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Tour de Trébaïx à Villesèque
 
 

               La "domus" templière de Trébaïx est une création tardive qui ne peut se comprendre sans considérer celle de deux autres établissements de l'ordre : Monjous et Carnac. La première, celle de Monjous, n'apparaît qu'en filigrane à la lecture de brefs de donations de biens, de droits et de personnes non datés et compilés au XIIIe siècle, et reste difficile à localiser : peut-être se dressait-elle sur une rive du Lot, non loin de Luzech. Plusieurs dons des membres de cette famille éponyme laissent entrevoir la fondation de la "maio de Monious" ainsi que la formation de son temporel suite à l'action missionnaire du frère templier Gausbert Vezia dans la seconde moitié du XIIe siècle. Après avoir participé à la fondation de la "domus" de Monjous, Gausbert Vezia reçoit vers 1174 l'église Sainte-Marie de Carnac des mains de l'évêque de Cahors Géraud Hector. Cette église se dressait au sein de la "villa" de Carnac, possession de l'ordre du Temple. Les frères n'y ont initialement pas installé de maison, mais le conflit armé qui oppose encore dans la seconde moitié du XIIe siècle Raimond V à Henri II Plantagenêt puis à Richard Coeur-de-Lion a, semble-t-il, contraint la petite communauté religieuse de Monjous à trouver refuge à Carnac, où elle s'installe de façon hâtive dans le presbytère de l'église. Lorsqu'il est encore mentionné au XIIIe siècle, Monjous semble avoir été reclassé d'une "domus" à un simple "tenementum".
L'installation des templiers à Carnac n'a pas été sans difficultés, qui apparaissent lors d'un conflit lié à des questions financières qui a nettement assombri leurs relations avec l'ordinaire à la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle. Après avoir été expulsés par deux fois de Carnac, l'issue de la controverse engagée avec l'évêque de Cahors leur est finalement favorable. Les frères de l'ordre du Temple s'y réinstallent selon des modalités que la documentation ne permet pas d'appréhender. Ils y fondent une véritable "domus" qui apparaît pleinement instituée en 1247. La communauté est alors gouvernée par le frère Jacme da Ramon, tandis qu'en 1258 c'est Gaillard de Pradines qui assure de façon discontinue la direction des maisons de Carnac, de La Cabana de Monso et de Lacapelle-Livron. En 1279, outre le commandeur B. de la Roca, la communauté templière de Carnac compte au moins cinq autres membres dont un chapelain et un donat. En 1288, c'est Athon de Salvagnac qui dirige simultanément les maisons de Lacapelle-Livron et de Carnac dans laquelle réside une communauté de quatre frères. Deux ans plus tard, en 1290, Athon de Salvagnac est qualifié de "preceptor milicie Templi de Cazenaco et de Travays". Il gouverne donc simultanément les établissements templiers de Carnac et de Trébaïx qui apparaît pour la première fois dans les textes. La fondation de cette dernière maison située cinq kilomètres à l'est de Carnac pose problème car la maigre documentation écrite conservée ne permet pas de l'appréhender pleinement. Certains auteurs ont proposé d'associer sous une même entité les maisons de Monjous et de Trébaïx. Or, il n'en est rien. Il convient de dissocier ces deux établissements qui ont dû se succéder dans le temps. En effet, dès la seconde moitié du XIIe siècle, Gausbert Vezia, fondateur de la domus de Monjous, se préoccupe d'acquérir des parts de dîme et des biens fonciers dans la paroisse de Trébaïx. Mais l'existence d'une "domus" de Trébaïx est seulement attestée à partir des dix dernières années du XIIIe siècle et Athon de Salvagnac dirige encore cet établissement religieux en 1295. De fait, l'installation définitive des frères à Trébaïx, à l'extrême fin du XIIIe siècle, marque l'aboutissement d'un processus gyrovague inscrit dans un territoire restreint sans doute contraint par la conjoncture. Cette "sédentarisation" de la communauté régulière se traduit matériellement par la construction d'une maison dont le programme architectural et ornemental a été réalisé dans son intégralité dans les dernières années du XIIIe siècle ou les premières années du XIVe siècle, avant 1307 et l'arrestation de la communauté templière. Il est sans doute la conséquence de la difficulté pour les frères à s'établir de façon pérenne dans cette partie du diocèse de Cahors.
