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Château de Saumur (Maine-et-Loire)
 
 

  Saumur occupe un beau site sur les bords de la Loire et au pied d'un coteau abrupt. L'élégance de ses monuments et la beauté du fleuve qui l'arrose l'ont fait dénommer la gentille, bien assise et bien aérée ville de Saumur. De plus le donjon couronnant le coteau lui donne un aspect original et pittoresque. Ce donjon est le troisième château en date, car en effet trois forteresses ont occupé le même emplacement. D'après Ménage et dom Huynes, le premier castrum truncum, le vetus truncus, d'origine romaine, était une petite forteresse, déjà antique par conséquent à l'époque où Pépin le Bref, père de Charlemagne, vint à Saumur (747). Cette opinion confirmerait l'origine très ancienne du castrum. D'autre part, Bodin, sans preuves, attribue le truncus à Pépin le Bref; enfin M. d'Espinay, le savant archéologue d'Angers, tout en reconnaissant que ce château était antique, ne peut et ne veut pas affirmer l'origine romaine de sa construction. Par ailleurs, dès le VIIIe siècle, il existait une petite abbaye dédiée à sainte Marie et à saint Jean qui formait le noyau de la villa Joannis et, selon toute vraisemblance, d'après les travaux et conclusions de M. de Beauregard, de M. Mérimée et de M. d'Espinay, était située sur l'emplacement actuel de l'église de Nantilly et non pas, comme on l'a dit, dans le voisinage de la chapelle Saint-Jean. Cette dernière est de construction beaucoup plus récente (XIIe siècle) et ne peut être considérée comme le centre primitif de l'agglomération saumuroise. Au milieu du IXe siècle (848) les Bretons, avec Noménoë, ayant brûlé Saint-Florent-le-Vieil, vinrent attaquer Saumur et son château. Charles le Chauve donna à cette époque aux moines de Saint-Florent le domaine de la villa Joannis en compensation de leur monastère détruit. Puis les Normands, conduits par Hastings, à leur tour attaquèrent Saumur en 853. C'est à ce moment que les habitants, pour se protéger, élevèrent des défenses, les premières fortifications, sur le coteau autour du vieux château de bois.

Les vicissitudes n'avaient point manqué aux Saumurois en ce qui concernait les maîtres dont ils relevaient. En effet, après avoir été sous la domination des Romains jusqu'en 419, ils étaient passés sous celle des Wisigoths jusqu'en 507. De cette date jusqu'en 638 ils avaient relevé du roi Clovis et de ses successeurs. En 638 Dagobert 1er, créant le duché d'Aquitaine, avait placé Saumur sous la coupe des ducs (jusqu'en 768, date à laquelle Pépin le Bref avait soumis le dernier duc, Waifre, qui refusait de reconnaître son autorité). Puis à partir de 778, Charlemagne ayant rétabli le royaume d'Aquitaine, la ville s'était trouvée successivement sous l'autorité de Louis le Débonnaire, de Charles le Chauve et de Louis le Bègue. C'est ce dernier qui en 877 l'avait réunie à la Couronne. Enfin au Xe siècle, Hugues le Grand, duc de France et comte de Paris depuis 936, avait donné à son cousin, Thibault le Tricheur, le comté de Blois avec Tours, Saumur et Doué. Quand Absalon, en 948, arriva aux abords du castrum, au bois doré, revenant de l'abbaye de Tournus, avec les reliques de saint Florent qu'il avait soustraites à cette abbaye, il demanda donc au seigneur de l'époque, Thibault le Tricheur, comte de Blois, à ce moment résidant à Doué, un lieu de sûreté pour abriter les dites reliques. Thibault ordonna qu'elles seraient, transportées au cas trum (vieux chasteau, vetus truncus). A cette occasion il fit construire un monastère à proximité du château (Saint-Florent-du Boële). Puis peu après il fit élever le fort salmurus ou truncus sur l'emplacement de vetus truncus. Ce château fut bâti après l'an 950 et en tous cas avant 978, date de la mort de Thibault. Son fils et successeur, Eudes 1er, compléta le travail en faisant établir autour du château, entre 978 et 990, une forte muraille dépourvue de tours dont la nécessité, en raison de la faiblesse des projectiles de l'époque, ne se faisait pas encore sentir. Cette muraille remplaça les fortifications de fortune élevées à l'époque des invasions normandes. C'est elle que l'on désigne sous le nom de première enceinte ou enceinte de Thibault le Tricheur. Elle constitua dès lors la limite de la ville, à partir du début du XIe siècle et du nom de Salvus murus (mur de salut, mur de protection) qui fut appliqué, dérivèrent les termes de Salmurus puis Saumur.

