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C'est à Pierre de Talhouët, issu d'un cadet de la
maison de Pluherlin prénommé Guillaume, que l'on attribue la création de
Keravéon en Erdeven, vers 1330-1350. Les Talhouët de Keravéon resteront
maîtres des lieux jusqu'en 1761. Les Talhouët d'Erdeven avaient pour
armoiries: "un losange en bannière d'argent et de sable". Ce blason figure
en plusieurs endroits dans l'église paroissiale et sur l'enceinte de la cour
du château. Par voie de mariage la seigneurie et son domaine passent
successivement aux mains des Cambout de Coislin, Adélaïde de Botderu, puis
les Soussay. Du logis médiéval on ne trouve plus traces à l'exception
peut-être des parties basses du logis-tour rénové au XIXe siècle. Il
subsiste par contre les défenses sud de la basse cour: murs, porte à
pont-levis, douves, parapets et échauguettes d'angles datant du XVIIe
siècle, ensemble décrit en partie dans la déclaration de 1683. Le logis
construit au XVIIIe siècle fut partiellement détruit à la Révolution. On
reconnaît toutefois dans le portail d'entrée l'inspiration classique, ainsi
que la remarquable orangerie récemment restaurée. Le colombier qui remonte à
la même période est en ruines. C'est à l'époque d'Adélaïde de Cambout de
Coislin, épouse de Victor de Botderu, comtesse de Botderu de Keravéon, que
le château fut entièrement rénové.
La comparaison des plans cadastraux anciens atteste de modifications
importantes entre 1811 et 1845: Intégration du bâtiment nord-ouest, actuel
donjon, dans l'alignement d'un nouveau logis à l'est de la cour; extension
de celui-ci et construction de la galerie en façade ouest; diminution de la
largeur des douves sud ; destruction d'un corps de bâtiment ouest, laissant
la place à un nouvel accès occidental à la cour; construction des communs et
écuries en arc de cercle au sud de l'enceinte du château; construction des
deux tourelles devant le portail XVIIIe siècle, à l'entrée sud du parc;
nouveau tracé des jardins d'agréments dans l'enclos du parc. Plus
précisément, entre 1822 et 1823, l'ancien donjon est complètement rénové aux
frais de l'administration car cette tour sert d'amer aux navires qui
croisent au large des côtes d'Erdeven. Elle figure encore sur les cartes
marines du début du siècle suivant. Le rhabillage du donjon, sa
surélévation, la construction d'une toiture en pavillon sommée d'un
belvédère et la construction d'une tour d'escalier, sont l'oeuvre des
ingénieurs des Ponts et Chaussées, dont Bondhore, ingénieur ordinaire et
Kerano aîné, conducteur de travaux, qui suivent le chantier d'août 1822 à la
fin avril 1823. Dans l'entre-deux-guerres, le comte de Soussay fit
construire une maison de gardien à partir des vestiges d'une ferme du XVIe
siècle, transférés depuis Kerdelame.
Situé au nord-est du bourg, le château de Keravéon et ses dépendances, sont
implantés à toucher le village de Keroret, où se trouvaient ses principales
métairies sous l'Ancien régime. C'est une imposante demeure seigneuriale
protégée par une triple enceinte, mise en perspective par l'allée principale
du parc: celle de la cour du logis, celle des communs et celle de l'enclos
avec porte d'entrée majestueuse au sud. Le logis est situé au nord du parc,
à l'est d'une cour cernée de douves (à l'ouest et au sud). Il présente une
double façade aspectée à l'ouest et à l'est. Il est composé d'un corps
principal à sept travées dont les trois du milieu sont réunies sous un
fronton triangulaire, et de deux ailes double en profondeur, formant
pavillons d'angle, dont celle au nord occupée par l'ancien donjon remanié.
Côté est, les pièces en enfilades reflètent une disposition probablement
imposée par le logis ancien dont on a conservé les refends. Côté ouest, deux
niveaux de galeries confèrent à l'ensemble un faux plan double en
profondeur. Au rez-de-chaussée, la galerie est dallée de pierres blanches et
cabochons de schiste noir. L'ensemble est distribué par deux escaliers: la
vis de la tour nord et un escalier en charpente, médiocre, dans l'aile sud,
dans le jour duquel est aménagé un ascenseur pour l'hôtellerie. L'enduit de
la façade ouest a été mal refait, faisant disparaître les bandeaux d'étage.
Cette composition régulière sous toitures de long pan et noues sur les
frontons de la partie centrale, reflète l'inspiration néo-classique du
premier quart du XIXe siècle. A noter une cheminée de style néoclassique
dans une salle à l'est de l'aile nord.
