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Le
domaine de la Cigogne ou "Sigogne" apparaît pour la première fois dans les
archives vers l'an 1100. Un certain Rainaldus de Cigunnia est alors
mentionné. La Cigogne semble ensuite désigner un hameau. En 1459, Jehan Cadu,
juriste demeurant à Poitiers, achète à Huguet Sabourin, charpentier à la
Sigogne, une terre relevant du commandeur de Beauvoir et située près du
bourg de Mignaloux. C'est là qu'aurait été construit le château de la
Cigogne, au XVIe siècle. Celui-ci est alors le siège d'un fief initialement
appelé "la Réau" ou "la Guichardière", comme le précisent deux aveux rendus
par le seigneur de la Cigogne en 1617 et 1627. Le domaine appartient au XVIe
siècle à Antoine Regnault, écuyer, seigneur de Traversay, conseiller au
parlement de Bretagne, puis à son probable gendre, Jacques Porcheron,
écuyer, seigneur de la Cigogne, époux de Julie Regnault. Le 18 mars 1598,
Jacques Porcheron vend la Cigogne à Maurice Roatin, juge au présidial de
Poitiers, maire de Poitiers de 1594 à 1595. Roatin achète par ailleurs les
métairies de Sainte-Jeanne et de la Péraudrie. La Cigogne comprend donc
désormais non seulement le futur château et la métairie principale ou
"grande métairie" qui le jouxte, mais aussi ces deux métairies voisines. A
Maurice Roatin succède son fils, Pierre Roatin, seigneur de la Cigogne,
conseiller et juge au présidial de Poitiers. Comme son père, il est maire de
Poitiers en 1625. C'est lui qui en 1617 et 1627 rend aveu pour son fief de
la Cigogne. Et c'est probablement lui qui fait construire le château tel
qu'on peut encore l'observer aujourd'hui en grande partie. Selon l'extrait
de l'aveu et dénombrement rendu par Pierre Roatin, seigneur de la Cigogne, à
l'abbé de la Réau commendataire de l'abbaye de la Réau, le 8 décembre 1627,
il est noté que le "fief de la Sigougne entiennement appelé la Réau et la
Guichardière consistant en ma maison noble et hôtel principal de la Sigougne
aveq ses appartenances de jardins, bois tant en haute futaye que taillis,
garennes, vignes, prés entiens et terres labourables qui sont autour de la
ditte maison avec les bastiments, granges et cours de la grande mestayrie de
la Sigougne, le tout entiennement appelé la Cousturie, le Cloux et Champs à
Lamy et le Loup Resnier, joignant ensemble et renfermé de fossés"; plus
"toutes les appartenances et dépendances de ma ditte grande mestayrie
ensemble ma mestayrie de la Peraudrye size audit village de la Sigougne aveq
toutes ses appartenances qui sont ès environs de la paroisse de Mignaloux".
En 1662, c'est Jacques Halus, conseiller et secrétaire du roi à Poitiers,
qui possède la Cigogne. Selon l'aveu et dénombrement rendu par Jacques Halus,
sieur de la Cigogne, au commandeur de Beauvoir, le 2 janvier 1662, il est
stipulé que "la maison noble de la Cigogne consistant en un grand corps de
logis, salle basse, chambres hautes et basses, cours, coursoires, écuries et
autres appartenances, jardins, prés, bois de futaie, taillis, terres,
vignes, maison et métairie de la Cigogne avec ses appartenances de maisons,
granges, étables, cours, coursoires et jardins". Parmi les confrontations,
on note le chemin qui mène aux deux autres métairies et borderies de la
Cigogne appelées la Perauderie et Saint-James. Le tout est la propriété en
1676 de Jean Pain, seigneur de la Fenestre. Le 24 septembre 1682, la Cigogne
est saisie pour dettes au détriment des héritiers Pain. Selon l'extrait du
procès-verbal de visite de la Cigogne "la maison consiste en un grand corps
de logis couvert d'ardoises et de tuiles plates, composé de deux pavillons à
chaque bout dans lequel il y a plusieurs chambres basses, chambres haultes,
greniers pour le dessus, grande salle, cuisine, galerie, grande et petite
écuries, cour, cellier, étables, granges, four, fourniou, deux colombiers
fait en tourettes, puy, dans la ditte cour grand portail pour entrer dans la
cour et corps dudit logis, et une porte ronde à côté, plus un petit jardin
renfermé de murailles touchant au dit corps de logis, plus un autre grand
jardin ou l'on entre, sortant du petit aussi renfermé de murailles". C'est
alors probablement Jacques II Chauvelin, seigneur de Beauregard, militaire,
qui rachète le domaine. En 1694, il est dit seigneur de la Cigogne. Son
petit-fils, François-Sylvain Chauvelin, inspecteur des haras, meurt à la
Cigogne le 20 août 1766, à 73 ans, tout comme son épouse, Marie-Catherine de
Nuchèze, le 7 février 1748.
