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Château de Béthon (Marne)
 
 

 La terre et seigneurie de Béthon, autrefois Fontaine-Béthon, assise aux confins de la Champagne et de la Brie, sur une côte élevée d'où le regard embrasse un vaste horizon, n'a pas encore eu son historien, et pourtant elle a son histoire, où les noms illustres abondent, aussi vieille, plus vieille peut-être que le royaume de France. Il est certain que Béthon eut jadis une importance stratégique, si l’on en juge par son enceinte de fossés, dont se voient encore les traces, et par ses fortifications, dont il ne reste que le souvenir. Dans la période féodale, il a eu des seigneurs de son nom, et si ce nom ne réveille aucun des prestigieux souvenirs des temps chevaleresques, il ne faut pas croire que Béthon n'ait pas ses pages glorieuses. Dès l'aurore de la féodalité, Fontaine-Béthon avait donné son nom à une famille chevaleresque, dont trop peu de titres sont venus jusqu'à nous. Le fief de Fontaine-Béthon était, du côté de l’orient, contigu au petit fief de Vaulonnière, et l’un et l’autre eurent pendant des siècles les mêmes seigneurs. En 1146, une charte de Thibaud, comte de Champagne, notifie que Milon, sire de Nogent, a donné au Paraclet du diocèse de Troyes, entre autres choses, la tierce partie du moulin de Guainnonières, ce que confirme, en 1194, une charte de Garnier de Trainel, évêque de Troyes, qui mentionne que Milon a fait cette donation pour l'âme de son fils Hugues, enseveli audit monastère. Nous voyons encore, par une bulle d’Eugène III, du 1er novembre 1147, que le même monastère possédait une vigne à Fontaine-Beton. Une bulle d'Alexandre III, de l’an 1169, mentionne au nombre des possessions et revenus de Saint-Pierre de Troyes "la dîme de Fontaine-Betton", et, en 1209, Innocent III confirme au même monastère "la dîme de Fontaine-Betun". D'une charte de Mathieu, par la grâce de Dieu évêque de Troyes, de 1171, il appert qu’une noble femme, du nom de Félicité, avait donné au monastère d'Andecy le tiers de la grosse dîme de Nesle, Bussy, Fontaine et les Essarts. M. l'abbé Lalore présume qu'il s'agit ici de Fontaine-Béthon, et c'est également notre sentiment.

Vers 1172, les hoirs de Gautier Chassefoin tiennent fief à Potangis et à Wagnonières, en la chastellerie de Chantemerle; de même, Guillaume de Lessart, à la Forestière, à Chantemerle et à Waugaignières, et Godefroy d'Esternay, à Potangis, Chantemerle, et en autre leu. On trouve à la même époque, des seigneurs de Potangis et de Chantemerle, et, un siècle avant, Hildegaire de Chantemerle était un des chevaliers du comte de Champagne. En 1176, Etienne Brichemer, possessionné à la Forestière et à Chantemerle, est témoin d'un accord conclu avec le prieuré de la Celle-sous-Chantemerle. De tous ces fieffés possessionnés auprès de Fontaine-Béthon, Milon, sire de Nogent, me paraît être le seul à qui la seigneurie puisse en être attribuée, et ce fut probablement lui qui donna à l'église cathédrale de Troyes, en même temps que la dîme du moulin de Vaulonnière, celle de la terre et seigneurie de Fontaine-Béthon. Au mois de mai 1204, "Thibaut, comte de Champagne, notifie que Serins de Fontaines, son vassal, a donné à la maison des Deux-eaux, pour les malades, la dixme de vin qu'il avait à Bouilly". Peut-être sommes-nous ici en présence du premier seigneur de Fontaine-Béthon dont la trace authentique n'ait pas disparu sous la poussière des siècles. Il apparaît avec le nom vénéré du céleste patron de Fontaine-Béthon, et, comme saint Serein, avec la pure auréole de la charité. Dans la charte susvisée, son fief est seulement appelé "Fontaines", et l’on pourrait douter qu'il s'agit de Fontaine-Béthon, si l’on n'avait d’autres exemples de semblables abréviations. Nous venons de voir qu’en 1146 un puissant seigneur, Milon, sire de Nogent, était possessionné à Vaulonnière et probablement aussi à Fontaine-Béthon, si l’on admet, comme il paraît très vraisemblable, que les biens possédés par le Paraclet dans l'un et l’autre de ces fiefs provinssent de la pieuse libéralité du seigneur de Nogent, sur le territoire duquel s'était fondée cette abbaye. Il est même présumable qu'à ladite époque ces deux fiefs, peu distants de Nogent, en relevaient féodalement, si même ils ne faisaient partie du domaine dudit seigneur, qui en aurait apanagé un puiné de sa maison, lequel, suivant la coutume, aurait pris le nom de son fief; mais ce ne sont là que des hypothèses et, si plausibles qu’elles puissent être, elles ne doivent être accueillies qu'avec de prudentes réserves.