Ce mot salmurus exprimait donc bien l'idée de l'enceinte close, du castrum que constituait l'agglomération du castel, du monastère et des habitations élevées dans leur ombre. Et ceci est d'ailleurs l'opinion émise par Adrien de Valois, le seul historien ancien ayant compris que le castrum salmuriense était l'œuvre du comte de Blois et non une ville gallo-romaine. La muraille de la ville fut définitivement achevée par Eudes II, fils de Eudes 1er et petit-fils de Thibault, en l'an 1004. A ce moment Eudes II confia le gouvernement de Saumur à Gelduyn le Jeune. En 1022 un premier incendie dévora le monastère Saint Florent et une partie du truncus. La première enceinte se déroulait sur le parcours suivant: se détachant du château, au nord, à hauteur du début du faubourg de Fenet, elle courait le long de la ligne des maisons qui bordent le côté sud de la rue des Cordeliers (rue Haute-Saint-Pierre ou rue Fourrier actuelle), gagnait l'entrée de la montée du Fort, point où il existait une porte dite porte de l'ouest, se fermant par une herse (on voit encore les traces du mur sur lequel la porte s'appuyait), puis continuait parallèlement à la ligne des maisons formant le côté gauche de la Grande-Rue, pour, à l'extrémité de cette dernière, remonter et rejoindre le château par le coteau dit la montagne de Tarare. Une deuxième porte avec pont-levis, à l'est du château, faisait communiquer directement ce dernier avec la campagne dans la direction de Varrains (porte de l'est ou des champs). Au début du XIe siècle, l'enceinte renfermait donc l'église, le monastère, les habitations des Saumurois, enfin la maison-forte du gouverneur Gelduyn, c'est-à-dire le truncus construit par Thi bault (fort Salmurus) comme nous l'avons dit. Les chroniques de Saint-Florent des XIe et XIIe siècles parlent fort distinctement du vetus truncus et de la maison-forte de Gelduyn et ne les confondent pas, ce qui prouve bien que la seconde avait remplacé le premier.

A ce moment Foulque Nerra, comte d'Anjou, attaqua le comte de Blois, Eudes II, et s'empara de Saumur qu'il réunit à l'Anjou. Il fit incendier le château (deuxième incendie) et le couvent de Saint-Florent avec l'intention de reconstruire le premier sur le même emplacement et de donner aux moines un terrain à Angers, sur lequel il leur ferait élever un monastère. (On sait que finalement les moines revinrent à Saint-Hilaire-des-Grottes où ils bâtirent leur abbaye). Saumur à partir de cette époque dut subir plusieurs sièges D'abord, quelques mois après la prise de Saumur, Gelduyn, dépossédé, attaqua et assiégea la ville; elle ne fut épargnée que grâce à l'intervention des moines de Saint-Florent (1026). Puis en 1058, le comte du Poitou, Guillaume IV d'Aquitaine, attaqua et bloqua dans la ville Geoffroy II Martel, fils de Foulque Nerra. Geoffroy mourut d'ailleurs dès 1060. En 1067, Foulque Réchin attaqua son frère Geoffroy le Barbu, réfugié à Saumur (Foulque Réchin et Geoffroy étaient neveux et héritiers de Geoffroy Martel). Le château fut pris et Geoffroy le Barbu fait prisonnier pour de longues années. Enfin, en mai 1068, le comte du Poitou, Guy d'Aquitaine, voulant venger l'échec subi par son prédécesseur, Guillaume IV, attaqua encore Saumur, s'empara du château qu'il incendia (troisième incendie) en même temps que les églises et les habitations, aussi bien celles construites en dehors que celles élevées en dedans des fortifications. La chronique de Maillezais place ce troisième incendie à la date du 27 juin 1068. Consécutivement les moines durent donc reconstruire leur monastère incendié. C'est également à ce moment que les fortifications de la ville furent restaurées entièrement (nous parlons bien entendu de l'enceinte de Thibault). Arrive la période des Plantagenets commençant avec Geoffroy IV le Bel en 1129. On sait que le dernier Plantagenet, Jean sans Terre, s'était emparé de Saumur au détriment de son neveu Arthur qu'il fit lâchement assassiner. Le roi Philippe-Auguste, ayant pris parti contre Jean sans Terre, enleva à ce dernier la ville de Saumur (1203) et la fit passer définitivement sous la domination des rois de France.

