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Nos collines
normandes des bois d'Auge et du Bourg n'offrent point la grandeur
pittoresque des vraies montagnes. De même, la plaine qui se déroule des bois
d'Auge au pied des bois du Bourg n'a ni l'étendue ni la fertilité de
certaines plaines de la Brie ou de la Beauce. Pourtant qu'elles résument
bien, nos collines, ce que réclame de pittoresque une âme tempérée. Et comme
nos champs, animés de maisons blanches, sont plus vivants que ces riches
solitudes. Puis le passé, chez nous, ajoute du charme aux beautés
naturelles. De sa plaine, le donjon de Chambois fait signe au château du
Bourg qui rêve au bord de sa forêt. A moins d'un kilomètre du
Bourg-Saint-Léonard, à gauche de la route qui, par une pente rapide, descend
vers Chambois, s'élève le château du Bourg. La grille franchie; elle vient,
parait-il, de Trianon, le château apparaît mieux dans sa masse imposante.
Certes il manque de grâce, en sa régularité rectangulaire. S'il était
construit au milieu d'un paysage nu et sauvage, qu'il semblerait froid et
triste. Mais l'onduleuse élégance du parc qui l'entoure; mais, à
l'intérieur, les trouvailles de l'art ancien et les recherches de l'art
moderne corrigent ce que l'aspect présente d'abord de trop grave, et, quand
on entre dans le boudoir célèbre dont les peintures sont attribuées à
Boucher, on oublie tout à fait l'impression sévère du premier moment. Le
château actuel fut construit entre 1763 et 1767, par Jules-David Cromot,
conseiller du roi, contrôleur général du marc d'or, secrétaire du cabinet du
roi, premier commis du contrôle général, surintendant des finances du comte
de Provence.
C'est en 1756 que la terre du Bourg-Saint-Léonard, dépendant de la vicomté
d'Exmes et formant un plein fief de haubert, fut vendue par le marquis de
Breffey et la dame de Vassy, son épouse, à Jules-David Cromot et à son
épouse, la dame Rose-Joseph-Sophie Baudon. Suivant lettres patentes du mois
de décembre 1765, la terre du Bourg fut érigée en baronnie par Louis XV et
les Cromot créés barons. Les Cromot étaient originaires de la Bourgogne.
Jules-David Cromot, né en 1725, avait amassé une fortune considérable par de
hardies spéculations. Les Baudon étaient fermiers généraux à Rouen. Leur
fille, quand elle fut châtelaine, fit du Bourg un centre de réunion des plus
animés. On y chassait beaucoup; elle était elle-même une intrépide amazone.
Dans un tout autre ordre d'idées, elle attira au Bourg un cercle de beaux
esprits. Florian y vint à plusieurs reprises, vers l'époque où il composa
Jean et Colin (1780) et son roman pastoral Galatée (1783); on croit qu'il
prit au Bourg des notes pour écrire Estelle (1788). Avant le château actuel
du Bourg, il en existait un autre. Dans ses intéressants mémoires le comte
de Cheverny compare l'un et l'autre château: "On nous attendait au château
du Bourg, habité par M. et Madame la marquise de VaSSy qui en avaient herité.
Il n'était pas alors (1748) ce qu'il est devenu depuis entre les mains du
fameux Cromot, qui en avait fait une habitation magnifique. Il avait tous
les caractères de l'antiquité, les cheminées étaient à l'ancienne mode, avec
des manteaux tellement élevés qu'un homme de cinq pieds pouvait y entrer
sans se baisser".
Le Bourg-Saint-Léonard s'appelait autrefois, et avant l'érection en baronnie
aux mains de M. de Cromot, le Bourg-Barquet. Ce nom était le nom
patronymique de la famille du Barquet. On trouve, en 1460, Olivier du
Barqquet, seigneur du Bourg; en 1512 Jehan du Barquet. En 1550 François du
Barquet épouse Slévenotte d'Oilliamson. Mais le nom le plus ancien est le
Bourg-Saint-Léonard. On trouve les seigneurs de Saint-Léonard cités en 1212
et en 1219 dans le chartrier de l'abbaye de Silly. M. de Cromot, baron du
Bourg, mourut peu avant la Révolution. Il laissait deux fils, qui émigrèrent
vers 1790. Leurs biens furent confisqués; mais ils rentrèrent dans leurs
propriétés en exécution de la loi du 5 décembre 1814. Ils ne les
conservèrent pas longtemps et le château du Bourg fut vendu par eux, le 28
mai 1824, à M. de Tamisier. Celui-ci le revendit, le 15 décembre 1835 à M.
de Tourdonnet, qui, à son tour, le céda à M. le marquis de
Chasseloup-Laubat, administre de la marine, à la date du 14 décembre 1841.
Enfin le château du Bourg a été acheté en 1879 par M Jules de Forceville.
Son fils, M. Constant de Forceville, en a hérité. Lui-même est mort en 1895,
et le château du Bourg appartient au début du XXe siècle à sa veuve, Madame
de Forceville, née Duruflé, et à ses enfants mineurs, Robert et Elisabeth de
Forceville. (1) Le château est situé au fond d'un jardin à la française
bordé au nord par l'orangerie, la ferme et le logement des jardiniers; au
sud par les écuries et le logement du concierge. Le jardin à la française a
été amputé sous Louis XVIII lors de la création de la route. Ce château est
un bon exemple du style classique de la fin du règne de Louis XV.
L'intérieur est garni de boiseries ainsi que de tapisseries provenant de
l'ancien manoir. Les peintures sont de François Snyders. La ferme,
endommagée en 1944, est reconstruite sur le même plan.
Éléments protégés MH : le château ; les écuries ; l'orangerie ; le bâtiment
des jardiniers ; le bâtiment du concierge ; le jardin et la terrasse au nord
du château : classement par arrêté du 25 février 1942. (2)
château du Bourg Saint Léonard 61310 Le Bourg Saint Léonard, tel. 02 33 36
68 68, ouvert au public du 01/07 au 31/08, tous les jours de 14h30 à 17h30.
En mai, juin et du 1er au 15 septembre, les week-ends et les jours fériés de
14h30 à 16h30, parc de 400 hectares.
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