Le donjon est représenté sur le plan cadastral de 1811 et a été englobé dans
les extensions nord du logis. A noter l'épaisseur des murs des premiers
niveaux qui laisse transparaître l'ancienneté de cette construction. De plan
rectangulaire, il présente quatre étages et un étage de comble sous le toit
en pavillon brisé. Au sommet un lanterneau sert de belvédère. La tour
d'escalier ajoutée dans l'angle sud-ouest avec le logis principal est
coiffée d'un toit conique brisé, avec oculi et haut épi de faîtage en zinc.
Elle est contemporaine de la reprise du donjon, le tout dans un style
éclectique mais toutefois assez austère, qui reflète le travail des
ingénieurs dans le premier quart du XIXe siècle. L'enceinte de la basse cour
du château est conservée au sud et à l'ouest, où subsistent des douves en
eau. Au sud, elle intègre une porte dont on distingue toujours une partie
des dispositifs telle les trémies des potences relevant le pont-levis. En
encorbellement sur les angles sud-est et sud-ouest, deux échauguettes en
pierre de taille sont percées de petites bouches à feu pour armes légères,
et coiffées d'un dôme terminé d'une boule. Les armes de Talhouët et alliés
sont sculptées sur leurs parties basses vers l'extérieur, ainsi que sur les
pilastres du parapet de l'enceinte. Le puits dans la cour à l'ouest du logis
est de plan circulaire, en pierre de taille, avec substructures en fer
forgé.
La clôture du parc prenant la forme générale mais irrégulière d'un
quadrilatère, est constituée d'un haut mur de moellons, dont la partie sud,
où se trouve le portail de l'entrée principale, est traité comme une
enceinte fortifiée. Précédée et mise en perspective par des douves remplies
d'eau, le portail est une porte monumentale en pierre de taille, flanquée de
deux tourelles en moellons (ajout du XIXe siècle). La porte charretière est
surmontée d'un fronton cintré portant les armes de Keravéon en grande partie
illisibles. Une poterne latérale existe à l'est de la tourelle orientale. A
l'est du portail, une tour basse construite en moellons sert de plateforme
pour la surveillance de la route vers Keroret. Les dépendances sont
construites au sud du château (écuries), suivant un plan néo-classique en
double arc de cercle de part et d'autre de l'allée centrale. Au sud, elles
sont défendues par des fossés remplis d'eau. Propriété de la commune, elles
sont très remaniées. La ferme, au nord du château n'est pas repérée. La
maison du gardien, comportant en façade ouest, des remplois d'une ferme du
XVIe siècle de Locoal-Mendon, est un pastiche des années 1930. Les communs
ont été transformés en gîtes par la commune d'Erdeven, qui les a acquis à la
fin des années 1970. Le château est inhabité depuis la fermeture de
l'hôtellerie, en 1992.
Les sources mentionnent plusieurs reconstructions du colombier sous l'Ancien
régime. Son dernier état remonte avant la Révolution. Il est décrit par Du
Halgouët comme du plus beau type des constructions de cette nature,
parfaitement conservé et unique dans le Morbihan. Non entretenu, sa partie
supérieure est détruite. Construit à l'angle nord-est de l'enclos du
château, il est intégré au mur d'enclos, mais, comme l'orangerie, en saillie
vers l'extérieur. Il semble ainsi faire partie du hameau de Keroret, mais
sans véritable communication. Colombier tour de plan circulaire, couvert
d'un dôme appareillé de moellons, surmonté d'un lanternon en pierre de
taille. Il est entièrement enduit à l'exception du dôme. Le couvrement du
lanterneau est supporté par six piles, et terminé par une boule. C'est par
là qu'entraient les volatiles. Pour l'entretien et la visite des boulins
aménagés dans le parement intérieur, une porte est ouverte au sud-est. En
ruine, il n'en subsiste environ que trois à quatre mètres d'élévation. Le
pavillon de l'orangerie est construit au nord de l'enclos du parc du château
de Keravéon, inclus mais en saillie du mur d'enclos. C'est un édifice de
plan allongé, remarquable par sa hauteur. Le mur nord est aveugle à
l'origine (deux ouvertures récentes), et l'ensemble est couvert d'une haute
charpente en surcroît, ouvert d'une fenêtre en pignon est. La façade sud
présente une porte centrale et quatre hautes baies réparties de chaque côté.
Dans l'axe de la composition un fronton circulaire ouvert de deux oculi au
milieu desquels figurent les armes de Keravéon (en partie bûchées). Les
entourages des baies et le fronton cintré sont en pierres de taille de
calcaire. Toutes les façades en moellons sont enduites, réservant des
chaînes d'angles de granite soigneusement appareillées. (1)
Éléments protégés MH : le colombier et le portail d'entrée : inscription par
arrêté du 19 novembre 1941.
château de Keravéon
56410 Erdeven, la maison du garde acquise par la commune en 1981 au décès du
châtelain, le vicomte de Soussay, et a été transformée en hôtellerie de
luxe. Les communs sont devenus gîtes communaux.
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