L'enceinte avait dû être construite sûrement au cours du XIVe siècle; sans aucun doute elle existait au début du XVe siècle. D'ailleurs il est évident qu'elle remontait au moins à l'époque au cours de laquelle nos guerres avec les Anglais battaient leur plein, or on sait qu'en 1417 furent construites les fortifications du monastère de Saint-Florent-du-Thouet qui subit les attaques de ces derniers. Comme on le voit l'enceinte de Saumur est de création postérieure au temps de Foulque Nerra, de Geoffroy II Martel et même de saint-Louis, mais elle existait au temps de René d'Anjou puisqu'elle est mentionnée dans les documents de l'époque de ce dernier. Fort épaisse, couronnée dans toute son étendue par des mâchicoulis et non plus par des hours (ou galeries de bois) comme la première enceinte, des saillants très marqués flanquaient les courtines et complétaient ainsi le système de défense obtenu avec les tours. Partant du château au niveau du Petit-Genève, elle rejoignait le bord de la Loire qu'elle longeait jusqu'à la Bilange, puis obliquant à l'ouest, coupait la rue Saint Jean actuelle, touchait au Puits-Tribouillet, filait jusqu'à l'Arche Dorée et allait rejoindre le mur du château au sud. Il faut donc bien remarquer que par conséquent dans sa partie orientale regardant Varrains, le dit château était protégé uniquement par le ravin puisque les fortifications n'englobaient pas le bâtiment sur cette face-là. Quant au château, le troisième, le Donjon actuel, les opinions sont partagées en ce qui concerne la date de sa construction. On sait que Foulque Nerra avait brûlé le truncus en 1025 et avait juré de le rebâtir. Cependant, on connaît à peu près la liste de tous les ouvrages construits par ce prince, mais on constate que le château de Saumur ne figure pas sur cette liste. Seulement on se souvient que Foulque Nerra après avoir pris possession de Saumur l'avait donné à son fils Geoffroy II Martel. C'est, sans aucun doute, ce dernier qui fit commencer les travaux en 1040 aussitôt après la mort de son père. La construction ne fut achevée que dans les siècles suivants. Bodin situe la fin du travail en 1250 et rappelle qu'en 1220 on s'occupait des travaux du château qui avaient été suspendus.

La Bessière précise que le donjon fut commencé en 1040. Godard-Faultrier est du même avis que les deux auteurs précédents. M. Mérimée fait remonter le travail au temps de saint Louis (1215-1250). Bernard de Hautmont, écrivant ses Mémoires sur Sumur en 1680, dit que l'édification était commencée bien avant le XVe siècle, c'est-à-dire avant la naissance du roi René en 1409) et ajoute que ce dernier aurait simplement achevé cette construction. Par contre M. d'Espinay attribue nettement la paternité du château au roi René et apporte d'abord comme preuve que, suivant Bernard de Hautmont, plusieurs portes et clefs de voûtes montraient les armes du roi René, c'est-à-dire celles d'Anjou, de Lorraine, de Bar, de Provence, etc, entourées du collier du Croissant, ordre fondé par ce prince en 1448. D'Espinay s'appuie ensuite sûr la tradition populaire attribuant au roi de Sicile la construction du Donjon. Puis il donne une grande importance à l'ornementation en style flamboyant du XVe siècle qui caractérise le monument. Pour finir, cet auteur fait état de documents recueillis par M. Beautemps-Beaupré et qu'il a publiés en 1879 et 1887 dans la Revue de l'Anjou, notamment une lettre de René à la Chambre des Comptes, en date du 8 avril 1464, dans laquelle le roi ordonne de bailler une certaine somme à un ouvrier pour la réparation du château et pour la Tour neuve. D'Espinay déclare que l'expression Tour neuve s'applique à un nouveau château, oppose ce château neuf au truncus, finalement situe la construction exactement entre 1464 et 1474. Nous ne pouvons adopter les conclusions de M. d'Espinay et nous allons aussi donner des preuves à l'appui de notre opinion diamétralement opposée à la sienne. D'abord, M. Lohier, le savant bibliothécaire de Saumur, a signalé que la gravure accompagnant les Très Riches Heures du duc de Berry (musée Condé à Chantilly), achevées en 1409, représente déjà le château de Saumur tel qu'il se présente actuellement. Or, en 1409, René d'Anjou venait à peine de naître. D'autre part dans la lettre de René, du 8 avril 1464, il est toujours question de réparations du château, mais le mot construction n'y figure pas. Dans une autre lettre du 4 mai 1473 relative à des travaux à exécuter au château à la suite d'avaries occasionnées par le vent, René parle de réparations aux fenêtres, aux cheminées, aux mâchicoulis. Il me paraît, d'ores et déjà, difficile d'admettre qu'un bâtiment construit en 1464 ait eu besoin de tant et de si grosses réparations moins de dix ans après le début des travaux, et même avant la fin de ces travaux.