Au mois de mai 1240, Henri de Fontaine-Beton, chevalier, est un des croisés de Champagne, ainsi qu'il appert d'une précieuse charte, glorieuse entre toutes pour Béthon, et dont voici la traduction: "Sachent tous ceux qui ces présentes lettres verront que nous, Henri de Fontaine-Beton, Renaud de Marchiéville, chevaliers, Jean de la Cour, Armand de Mulnet et Girard de Saint-Benoît, écuyers, nous avons reçu en commun et solidairement de Lazare Dovinello et ses associés, marchands génois; 180 livres tournois pour le paiement desquelles, au terme de Pâque, notre illustre et très cher seigneur, par la grâce de Dieu roi de Navarre, comte palatin de Champagne et de Brie, a bien voulu se constituer garant, et doit fournir ses lettres auxdits marchands. En retour, nous avons accordé à notre dit seigneur que si, à l'occasion de cette garantie, il encourait quelque dommage, il pourrait s’en indemniser sur tous a nos biens présents et à venir, en foi de quoi nous avons fait faire cette charte, et moi, Henri de Fontaine-Beton, je l’ai scellée. Fait à Acre, l'an du Seigneur 1240, au mois de mai". Plus heureux que tant d’autres volontaires de la Croix, "vassaux de Notre Seigneur Jésus-Christ", ainsi que les Croisés se qualifiaient avec une humilité fière, le sire de Fontaine-Béthon revit la terre natale, car c'est très probablement lui qui figure, sept ans après, dans une autre charte. Au mois d'août 1247, en présence de Nicolas du Meix, archidiacre d’Arcis, Henri de Fontaine-Beton, chevalier, déclare se désister, en faveur de l’évêque de Troyes, de ses prétentions sur la dîme de Waignoniers, prétentions qui impliquent quelque lien de parenté entre le seigneur de Fontaine-Béthon et le donateur, Milon de Nogent. L'abbaye de Saint-Louis et Sainte Claire de Nogent l’Artaud, du diocèse de Soissons, de l’ordre des Urbanistes, possédait à Fontaine-Béthon le fief de Tronchet. Or, ces religieuses tiraient leur nom d'un illustre troyen, Jacques Langlois, pape sous le nom d’Urbain IV, auteur de leur règle, et ce dut être cet illustre pontife qui les gratifia de ce fief. Il est singulièrement glorieux pour Béthon de pouvoir inscrire dans ses fastes le vénéré nom du grand Pape champenois.

De tout ce qu'on vient de lire il résulte qu'au temps de Dagobert 1er et de saint Serein, le territoire de Fontaine, appelé ensuite Fontaine-Béthon, faisait partie des domaines d’un seigneur du nom de Boson; qu'il fut donné par Louis le Débonnaire, en l’an 822, à un de ses fidèles, du nom de Béthon; qu'en 1201, 1240 et 1247 il appartenait à des seigneurs du nom de Fontaine-Béthon, probablement issus des sires de Nogent-sur-Seine. Telles sont les seules données que nous ayons pu recueillir du VIIe au XIVe siècle. En 1394, Pierre d’Arcis, évêque de Troyes, fait le dénombrement de la seigneurie de Fontaine-Béthon. Ce renseignement nous est fourni, sans aucun détail, par un acte de transaction du 12 décembre 1699, dont il sera parlé en son lieu. Pierre d'Arcis mourut le dimanche de quasimodo (18 avril) 1395, et fut inhumé dans le chœur de la cathédrale de Troyes, comme il en avait marqué le désir dans son testament. Etienne de Givry fut élu au siège épiscopal de Troyes après la mort de Pierre d'Arcis. La terre et seigneurie de Fontaine-Béthon ayant été acquise par son prédécesseur, non à titre personnel, mais à titre épiscopal, Etienne de Givry en fut le seigneur temporel pendant toute la durée de son épiscopat. En dépit de l’aristocratique euphonie de son nom, il était né d’une famille obscure, au diocèse de Reims, dans le village de Givry, dont il prit le nom. On trouve un acte de cet évêque concernant Fontaine-Béthon: le 26 avril 1397, il est procédé à la délimitation des dîmes de Béthon, appartenant à l'évêque de Troyes, et des dîmes de Chantemerle, appartenant à l'abbaye du lieu: dans le procès-verbal sont mentionnées "la ville et la chapelle de Vougnonniers". Le pouillé de 1407 indique que l’évêque, comme seigneur temporel, conférait la cure de Fontaine-Béthon. En 1405, Etienne de Givry fut un des exécuteurs testamentaires de Guillaume de Dormans, archevêque de Sens, qui testa le jour de sa mort, 26 avril 4426. Il fut inhumé dans le chœur de la cathédrale, vis-à-vis le grand autel, comme il l’avait demandé.

