe siècle, pourrait avoir résulté de la
nouvelle séparation de l'église et de la turris. En dépit des aménagements
successifs qu'elle a connus depuis la fin du XVe siècle, l'aile méridionale
conserve suffisamment de vestiges du logis du XIIIe ou XIVe siècle pour
qu'il soit possible d'en restituer les grandes lignes. Il se composait de
deux ailes articulées sur une tour carrée disposée à l'angle sud-est. Les
chaînes d'angle visibles au niveau de l'étage montrent que le corps de
bâtiment sud n'avait qu'un seul niveau, tandis que dans l'élévation nord de
la tour, une porte haute couverte d'un arc brisé indique que l'aile en
retour d'équerre, dont ne subsiste plus que l'arrachement d'un mur, devait
comporter un étage. Deux portes à arc brisé et une fente de jour peuvent
être attribuées à ce premier état de l'aile sud. Le corps de logis sud a
fait l'objet d'importants travaux à la fin du XVe siècle ou au début du XVIe
siècle, identifiables, en particulier, par le style des baies et des
cheminées. A côté de la cuisine aménagée dans la tour, une grande salle,
équipée d'une cheminée, occupait tout le rez-de-chaussée ; la croisée
conservée au sud fait supposer qu'un fossé ou une enceinte protégeait le
bâtiment de ce côté. Une galerie, côté cour, desservait les deux pièces de
l'étage, qui, comme la chambre de la tour, ont conservé leurs cheminées.
Trois autres cheminées indiquent que les combles constituaient un étage
habitable. A la même période appartient le grand portail en anse de panier
et orné des branches écotées qui jouxte la chapelle et donne accès à la cour
depuis l'ouest. La tour ronde ajoutée à l'angle extérieur de l'ancienne tour
du XIIIe ou XIVe siècle présente encore des demi-croisées à double cavet et
appui saillant, mais les cheminées des étages sont désormais de style
Renaissance. Son plan présente en fait un tracé ovoïde à l'extérieur et
carré à l'intérieur. D'autres remaniements importants de l'aile sud sont dus
à Emmanuel de Crussol, dont le chiffre, deux C affrontés, est inscrit sur
l'architrave de la grande lucarne sud du comble. Le cabinet établi à l'angle
de la tour sud-est et du corps de logis appartient sans doute à cette
campagne de travaux à laquelle il faut sans doute également attribuer
l'application d'un enduit extérieur à fausse coupe de pierre.
L'aile nord, flanquée au nord-est d'une tour ronde unique, se présente sous
l'aspect d'un corps de logis symétrique à celui de l'aile sud. Les caves qui
en constituent le soubassement paraissent appartenir à une construction
laissée inachevée, ou ruinée, qui serait contemporaine de la reprise de
l'aile sud à la fin du XVe siècle ou au début du XVIe. L'élévation sur la
cour présente trois croisées placées dans des travées complétées au XIXe
siècle par le percement de baies au rez-de-chaussée et la mise en place, ou
la restitution, des grandes lucarnes de comble copiées sur celle de l'aile
sud. La croisée de gauche se distingue par sa mouluration et son larmier,
quand les autres sont à pilastres, qui se prolongent sur les pleins de
travée, et corniche, forme qui se retrouve cependant avec les deux
demi-croisées de l'élévation ouest, dont une est ornée des têtes de deux
personnages représentant sans doute le maître et la maîtresse des lieux : le
chapeau et la barbe à la mode de François Ier conduisent à en situer la
réalisation dans les années 1515-1530, et à attribuer la construction de
l'aile nord à Antoine Hébrard et Jeanne de Lévis-Caylus, mariés en 1518 ou
aux parents d'Antoine, Jean II d'Hébrard et Anne d'Estaing. Deux portes
localisées aux extrémités du premier étage de la façade sur cour
complétaient la composition. L'une des deux, ouvrant contre l'élévation
aveugle de l'église, est desservie par un escalier extérieur qui semble
conforme aux dispositions anciennes. A l'extrémité orientale, la seconde
porte, aujourd'hui murée, est à mettre en relation avec les arrachements
d'un ouvrage ayant comporté une croisée d'ogives qu'il est difficile de
restituer : il pouvait s'agir d'un escalier extérieur destiné à la seule
desserte de la porte, ou bien d'une galerie adossée à la courtine orientale.
L'édification de l'aile nord et des deux tours rondes du château, bien
qu'esquissant l'organisation d'un château sur cour, impliquait la
construction de deux tours d'angle complémentaires et semble être restée
inachevée. Le portail ouest est orné de branches écotées. Le monogramme des
Crussol d'Uzès, deux C opposés, est gravé en différents endroits. Une tête
de femme et une tête d'homme, barbu et coiffé d'un chapeau, prennent place
sur les chapiteaux d'une fenêtre de l'élévation ouest.
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château; la chapelle :
inscription par arrêté du 21 février 1974. (1)
château de Couanac 46260 Varaire, tel. 05 65 31 52 32, Madame d'Armagnac,
quatre gîtes dans l'enceinte du parc, salles pour réceptions, le château est
visitable en juillet et août, du lundi au samedi de 10h à 12h et 14h à 18h,
le dimanche de 14h à 18h, groupes uniquement sur réservation. Visites
assurées par des étudiants en histoire de l'Art de l'université de Toulouse
II le Mirail
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