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Le parc et le haras de
Lonrai sont aujourd'hui les principaux titres de gloire d'un ancien
marquisat possédé par les Matignon, par Seignelay et par le maréchal de
Montmorency-Luxembourg. Le parc, traversé par la Briante et entouré de murs
et de fossés, a une étendue de 180 hectares. L'allée extérieure de
marronniers qui conduit à la grille d'honneur est l'ouvrage d'un des
derniers possesseurs de Lonrai, M. le comte de Séraincourt. Dans le parc,
"les arbres séculaires ont été respectés. Des allées ombreuses circulent au
milieu des taillis et des futaies et un troupeau de daims erre presque libre
dans un enclos de deux hectares. Des fenêtres du château, l'œil se repose
sur une large pelouse encadrée d'arbres magnifiques. Grandeur, simplicité,
calme et majestueuse variété sans effort ni recherche, le parc de Lonrai
réunit tout ce qui charme à la première vue, tout ce qui retient à la
seconde". Situé dans une position remarquable, à l'entrée de la forêt
d'Écouves, en face de la butte Chaumont, la plus élevée des collines de
Normandie, Lonrai a été habité dès l'époque de la pierre polie. Au mois de
janvier 1892, à 350 mètres d'un ruisseau, dans une pâture dite de la
Croix-Houdiard, qui doit son nom à une vieille croix en granit, rongée par
le temps, presque informe, plantée au carrefour voisin, on a trouvé cinq
haches en pierre polie de grandeur et de formes différentes. M. Letellier,
qui le premier a signalé cette découverte, a cherché vainement dans le
voisinage quelques vestiges de sépulture antique, élévation de terrain,
blocs de pierre, etc. Il n'a remarqué que la vieille croix dont on vient de
parler. Mais nous croyons pouvoir affirmer que des monuments mégalithiques
ont autrefois existé sur le territoire de Lonrai.
Le premier seigneur de Lonrai dont le nom nous soit connu est Haimeri de
Lonreio, qui fut témoin, en 1091, d'une donation faite à Saint-Martin de
Sées par Robert Bigot et Emma, sa femme. Le second est Garin de Lonrai (Guarinus
de Lonreio) qui, en 1147, du consentement de lui et de sa femme, fit don à
la même abbaye des deux tiers de la dîme de Lonrai. L'acte en fut fait au
château d'Alençon, en présence de Guillaume, comte de Ponthieu. Garin de
Lonrai fut témoin de la fondation de la Chartreuse du Val-Dieu en 1170.
Lonrai passa ensuite dans la maison de Neuilly, puis dans celle de Silly,
par le mariage Jeanne de Neuilly avec Nicolas de Silly dont ils eurent deux
fils, Gautier et Garin de Silly. Jacques II et Jean II de Silly paraissent
avoir conservé pendant l'occupation anglaise leur terre de Lonrai, plein
fief de haubert auquel était attaché le patronage de l'église paroissiale et
deux chapelle plus le droit de prendre dans la forêt du bois de chauffage et
du bois à maison. François de Silly, seigneur de Lonrai, fut bailli et
gouverneur de Caen et mourut à Pavie, en 1524. Il fut inhumé dans l'église
paroissiale, un magnifique tombeau, détruit en 1793, lui fut érigé. L'aînée
de ses filles, Anne, mariée à Jacques Goyon de Matignon, maître des eaux et
forêts du duché d'Alençon, eut Lonrai dans son lot. De ce mariage sortit
Jacques II de Matignon, maréchal de France, qui fut un des premiers hommes
de guerre de son temps. Par son caractère conciliant, il empêcha beaucoup de
désordres à Alençon où les protestants, après avoir commis des excès
abominables en 1662, se virent, à leur tour, menacés de représailles lors de
la Saint-Barthélemy.
