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On ne saurait
s'imaginer quelle influence souveraine, les architectes du règne de Louis
XIV, ont eue sur l'architecture civile en province. De même que l'on se
modelait dans la bourgeoisie sur les manières de la cour, de même la
noblesse de nos provinces et les riches bourgeois s'inspiraient des
bâtiments du roi. Le palais de Versailles, les pièces d'eau, les jardins,
les statues exerçaient sur les esprits une véritable fascination. Les copies
étaient parfois bien pâles, souvent même peu dignes du modèle, mais malgré
l'étroitesse des proportions et les défaillances de certaines parties de
l'exécution, l'imitation était flagrante et se laissait deviner. Il en est
ainsi de Rabodanges, qui, simple rendez-vous de chasse, fut remplacé par le
château actuel par les soins de Louis-César de Rabodanges, en 1648. Les
plans furent dressés à Paris, les jardins furent dessinés par André Le
Nôtre, les grilles elles-mêmes sortirent des ateliers d'un serrurier employé
aux travaux de Versailles, le sieur Chrétien. De toutes ces grilles d'une
exécution artistique très soignée, il ne reste plus que celle de l'entrée.
Les balustrades en granit ont été enlevées, le parc a été détruit, les
longues avenues abattues; mais, malgré toutes ces suppressions et ces
mutilations, il reste, dans l'ordonnance magistrale de ces grands bâtiments
d'une correction solennelle et rigide, quelque chose qui évoque le souvenir
des splendeurs du passé. Nous n'avons pas ici à faire l'histoire de la
famille de Rabodanges, mais à préciser ce qui la rattachait directement au
château dont nous nous occupons. Nous nous bornerons à ce qui est essentiel.
Par lettres patentes du mois de juillet 1649, le roi érigea en marquisat,
sous le titre de marquisat de Culley, la terre de Culley-sur-Orne, composée
des seigneuries de Rabodanges, de Neufvy, du Mesnil-Hermey, du
Mesnil-le-Vingt, etc. Il faut croire que le titre de marquis de Culley ne
plut pas longtemps au titulaire, car sur sa demande, par lettres patentes du
mois de mars 1650, le roi commua le nom de Culley en celui de Rabodanges, si
bien que le marquisat s'appela désormais marquisat de Rabodanges. Les
lettres patentes portaient en même temps création d'un marché le mardi de
chaque semaine et de deux foires par an, la première le premier jour de mai,
la séconde le 18 octobre. Depuis, le marquis de Rabodanges acquit de
François de Mue, écuyer, le fief de la Motte-en-Bazoches, relevant du roi à
cause de la vicomté de Falaise. Des lettres patentes du roi, datées de
Fontainebleau au mois d'octobre 1693, autorisèrent l'union au marquisat du
fief de la Motte, ainsi que des terres de Fumichon, et établirent dans le
bourg de Rabodanges deux nouvelles foires, l'une le 22 mars, l'autre le 20
juillet de chaque année. Par suite de ces adjonctions le marquisat de
Rabodanges comprenait six fiefs en dépendant et son revenu était estimé
quinze mille livres. Le marquis de Rabodanges était alors Guy Cyr de
Rabodanges, le constructeur même du château, chevalier des Ordres du Roi et
gouverneur de Lisieux. Il était fils de Louis, troisième du nom, qui prenait
le titre de marquis de Crèvecœur, et qui avait épousé Marie de Longchamp. Le
marquis Guy Cyr de Rabodanges contracta mariage avec une demoiselle
Charlotte de l'Escalopier. Son fils épousa Cécile-Adélaïde de la
Ferté-Senecterre. Le château de Rabodanges fut cédé, après la Révolution,
par Mademoiselle de Rabodanges, à son neveu le marquis de la Carte, qui
s'était retiré en Italie. A la mort de celui-ci, il fut vendu puis revendu
en plusieurs lots. Le château, avec une partie du domaine, appartient
aujourd'hui à M. Beylard. Les Rabodanges portaient: "Ecartelé au premier et
au quatrième d'or à la croix ancrée de gueules, aux deuxième et troisième de
gueules à trois coquilles d'or". On distingue encore des vestiges de ces
armoiries sur les frontons du château; elles sont supportées par deux anges
tenant chacun un rabot (1). L’accès au château s’ouvre sur une rotonde
délimitée par des arbres. Une large allée conduit vers la cour d’honneur.
Deux parterres engazonnés s’étendent de part et d’autre entre deux rideaux
de tilleuls. Dans l’axe de l’allée, ponctuée de nombreuses bornes de granit,
le château dresse son élégante silhouette sobre et trapue. Peu avant les
douves, une allée transversale coupe l’allée d’honneur sur un petit rond.
Elle conduit à l’ouest vers la ferme de la Martinière, restaurée et
reconvertie en haras, et à l’est vers des communs et l’ancien logement du
chapelain aujourd’hui gîte rural. Un petit pont de pierre clos d’une grille
franchit les douves sèches. Devant le château, le jardin a conservé son
organisation simple et sobre d’origine. Des murets bas doublés de haies
composites taillées bordent les fossés. Deux vastes parterres de gazon
encadrent l’allée principale longée de plates-bandes fleuries ponctuées de
topiaires d’arbustes de formes variées. De faible hauteur sous le pont
d’accès, les douves deviennent plus profondes vers l’arrière. Une allée les
longe à l’ouest en passant devant les reliques du jardin anglais et l’allée
de la rotonde forestière à la végétation clairsemée. Enserré par les
profonds fossés en herbe où s’appuient quelques appentis utilitaires, le
jardin sud du château, simple parterre de gazon, épouse le dessin des douves
qui se terminent en demi-cercle à redents. Les deux pavillons massifs de la
chapelle et du logement du chapelain marquent les angles des fossés bordés à
l’extérieur de buis taillés qui masquent les vues vers les collines
avoisinantes. Un pont permet de rejoindre une terrasse engazonnée sur le
sommet de la puissante muraille des douves, un escalier latéral descend vers
une seconde terrasse étroite située au niveau du fond des fossés que l’on
peut rejoindre par un étroit tunnel. Vers le château, le haut mur couvert de
végétation abrite quelques poiriers. Devant, un muret s’ouvre en son centre
sur quelques marches qui conduisent à une terrasse en herbe plus large. Son
mur de soutènement est longé de buis et de tilleuls. Deux escaliers latéraux
conduisent à la prairie en contrebas qui descend en pente douce vers la
pièce d’eau qui marque l’aboutissement de la composition du parc.
Éléments protégés MH : le château, sauf parties classées ; les douves ;
l'intérieur de l'habitation du chapelain : inscription par arrêté du 1er
février 1944. Les deux frontons-pignons sur les façades de la partie
centrale ; le pavillon de la chapelle ; les façades et les toitures du
pavillon du chapelain : classement par arrêté du 10 avril 1981. (2)
château de Rabodanges 61210 Rabodanges, tél. 02 33 35 04 76, ouvert au
public du 06 janvier au 30 septembre de 10h à 12h et 14h à 17h fermé le
dimanche, gîte de charme et de caractère .
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