Etude sur les comptes de Macé Darne, maître des œuvres de Louis 1er duc d'Anjou et comte du Maine (1367-1376), d'après un manuscrit inédit du British Museum, par André Joubert (Revue de l'Anjou, 1890). Chapitre IV, relatif à la restauration partielle du château de Saumur et la construction de la chapelle neuve (1367-1376). Précisons de suite que Louis 1er était le grand-père de René d'Anjou. D'après les comptes de Macé Darne, une grande partie du château fut restaurée entre 1367 et 1376. On voulait fortifier la place et la mettre à l'abri des attaques des Anglais. Les fournitures de pierres destinées aux travaux de défense commencent à la Tous saint 1367. Dès le mois de juin 1368 on travaille à "haucer de III ornes et demie le portal du baille par devers les champs". Pierrot Baudit, maçon de la ville, est chargé du travail. On recouvre une partie du château et on reconstruit en entier le pont-levis de l'entrée de la forteresse. Au commencement du mois de mars suivant (1369) on refait plusieurs "terraces en la longue chambre d'emprès le portal et en la salle où le capitaine demeure", ainsi que dans les chambres voisines en fort mauvais état. Dans la première semaine de mai on démolit quatre vieilles maisons et le mur du côté du château "sur la rue de Feunet, pour élever une maison et deux tourelles aux deux bouts d'icelle". On emploie à la fin du même mois quatre maçons pour "esgaller de pierre à sec les brèches du dit mur et huit manœuvres pour couvrir dessus de pipes sur bout plaines de pierre et de sablon pour cause des ennemis que l'on disait venir faire siège devant la ville de Saumur". On achète une grande quantité de "coings tout simples", des pierres appelées "tableaux" pour les fondements, des pierres nommées "voussueurs" (voussoires) pour "faire grands arcs contre le pavillon, des grandes pierres d'apparay (appareil) pour les chemines, les huisseries, les fenestres", cinq grandes pierres pour faire les "quatre coings des deux cheminées du haut estage de la maison" et la clef de voûte de la chapelle, quatre autres grandes pierres pour "couvrir l'husserie (porte) double à entrer du pavillon en la chambre de parement (parade) et pour les marches des deux eschelliers, l'un à monter en la dite chambre de parement devez le puiz (escalier d'honneur), l'autre à descendre au bas-cellier d'icelle maisson", d'autres pour paver les deux hautes chambres, l'une de parement, l'autre de retrait et le devant de la chapelle, ainsi qu'une pierre "bien grande à faire l'espi de la tour devers la salle du baille". Les pierres sont fournies ainsi depuis la Toussaint 1367 jusqu'en mai 1376.

En 1589, Duplessis-Mornay fut envoyé à Saumur par Henri IV pour prendre possession de la ville. En 1593, il décida que la Place deviendrait une forteresse importante, capable de soutenir un siège et, dans ce but, sur les plans de l'ingénieur Bartholoméo, fit entourer le donjon sur tout son pourtour et y compris une vaste cour adjacente, d'une enceinte formée de redents et de bastions. Ces remparts, en pierre, existent, toujours; ils supportent un terre-plein et sont couronnes d'un parapet. Jadis de petites guérites ou échauguettes en encorbellement étaient suspendues aux angles saillants des bastions. Elles n'ont pas été rétablies. Deux demi-lunes (à l'ouest et au sud) défendaient les deux portes. L'enceinte bastionnée n'a pas été modifiée. En même temps Duplessis-Mornay faisait élever, à l'extérieur de la partie ouest de la ville, une autre enceinte de terre, commençant à 200 mètres en deçà de la tour Grenetière, enveloppant tout le faubourg Saint-Nicolas des Bilanges et par conséquent les portes de la Bilange et du Puits-Tribouillet, et finissant à la Loire. Cette enceinte supplémentaire comportait cinq bastions et était dotée de deux portes: le portail Louis et le portail Henri. Cette enceinte de terre a disparu dès la première visite que fit Louis XIII à Saumur (5 à 9 avril 1622) après celle du 17 mai 1621, au cours de laquelle il avait enlevé à Duplessis le commandement de la Place. Quelques semaines après le départ de Duplessis-Mornay un incendie détruisait le logis de la garnison du château avec les magasins et les munitions. Heureusement le donjon fut épargné. Durant la Fronde le château tomba aux mains des rebelles et fut gouverné par Dumont qui, d'ailleurs, se trouva bientôt dans l'obligation de capituler et rendit la place au comte de Comminges. Puis, pendant une longue période il ne se passe rien d'important au château qui était commandé par un lieutenant du Roi assisté d'un major et d'un aide-major.