Résultant d'une fondation "ex nihilo", l'installation des frères de l'ordre du Temple à Trébaïx leur permet d'expérimenter un programme architectural répondant le mieux à leurs besoins. La maison religieuse est érigée à proximité d'une source, sur un tertre a priori naturel, de forme approximativement ovalaire, qui a été sinon aménagé du moins entretenu au fil du temps. De l'édifice ne subsiste qu'une grosse tour barlongue flanquée d'une tour d'escalier polygonale. La domus était initialement constituée d'une tour et d'un corps de logis lié aujourd'hui détruit qui se développait au nord-est de la tour en direction du nord-ouest. La tour d'escalier polygonale hors-oeuvre conservée, éclairée par trois jours verticaux superposés, était placée à l'angle des deux corps de bâtiment mais ne desservait que la tour. La restitution proposée à partir de ce qui est aujourd'hui observable est donc très différent des dispositions figurées par le plan cadastral de 1812, où le corps de logis accolé à la tour, sans doute depuis longtemps disparu, est remplacé par deux ailes parallèles bordant une cour et probablement reliées par une galerie.
La tour, de plan rectangulaire, est conservée sur une hauteur d'environ 14 m et comptait initialement au moins deux voire trois niveaux. Elle est dépourvue de contreforts, mais un soubassement saillant de quelques assises est marqué par un léger glacis. Réalisé en pierre de taille de calcaire de moyen appareil, le premier état de la construction est très homogène. On pénètre dans la tour par un portail aménagé dans l'élévation nord-ouest. Il est couvert par un arc brisé mouluré à archivolte, dont les deux tores retombent sur des chapiteaux à décor feuillagé. Le front extérieur des claveaux a reçu un décor sculpté supplémentaire, tellement altéré aujourd'hui qu'il n'est plus reconnaissable. Le portail ouvre sur un rez-de-chaussée qui abrite la chapelle de la communauté religieuse. La nef mesure environ 8 m de longueur sur environ 6 m de largeur dans-oeuvre. Elle est divisée en deux travées barlongues couvertes de voûtes d'ogives qui culminent à une hauteur d'environ 6,50 m sous clef ; les nervures, à gorges et tore à listel, retombent sur un culot dans l'angle nord, au-dessus de la porte d'accès à l'escalier, et sur des colonnes engagées aux trois autres angles et des faisceaux de cinq colonnes au milieu des murs latéraux sud-ouest et nord-est, à bases prismatiques sur plinthe. Le culot est orné d'un personnage en buste, malheureusement très érodé, les chapiteaux portent des feuillages et une scène d'animaux fantastiques affrontés. La similitude de ce décor sculpté avec celui des chapiteaux du massif occidental de la cathédrale Saint-Etienne de Cahors conforte l'idée d'une construction de la tour de Trébaïx vers la fin du XIIIe siècle. Les deux clefs de voûte figurent un écu à la croix à huit pointes sur la première travée et saint Jean-Baptiste avec l'Agnus Dei dans la deuxième travée. La présence de ces deux motifs peut paraître étonnante, l'historiographie associant traditionnellement saint Jean-Baptiste ou la croix dite aujourd'hui "de Malte" à l'ordre des hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Or les recherches récentes ont montré que la représentation de la croix de l'ordre du Temple n'était pas réellement fixée et pouvait être pattée, et que certains lieux de culte templiers pouvaient être dédiés au Précurseur.