A la mort d'Etienne de Givry, lui succéda Jean Lesguisé, maître-es-arts, bachelier en droit civil, licencié en droit canon, chanoine de Troyes, fut élu évêque, le 12 juin 1496, par le chapitre, qui avait encore ce privilège. Ce fut à ses exhortations que les Troyens, dominés par la garnison anglaise, ouvrirent leurs portes, en 1427, à Charles le Victorieux et à l'héroïque Jehanne d'Arc. En reconnaissance de ce patriotique service "le Roy l’anoblit, lui, son père, ses frères, sœurs, et toute leur postérité, quoi-qu'ils fussent déjà nobles d'origine". Ces lettres d’anoblissement furent données le 9 juillet 1441; elles sont du mois de mars 1431,et il y est dit, entre autres choses à l'honneur des Lesguysey, que Huet, père de l'évêque, était "né de parents nobles et qu'il tirait son origine de la noble maison de Dormans, d’une noblesse si insigne et si ancienne qu’elle était immémoriale". Jean Lesguisé avait la vertu de l'économie; c'était un sage et vigilant administrateur; les terres de Fontaine-Béthon et de Vaulonnière, complètement ruinées, étant très certainement onéreuses, dans ces conditions, à leur seigneur temporel, Jean Lesguisé dut penser à se défaire de ce domaine inculte et désolé, en conservant, toutefois, le clos des Nobleaux, qui, peut-être, avait moins souffert ou déjà tendait à se relever, et une vigne à Vaulonnière, sans doute pour en affecter le revenu à la chapelle de saint Antoine, sise dans ce dernier fief. De plus, tout en délaissant le domaine temporel de Béthon, l'évêque demeura gros décimateur en la paroisse, très vraisemblablement en vertu des donations faites, trois siècles avant, par Milon, sire de Nogent. Jean Lesguisé, évêque de Troyes, mourut à Paris, le 3 août 1450, après vingt-quatre ans d’un épiscopat fécond au milieu de temps singulièrement troublés par la guerre.

D'un acte de donation du 28 juillet 1457 il appert qu'antérieurement à cette date, la seigneurie de Fontaine-Béthon avait appartenu en même temps à Jean Marin, Vermonnet et Jean d'Anthenay, écuyers. De ces trois co-seigneurs, les deux derniers étaient très probablement frères et apparentés au premier. Sur la famille Marin ou des Marins, nous trouvonsplusieurs documents intéressants; outre la co-seigneurie de Fontaine-Béthon, elle possédait, au XVe siècle, les fiefs de Vaulonnière, de Montgenost et de Champeaux. Le 6 mai 1493, noble homme Jehan Marin, escuier, seigneur de Mongenost et de Champeaulx, baille à ferme le courtil Simon, acquis par lui de M. de Lignières, qui le possédait au droit de sa femme, "héritière seulle et pour le tout de feu M. de Treignel". Jean Marin avait épousé Jeanne de Rapillard, qui était veuve vers 1499. Le 22 juillet 1457, noble homme Hochon Pigne acquiert de nobles personnes Jean Marin, Vermonnet et Jean d’Anthenay, écuyers, la terre et seigneurie de Fontaine-Béthon, et, six jours après, il en fait donation à noble homme, Jean de Salazar, écuyer d'écurie du Roi, seigneur de Marcilly-sur-Seine, son cousin, époux de Marguerite de la Trémoille. Jean de Salazar, dit le grand, un des plus renommés et des plus valeureux capitaines du XVe siècle, appartenait à une des plus anciennes familles de Biscaye. Au dire de ses panégyristes, il "estoit issu des anciens princes gots en Espagne, et fut envoyé par Sa Majesté Catholicque avec un gros de seigneurs d'élite du duché de Biscais, province d’Espagne, pour aider de leurs courages et de leurs armes le roy de France Charles VI contr les Anglois et Bourguignons, qui travailloient le royaume. Après s’estre signalé parmy les plus vaillants et belliqueux de son tems par les marques d’une proisse admirable, il receut le baston de Mareschal de France et espousa Marguerite de la Trimouille". L'éloge n'est pas excessif, mais il pèche par un point: sans doute Jean de Salazar allait recevoir avec le bâton de maréchal la suprême récompense d’une vie de loyauté, lorsque la mort le surprit le 12 novembre 1479, mais il ne le reçut point.

