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Situé au fond d'une
vallée profonde creusée par l'Orne, dominé de l'autre côté de la rivière par
des rochers abrupts, et à droite abrité par des collines couvertes de
hêtres, de chênes et de pins, le château de la Forêt-Auvray exerce encore
aujourd'hui un prestige puissant sur l'imagination populaire. Il rappelle à
la fois la puissance des Vassy qui l'ont élevé, et le rôle qu'un des leurs a
joué dans les guerres du XVIe siècle. Comme Creuilly il a encore l'aspect
d'une véritable forteresse. Son enceinte quadrangulaire, de 80 mètres de
long sur 45 de large, est formée de murs épais de plus de deux mètres et
dune hauteur de sept à dix mètres, munis de parapets couvrant un chemin de
ronde par lequel on peut circuler d'un bout à l'autre des remparts. Une
trentaine de meurtrières alternant avec des ouvertures semi-circulaires ont
été percées dans ce parapet. Aux quatre angles s'élèvent des tours
communiquant avec le chemin de ronde. La porte d'entrée n'a pas moins de
trois mètres de largeur, les rainures du pont-levis et de la herse, qu'on
abattait en cas de danger, sont encore visibles. Des moulures sur pierre
calcaire dont la blancheur tranche sur la couleur sombre du schiste et du
granit qui compose toute la construction, ont été ajoutées maladroitement à
cette façade au XVIIe siècle. Mais les mâchicoulis qu'on aperçoit au-dessus
de la porte, à la hauteur d'environ six mètres du sol, et les meurtrières
dont le corps-de-garde est garni ne laissent aucun doute sur la pensée du
constructeur de ce château. Ce vaste quadrilatère est précédé de fossés,
larges de neuf mètres et de quatre mètres de profondeur, dans lesquels ont
pris racine des frênes et des peupliers. Du côté du nord, la muraille,
complètement disparue, n'avait pas de fossés, parce qu'elle était bordée par
la rivière d'Orne.
Jacques de Vassy, seigneur de la Forêt-Auvray, fut un des chefs du parti
protestant dans le pays, avec Payen de la Poupelière, Philippe de Sarcilly
et Jean de Saint-Germain, seigneur de Rouvrou. On prétend que sa femme, Anne
de Montgommery, pendant qu'il était occupé à guerroyer, aurait fait sortir
de terre cette vaste construction qu'il aurait trouvée complètement achevée
au retour de son expédition. On ajoute que la première dame de Vassy aurait
été de la race des fées, comme la dame d'Argouges et aurait caché sa dot,
trésor immense, dans un angle de la cour. Le château féodal de la Forêt a
sans doute eu pour premier constructeur un chevalier du nom d'Auvray, et ici
nous sommes d'accord avec La Roque et La Chcsnaye des Bois, mais nous nous
écartons d'eux quant à la généalogie qu'ils ont donnée des Vassy. Ce que
nous pouvons affirmer, c'est qu'il existe une charte d'Enguerrand de Vassy,
de l'année 1197, contenant donation à l'abbaye d'Ardennes d'un lieu nommé le
Champ de la Vionne, sur le territoire de la Forêt-Auvray. Philippe de Vassy,
chevalier, apparaît plus tard, de 1207 à 1239, parmi les bienfaiteurs du
prieuré de Saint-Nicolas-sur-Orne, dépendant de la même abbaye. Olivier de
Vassy figure également dans le cartulaire d'Ardennes, en 1443. On trouve, au
commencement du siècle suivant, Jean de Vassy, sieur de la Forêt, qui épousa
Marguerite de Saint-Germain, puis viennent Gabriel, marié à Marguerite
d'Harcourt, et Jacques de Vassy. Ce dernier, après avoir pris part à la
surprise du château de Vire avec La Poupelière, eut à y subir l'attaque de
Matignon. Après des prodiges de valeur, les capitaines huguenots, repoussés
jusque dans le donjon, furent obligés de se rendre. La Poupelière eut la vie
sauve, grâce au dévouement de sa femme, mais Vassy qui s'était rendu au
sieur de Surlandes, fut tué par les soldats du capitaine à la garde duquel
on l'avait confié.
Cette race puissante semble avoir repris une nouvelle vigueur après cette
catastrophe. Les de Vassy avaient pour devise: "Nodos virtute resolvo". Au
XVIIe siècle, un autre Jacques de Vassy arrondit sa seigneurie en y
réunissant, par droit de retrait féodal, moyennant une somme de 18000
livres, prix de vente, la seigneurie de Ménil-Hubert-sur-Orne, possédée,
après lui, par son fils, Jacques de Vassy. Comme presque tous les
descendants des conquérants, les sires de la Forêt-d'Auvray (d'argent à
trois tourteaux de sable), qualifiés du titre de comte et de marquis, au
XVIIIe siècle, avaient la passion de la chasse, qu'entretenait l'abondance
d'excellent gibier dans la contrée. On raconte que Renty, baron de Beny,
étant un jour allé voir son ami le comte de Vassy, sire de la Forêt,
celui-ci lui fit admirer sa meute qui passait pour la plus belle du pays.
Renty, qui avait d'autres goûts, lui répondit froidement qu'il en avait une
plus belle encore. Curieux de s'assurer du fait, le sire de la Forêt se
rendit au Beny, et son ami l'ayant fait entrer dans une vaste salle, le fit
assister à une distribution de pain et de vêtements à une centaine de
pauvres. "Voilà ma meute, dit-il. Ne vous avais-je pas dit qu'elle était
bien plus belle que la vôtre". Le Verrier de la Conterie, dans la Vénerie
normande ou l'École de la chasse aux chiens courants, parle avec éloges de
Saint-Jean, piqueux du marquis de Vassy. Un garde de la marquise de Vassy
fut victime de son zèle pour la défense des droits de chasse, si chers à ses
maîtres. Un habitant du Ménil-Hubert, en compagnie d'un Monsieur Néel,
écuyer, ayant eu la témérité de chasser sur les terres de la Forêt-Auvray,
fut poursuivi par le garde, et se voyant menacé de son fusil, tira lui-même
sur lui et le tua. Pour obtenir sa grâce, il dut lever la fierté de
Saint-Romain. (1)
Éléments protégés MH : le logis ; le moulin ; l'allée d'accès ; l'ensemble
de l'enceinte et des tours ; la poterne et les douves : classement par
arrêté du 9 avril 2002.
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