La diffusion de la lumière naturelle était assurée par deux petites baies en lancette ouvertes dans le mur sud-est et un oculus percé au sud-ouest. Un placard mural, couvert par un arc brisé, ménagé dans le mur nord-est permettait de ranger les objets du culte. Une tribune était érigée contre le mur nord-ouest, du côté du portail. Sa structure en bois reposait sur des corbeaux moulurés d'un bandeau sur quart-de-rond. On y accédait en empruntant l'escalier en vis, par une porte aux montants chanfreinés couverte d'un arc brisé ; une seconde porte ouvrait également sur la tribune le logis. Le soin accordé au décor de cette dernière, tant sur les piédroits que sur l'arc brisé qui la couvre, démontre le caractère ostentatoire du premier étage du corps de logis qui s'apparentait sans doute aux aulae des résidences aristocratiques où s'exprime, dans l'architecture et son décor, le pouvoir de celui qui y réside. L'accès au deuxième niveau de la tour a été repris à la fin du Moyen Age par les hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem lors d'une phase de recomposition au cours de laquelle le ou les niveaux supérieurs ont été subdivisés et ré-agencés. Des murs de refends ont été construits et de nouvelles fenêtres, à simple traverse ou à croisée, chacune munie d'une archère-canonnière dans l'allège, ont été percées. Néanmoins, un placard mural couvert par un arc brisé présent dans le mur nord-est, de même forme que celui de la chapelle, appartient à l'état de la fin du XIIe siècle. L'absence de fenêtres antérieures à celles ouvertes à la fin du Moyen Age et l'unique accès à cet espace par l'escalier en vis pourrait laisser supposer qu'il ne s'agissait pas initialement d'un espace résidentiel mais peut-être, par exemple de la salle où étaient entreposées les archives de la communauté religieuse.
Du logis accolé au nord-est subsistent les arrachements des murs aux angles nord et sud de la tour, sans rupture des assises, et les traces conservées dans l'élévation nord-est, qui ne permettent pas d'en connaître l'emprise exacte mais indiquent que le bâtiment comportait un étage. Ses accès ne sont pas connus, hormis les deux portes qui le mettaient en communication avec la chapelle et sa tribune. La première est chanfreinée et à arc brisé, mais les longs claveaux formant sommiers la distinguent des autres portes conservées. Une série de corbeaux à mi-niveau correspond à un plancher ou tout au moins une galerie donnant accès à la porte haute ouvrant sur la tribune. Ce logis a sans doute été remanié à la fin du Moyen Age. En effet, une représentation de la commanderie réalisée durant l'Époque moderne figure un logis qui ne correspond sans doute plus à son état initial. Il se développait en direction du nord-est et comportait trois niveaux dont un sous combles qui sont décrits dans une visite de la commanderie en 1613. Le premier niveau planchéié était accessible par une porte cintrée qui ouvrait sur une pièce dont la fonction est indéterminée. On accédait à l'étage par un escalier droit situé à l'extérieur de l'édifice, probablement contre son mur gouttereau nord-ouest. La pièce était divisée en trois espaces distincts au XVIIe siècle : une salle qui possédait une cheminée et plusieurs fenêtres, ainsi que deux chambres. Des greniers étaient aménagés sous les combles. L'exemple de Trébaïx illustre ainsi le choix des frères de l'ordre du Temple d'adopter, pour certaines de leurs domus, un parti architectural castral comme cadre d'une vie monastique. Dès le XIIe siècle, de nombreuses tours templières méridionales abritaient un lieu de culte qui structurait et hiérarchisait leur topographie. L'établissement de Trébaïx éclaire, quant à lui, à la fin du XIIIe siècle, une évolution de ce principe en associant à la tour un logis participant d'un même programme architectural.

Éléments protégés MH : la tour de Trébaïx en totalité : inscription par arrêté du 22 janvier 2004. (1)

tour de Trébaïx 46090 Villesèque, (Trébaïx ouest) propriété privée, ne se visite pas, visible de la route.

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(1) 
 source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

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