Marguerite de la Trémoille, sa première femme, mourut au château de Saint-Just, jeune encore, après seize années d'une union embellie par une couronne d'enfants. Elle fut inhumée dans la nef de l’église abbatiale de Macheret. Outre Charles, né de son second mariage, Jean de Salazar laissa quatre fils et trois filles: Isabeau, femme de Bertrand du Lac, chevalier, seigneur de Douville, Chamerolles et autres lieux; Jeanne, femme de Louis de Prie, chevalier, seigneur de Buzançais, grand-queux de France; Ragonde, femme de Tristan de Bien, écuyer, seigneur de la Brosse. Par suite du partage qui eut lieu le 26 septembre 1481, la terre et seigneurie de Béthon échut à Lancelot de Salazar. Le nouveau seigneur avait servi dans la compagnie d'hommes d'armes de son père et, comme lui fut écuyer du roi. Il fut marié à Louise de Courcillon, dont il eut deux fils et deux filles; puis à Marguerite de Vignes. Il mourut le 28 juin 1618 et fut inhumé en l’église de Marcilly. Jacques de Salazar, fils de Lancelot, fut après lui seigneur de Béthon. Par contrat du 1er mai 1520, il épousa Jeanne de Saint-Simon, fille de Guillaume, seigneur de Rasse, Précy et autres lieux, et de Marie de la Vaquerie. Fidèle à ses chevaleresques traditions, le seigneur de Béthon avait déjà valeureusement servi les rois Louis XII et François 1er, lorsqu'il suivit ce dernier prince dans son expédition d'Italie. A Pavie, le 24 février 1525 Jacques de Salazar ftomba en faisant de son corps un rempart à son Roi. Sa dépouille, rapportée en France, fut inhumée dans l'église de Marcilly. Le roi ne fut pas ingrat: le 13 juin 1527, il fit don de droits seigneuriaux importants "à dame Jehanne de Rouvroy, dite de Saint-Simon, veuve de Jacques de Salazart, chevalier, seigneur de Marcilly, Fontaine-Béthon, etc". Jacques de Salazar ne laissa que des filles de son mariage. Dans le partage des biens de sa succession, les terres et seigneuries de Marcilly, Potangis et Béthon, échurent à sa deuxième fille, Jeanne, femme de Florimond de Biencourt.