Le 3 mai 1769, la Cigogne est vendue à Xavier Baron, seigneur de Vernon,
qui, accablé de dettes, la revend le 2 janvier 1779 à Sara Creagh, veuve du
baron irlandais Valentin Keating. La veuve Keating s'installe au château de
la Cigogne, mais c'est à Poitiers qu'elle meurt le 13 mai 1793. Deux de ses
enfants et héritiers ayant émigré, la Cigogne est partiellement saisie comme
bien national et vendue. Les autres héritiers, qui n'ont pas émigré,
rachètent ensuite la part saisie. La Cigogne reste donc, en indivision, dans
les mains de la famille Keating, notamment de Gualfrid ou Geoffroy Keating,
premier maire de la nouvelle commune de Mignaloux-Beauvoir de 1800 à 1802,
et de son frère Thomas, militaire, qui habite la Cigogne. L'indivision cesse
en 1803 lorsque les héritiers Keating vendent le domaine à M.
Marchand-Duchaume, ancien procureur à Poitiers. En février 1818, la Cigogne
est saisie pour dettes et vendue à la famille Chartier. Selon l'extrait du
procès-verbal de saisie de la Cigogne, le 9 février 1818, il est noté: "une
barrière ouvrant à deux battants soutenue par deux montants en pierre de
taille. Cette ouverture donne sur le chemin qui va de Mignaloux à Anxaumont
à droite. Ensuite vient une cour de métayer pour l'exploitation de la
métairie de la cour. A droite en entrant dans cette cour se trouvent trois
petits toits avec chacun leur fermeture et un four. Ensuite le logement du
métayer avec une porte, une fenêtre et fermetures. Grenier par-dessus avec
fenêtres et fermetures. Dans lequel logement de métayer habite le nommé
Chauvigneau chargé d'exploiter la métairie de la cour. Vient après et
toujours à droite un grand toit à brebis, un petit cuvier avec chacun leur
porte de fermeture, plus une porte avec fermeture pour entrer dans un
jardin. A gauche entrant dans la cour dont il s'agit est une étable à boufs
avec deux portes dont la seconde ouvre à deux battants. Sur cette étable est
un fenil dont l'entrée se trouve dans la grange.
Ensuite de la cour ci-dessus désignée est un mur de séparation au milieu
duquel se trouve une barrière à deux battants soutenue par deux montants en
pierre de taille, par laquelle barrière on entre dans une cour appelée la
cour du maître. A droite en entrant dans cette cour est une tourette
couverte en ardoises dont le haut est destiné à faire un colombier et le bas
une buanderie dans laquelle on entre par une porte qui a sa fermeture.
Ensuite se trouve un petit enfoncement dans le mur ou est un puit. Plus loin
et toujours à droite est une arcade qui conduit dans une basse cour dans
laquelle à droite en entrant sont deux petits toits avec chacun leur porte
et fermeture. Vis-à-vis l'arcade qui sert d'entrée à cette cour, est une
grande barrière qui donne dans la renfermée de la garenne. A droite de cette
barrière en entrant par la garenne est un grand hangar. Ensuite a un cuvier
avec porte et fenêtre et leurs fermetures. A gauche en entrant dans la dite
basse cour est un toit à brebis avec porte et fermeture. Plus loin entre le
toit et le cuvier est une porte avec fermeture qui conduit dans le jardin de
la maison de maître. Dans la cour de maître et après l'arcade est une grange
ayant une petite porte ouvrant à deux battants et deux fenêtres dont une de
chaque côté de la porte, le tout avec fermeture. Viens après et toujours à
droite un logement de métayer auquel est une porte et fermeture. Ledit
logement habité par le nommé Bertaud. A gauche en entrant dans la susdite
cour de maître est une tourette pareille à celle de droite, dans le haut de
laquelle est un colombier et dans la base sont des bâtiments où on entre par
une porte garnie de fermeture. Une grange dont l'ouverture est vis-à-vis
l'arcade qui conduit à la basse cour dont il a été ci devant parlé, la
fermeture de cette grange n'est pas en bon état. Ensuite sont deux cuviers
avec chacun leur porte et fermeture, et fenil par dessus aussi avec fenêtre
et fermeture. Vient ensuite toujours à gauche un bâtiment attenant à la
maison de maître avec une porte et sa fenêtre aussi avec fermeture et deux
autres croisées hautes, le bout dudit bâtiment servant de cuisine.
