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Tous les auteurs s'accordent pour signaler, mais
sans la situer, l'existence d'une motte féodale au Lude avant l'an Mil.
Cette motte serait ensuite, selon les hypothèses, abandonnée ou réaménagée
pour la construction d'une forteresse. Les points de vue divergent sur
l'emplacement de cette première motte que le Docteur Candé (1900) situait
grosso-modo au centre de l'îlot de l'usine Candia, en aval du pont sur le
Loir. Cette mystérieuse proéminence disparue dans les années 1980, pouvait
aussi être le socle de la tour d'un certain Jean du Lude que les seigneurs
du Lude auraient détruite au XIe siècle. Néanmoins, il existait deux
seigneuries de haute justice: Le Lude et la Motte-sous-le Lude. Si
l'emplacement du lieu seigneurial du Lude est attesté avec une
quasi-certitude, celui de la Motte-sous-le Lude aurait été déplacé. Un
certain nombre de parcelles cadastrales agglomérées et situées en face Le
Lude, sur la rive droite, sont associées au toponyme de Valboyer que l'on
retrouve aux abords de l'église saint-Vincent, proche la terrasse. Cet
emplacement sur la rive basse du Loir, sous l'éperon du Lude, éclairerait le
sens du toponyme Motte-sous-le Lude, ensuite déplacé sur la terrasse de la
rive gauche, lors de la possession des deux châtellenies par le même
seigneur. Cependant, quelques interrogations demeurent. L'enceinte du
Château du Lude réunissait les deux châtellenies de la Motte-sous-le Lude et
du Lude. Dans l'état actuel de la recherche, il est vraisemblable
d'envisager la coexistence de deux lieux seigneuriaux ou châteaux: celui du
Lude, à l'emplacement de l'éperon, et celui de la Motte-sous-le Lude sur la
terrasse du château. D'après les aveux de dénombrements de ces deux
châtellenies en 1703, seul Le Lude a conservé son château tandis que le
châtelet de La Motte-sous-le Lude s'est fondu dans les communs et les abords
immédiats.
Pendant quatre siècles, l'existence du château du Lude est attestée par les
témoignages historiques: le premier seigneur héréditaire connu serait
Isambart du Lude tué en 1016. Sa fille Adelburge du Lude épouse Étienne de
Montreveau qui donne asile à Foulques Nerra en 1027. Puis, Emmeline de
Montreveau et du Lude épouse Raoul de Beaumont. Au milieu de XIIe siècle,
Roscelin II vicomte de Beaumont et du Lude, épouse Constance d'Angleterre
fille d'Henri 1er roi d'Angleterre et devient l'allié de l'Angleterre contre
Geoffroy Plantagenêt comte d'Anjou. Le 20 février 1202, Jean-sans-Terre roi
d'Angleterre fait étape au Lude. Les vicomtes de Beaumont, de Fresnay et du
Lude possèderont le Lude jusqu'en 1253, date du mariage d'Agnès avec Louis
de Brienne, troisième fils de Jean, roi de Jérusalem, empereur de
Constantinople. En 1355, Louis II succède à son oncle Geoffroy dans la
possession de la seigneurie du Lude. Il avait épousé Isabelle de Bourbon qui
lui succède comme dame du Lude. Elle meurt en 1371, peu de temps après la
bataille de Pontvallain où s'affrontent Bertrand Du Guesclin et Robert
Knolles. Deux fois, les anglais tentent de prendre le château en vain. Lors
de cette succession, la châtellenie du Lude est détachée de la terre de
Beaumont et échoit à Marguerite de Poitiers qui la cède à son petit-fils
Jean de Vendôme. Tant bien que mal Marie d'Orange, veuve de Jean de Vendôme,
conserve la terre du Lude qu'elle partage avec Pierre de Vendôme, son neveu.
En 1425, le château et la ville du Lude sont pris par les troupes du comte
de Warwick et Guillaume Gladsdall est nommé gouverneur de la ville. En 1427,
son successeur William Blackborne tenait la forteresse avec 1200 hommes
lorsqu'Ambroise de Loré, capitaine des troupes de La Trémoille, et Gilles de
Rais font le siège du château et le chasse. Pierre de Vendôme et Marie
d'Orange retrouvent leur bien.