C'est encore une race illustre qui, avec Florimond de Biencourt, succède aux Salazar dans le domaine seigneurial de Béthon; elle n’a fait qu'y passer, mais nous verrons quelles traces splendides de son passage elle a laissées. Hainfroy de Biencourt, chevalier, prit part à la troisième croisade avec Raoul, comte de Soissons. L'histoire de cette noble race n'est qu’une longue et brillante série de fidèles et valeureux services, que l'on ne résumerait même pas en de nombreuses pages. Florimond de Biencourt, chevalier, seigneur de Poutrincourt, Saint-Maulvis, Fontaine-Béthon, Marcilly-sur-Seine et autres lieux, fut successivement homme d'armes sous le duc de Guise, conseiller et maître d'hôtel du Roi François 1er et du Dauphin Henri II, l'un des cent gentilshommes de l'hôtel de Sa Majesté, bailli de Vermandois, gouverneur d'Aumale, ambassadeur de Francois 1er auprès de Charles Quint, et chargé de procuration, en 1549, pour épouser, au nom de François de Lorraine, fils du duc de Guise, Anne d'Este, fille d'Hercule II, duc de Ferrare et de Renée de France. Le 3 avril 1560, "noble et puissant seigneur messire Floremont de Biencourt, chevalier, etc, en son nom et comme procureur de noble et puissante dame Jehanne de Salazard, sa femme, vendit les terres et seignouryes de Fontaines de Beton et Vauguonnières et la Tormentrasse, pour le prix de onze mille livres tournois, à noble et puissante damoiselle Magdelaine de Choiseul, veuve de feu noble et puissant seigneur messire Ferry de Nicey". Elle était fille d'Antoine 1er de Choiseul, baron de Lanques, seigneur d’Is-en-Bassigny en partie, d’Autreville, Chamarande, Pressigny, et d'Anne de Ray. La maison de Nicey était anciennement possessionnée dansle comté de Champagne, qui paraît avoir été son berceau, dans le duché de Bar et dans le comté de Joigny. On la suit dans l'histoire depuis Hugues qui, en 1108, donna à l'abbaye de Molesme, pour la réception de deux de ses fils qui y prirent l'habit monastique, la terre de Nicey et la moitié du fief qu'il possédait à Channay.

Madeleine de Choiseul mourut vers 1580, laissant à son fils aîné, Ferry de Nicey, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi et lieutenant d’une compagnie de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances, entre autres biens la terre et seigneurie de Fontaine-Béthon. Ferry de Nicey mourut vers 1617, laissant un fils, Etienne, chevalier, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, seigneur de Romilly-sur-Seine, Fontaine-Béthon, Lagesse, Juvandey et autres lieux, marié à Claire de Bragelogne, fille de Thomas, écuyer, seigneur de Jouy, et de Thomasse Seguier, et dont il eut, entre autres enfants, Catherine de Nicey, mariée le 27 janvier 1632, avec Louis de Choiseul, marquis de Francières, à qui elle porta les terres et seigneuries de Romilly, de Fontaine-Béthon et Vaulonnière en partie. Etienne de Nicey était mort vers 1650, et sa veuve avait eu pour son douaire la principale partie de la seigneurie de Bélhon; car, à ladite date, des bornes seigneuriales ayant été, d’un commun accord entre les seigneurs de Béthon et de Montgenost, placées à la limite de leurs bois respectifs, ces bornes, qui sont encore debout, furent blasonnées, du côté de Montgenost aux armes des Le Roux de Sigy, et du côté de Béthon aux armes de Bragelogne. Louis de Choiseul, époux de Catherine de Nicey, mestre de camp d'un régiment d'infanterie, capitaie aux chevau-légers du prince de Condé, lieutenant-général des armées du Roi, était de cette illustre maison dont l’origine se perd dans la nuit des temps, et qui, parmi ses membres, compte des croisés, des maréchaux de France, des chevaliers des ordres, des minisires, des ambassadeurs, des évêques, des abbés et abbesses de monastères, des membres de l'Académie française. Il mourut vers la fin de 1659; Catherine, sa veuve, eut dans son douaire une part de la terre de Fontaine-Béthon et Vaulonnière; l’autre part échut à son fils Claude, comte de Choiseul, marquis de Francières, grand bailli de Langres, un de nos plus illustres maréchaux de France, mort à 79 ans, criblé de blessures, comblé d’honneurs et de gloire, et tout naturellement appauvri.

