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Autrefois, il existait deux fiefs sur le
territoire de Mézangers, réunis à la fin du XVe siècle. On disait du
seigneur de Mézangers qu'il était le souverain des forêts tant elles le
cernaient de toutes parts, et de celui du Rocher son vassal, qu'il était le
roi des eaux. Le château du Rocher tient son nom de l'affleurement
granitique, du Massif armoricain, sur lequel il a été construit alors
qu'Évron est bâtie sur un terrain calcaire. Il mire ses tours dans le miroir
d'un étang, celui de la Salle, qui occuperait une partie de la carrière d'où
fut extraite la pierre nécessaire à sa construction. Voici peut-être
l'origine du "roi des eaux". L'accès libre de son parc, aménagé au XIX
siècle par le paysagiste anglais Bülher permet d'admirer les faces d'une
même demeure: la plus riante sur la cour d'honneur, malgré l'austérté du
granit; la plus rude du côté de l'étang. D'un côté une demeure de plaisance,
embellie au retour des guerres d'Italie; de l'autre celle qui reste
soucieuse de sa défense en des temps longtemps troublés. Si la légende
attribue à sant Aldric, au IXe siècle, l'établissement d'un domaine, on
trouve au XIIe siècle le fief du Rocher entre les mains de Guillaume le
Defublé. À la fin du XIVe siècle, en 1398, il passe à la famille Le Maire.
D'un premier château, restent des caves voûtées du XIIe siècle et des murs
intérieurs d'une grande épaisseur, à la jonction des deux bâtiments. Vers
1475, après la guerre de Cent Ans qui voit le Maine panser ses plaies et se
reconstruire, Charles Le Maire et son épouse Catherine de Favières font
édifier les deux bâtiments en équerre, du corps de logis. Du côté de l'étang
on construit un flanquement de trois tours, deux rondes et une carrée. Leurs
ouvertures et la forme des lucarnes indiquent le XVe siècle. La cour
d'honneur était fermée par un ensemble de bâtiments et ne s'ouvrait que par
un pont-levis, le tout ceinturé par des douves.
Avec la famille de Bouillé, originaire de Torcé-en-Charnie, qui entre par
alliance en possession du Rocher, Jean de Bouillé ayant épousé la fille de
Charles Le Maire, la Renaissance marquera la demeure, à la génération
suivante, au point qu'on le classe parfois dans la série des châteaux dits
de la Loire. François de Bouillé, grand fauconnier de France à la cour de
François 1er, et sa femme, Marguerite de la Jaille, vont entreprendre entre
1510 et 1540 des travaux d'embellissement qui mettront leur demeure au goût
du Jour c'est-à-dire celui rapporté des guerres d'Italie. La chapelle,
dédiée à sainte Catherine, à l'extrémité gauche du bâtiment principal,
attire le regard par l'élancement de sa toiture à pans et ses contreforts
terminés par des pilastres couronnés par de fines colonnettes. François de
Bouillé fait édifier une galerie à arcades en anses de paniers surbaissées,
surmontée d'une façade Renaissance, devant le corps de logis existant. Cet
ensemble particulièrement remarquable est richement décoré, les sculpteurs
ayant taillé dans le granit une ornementation qui n'a rien à envier à celle
jaillie d'une pierre plus tendre: fleurons, frises sculptées, chérubins,
médaillons à têtes humaines, trophées, écus etc. En même temps des fenêtres
sont percées dans l'aile en retour. Sa femme, lors du décès de son époux,
ornera la porte d'entrée de son logis de cordelières qui symbolisent son
veuvage.
En 1650, Éléonore de Bouillé, héritière du Rocher épouse dans la chapelle,
Henri de Daillon, marquis d'Illiers, duc du Lude. Grande chasseresse, cette
femme au caractère bien trempé est entrée dans la légende du Maine sous le
nom de "la Dame Verte". Elle revient hanter les lieux en apparaissant vêtue
de vert, aux jeunes mariés. Toutefois, lors de sa dernière apparition, dans
les années 1930, elle aurait été vue dans la chapelle du Rocher vêtue de
noir. Cette femme farouche, violente, incarnation de Diane chasseresse, est
morte en son logis de La Muette, au cœur de la forêt de Charnie, en 1681.
Après que sa famille l'ait gardé durant un siècle, Éléonore de Bouillé,
duchesse du Lude, vend le Rocher en 1665, au mari de sa belle-sœur,
Jean-Baptiste-Antoine de Roquelaure. C'est à ce moment que l'on perce de
nouvelles fenêtres du côté de l'étang et que l'on ouvre le mur de la
chapelle, pour suivre la messe depuis un salon. Louise Roquelaure, fille des
propriétaires du Rocher défraya la chronique en son temps. Enlevée par le
prince de Léhon, fils du duc de Rohan-Chabot, elle alimenta la plume
caustique de Monsieur de Saint-Simon. Le mariage forcé qui s'en suivit,
imposé par le roi, fit jaser Versailles et la société provinciale. En 1728,
le Rocher est vendu à Benoit Eynard, grand maître des Eaux et forêts de la
Généralité de Tours. C'est à lui que l'on doit l'édification du bâtiment qui
ferme l'aile nord, un peu anachronique dans cet ensemble avec sa niche et
son fronton triangulaire. Le même remanie la décoration intérieure en
supprimant les anciennes cheminées et les meneaux des principales fenêtres.
Se conformant au goût de l'époque, il crée par contre un parc et agrandit
l'étang. Il ouvre une avenue dans l'axe de la façade et fait disparaître ce
qui restait des bâtiments anciens encadrant la cour et l'entrée fortifiée.
Le Rocher passe ensuite à la famille du Plessis d'Argentré, au comte Le
Gonidec de Traissan, au comte de Beaucaire et depuis 1931, au marquis de
Chavagnac dont le fils l'habite toujours. Pendant la guerre de 1870, dont
les ultimes combats se livrent entre Le Mans et Laval, le Rocher est
converti en hôpital et en 1914, il sert de refuge à un couvent. Dans
l'entre-deux-guerres, le site prend son aspect actuel avec la réalisation du
parterre à l'anglaise et la suppression des bois qui cachaient le château.
(1)
Éléments protégés MH : le château du Rocher en totalité : classement par
arrêté du 13 août 1963.
château du Rocher 53600
Mézangers, propriété privée, visite des extérieurs uniquement, ouvert aux
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