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Dans ce ravissant petit château
que Barbey d’Aurevilly baptisa "le Palais des premiers songes" naquit en
1810 Maurice de Guérin. Humble professeur à Stanislas, il évolua dans ses
écrits du christianisme fervent au romantisme exalté, menant une vie retirée
malgré l’admiration dont il faisait l’objet parmi certains des écrivains
parisiens les plus éminents de son temps. Il écrivit Le Centaure et La
Bacchante, magnifiques poèmes en prose nés sans aucune influence littéraire
et publiés après sa mort prématurée, à vingt-neuf ans. Georges Sand permit
sa reconnaissance posthume en publiant ses textes dans La Revue des Deux
Mondes. C’est également au Cayla que naquit sa sœur Eugénie, morte comme lui
de phtisie et célèbre pour les intéressants souvenirs qu’elle à laissé sur
la vie des hobereaux dans le Tarn au XIXe siècle. Lieu magique s’il en est,
Le Cayla resta dans la même famille depuis le XVe siècle, date à laquelle
les Guérin prirent possession de cette terre, jusqu’à ce que le dernier de
la descendance à habiter le château vende celui-ci au Conseil général du
Tarn, pour que l’on y crée un musée. Les Guérin avaient pour armes "De
gueules à six besans d'argent, 3, 2 et 1, au chef d'azur" avec cette devise
"Omni exceptione mayjores". Eugénie de Guérin fait de manière très optimiste
remonter les origines de sa race au IXe siècle, et lui attribue une
ascendance italienne. De manière plus patente, les titres de noblesse des
Guérin furent confirmés par jugement souverain prononcé à Montpellier par M.
de Bezons, intendant de la province de Languedoc, le 26 novembre 1668.
Malheureusement, en 1793, durant une visite domiciliaire de la Société des
Amis de la Constitution de Cahuzac-Sur-Vère, l’acte fut brûlé en même temps
que tous les portraits de famille. Le grand-père d’Eugénie et de Maurice,
Antoine, fut élu maire d’Andillac en 1790 par les révolutionnaires. Trois
ans plus tard, ces mêmes révolutionnaires demandèrent la mise en accusation
de ce gentilhomme paysan. Comme son frère Roch, curé de Cahuzac, il réussit
à se cacher dans la forêt de la Grésigne. Entre temps, son fils Joseph avait
émigré en Italie pour ne rentrer au pays qu’en 1797. Les Guérin étaient
alors si pauvres que l’année suivante, lorsque la Loi appela cinq classes de
conscrits et que l’on voulut "acheter un homme" pour remplacer Joseph au
régiment, Antoine ne possédait hélas pas les cent écus nécessaires. C’est
une tante, madame de Sainte-Colombe, qui avança la somme. À la Restauration,
Joseph de Guérin fut élu maire d’Andillac, et maire légitimiste comme la
plupart de ses collègues de l’arrondissement. Il se trouva veuf en 1819 avec
la charge de quatre jeunes enfants, dont Eugénie et Maurice.
La gentilhommière telle qu’on peut l’admirer aujourd’hui s’est développée
autour de la tour pigeonnier contenant l’escalier, contemporaine de
l’installation des Guérin sur cette terre, au XVe siècle. Commencé au XVIe
siècle, le logis fut agrandi au cours des deux siècles suivants pour donner
la longue façade blanche dominant le vallon et la campagne gaillacoise. La
cuisine, parfaitement conservée, est une grande salle basse qui occupe tout
l’ouest du rez-de-chaussée. Le journal d’Eugénie nous décrit la famille se
réunissant là pour la veillée. L’escalier à vis conduit au premier étage où
l’on découvre la chambre de Joseph de Guérin, la salle à manger avec sa
lourde cheminée de stuc hélas remaniée au XIXe siècle puis, tout au bout de
la maison, vers l’est, l’on descend par trois marches dans une petite pièce.
Il s’agit de la chambre d’Eugénie, dans laquelle Maurice est mort. Les
communs, quant à eux, furent construits au XIXe siècle mais s’intègrent
parfaitement à ce beau manoir en pierre blonde aux murs envahis par le
lierre. Entouré d’une nature apaisante, Le Cayla fait partie de ces trop
rares lieux qui semblent touchés par la grâce. Aujourd'hui, le bâtiment,
transformé en château-musée, est consacré à Maurice de Guérin, à la
littérature et à la peinture. (1)
château du Cayla 81140 Andillac, tél. 05 63 33 90 30, jardin libre
d'accès, musée ouvert : janvier et février le samedi et dimanche de 14h à
17h. De mars à avril et de novembre à décembre du mercredi au dimanche de
14h à 17h. De mai à juin et de septembre à octobre tous les jours (sauf le
mardi) de 10h à 12h et de 14h à) 18h. En Juillet et Aout tous les jours de
10h à 12h30 et de 14h à 19h.
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