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C'est en
1491 que Janon de Dampierre fit construire, à Imbleville, le château de
Bimorel; cette habitation fut successivement appelée château du Vivier, puis
château de la Couture, puis château d'Imbleville, enfin château de Bimorel;
depuis les partages de famille de 1825, elle a toujours été désignée sous le
nom de château de Bimorel. Sur la porte de cette antique demeure
seigneuriale, se trouve l'inscription suivante placée, en 1491, par Janon de
Dampierre sur une pierre frontale aujourd'hui fort usée par le temps: "L'an
de grâce 1491, noble homme, Messire Janon de Dampierre, chevalier, seigneur
de Biville-la-Baignarde, et autres seigneuries, fit édifier cette maison. Et
était pour lors, sa femme, noble dame Marie de Gouvis. Leurs hoirs feront
leur devoir de prier pour eux". Au-dessus, étaient les armes de la famille
de Dampierre, et celles de la maison de Gouvis qui portait "de vair plein".
Janon de Dampierre vivait encore en 1530 et les anciens auteurs constatent
qu'il était seigneur de Biville-la-Baignarde, d'Imbleville, Thiédeville et
Eurville. Vers 1579, la seigneurie d'Imbleville et le château de Bimorel
furent partagés entre Christophe de Dampierre, petit-fils du fondateur de ce
château, et Charles de Mascarel. Les 5 et 6 décembre 1597, le château de
Bimorel fut mis en vente et acheté par Nicolas Baudry, avocat au parlement
de Rouen. Les titres d'acquisition se retrouvent encore dans les archives du
château de Bimorel. Depuis lors, le domaine d'Imbleville et le château de
Bimorel ont toujours été transmis par héritages.
Nous nous contenterons de mentionner rapidement, après les avoir relevés aux
archives du château, les partages de 1721, de 1744, de 1748, de 1795, qui
firent rentrer le domaine dans la famille de Dampierre, pour arriver aux
partages de 1801, de 1825, et de 1831. Le dernier représentant mâle de la
famille de Dampierre, Pierre-Eustache Le Vigner de Dampierre, mourut en
1795, laissant trois filles. En 1801, par suite d'arrangements de famille,
le château de Bimorel, avec ses dépendances, fut attribué à l'aînée des
demoiselles de Dampierre, qui avait épousé Alexandre-Marie-François Le Hayer,
marquis de Bimorel, propriétaire de son côté, de la terre de la
Croix-Saint-Leufroy, département de l'Eure, à trois kilomètres de Louviers.
La marquise de Bimorel mourut en 1823; son mari étant mort en 1831, de
nouveaux partages eurent lieu entre les cinq enfants issus du mariage. Le
château de Bimorel échut à Pierre-François Le Hayer, marquis de Bimorel, qui
racheta, de sa sœur, Madame la comtesse de Couvrigny, tout le lot de
celle-ci et reconstitua ainsi la terre d'Imbleville, telle qu'elle est
aujourd'hui. A sa mort, en août 1842, il ne laissa de son mariage avec
Antoinette-Sophie de Perier, qu'une fille unique, Corine-Félicie Le Hayer de
Bimorel, qui épousa M. Louis-Léonce de Folleville et lui apporta en dot le
château de Bimorel et la terre d Imbleville. De ce mariage, dissous le 3
juin 1860, par le décès dc Madame de Folleville, restait un fil unique, M.
Louis-André-Daniel de Folleville; sa sœur, Marie-Thérèse de Folleville,
était en effet, morte à l'âge de six ans, dès l'année 1858.
M. Daniel de Folleville, avocat à la Cour d'appel et doyen de la faculté de
droit de Douai, s'est donc trouvé, par héritage, depuis 860, propriétaire du
château de Bimorel et de la terre d'Imbleville. A la mort de sa grand mère
maternelle, Madame la marquise Le Hayer de Bimorel, née de Perier, il ajouta
en vertu de la volonté testamentaire expresse de la défunte, le nom de
Bimorel à son nom patronymique; et il a toujours été désigné, depuis, dans
tous les actes authentiques sous la dénomination de M. de Folleville de
Bimorel, ou encore de marquis Daniel de Folleville de Bimorel. Il se trouve
être, en effet, au début du XXe siècle, le seul et le dernier représentant
de ces deux anciennes familles, dont la notoriété fut considérable en
Normandie: l'on rencontre déjà des membres de ces deux familles, parmi les
gentilshommes normands qui accompagnèrent Guillaume le Conquérant, lors de
la conquête de l'Angleterre. Le château de Bimorel est, assurément, l'une
des habitations les plus gaies et les plus complètes du pays de Caux: il est
placé au bord de la rivière la Saâne, au milieu de bois touffus et au pied
de collines élevées. Il a subi, toutefois, depuis sa fondation en 1491, de
nombreuses et importantes transformations.