Jacques II de Matignon fut un des premiers, après la mort de Henri III, à
engager Henri IV à se faire catholique, et il remplit les fonctions de
connétable à son sacre. Charles de Matignon, son fils, obtint aussi le
brevet de maréchal, mais n'en eut que l'honneur. Il fit ériger Lonrai en
marquisat en 1644. Léonor de Matignon, évêque de Coutances, sacré à Alençon,
plus tard évêque et comte de Lisieux, ne contribua pas peu à
l'embellissement de Lonrai. Peintres et sculpteurs y furent employés. Parmi
ces derniers nous relevons le nom de Gilles Durieu, sculpteur, qui s'était
même établi à Lonrai. Les salons furent décorés de tableaux des plus grands
maîtres, dont le catalogue nous a été conservé. On peut citer notamment une
Descente de Croix et une Résurrection, du Carrache; une Madeleine communiée
par deux anges, de Dominiquin; une Tête de Christ, du Corrège;
Notre-Seigneur dans le jardin des Oliviers, de Paul Véronèse; Enfant couché
avec un vieillard, de Lorenzo Lotto; Notre Seigneur parlant au peuple, de
Sébastien Bourdon; Moïse marchant sur la couronne de Pharaon, d'après le
Poussin... Henri de Matignon, neveu et héritier testamentaire de l'évêque de
Lisieux, étant mort en 1682, le marquisat de Lonrai passa à
Catherine-Thérèse, sa fille, qui en 1678 avait été mariée au marquis de
Seignelay, surintendant de la marine, fils du grand Colbert. Par un autre
mariage, Lonrai entra dans la maison de Montmorency-Luxembourg. En 1786 et
années suivantes, le duc de Montmorency, fils du maréchal, le vendit au fils
d'un de ses plus modestes vassaux, Thomas Mercier, négociant, marchand de
point d'Alençon. Après lui, Jacques Mercier, son fils, joua un rôle très
important à Alençon au commencement du XIXe siècle. Il fut créé baron par
Napoléon 1er, fut maire d'Alençon et député de l'Orne pendant de longues
années.
Mais on lui reproche d'avoir rasé l'ancien château et d'avoir distribué le
parc d'une façon assez mesquine. Ruiné à son tour, le baron Mercier dut
vendre Lonrai au comte de Séraîncourt, qui rebâtit en partie le château
construit par son prédécesseur, donna au parc l'aspect que nous lui
connaissons et établit sur cet important domaine une exploitation agricole
de premier ordre. M. Armand Donon continua l'œuvre du comte de Séraincourt
et créa le haras de Lonrai, en 1863. Dans le principe, par suite d'un traité
avec le comte de Morny, les poulains nés à Lonrai passaient à l'âge de
dix-huit mois dans l'écurie de ce dernier et couraient sous ses couleurs.
Mais au bout de quelques années, M. Donon put conserver tous les produits de
son haras, dont la réputation ne tarda pas à être européenne. Ce fut dès
lors sous le nom et sous couleurs de son fils M. Pierre Donon, que les
chevaux de Lonrai parurent sur le turf. C'est Péripétie qui fut une des
premières gloires de Lonrai et qui gagna en 1869 le prix de Diane. Puis
vinrent Perplexe, Le Destrier et son fils Stuart, vainqueurs du Derby et du
Grand-Prix de Paris, en 1888, Alphonsine, Escogriffe et toute une lignée
d'excellents chevaux, malheureusement disséminée, en 1891, à la vente du
haras formé par M. Donon. A la fin de 1892, M. le comte Le Marois, devenu
propriétaire de Lonrai, y ramena son stud, composé de deux étalons, Chalet
et Julius-Cœsar et de vingt-cinq poulinières. Ce nouveau haras promet à
Lonrai de nouveaux succès. Le local, en effet, est éminemment propice à
l'élevage des chevaux: terrain légèrement ondulé, prairies d'excellente
qualité, sources abondantes, voisinage de la forêt d'Écouves, qui du coté du
nord forme un abri de cent à deux cents mètres d'altitude et dont l'effet
est des plus pittoresques. Le haras, construit dans le style normand, est
adossé à une haute futaie. Les autres constructions sont dispersées dans les
différentes prairies. (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du château, ainsi que le
grand salon avec l'ensemble de son décor; la cour d'honneur, avec les
douves, les murs et les ponts; les façades et les toitures du logis, de la
grange et des écuries de la ferme du château; les vestiges du colombier; le
portail du potager et de la grande serre centrale; les façades et les
toitures de l'orangerie, y compris son mur de clôture; les façades et les
toitures de la maison du garde-chasse, à l'entrée dite "des marronniers";
les façades et les toitures de la maison du régisseur du haras et des box;
les façades et les toitures du bâtiment de la jumenterie du haras:
inscription par arrêté du 14 décembre 1999. Le grand salon du château :
classement par arrêté du 21 juillet 2000. (2)
château de Lonrai 61250 Lonrai, tel. 02 33 29 39 59, Poney Club
d'Alençon, ouvert au public tous les jours sauf dimanches.
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