La part de Marie d'Orange est engagée auprès d'un certain Goreau qui rend
foi et hommage comme seigneur du Lude à Jean, duc d'Alençon et vicomte de
Beaumont. Les biens engagés de Goreau passent à Guy de Carne qui vend en
1457 aux Daillon qui seront dorénavant les seuls propriétaires de
l'ensemble. De cette histoire, il apparaît que l'on sait peu de choses de la
configuration du château au Moyen Age sinon que devant la menace des troupes
anglaises, le capitaine Guillaume de Méron fait creuser des fossés du côté
de la ville à la fin du XIVe siècle. Les deux années d'occupation par les
anglais ont conforté les défenses du château qui fut très endommagé par le
siège de 1427. Le statut de domaine engagé pour moitié n'a pas favorisé les
travaux de restaurations jusqu'au rachat par les Daillon en 1457. Le château
tel que nous pouvons l'observer aujourd'hui appartient à une histoire qui
commence dans la deuxième moitié du XVe siècle. L'arrivée de Jean de Daillon
au Lude est une période de renouveau. Malgré sa nomination en 1447 comme
Chambellan ordinaire du dauphin, le futur Louis XI, il prend parti contre ce
dernier en ralliant la ligue du Bien public. Selon Pascal Thibault,
contraint à l'exil de la cour de France, il aurait vécu sept années comme
secrétaire du roi René en Anjou. Rentré en grâce à partir de 1468, il
s'enrichit et peut se consacrer à l'embellissement de son château du
Lude.Jean de Daillon meurt en 1482 et c'est son fils Jacques qui poursuit
les travaux au XVIe siècle. Dans les années 1560, un artiste anonyme décore
le studiolo de la chambre du rez-de-chaussée pour Guy de Daillon et son
épouse Jacqueline de la Fayette. Par lettres patentes de François 1er, la
terre du Lude est érigée en comté en 1545 et devient un éphémère
duché-pairie par lettres patentes (non enregistrées) de Louis XIV en 1676.
Henri, seul Duc du Lude, meurt sans postérité. La terre échoit à la famille
de Roquelaure puis aux Rohan-Chabot. Jusqu'à sa vente en 1752, le château
n'est pas habité et l'on peut supposer qu'il n'est pas bien entretenu.
Joseph Julien Develaer l'achète pour 395000 livres et se contente de
réparations légères de mises hors d'eau. En 1785, sa fille Françoise
Joséphine Butler épouse d'Étienne Baude, marquis de la Vieuville vont
entreprendre de grands travaux. L'exiguïté des espaces bordés de larges et
profonds fossés avec des accès compliqués depuis la ville et les grands
chemins de communication va contribuer à bouleverser une fois de plus les
schémas de composition d'ensemble et gommer les accidents du relief. Ils
font appel à l'architecte Vincent Barré connu entre autre, pour ses
réalisations du château du Marais dans les Yvelines et du château du
Montgeoffroy dans le Maine-et-Loire. Le projet de Barré retourne le château
à 180°: il ouvre la façade ouest vers la ville en l'agrémentant d'un
portique, ferme la cour d'honneur à l'est, démoli les bâtiments de
l'avant-cour, comble le fossé est et relie l'avant-cour et l'éperon dans un
même espace. Le parti pour la nouvelle façade sur l'éperon est un compromis
entre la fin de la Renaissance et le XVIIIe siècle: les corps de bâtiment à
travées régulières ont des toits différenciés en pavillon. Le projet de
Barré reste inachevé à la Révolution. En 1798, Élisabeth Baude de la
Vieuville épouse Louis-Céleste de Talhouët. Ils résident peu au Lude. Leur
fils épouse Alexandrine Sophie Roy, la fille du Comte Antoine Roy, ministre
de Louis XVIII et maître de forges. Le château renaît à partir de 1850 avec
l'arrivée des marquis de Talhouêt-Roy qui entreprendront d'importants
travaux de réaménagements intérieurs et la construction de nouveaux communs
où se succèderont les architectes Pierre-Félix Delarue de 1852 à 1857, Denis
Darcy de 1876 à 1880, Louis Parent de 1888 à 1906 et enfin Paul Lafargue de
1911 à 1914.
