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Le château de Vrigny, auquel le souvenir de la
maison de Vauquelin reste à jamais attaché, s'élève dans une pittoresque
vallée, au milieu de vastes herbages. Il appartint, jusqu'aux dernières
années du XVIIe siècle, à la famille de Droullin, qui établissait sa
filiation depuis Jean Droullin, seigneur de Montfort, vivant vers l'an 1350.
Le domaine de Vrigny fut apporté par Madeleine de Droullin à Jean de
Vauquelin, fils de Jacques de Vauquelin, seigneur de la Fresnaye-au-Sauvage,
Boissey, la Lande-Terrée et Saint-Mâlo. La terre de Vrigny passa, après lui,
à Jean-Jacques de Vauquelin, son fils, "jeune homme bien fait, et sur lequel
est fondée l'espérance de la continuation de la branche aînée de la Fresnaye"
disait en 1700 un généalogiste. Cette espérance ne fut pas déçue. En 1713,
Jean-Jacques de Vauquelin épousa Anne-Louise d'Amphernet, et, en 1722, le
roi érigea en marquisat la terre de Vrigny. La maison de Vauquelin en
possédait déjà deux: celui des Yveteaux et celui d'Hermanville. Le 22
juillet 1722, et l'année même de cette faveur royale, naquit René de
Vauquelin, qui devait être le célèbre marquis de Vrigny, et l'une des
figures les plus curieuses d'une famille particulièrement féconde en
originaux.
Le marquis de Vrigny, capitaine de cavalerie, avait, de bonne heure, quitté
le service. Valeureux et spirituel, mais hautain et chicanier, il avait
ensuite consacré sa vie à lutter contre ses vassaux. Et cela, non seulement
pour le maintien, mais encore pour l'extension de privilèges qui allaient
être prochainement et pour jamais abolis. Il avait épousé, en 1761,
Antoinette-Hélène de Verduc, dame de Soisy-sous-Étioles, veuve de Claude
Mérault, vicomte de Châteaufort. Nommé, en 1771 grand bailli d'épée au siège
du bailliage d'Alençon, il ne devait être installé dans cette place que le
12 février 1789, pour présider l'assemblée générale des trois ordres, qui
avaient à élire des dépotés aux États généraux. Il ne fut nommé qu'avec
peine député par la noblesse, que son intransigeance inquiétait, et, le 1er
août 1791, il donna sa démission de membre de l'Assemblée constituante.
Épargné par une sorte de miracle au commencement de la Terreur, le marquis
de Vrigny, qui était comme l'incarnation de la féodalité en ce qu'elle avait
de plus impopulaire, fut arrêté en I794 et envoyé à l'échafaud sur la
dernière charrette.
Il ne laissait qu'un fils, Antoine de Vauquelin, pauvre idiot interné
pendant de longues années dans le château de Soisy, où il mourut en 1829. La
race des Vauquelin finissait dans la folie. Pour qui sait l'histoire de
Nicolas des Yveteaux, ne semble-t-elle pas avoir commencé par là ? Le
château de Vrigny, épargné au moment de la Révolution, en dépit de
l'impopularité de son maître, fut après la mort du dernier marquis vendu à
la "bande noire". Il fut ensuite acheté par Monsieur Hellouin de Cénival et
presque entièrement démoli par lui. Monsieur Leger, propriétaire au milieu
du XIXe siècle, acquit la terre de Vrigny et transforma les communs, seuls
restes de l'ancien château, en une habitation élégante et confortable. M.
Leger était déjà possesseur du petit manoir de la Lande-Terrée, que les
Vauquelin avaient habité. Soucieux des souvenirs de la vieille maison
normande, dont il se trouvait être deux fois le successeur, M. Leger a
recherché et recueilli à Vrigny tout ce qui paraissait provenir des
Vauquelin. Un curieux panneau, retrouvé et replacé par lui dans le salon
donne le portrait du marquis en habit de cour et, plus bas, dans un
médaillon, celui de la marquise costumée en Bellone et armée d'un javelot.
N'est-il pas le symbole exact de cette race très singulière de courtisans,
de gens de guerre et de poètes, faite pour des temps lointain pour le Louvre
ou pour l'Olympe, et morte à l'heure opportune, au début des jours nouveaux.
(1)
château de Vrigny 61570 Boischampré, propriété privée, ne se visite pas.
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