En 1674, la terre de Béthon fut saisie à la requête de Pierre le Meusnier, président au parlement de Metz, créancier du comte de Choiseul, et adjugée, aux criées du Palais, à Paris, à noble homme Jacques Chesneau, bourgeois de Paris. Jacques Chesneau, qualifié dans les actes, "gentilhomme de la grande fauconnerie de France", avait épousé Anne Tholimet, d'une famille de la bourgeoisie parisienne; il était veuf sans enfants au mois de février 1684. La terre de Béthon devait être onéreuse à ses maîtres, car elle fut saisie sur Jacques Chesneau, comme elle l'avait été sur Claude de Choïseul. Forcé de se défaire de sa seigneurie, il ne s'en éloigna pourtant pas, et, dans divers actes ultérieurs, on le voit agir en qualité de chargé de la procuration de maître Nicolas de Langelerie, procureur en la cour, à qui il avait vendu la terre et le château de Béthon, le 16 mars 1697. Jacques Chesneau testa le 11 avril 1711, et mourut peu de jours après. De 1697 à 1730, Béthon demeura dans la famille de Langelerie, qui était probablement un rameau d'une ancienne et noble maison bretonne. Nicolas de Langelerie avait épousé Madeleine Le Brun, d’une ancienne famille de l'Isle-de-France, qui lui donna deux fils. Antoine-Thomas, l'aîné, mourut, ainsi que son père, avant le 4 décembre1717. Le 22 janvier suivant, dame Madeleine Le Brun, veuve, fit donation de la terre et seigneurie de Béthon et Vaulonnière au survivant de ses deux fils, Noël-François de Langelerie, écuyer, conseiller du Roi, auditeur en sa chambre des comptes de Paris, qui mourut, le 23 mars 1738, laissant de son alliance avec Suzanne Aubry un fils et trois filles. La seigneurie de Béthon demeura indivise entre eux jusqu'au premier juin 1745, qu’eut lieu la licitation, en vertu de laquelle Nicolas-Charles de Langelerie, écuyer, conseiller da Roi, auditeur en sa chambre des comptes, fils de feu Noël-François, en devint le seul seigneur. Le 22 janvier 1750, par acte passé devant Brillon et Bontemps, notaires au Châtelet de Paris, Nicolas-Charles de Langelerie vendit la seigneurie de Béthon et Vaulonnière à Charles-Auguste Noguez de la Garde, écuyer, mousquetaire du Roi dans la première compagnie, chevalier de l'Ordre royal et miitaire de Saint-Louis, demeurant à Paris en l’hostel des Mousquetaires.

Le nom de Noguez ou Noguës, ancien en Languedoc, en Navarre et en Béarn, était représenté à la huitième croisade. Charles-Auguste Noguez de La Garde, l'acquéreur de Béthon, avait un frère ainé, Jacques, écuyer, seigneur de la Garde, ci-devant mousquetaire, marié à Marie-Renée Maromme de la Mairie. Les deux frères ne furent à Béthon que des éphémères, ils n’ont fait que passer. Au mois d'avril 1755, la terre et le château de Béthon furent acquis par haut et puissant seigneur Bleickard-Maximilien-Augustin, comte d'Helmstatt et de Morange, baron du Saint Empire, colonel du régiment de cavalerie de Bourgogne, époux de Louise-Henriette de Montmorency-Laval, fille de Gui-Claude-Roland, gouverneur de Béthune, gou-verneur pour le Roi en Lorraine, grand chambellan du roi de Pologne, maréchal de France, et de Marie-Elisabeth de Rouvroy Saint-Simon. Le comte d’Helmstatt était d’une ancienne famille du margraviat de Bade; du service de Stanislas, roi de Pologne, il était passé au service du roi de France, grâce à la puissante protection du maréchal de Laval, son beau-père. La comtesse, sa femme, était la sœur puinée de Marie-Louise de Montmorency-Laval, abbesse de Montmartre, et de Joseph-Pierre, comte de Laval, colonel du régiment de Guyenne infanterie, menin du Dauphin, tué le 31 juillet 4757 à la bataille d'Hastembeck. Le très illustre nom de Montmorency a passé dans les fastes de Béthon, mais, comme bien d’autres, il n'a fait qu'y passer; dix années à peine. Il y a loin de ces deux lustres à plusieurs siècles. Mais tel était le prestige de ce grand nom, resplendissant de tant de gloire, que son court passage a laissé comme un long sillon de lumière dans les modestes annales de Béthon. Ce fut le comte d'Helmstatt qui replaça sur le haut du plateau le château, auparavant enclavé dans le village; mais il ne jouit pas longtemps de sa nouvelle habitation: le 13 mars 1762, il vendit à l'abbé Terray, conseiller-clerc au parlement de Paris, puis contrôleur général des finances, la terre et seigneurie de Béthon avec droits de haute, basse et moyenne justice et les autres droits féodaux qui y étaient attachés.

