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Château de Sébeville (Manche)
 
 

    Ce château a été construit en 1719, par le troisième marquis de Sebeville, Charles-Louis-Frédéric Kadot, enseigne de la deuxième compagnie des mousquetaires du roy, qui mourut en 1730, ne laissant que des filles. Cette date de 1719 est écrite sur une plaque de plomb retrouvée, il y a quelques années, dans la maçonnerie du perron central, à présent démoli. La nouvelle et somptueuse résidence remplaçait un logis plus ancien, construit, au lendemain des guerres de religion, par François Kadot, gouverneur de Carentan, dont les protestants avaient mis à sac et détruit la demeure. De la restauration du XVIe siècle, il ne reste plus qu'une tourelle, qui ourle l'un des angles du château actuel. Cette tourelle, couverte d'une toiture campaniforme, insuffisamment percée d'ouvertures, en somme assez disgracieuse, fut affectée à l'usage de chartrier. On ne s'explique pas bien pourquoi l'architecte, élève de Mansard, qui dirigea la construction nouvelle, consentit à conserver cette tour, dépourvue de toute élégance. La décision paraît d'autant plus singulière, que la tourelle du XVIe siècle ne sert pas à loger l'escalier principal. Celui-ci est placé dans un pavillon neuf, à l'autre extrémité du château. Pour balancer sans doute la masse du chartrier, et bien marquer que la façade centrale seule appartenait au plan qu'il avait créé, l'architecte fit un véritable hors-d'œuvre du pavillon, bâti à l'opposé de la tour. Les ouvertures de ce pavillon suivent le rampant des marches de l'escalier, disposition qui avait cessé d'être en usage aux débuts du XVIIIe siècle.
Entre ces deux pavillons, ou il n'avait cherché que le balancement des masses, sans se préoccuper des rigueurs de la symétrie, l'auteur du château de Sebeville dessina une façade régulière sur neuf ouvertures réparties en trois groupes et formant un rez-de-chaussée sur sous-sol, surmonté d'un étage et d'un comble sans lucarnes. Au centre, un corps avancé en faible saillie, terminé par un fronton, prenait accès sur un perron a double volée. La porte principale était accostée de deux colonnes corinthiennes, prolongées au premier étage par des pilastres et supportant un balcon rectangulaire en fer forge. Les chaînes d'angle aux refends étroits et très nets, les chambranles en faible saillie, d'un profil très pur, les mascarons formant clef de voûte, les moulures sobres et fines des cheminées, tous les détails de la construction trahissent la main d'un de ces architectes de cour élevés dans les traditions classiques du siècle de Louis XIV. Ni les fantaisies provinciales, ni les mièvreries du style rocaille ne sont venues troubler la sévère et froide ordonnance de cet émule des Lemercier et des Blondel. Il ne reste plus rien du parc qui avait du être créé, tout au moins projeté, autour de cette grandiose demeure. On voit encore, dans un herbage, derrière le château, les restes d'une avenue. Quant à l'intérieur du château, la pièce la plus remarquable est un salon en forme de galerie, décoré de lambris de hauteur peints et dorés, de toute beauté. Ces lambris avaient été disposés pour recevoir les portraits des Kadot. Au début du XXe siècle, le propriétaire, M. le comte de Maillé, a fait enlever ces portraits, pour les remettre au chef actuel de la famille de Sebeville. Ces portraits étaient nombreux et intéressants, tels que peuvent être ceux d'une race d'épée, dont plusieurs ont versé leur sang pour le service du roi, ou joué un rôle historique.
La famille Kadot, à ce que rapporte une tradition mentionnée dans ses archives, devait sa première illustration à un Lionnet Kadot, qui avait sauvé la vie au roi Louis le Gros, menacé par un sanglier furieux. Lionnet avait reçu le "cognom" de Sauve-Roi, et les armes de la famille s'expliquent, si l'on en croit cette même tradition, par une allusion à cette aventure de chasse. L'écusson des Kadot porte, en effet: "de gueules aux trois roses d'or, accompagnées, en cœur, d'une hure de sanglier de sable, couronnée d'or, allumée et défendue d'argent". En 1310, Guillaume Kadot était établi à Carentan, et habitait une maison qui devint depuis l'hôtel de ville, où ses armes se voyaient encore quelques siècles après. Vers la fin du XVe siècle, les Kadot devinrent seigneurs de Gerville et de Sebeville, et se séparèrent, vers 1509, en deux branches. Dans les deux siècles qui suivirent, apparurent de nombreux hommes de guerre; quelques-uns d'entre eux ont laissé des traces dans l'histoire. Michel Kadot fut député de la noblesse aux États généraux de 1526. Capitaine des côtes et plat pays du Cotentin, il lutta toute sa vie contre les calvinistes. Dans l'intervalle de ses expéditions, il écrivait contre l'hérésie des ouvrages de controverse. Il fit rebâtir le château, qui avait dû souffrir pendant la guerre de Cent ans, et qui était en ruines en 1490. François eut la survivance des charges de son père, et fut nommé, en 1574, gouverneur de la ville et du château de Carentan. Il se distingua pendant la campagne contre les lieutenants de Montgommery. En représailles de la défaite que Michel Kadot avait infligée à un régiment protestant, l'habitation qu'il venait de relever fut démolie. François s'était allié à la famille Guillotte de Franquetot, déjà riche et influente. Gilles fut, comme son trisaïeul, député de la noblesse à l'assemblée de notables qui se tint à Rouen en 1617. Il prit part, comme gendarme du roy, aux campagnes de Louis XIII, et fut blessé au siège de Montpellier.