Signalons cependant que le surintendant des Finances Fouquet, arrêté le 5 septembre 1661 sur l'ordre du Roi, en sortant du château de Nantes, fut dirigé sur la Bastille pour y être écroué et passa successivement, au cours du transfert, le 6 septembre à Ingrandes, le 7 au château d'Angers, où il resta trois mois, puis aux châteaux de Saumur, d'Amboise et de Vincennes où il ne fit que de courts arrêts. Fouquet ne resta qu'une nuit au château de Saumur, du 10 au 11 décembre 1661. A la fin du XVIIe siècle, les huguenots, refusant de signer la formule d'abjuration, furent incarcérés au château de Saumur et mis au cachot. La fille cadette de Tallemant des Réaux (Charlotte) et Tallemant de Lassac connurent cette vie pénible. Charlotte, entêtée dans ses idées religieuses et ne voulant pas suivre ses parents dans leur soumission, fut arrêtée en mars 1686, transférée du couvent à Fort-l'Evêque, de la Bastille au château de Saumur. De Saumur on l'envoya à Mons (Hainaut) le 2 mars 1688. Daniel de Larroque fut également détenu à Saumur. Pour avoir écrit un pamphlet où le gouvernement du roi était accusé de n'avoir pris aucune mesure pour prévenir la famine, Larroque fut enfermé au Châtelet d'abord, puis au château de Sau mur où il resta cinq ans. En 1730 Louis-Charles Le Tellier, ancien garde du corps, est lieutenant de la compagnie des gens d'armes invalides au château de Saumur. En 1745, après la bataille de Fontenoy, le roi Louis XV ayant décidé que le château deviendrait prison d'Etat, le lieutenant du Roi, commandant, eut alors sous ses ordres, comme garnison du fort, une compagnie de vétérans de l'armée du Hanovre auxquels on laissa, en souvenir de leurs exploits, un parc d'artillerie d'honneur formé de trois grandes couleuvrines de bronze données par Richelieu au comte de Sceaux, le gouverneur qui avait succédé à Duplessis Mornay. L'une de ces couleuvrines fut enlevée par les Vendéens aux Saumurois, le 16 mars 1793, au combat de Coron. Les Vendéens la baptisèrent la Marie-Jeanne et en firent l'objet d'un culte superstitieux. Entre 1760 et 1789, le nombre des prisonniers d'Etat enfermés à la forteresse ne dépassa pas le chiffre de huit à dix personnes dont le comte de Sades (1740-1814), le sieur Lenormand d'Etioles, parent de l'époux de Madame de Pompadour, et l'amiral comte Yves de Kerguelon-Trémarec, navigateur (1734-1797) enfermé en 1774 à la suite d'une condamnation encourue pour avoir abandonné enmer un canot et les hommes d'équipage montant ce canot.