De cette histoire, il apparaît que l'on sait peu de choses de la
configuration du château au moyen-âge sinon que devant la menace des troupes
anglaises, le capitaine Guillaume de Méron fait creuser des fossés du côté
de la ville, à la fin du XIVe siècle. Les deux années d'occupation par les
anglais ont conforté les défenses du château qui furent très endommagées par
le siège de 1427. Le statut de domaine engagé n'a pas favorisé les travaux
de restaurations jusqu'au rachat par les Daillon en 1457. Le château tel que
nous pouvons l'observer aujourd'hui appartient à une histoire qui commence
dans la deuxième moitié du XVe siècle. La forteresse était alors entourée
d'un profond fossé et se divisait en deux plates-formes inégales et
irrégulières. La plate-forme, dite de l'éperon, dominait la rivière, et
formait une première enceinte accessible par un petit châtelet d'entrée
situé au nord, proche le pont sur le Loir. L'autre plateforme, reliée par un
pont à l'éperon, supportait l'ancien château. Les témoignages sur les
travaux entrepris par Jean de Daillon ne se manifestent qu'à la fin des
années 1470. En 1479, le maître-maçon du roi René d'Anjou, Jean Gendrot,
résiderait au Lude et travaillerait aux ailes nord du logis et de la
basse-cour comme en témoignent encore les sous-sols de l'aile nord du
château et la salle hexagonale dite des souterrains de la tour nord-est de
l'ancienne avant-cour qui présente une voûte d'arêtes multiples bombée. Il
est vraisemblable que la plateforme du château fut agrandie vers l'est, au
détriment de l'éperon alors raccourci. C'est un grand bouleversement dans la
composition d'ensemble de la forteresse qui va pivoter une première fois à
180 degrés. En condamnant l'accès par l'éperon abandonné au profit de
l'accès par la grande terrasse, la nouvelle entrée privilégie la façade sud
et l'arrivée par la ville.
La plate-forme du château agrandie supporte alors le château et la
basse-cour. La grande terrasse haute est aménagée au-dessus du Loir en face
de la principale entrée accessible par un pont. Une galerie couverte d'un
toit à l'impérial, dite galerie du Zodiaque, est adossée au mur d'entrée, de
part et d'autre du portail de l'avant-cour. Une nouvelle chapelle
Saint-Aubin est aménagée dans la tour sud-est de l'avant-cour. Dorénavant
deux façades principales doivent être magnifiées: la façade sud donnant sur
la grande terrasse d'accès, et la façade orientale donnant sur l'avant-cour.
L'aile sud paraît avoir été construite de fond en comble au XVIe siècle. La
cour d'honneur est accessible par un degré d'une dizaine de marches. Les
pignons des deux ailes sont mis à l'alignement et ordonnancés- ce qui
entraîne une déformation de l'avant-cour qui est élargie vers le nord pour
dégager le pignon est de l'aile nord du logis. Cette anomalie rend compte
d'un projet évolutif au fil des ans. Dans les années 1560, un artiste
anonyme décore le cabinet privé de l'appartement du comte du Lude situé au
rez-de-chaussée de l'aile sud. Les commanditaires seraient Guy de Daillon et
son épouse Jacqueline de La Fayette. Au milieu du XVIIIe siècle, un document
fait état de la présence, au rez-de-chaussée, de trois salles des bains ou
latrines accessibles depuis des balcons extérieurs. Le premier existe
toujours. Il s'agit du grand balcon de la façade sud qui dessert
l'appartement du seigneur. Le deuxième est à l'ouest pour l'usage de la
chambre jaune et le troisième est celui de la garde-robe de la grande
chambre de la tour sud-ouest.