La terre de Sebeville fut érigée en marquisat par lettres patentes de 1660, en faveur de François, fils de Gilles. Par son mariage avec Françoise Gigault de Bellefonds, fille d'une Aux Epaules de Sainte-Marie-du-Mont, il devint l'oncle par alliance des maréchaux de Belletonds et de Villars. Bernardin, filleul du maréchal de Bellefonds, devint maréchal des camps et armées du roy. Il fut envoyé à Vienne, de 1681 à 1683, après la paix de Nimègue, comme ambassadeur extraordinaire du roi de France auprès de l'Empereur. Il a laissé de sa mission un récit qui constitue un véritable monument historique. Il dépeint dans ce récit, avec beaucoup de sagacité, les habitudes des membres de la maison impériale, les usages de la cour, et les terreurs que firent naître les menaces des Turks. On assiste aux négociations entamées par l'Empereur avec les principales puissances environnantes, aux alternatives de succès et de revers qui marquèrent cette campagne, dernier terme des progrès en Europe des armées ottomanes. Le métier d'ambassadeur, à cette époque troublée, n'était exempt ni de soucis, ni de dangers, et comportait autant d'énergie que d'adresse. Ni l'une ni l'autre de ces qualités ne firent défaut au marquis de Sebeville. Un des gentilhommes de sa suite, le sieur du Fayel, avait été mis en prison sur les ordres du chancelier aulique. L'ambassadeur protesta contre cette violation du droit des gens, et, après de longues démarches, entremêlées de menaces et de représailles, obtint la délivrance de du Fayel. Le récit de cet incident, sous la forme froide et officielle d'un rapport, donne une haute idée des ressources d'esprit du plénipotentiaire normand. Tous ces hommes, et beaucoup d'autres de l'illustre lignée, avaient leur portrait à Sebeville.
La collection est maintenant réunie au château de Palteau en Bourgogne, dans la résidence du comte Kadot de Sebeville, le chef actuel de la famille. Quelques-unes des figures frappent la mémoire: tels le portrait de ce beau et jeune Henry Robert, tué en 1674, à 22 ans, à la sanglante journée de Seneffe, ou celui de Jacques, chef d'escadre en 1702, tué en 1707 au siège de Toulon. Les Kadot ont joué un rôle dans la construction de l'église de Carentan, dont ils furent les bienfaiteurs. La chapelle Saint-Eloi, avec une partie de la muraille adjacente, avait été construite des deniers de Gilles, en 1426. Cette chapelle appartint à la famille jusqu'à la Révolution. Nous possédons l'original d'une supplique, présentée par les ouvriers travaillant du marteau, en la ville de Carcntan, à l'effet d'être autorisés, comme par le passé, ce à se placer dans cette chapelle, y tenir confrairie, et y faire dire la messe, à charge par eux d'entretenir ladite chapelle de décoration luminaire et de toute espèce de réparations. La supplique fut répondue favorablement par Guillaume-Remy-Charles, chevalier, comte de Sebeville, capitaine au régiment de Bourbon-dragons, seigneur et patron de la paroisse de Notre-Dame de Savigny, au nom de sa cousine, Barbe Kadot de Sebeville, marquise de Longaunay, le 4 juin 1787. La marquise de Longaunay était la dernière héritière de la branche aînée des Kadot. Après la mort de Rernardin-François, fils de l'ambassadeur, les titres de la famille furent dévolus à Guillaume-Remy-Charles, ancêtre direct des Sebeville actuels. Quant au domaine lui-même, il passa aux mains du prince Lebrun, second consul après le 18 brumaire, architrésorier de l'Empire, duc de Plaisance, pair de France, l'une des illustrations les plus pures de l'époque. Le château appartenait au début du XXe siècle à l'une des héritières du duc de Plaisance, Madame la comtesse de Maillé. (1)

Éléments protégés MH : les trois cheminées subsistantes du château ; les façades et les toitures de la partie ancienne avec les arcades des communs : inscription par arrêté du 31 juillet 1979. Les façades et les toitures du château : classement par arrêté du 31 juillet 1979. (2)

château de Sébeville 50480 Sébeville, propriété privée, ne se visite pas.

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Crédit photos: Elgaard sous licence Creative Commons
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(1)    source: La Normandie Monumentale et Pittoresque, (Manche) Lemale & Cie. Imprimeurs, Éduteurs, achevé d'imprimer le 25 septembre 1897.
(2)    source :  https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee

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