Cependant, pendant la deuxième partie de la guerre de l'Indépendance américaine (1778-1783), c'est-à-dire à partir du moment où la France eut pris parti pour les treize états américains, de nombreux prisonniers de guerre furent internés à Saumur. En 1789 le commandement et l'administration du château étaient confiés à Louis-Henri-Georges Aubert de Saint-Georges du Petit-Thouars, lieutenant du roi et gouverneur de la ville (oncle d'Aristide du Petit-Thouars). En visitant le château les députés nantais de la Fédération y trouvèrent quelques prisonniers et un vénérable vieillard dont la barbe descendait jusqu'à la poitrine. Etendu sur une chaise longue, attitude lui ayant été recommandée aux fins de se remettre d'une chute de 60 pieds, au cours d'une tentative d'évasion, c'était Jean Louis Kergus de Trosugan, détenu depuis six ans, par lettre de cachet, sous prétexte de folie. Le 9 juin 1793 le château fut pris et occupé par les Vendéens. Pendant le Directoire et le Consulat plusieurs prisonniers anglais y furent incarcérés. Le château fut déclassé après la paix d'Amiens (mars 1802). La vieille citadelle était à ce moment en bien mauvais état, on allait l'abattre, lorsque Napoléon 1er passa à Saumur le 12 août 1808. Sa visite assura la conservation du château dont il ordonna la restauration. Peu de temps après, Napoléon, par décret impérial du 3 mars 1810, reclassait le château comme prison d'Etat. Les travaux de réfection n'étaient pas encore commencés, deux tours étaient en ruines, une intervention d'urgence s'imposait. Une somme de 265.000 francs prévue pour la remise en état fut jugée insuffisante et les dépenses furent finalement évaluées à 322.000 francs. Les travaux, dirigés par l'ingénieur de première classe du corps impérial des Ponts-et-Chaussées Normand, furent adjugés au sieur Caillaux, entrepreneur à Saumur. Ils durèrent longtemps et, commencés en 1811, ne furent achevés qu'en décembre 1813. L'établissement ouvrit enfin le 7 février 1814. Un commandant de gendarmerie, le chef d'Escadron Pihoux, en était le directeur. Quatre-vingt-seize chambres disponibles dont soixante-quinze pour les prisonniers et vingt et une pour le personnel subalterne étaient aménagées, non compris un certain nombre de locaux administratifs et de service (infirmerie, archives, cuisines, lingerie, etc), et un cachot.

Désaffecté en 1830, le château devint arsenal militaire jusqu'en 1890. En même temps les bâtiments de la cour adjacente étaient, occupés par diverses fractions de régiments d'infanterie. Cependant, dès 1892, le docteur Peton, maire de Saumur, songeait à récupérer le château au profit de la ville et à l'utiliser. A cette époque il associa M. Magne, inspecteur général des Monuments historiques au Ministère des Beaux-Arts, à cette œuvre de restauration. En 1896, M. Magne fournissait un devis de travaux. Les conseils municipaux de 1896, 1900, 1904 s'occupèrent pécuniairement de la question. Enfin, par délibération du 10 janvier 1906, le conseil municipal autorisa le maire à passer acte avec les représentants des trois ministères intéressés (Guerre, Beaux-Arts, Finances) pour traiter et acheter à l'Etat les bâtiments proprement dits du château. Le contrat passé, la Ville put songer à commencer les travaux de restau ration. Le conseil vota un premier crédit de 50.000 francs qui s'ajoutèrent aux 70.000 francs accordés par les Beaux-Arts. Les travaux se poursuivirent de 1906 à 1912, les extérieurs furent réfectionnés, les étages provisoires supprimés, les escaliers rendus utilisables, les appartements rétablis dans leur état primitif dans deux corps de bâtiments, les toitures plates provisoires de deux tours supprimées et remplacées par des pignons pointus en poivrière. Enfin, en 1912, la Ville installait dans une partie des locaux son Musée municipal et en même temps accordait l'hospitalité, dans une autre partie, à la Société du Musée du Cheval. Depuis 1912 de nouveaux travaux ont été exécutés et se poursuivent au fur et à mesure des disponibilités pécuniaires.

Description du château de Saumur:

Bâti sur l'emplacement successivement occupé par le vetus truncus, puis par le truncus, à 45 mètres au-dessus du niveau de la Loire, le château comprenait quatre corps de bâtiments renfermant une cour carrée sous laquelle s'étendait une vaste cave voûtée. Aux quatre angles extérieurs s'élèvent quatre tours jadis couronnées de hautes toitures pointues. Ces quatre tours sont cons truites sur deux plans: le plan inférieur circulaire (jusqu'au niveau du milieu de la hauteur) et le plan supérieur octogonal avec un pilier à chaque angle de l'octogone. Les quatre tours, dont deux étaient en ruines à la fin du XVIIIe siècle, sont rétablies dans leur état primitif comme nous l'avons dit. Dans la cour un avant-corps renferme l'escalier d'honneur. Cet avant-corps, doté de quatre larges fenêtres superposées, à frontons découpés et à balcons dotés de sculptures renaissance, est décoré à l'extérieur par cinq niches dans lesquelles il y avait autrefois des statues. Un écusson aux armes royales (trois fleurs de lys) surmonte la fenêtre supérieure de l'escalier. A l'angle nord-est de la cour il existe, au-dessus de l'entrée d'un autre escalier, un bas-relief de forme semi-circulaire représentant deux lutteurs. L'entrée du château se trouve au sud-est; un petit avant-corps, flanqué de deux tourelles en encorbellement, protège cette entrée. Le corps de garde (qu'il ne faut pas confondre avec la salle des gardes) était installé dans la salle unique de cet avant-corps (on y voit encore la cheminée). Rappelons au passage que jadis, avant la construction de l'enceinte bastionnée de Duplessis-Mornay, la porte, qui faisait, communiquer directement le château avec la campagne de Varrains, était dotée d'un pont-levis jeté sur le ravin. Ce pont-levis était placé à proximité immédiate de la porte (porte de l'est ou des champs). Il était doublé à l'intérieur par la herse dont on voit encore l'emplacement et par une seconde porte, plus en arrière encore et en bordure de la cour intérieure.

L'ornementation extérieure est presque nulle. Les fenêtres sont à plates-bandes avec meneaux de pierre. Des ornements en style flamboyant se remarquent cependant aux appuis d'un autre petit avant-corps qui fait saillie à l'extérieur du château vers l'est. L'ornementation intérieure est sobre. Les fenêtres sont décorées de sculptures représentant des choux frisés. Dans les salles voûtées les nervures des voûtes sont à pans coupés. Les autres salles, hautes d'étage et hardies de construction, sont dotées de plafonds à poutrelles ou à soliveaux à moulures. Six escaliers, tous en vis, desservent les étages. L'escalier d'honneur occupe la tourelle qui forme avant-corps au bâtiment nord dans la cour intérieure. Les cinq autres sont placés dans des tourelles accolées aux quatre tours et non dans les tours elles-mêmes: un dans la tourelle nord (ne commence qu'au premier étage), un dans la tourelle nord-est (accès aux Musées, c'était l'escalier desservant jadis les appartements privés), un dans la tourelle sud-est (au-dessus du logement du gardien-chef), enfin deux, dans la tourelle sud-ouest, qui ne commencent à courir qu'à partir du premier étage et sont imbriqués l'un dans l'autre sans jamais se confondre (on accède à ces deux escaliers en gagnant tout d'abord le premier étage par l'escalier de la tour sud-est). A remarquer que la tourelle sud-ouest est appelée communément la Tour du Guet et cette désignation indique suffisamment son utilisation primitive. Signalons en passant le puits sec, situé dans l'angle nord-ouest de la cour, d'une profondeur de quarante mètres et doté d'un treuil. La légende rapporte que ce puits, qui autrefois se trouvait à l'intérieur du bâtiment disparu, communiquait par un souterrain avec une maison du boële, vraisemblablement celle située à proximité de la porte ouest (extrémité inférieure de la montée du château) et était utilisée, pour permettre le ravitaillement des habitants du fort lorsque ce dernier était assiégé. Cette opinion manque tout à fait de vraisemblance car il ne faut pas oublier que château assiégé impliquait nécessairement occupation du boële par l'adversaire. Les intérieurs ont été reconstitués dans deux corps de bâtiments seulement. Pour terminer ne ménageons ni notre admiration ni nos remerciements à l'administration municipale éclairée et avertie qui, en quelques années, a su faire revivre notre vieux château et en assurer la conservation. (1)

Éléments protégés MH : le château et son enceinte bastionnée, y compris les bâtiments édifiés dans l'enceinte, les fossés, le pont d'accès à la basse-cour et le bastion en terre situé au sud-est : classement par arrêté du 2 novembre 1964. (2)

château de Saumur 49400 Saumur, tél. 02 41 83 30 21, ouvert au public du 1er avril au 30 septembre, accès au site tous les jours du mardi au dimanche de 10h à 13h et de 14h à 17h 30. En juillet et août présentation commentée en Français et Anglais de l’histoire du site et de l’architecture du château.


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(1)  Le château de Saumur: étude historique et archéologique par le colonel Savette; bois gravés de Henri Cordier: Imprimerie Richou et fils, Saumur (1951)
(2)   
source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

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(IMH) = château inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, (MH) = château classé Monument Historique
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