Au mois d'octobre 1772, l'abbé Terray acquit de haut et puissant seigneur Maximilien Gon, vicomte d’Argenlieu, colonel d'infanterie, chevalier de l'Ordre royal, et de haute et puissante dame Marie-Anne Morel, sa femme, la terre et seigneurie de la Chalmelle, relevant du Roi à cause de son château de Sézanne, le fief de Boulage et le fief des Mouches. Le 31 décembre 1777, "haut et puissant seigneur messire Joseph-Marie Terray, conseiller du Roy, abbé commandataire des abbayes de Troarn et de Molesme, seigneur de la Motte-Tilly, Béthon et autres lieux", donna à bail divers fonds sis audit Béthon. Le 18 février suivant, il avait cessé de vivre; la mort le saisit brusquement, à Paris, dans sa 62 année; il fut inhumé dans l'église de la Motte-Tilly. Par son testament, en date du 29 décembre 1776, l’abbé Terray légua la terre et seigneurie de Béthon à son neveu, messire Charles-François du Myrat, colonel de dragons et chevalier de Saint-Louis, d’une ancienne famille de robe de la Guyenne, et qui, en sa qualité de colonel, prit le titre de comte, suivant un usage édicté par Louis XV. Devenu veuf en 1779 de Marie Le Normant de Flaghac, il épousa en secondes noces Marie-Françoise de Charry des Gouttes, d'une ancienne famille du Bourbonnais. Le comte du Myrat résidait ordinairement dans les terres de sa seconde femme; mais tout en pratiquant l'absentéisme, il n’oubliait pas sa seigneurie de Béthon; c'était, semble-t-il, un bon seigneur, animé de sentiments humains et généreux. Mais il était écrit que jamais Béthon ne conserverait longtemps le même seigneur; aux approches de la crise révolutionnaire, le comte du Myrat vendit sa terre et son château; il dut laisser à Béthon de sincères regrets. La seigneurie de Béthon devenait la propriété de madame Marie-Henriette Boulard, veuve de Charles-Jean-Baptiste Le Brun, secrétaire du Roi et chevalier de l’ordre du Saint-Sépulcre, tout près des années terribles où la tempête sociale allait détruire au ras du sol le vieil édifice de la féodalité française; mais des droits féodaux qui allaient lui être ravis, la pieuse châtelaine n'en voulait exercer qu'un, celui de faire le bien.

La famille Boulard portait anciennement de gueules au lion léopardé d'argent, tenant une boule d’or, au chef de même, chargé de deux roses de gueules, en vertu du règlement d'armoiries délivré par le sieur d'Hozier, juge d'armes de la noblesse de France, sur le vu de lettres patentes d’anoblissement en date du 10 février 1717. La famille Le Brun, très ancienne en Isle-de-France, porte de gueules à une fasce d'argent accompagnée de trois coupes couvertes d'or; armoiries héréditaires qu’elle a fait enregistrer, en 1698, dans l'Armorial général de France. Madame le Brun, née Boulard, mourut le 1er janvier 1833, et, après elle, son petit-fils en ligne maternelle, M. Charles-Henri Vanin devint propriétaire de la terre et du château de Béthon. Conseiller à la cour d'appel de Paris, membre du conseil général de la Marne, officier de la Légion d'honneur, M. Vanin jouit pendant sa vie de l’estime et de la considération publiques, qu’il méritait à tous égards; son souvenir vit encore dans la contrée. L'honorable magistrat étant décédé sans enfants en 1862, la terre de Béthon fut dévolue, par voie de succession et d’attribution testamentaire, à un autre petit-fils de Madame Marie-Henriette Le Brun, en ligne paternelle, M. Antoine-Henri-Alfred Le Brun de Neuville, propriétaire à la fin du XIXe siècle. La terre de Béthon se composait à cette époque du château, splendidement restauré par lui; du parc, du chalet et des terres attenantes; d'un pressoir dans le village; de la ferme et garenne de la Chalmelle; des bois connus sous le nom de Vente Guillé, bois Séquestré, bois de la Rochelle et de Rochelle-Vilbion, qui faisait autrefois partie du fief des Mouches, du bois Michaux; des trois étangs Rochelle, Famine, et Hourat ou Tourtépée. Le château de Béthon n’est pas seulement une belle et agréable demeure, c'est encore et surtout l'asile de toutes les nobles traditions et des saintes croyances de cette vieille France qui sera encore, si Dieu veut, la France de demain. Hoc est in votis! (1)

château de Béthon 51260 Béthon, propriété privée, ne se visite pas.


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(1)
    Les Seigneurs et le château de Béthon, par le Vicomte Oscar de Poli. Éditeur: au Conseil héraldique de France, 37 rue des Acacias, Paris (1885)

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