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Le château d'Aunay domine de ses
robustes constructions tout un horizon grandiose de bois et de prairies,
borné au midi par les collines de la forêt de Perseigne. Il a successivement
occupé trois emplacements. Placé par les conquérants normands au plus bas de
la prairie, sur une motte isolée, environnée d'une deuxième enceinte où se
groupèrent les bâtiments d'exploitation, entouré de larges palissades et de
fossés, couvert par les étangs, il a été une deuxième fois reconstruit sur
un second tertre factice à mi-chemin de la côte, à 80 mètres à peine de son
emplacement actuel. Dès ces époques lointaines il est le centre d'une
importante seigneurie, fief de haubert relevant du château d'Essay,
comprenant, outre la paroisse d'Aunay, la majeure partie de celle de
Marchemaisons (dont le clocher et le bourg) et, par ses fiefs immédiats du
Vaurenoult, de la Béchetière, de Sonnel et de Cornilly, des portions
considérables des paroisses de Boitron et de Bursard. Jusqu'à la Révolution
la terre du Bois-Roussel, appartenant à la fin du XIXe siècle au comte
Rœderer, à Bursard, en releva.
A la fin du XIe siècle apparaît dans le cartulaire de Saint-Martin de Sées,
Guillaume d'Aunay. En 1094, il ratifie comme seigneur féodal le don fait à
l'abbaye, de l'église de Marchemaisons. Nous le retrouvons en 1097 aux côtés
de l'évêque Serlon. En 1105, il tient avec Robert de Belles, comte
d'Alençon, les pieds sur la colline fortifiée de Boitron et se qualifie de
ses barons. En 1110, il paraît une dernière fois comme témoin de
Saint-Martin. Vers le milieu du XIIe siècle, Arnoul, l'un de ses
petits-fils, se retire après avoir perdu son épouse au monastère de
Saint-Martin, avec son fils encore en bas âge. Ils y prenaient l'habit et
après avoir donné leur nom au Vaurenoult, qui conserve les traces de deux
manoirs successifs, l'un au bord des eaux, l'autre sur la hauteur, ils font
à l'abbaye des dons considérables, maintes fois confirmés par leurs
arrière-neveux. Jusqu'à la fin du XIVe siècle la descendance immédiate de
Guillaume conserve la terre d'Aunay et ses dépendances féodales. Le dernier
du nom, Jean d'Aunay, mcurt vers 1380, laissant sa fille et son héritage à
Jean de Bonvoust qui lui succède.
Vouée aux armes, la maison de Bonvoust se signale dans les guerres anglaises
par une constante fidélité aux princes français. Jean III, fait prisonnier
en 1424 à la bataille de Verneuil, est contraint de se racheter. Vers 1495,
Pierre, fils d'Hélie, fait bâtir le manoir voisin de Cornilly, fief
ordinairement donné en mariage aux aînés de la maison. René de Bonvoust,
page du cardinal de Lorraine, embrasse avec ardeur le parti des Guise. Les
hordes qui ravagent le pays en 1562, sous la conduite de Coligny, s'abattent
sur Aunay, saccagent le château de fond en comble et pillent les archives.
La vie tout entière de René se passa au milieu des luttes de ces époques
néfastes. Guerroyant tantôt à la suite du duc d'Alençon, tantôt à la suite
des princes lorrains, il se distingue dans la résistance de Poitiers, où il
était renfermé avec les ducs de Guise et de Mayenne, et meurt gentilhomme de
la chambre du roi et chevalier de ses ordres. Le chartrier d'Aunay conserve
encore une partie de sa correspondance avec le duc d'Elbœuf, Charles de
Lorraine.
C'est à lui que l'on doit la reconstruction en partie, après les désastres
de 1562, du château actuel d'Aunay, vaste donjon, presque carré sur chaque
face, flanqué dé quatre étroits pavillons coiffés de lanternons et dominé
par une haute toiture dont les bois gigantesques furent fournis par la forêt
voisine de Bourse, où la seigneurie avait le droit de prendre les matériaux
nécessaires à ses édifices. De larges assises de pierre de taille et de
brique rompaient primitivement de distance en distance la lourdeur des
murailles, épaisses de un mètre quarante. Un colombier monumental, décoré
d'une colonnade engagée, s'éleva en même temps vers le midi. De larges
fossés continuaient à entourer la maison forte, qui ajoura ses tourelles de
meurtrières destinées à éviter toute surprise. Les travaux n'étaient pas
terminés, lorsqu'il mourut, à quarante-six ans, le 9 janvier 1589, dans
toute la force de l'âge, sur le chemin des honneurs et de la fortune. Son
fils, Jean IV, marié à une fille de la puissante maison de Gruel, donna
naissance aux trois branches d'Aunay, de Prulay et du Plessis, qui toutes
trois s'éteignirent presque ensemble aux abords de la Révolution. Les
travaux intérieurs ne furent terminés qu'au XVIIIe siècle. Encore les deux
tours de l'ouest dont les soubassements seuls avaient été commencés, ne
furent-elles achevées que vers 1830.
Claude, successeur de Jean IV, recueillit le fruit des travaux de ses pères.
Par lettres royales du mois de septembre 1647, la seigneurie fut érigée en
baronnie. Une seconde érection en fut faite en 1733 en faveur de
François-Jean-Louis, qui fit terminer les intérieurs du château, élever la
grande cheminée monumentale de la salle d'entrée (peut-être le rétable de
l'église aux armes d'Aunay, rendues frustes pendant la Révolution, et d'un
style analogue), et orna le grand salon de merveilleuses boiseries en plein
chêne de la meilleure époque de la Régence. Il reconstitua le chartrier et
laissa sa terre en grande prospérité à Flore, qui fit remanier la façade du
nord et commencer de vastes communs. Enfin, en 1767, la baronnie accrue
d'importantes acquisitions à Bures, où les Bonvoust allaient se créer une
nouvelle seigneurie, fut érigée par Louis XV en marquisat sous le nom de
Bonvoust. Quelques années plus tard, la Révolution éclatait, le jeune comte
de Bonvoust mourait à vingt ans. Ses père et mère se réfugiaient à Rouen où
ils succombaient avant la fin des mauvais jours. Trois orphelines rentrèrent
seules au vieux château. L'aînée, mariée en 1773 à M. de Loisel, laissa une
fille unique qui épousa M. de Mésenge, dont la descendance s'est éteinte
dans la maison de Romanet de Beaune, en possession de la terre d'Aunay à la
fin du XIXe siècle. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château : inscription
par arrêté du 22 juillet 1971. (2)
château d'Aunay
les Bois 61500 Aunay les Bois, propriété d'une société, visite des
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