Au moment de sa construction à la fin du XVe siècle, le château de Bimorel
était un petit château fort, garni, de tous les côtés, de tourelles. A
l'entrée de la cour, à laquelle on ne pouvait accéder que du côté nord, se
trouvait un corps carré (sorte de poterne), flanqué de quatre tourelles, que
l'on traversait, après avoir passé le pont-levis jeté sur les fossés. Une
fois entré dans la cour, le visiteur avait, devant lui, du côté est, le
château proprement dit, avec la longue galerie conduisant à la chapelle
Notre-Dame; le dimanche, le public y était admis et y accédait par un
escalier près du château. Cette galerie servait de nef pour le public. En
dessous, se trouvaient des arcades; sous la chapelle, une grande cave
voûtée. En face du château, un vaste colombier. Du côté nord, la cour était
entourée de bâtiments de service qui allaient de la chapelle au pont-levis.
Du côté sud, un long mur crénelé allait du château à une tourelle vers
l'ouest. Le côté ouest était également fermé par des bâtiments de service.
Le tout était entouré de larges fossés remplis par la rivière de Saâne, qui
y entrait à l'angle sud-est, et en ressortait à l'angle nord-est. Tel était
le château de Bimorel au moment de sa construction en 1491. Depuis lors,
diverses modifications ont été apportées à l'aménagement de cette propriété
seigneuriale. L'une des premières fut le détournement de la rivière de Saâne
qui, par des crues fréquentes et considérables, en hiver, causait des
inondations, dont on avait peine à se défendre. L'étang ne fut plus alors
alimenté que par des sources prenant naissance sur la propriété.
Les tourelles de la façade ouest du château, ainsi que les bâtiments de
servi ce du coté du nord; disparurent successivement, sans qu'il soit
possible de préciser la date exacte de ces travaux. Vers le commencement du
XIXe siècle, le pont-levis et les fossés du sud furent comblés et
transformés en jardins. Ainsi, en 1842, le château de Bimorel avait perdu,
peu à peu, son cachet du moyen-âge. On l'accrut à cette époque de deux
pavillons, et les toitures furent refaites dans le style primitif. S'il nous
était permis d'exprimer un regret, comme archéologue, nous dirions qu'il est
fâcheux, à notre avis, que les générations successives, aient, par leurs
travaux et leurs modifications, profondément altéré le caractère féodal et
moyen âge du château de Bimorel. Nous aurions aimé notamment à retrouver,
encore debout, le pont-levis et les tourelles si pittoresques qui le
bordaient; le château aurait ainsi conservé un caractère tout à fait
original, surtout si, en même temps, l'on n'avait pas abattu plusieurs
tourelles, ainsi que le colombier et le mur crénelé qui se trouvait du côté
sud. Quoi qu'il en soit, et, avec son aspect plus moderne, le château de
Bimorel, parfaitement entretenu dans toutes ses parties et resté en
excellent état de conservation quant au corps principal de bâtiments, est de
l'aveu de tous les connaisseurs, l'une des plus jolies propriétés de la
vallée de la Saâne et du pays de Caux tout entier. Pour terminer notons que
dans un des murs de la nef de l'église se trouve une inscription portant
qu'en 1522 Janon de Dampierre, seigneur de Biville-la-Baignarde et autres
lieux, fonda une rente de 50 livres, au trésor de l'église d'Imbleville, à
charge de faire chanter des libéra devant l'autel Saint-Nicolas. Cette rente
a été reconnue et remboursée par M. Daniel de Folleville de Bimorel. Dans le
cimetière on remarque une jolie croix en grès et pierre, sur le pied de
laquelle est écrit: NOBLE HOMME PHLÈS DE DAMPIERRE A DONNÉ CESTE CROIX
MVCC. Au-dessus, sont les armes de la famille de Dampierre et de la
famille de Gouvis. Il est donc fort probable que cette croix fut donnée par
Christophe de Dampierre, petit-fils de Janon de Dampierre; car, précisément,
Christophe de Dampierre avait épousé Marie de Gouvis. L'on est, au reste,
réduit aux conjectures, en ce qui touche cette époque reculée. Ce qui est
certain, c'est que dès avant le moment de l'occupation anglaise, Imbleville
était l'un des apanages de la famille de Dampierre: Jusqu'à l'époque de la
Révolution de 1789, les seigneurs d'Imbleville ont conservé le droit de
présentation à la cure. On voit que la commune d'Imbleville, par son église
et par le château situé sur son territoire, est riche en souvenirs
historiques et qu'elle mérite d'attirer l'attention des archéologues et des
connaisseurs. Le château et le domaine patrimonial y attenant, appartenaient
au début du XXe siècle à M. Daniel de Folleville de Bimorel. (1)
Éléments protégés MH : le château et son parc : inscription par arrêté
du 1er février 1944 (2)
château d’Imbleville, route de la Vallée de la Saâne, 76890 Tôtes
(Imbleville), jardins ouverts au public de mi-juin à août, le jeudi,
vendredi, samedi et dimanche de 11h à 13h et de 14h à 18h. Les jardins ont
été réalisés entre 1920 et 1950 par la famille Saint Rémy.
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Crédit photos :
Louis-Fabrice Jean
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