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La commune de Vauville est assurément l'une des plus pittoresques de toute
la Hague: c'est une suite de collines abruptes, séparées les unes des autres
par d'étroites et tortueuses vallées. Des ajoncs nains, de chétives bruyères
couvrent à peine ces hauteurs où le touriste rencontrera plusieurs monuments
celtiques. Sur la colline des Pouquelées, à 134 mètres d'altitude, c'est une
galerie mégalithique fort remarquable, en dépit des mutilations qu'elle a
subies au commencement du siècle. Sur la lande des Cottes, ce sont des
tumuli parfaitement conservés, et, dans le bois des Hougues, dépendant du
château un autre plus important, dit: la Butte de César, où existait jadis
un télégraphe aérien. La bourgade, qui s'embellit chaque jour, est
coquettement assise, près de la mer, autour de l'église et du château.
L'église offre un mélange intéressant de différents styles et fut donnée par
Richard de Vauville au prieuré du lieu, dans la première moitié du XIIe
siècle. Le château, d'abord forteresse féodale importante, fut rebâti, vers
la fin du XVIIe siècle, par le comte de Tourville, à l'exception du donjon
et d'une partie de l'aile occidentale qui sont de la construction primitive.
Bien que l'appareil en soit vulgaire, les formes lourdes et massives, le
château de Vauville n'est pas sans valeur architecturale: sa grande hauteur,
ses fenêtres Renaissance avec meneaux en croix, les frontons rayonnants des
combles, et surtout le donjon de 16 à 18 mètres d'élévation qui relie et
domine les deux ailes, donnent à l'ensemble un aspect imposant et très
monumental.
La seigneurie de Vauville remonte aux premiers ducs de Normandie, et fut
érigée vers la fin du Xe siècle. Un des premiers seigneurs, appelé Richard,
accompagna le duc Guillaume à la conquête de l'Angleterre (1066). D'après
Toustain de Billy, ce serait lui qui, dès 1060, aurait fondé à Vauville le
prieuré de Saint-Ermel, dédié à l'archange saint Michel et dépendant de
l'abbaye bénédictine de Cérisy. La dotation de ce prieuré, dont les
bâtiments subsistent encore, fut complétée par Algare, évêque de Coutances,
et par quelques habitants de Vauville. La fondation en fut confirmée par
Richard de Bohon en 1163. Au XIIe siècle, Vauville relevait de la baronnie
de Lithaire et devait le service d'un chevalier. Plus tard, il forma un
plein fief de haubert et releva, pendant quelque temps, de la baronnie de
Bricquebec. Mais, dès 1456, il ne figure plus parmi les fiefs de cette
baronnie, et, jusqu'à la Révolution, il a sa haute justice à
Saint-Sauveur-le-Vicomte. Sous le règne de saint Louis, Vauville eut pour
seigneur Gauvain, le bienfaiteur et l'ami de Thomas Hélye de Biville. C'est
dans une chambre du château, située sur la porte cochère, que le pieux
missionnaire reçut, pendant sa dernière maladie, les soins les plus
affectueux, et rendit son âme à Dieu, le 19 octobre 1257. Ces premiers
seigneurs portaient "de gueules au pal fiché d'argent accompagné de 6
merlettes 1 de même, 3 de chaque côté". Ils disparurent pendant la guerre de
Cent ans et furent remplaces, vers la fin du XVe siècle, par les de la Haye,
une des familles les plus anciennes et les plus considérables de la
Basse-Normandie.
En 1500, le seigneur de Vauville était Gyon de la Haye; en 1543, c'était
Jacques, seigneur de Hotot, au pays d'Auge. Ce dernier ne laissa qu'une
fille, accordée fort jeune avec François de Harcourt, baron de Beaufou, de
Beuvron, etc., mais dont elle fut séparée par la suite. Après elle, Vauville
eut pour seigneur Louis Le Poupet, dont la famille, anoblie en 1509 portait
"d'azur à la croix pattée d'or, accompagnée de 3 croissants de même, 2 en
chef et 1 pointe". Louis Le Poupet épousa Jeanne de Pirou, l'une des trois
sœurs de Jean, seigneur de Fermanville, Gonneville, etc. Il mourut sans
enfants, et eut pour héritier son neveu Julien qui gaspilla, en quelques
années, toute sa fortune. Les Le Sauvage, qui lui succédèrent, étaient
originaires de Pierreville et avaient été anoblis en 1422. Ils portaient
"d'azur au tronc de chêne d'argent à 3 écots, 2 à droite et 1 à gauche, posé
en pal et accompagné en chef de 2 glands, le fruit d argent et l'écorce,
d'or, et en pointe de 2 feuilles d'argent". Le premier, qui fut seigneur de
Vauville, est François, fils de René et de Marie Hamon. Il y mourut
célibataire, le 30 mai 1631, et eut pour héritier son frère Julien, déjà
seigneur et patron de Saint-Marcouf, Fontenay, Pierreville, Quettehou,
Valognes, etc. Julien Le Sauvage avait épousé Françoise de Grimouville qui
mourut sans enfants, le 2 novembre 1634 Il épousa en secondes noces Anne de
Cotentin de Tourville, dont la famille allait briller d'un si vif éclat sous
le règne de Louis XIV. Il en eut une fille, Jeanne-Marie, qui, en novembre
1663, épousa son cousin, César de Cotentin, frère aîné du maréchal de
Tourville, et, comme lui, d'une bravoure à toute épreuve. C'est ce nouveau
seigneur qui rebâtit et transforma le château. Il mourut en 1697, après
vingt-deux ans de maladie.
Son plus jeune fils seulement, Jean-César, lui survécut et hérita de ses
titres et seigneuries. Il est surtout connu par le meurtre qu'il commit, en
1713, dans un accès de jalousie conjugale, sur la personne de
Pierre-Alexandre Hellouin, bailli de Périers. Condamné à mort pour ce crime,
il fut gracié par le chapitre métropolitain de Rouen, qui le choisit pour
lever la fierté, c'est-à-dire porter les reliques de saint Romain, cette
année-là, le jour de l'Ascension. Les comtes de Tourville portaient "de
gueules au bras armé d'argent tenant une épée de même, accompagnée en chef
d'un casque de même métal". Vauville, après eux, devint la propriété de M.
de Saffray, originaire de la ville de Caen, dont la famille, anoblie en
1358, portait "d'argent à 3 fasces ondées de gueules". Il avait épousé
Adélaïde-Anne-Thérèse du Mesnildot, qui lui survivait au moment de la
Terreur. C'est elle qui, en 1810 et 1811, vendit à M. le lieutenant général
comte Le Marois, le château et le domaine de Vauville, dans la famille
duquel ils sont restés jusqu'en 1890. Au début du XXe siècle le propriétaire
était M. Henri Gayard, un archéologue et un artiste, qui restaura le château
de Vauville avec un goût parfait (1). Lors de la seconde Guerre Mondiale, la
demeure fut pillée et fortement endommagée. L'exceptionnel jardin botanique
occupe plus de 40000 m². Abritant plus de 900 espèces de l'hémisphère
austral, le jardin entoure le château dans une ambiance subtropicale tout à
fait surprenante.
Éléments protégés MH : le jardin botanique : inscription par arrêté du 20
novembre 1992. (2)
château de Vauville 50440
Vauville, tel. 02 33 10 00 00, ouvert au public en avril les samedis et
dimanches de 14h à 18h, en mai, juin, juillet, août et septembre tout les
après midi de 14h à 18h, en octobre le samedi et dimanche de 14h à 18h.
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