À la fin du XVIIIe siècle, le projet de l'architecte Vincent Barré
bouleverse une nouvelle fois la distribution du château: il ouvre la façade
ouest vers la ville en créant un portique, ferme la cour d'honneur à l'est,
démoli tous les bâtiments de la basse-cour, comble le fossé est, et relie la
basse-cour et l'éperon dans un même espace. L'ancien pont d'accès à la
basse-cour devient un pont pour sortir du jardin de l'éperon et gagner la
grande terrasse du Loir. Le parti architectural choisi pour la nouvelle
façade sur l'éperon est un compromis entre la fin de la renaissance et le
XVIIIe siècle: les corps de bâtiment à travées régulières ont des toits
différenciés couverts en pavillon. Le projet de Vincent Barré reste inachevé
à la Révolution, notamment la tour nord-ouest qui aurait dû abriter la
chapelle, n'est pas construite. Néanmoins, toutes les baies de l'ancien
château sont simplifiées et les croisées de pierre disparaissent. À partir
de 1850, l'architecte Delarue intervient sur l'aile nord et le vestibule. Il
crée, à l'imitation de la façade sud, un balcon le long de la façade nord et
construit la tour nord-ouest, déjà signalée pour sa partie basse sur le
cadastre de 1814. Dans les années 1870, l'architecte Denis Darcy poursuit
les travaux. Il est l'auteur, avec le sculpteur Gaullier, de tout le décor
sculpté néo-renaissance des lucarnes, des encadrements de baies, d'une
grande partie des mâchicoulis, et des nouvelles croisées en pierre. Dans les
années 1890, l'architecte Louis Parent remanie les intérieurs dans un style
de la Première Renaissance : l'escalier monumental de Barré est démoli et
remplacé par une grande vis, le décor du vestibule nord est remanié, les
carreaux des sols des deux vestibules (salle à manger sud et galerie nord)
trouvent leur inspiration au château d'Ancy-le-Franc (Yonne) et la galerie
nord au plafond stuqué de style troubadour, sans cheminée et largement
éclairée par des baies en vis à vis, devient une salle de bal couverte de
solives et ornée d'une cheminée monumentale néo-renaissance. À l'extérieur,
la régularité des travées de baies est bouleversée et le conduit de la
nouvelle cheminée est caché derrière la statue équestre de Jean de Daillon
placée dans une niche. Enfin à partir des années 1910, l'architecte Alcide
Lafargue modifie l'aspect de la tour nord-ouest édifiée par Delarue pour la
aire ressembler aux tours du château de Chambord en la quadrillant de
pilastres et la couronnant d'un clocheton.
L'histoire des jardins du Lude a véritablement commencé au XVIe siècle. Les
bouleversements générés par les agrandissements du château ont entraîné
l'isolement de l'éperon qui est probablement devenu un jardin accessible par
une passerelle depuis la nouvelle basse-cour. Il est difficile de savoir
quand les murs du grand parc ont été bâtis. Ils rendent compte encore
aujourd'hui des nombreux remaniements (rehaussements et reprises effectués
depuis des siècles). Néanmoins la clôture du parc ne peut pas être
antérieure aux années 1530. Elle a nécessité un détournement de la route de
Châteaux en Anjou (Château-la-Vallière). La terrasse haute face à la façade
sud du château s'est constituée au fur à mesure du chantier du château et
constituait la principale entrée pour les visiteurs. Au XVIIe siècle, cette
terrasse était plutôt une avant-cour permettant aux attelages de tourner et
desservant un vaste chenil placé à l'extrémité. Les jardins se trouvaient au
pied de cette terrasse le long de la rivière. On peut supposer la présence
d'un jardin divisé en parterres d'agréments de fleurs, de fruits et de
légumes. Dès le XVIIIe siècle, on note la présence d'un potager utilitaire,
de serres, d'une orangerie et de pépinières le long du chemin de Valboyer
près des communs. À la fin du XVIIIe siècle, toute cette organisation est à
nouveau bouleversée. La grande terrasse est régularisée et dégagée. Le
chenil est déménagé, le jardin de l'éperon est agrandi avec la suppression
du fossé qui le séparait de la basse-cour démolie et incluse dans le nouveau
jardin. De nombreux projets imaginés au début du XIXe siècle ne voient pas
le jour. Ce n'est que dans la deuxième moitié du XIXe siècle, qu'un
paysagiste dessine un jardin paysager qui gomme tout relief et lie le grand
parc au petit parc et inclut l'éperon et les fossés. Apparemment, il n'est
pas réalisé. D'après le style du rendu, il pourrait être l'œuvre des frères
Eugène et Denis Buhler. Dans les années 1880, les Talhouët font appel à
Edouard André qui imagine des espaces plus différenciés. (1)
Éléments protégés MH : la façade François Ier et l'oratoire :
classement par arrêté du 27 février 1928. Le château, ainsi que son sytème
fortifié d'éperon et de douves, les maçonneries et balustrades des terrasses
et les murs de clôture du parc ; la totalité des communs (dont les deux
pavillons d'entrée ou porteries) : inscription par arrêté du 28 octobre
1992. Le tympan hydraulique avec sa roue motrice dans son abri et le canal
d'irrigation correspondant : inscription par arrêté du 7 février 2012.
château du Lude 72800 Le Lude, tél. 02 43 94 60 09, ouvert au public
du 1er avril au 30 septembre, sauf mercredis d’avril, mai, 1ère quinzaine de
juin et septembre, les jardins de 10h à 12h 30 et 14h à 18h et le château,
visites guidées de 14h 30 à 18h.
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