A l'extrémité de la susdite cour de maître et vis-à-vis avec l'entrée est un
escalier en pierre qui conduit sur un plafond, le long duquel est un mur
d'appui du côté de la cour. Et de l'autre est la maison de maître qui
consiste en un corps de logis couvert en tuiles plates avec un pavillon de
chaque côté couvert en ardoise. A chaque pavillon sont trois fenêtres dont
deux hautes et une basse, plus au pavillon de droite en entrant une petite
fenêtre et un oeil-de-boeuf. Au corps de logis est une porte ouvrant à deux
battants et cinq croisées dont une haute et quatre basses. Les susdits
bâtiments, maison de maître, de colon, servitudes et cour ci-dessus
contiennent à peu près un hectare trente sept et sont couverts de tuiles
courbes à l'exception de ceux désignés ci-dessus. Derrière la susdite maison
de maître est un jardin divisé en jardins haut et bas par un mur de
séparation au milieu duquel est une ouverture avec deux escaliers. Ledit
jardin contenant en totalité environ cinquante-trois ares. Au bout de ce
jardin et vis-à-vis de la maison de maître est une barrière ouvrant par deux
montants en pierre de taille qui conduit du jardin dans un grand enclos
appelé le renfermé de la garenne, entouré de toutes parties par un fossé,
buisson, arbres, têtards et de haute futaies. A droite en entrant par la
première barrière située sur le chemin de Mignaloux à Anxaumont à droite et
qui sert de principale entrée au domaine de la Cigogne et notamment à la
cour de la métairie, est un jardin dans lequel on entre par la petite porte
dont est ci devant parlé et qui se trouve immédiatement après celle du petit
cuvier existant dans ladite cour après le logement du métayer. A gauche de
ladite cour est un autre jardin qui a son entrée sur le chemin de Mignaloux
à Anxaumont à droite, ledit jardin dépend aussi de la métairie de la cour,
confronté d'une part à la grange et au mur de la métairie de la cour,
d'autre au chemin de Mignaloux à Anxaumont à droite, et au renfermé de la
garenne".
Dès le 16 octobre 1818, le château passe à Anne-Marie-Geneviève de Tudert.
Il faut noter que celle-ci est par ailleurs propriétaire de l'ancienne
église et de l'ancien cimetière de Mignaloux, qu'elle donne à la paroisse en
1822. A la même époque, elle achète la métairie de l'ancien prieuré de
Mignaloux. A sa mort en 1830, la Cigogne et les métairies qui en dépendent
sont léguées à son neveu, Emmanuel Hunault de la Chevallerie. Le 12 février
1846, il la revend à Hippolyte Bain de la Coquerie (1812-1876). C'est lui
qui procède à des travaux au logis en 1853. En 1869, il obtient le
déplacement du chemin de Mignaloux à la vallée des Touches, qui passait au
pied du château, déplacé vers l'ouest, là où se trouve aujourd'hui la route.
Hippolyte Bain de la Coquerie transmet la Cigogne à sa fille Gabrielle et à
son gendre, Hilaire Parent de Curzon. Leurs descendants sont aujourd'hui
toujours propriétaires de la Cigogne. Présent sur des vues du début du XXe
siècle, le plan d'eau n'existe plus aujourd'hui. L'aile nord des communs a
disparu semble-t-il dès le XIXe siècle. Il subsiste des ouvertures murées
qui permettaient de passer de cette aile nord vers le logis. La
tour-pigeonnier qui terminait l'aile nord s'est effondrée en 1936 et n'a pas
été reconstruite. Le 16 janvier 1994, un incendie a détruit la toiture et
une partie de l'intérieur du château. L'ensemble a depuis été reconstruit à
l'identique.
Le domaine de la Cigogne se situe à l'est de la route reliant le bourg de
Mignaloux à la Vallée des Touches. Il se compose d'un logis à l'est, d'une
aile de communs au sud et, derrière celle-ci, encore plus au sud, d'une
ancienne métairie. Le logis comprend un corps central flanqué de deux
pavillons latéraux dans le même alignement. Surmontés de hauts toits à
croupe et de chacun deux girouettes représentant des dauphins, il sont
couverts en ardoise. Le pavillon nord ouvre vers l'ouest, sur la cour, par
une travée qui se prolonge par une lucarne à deux fenêtres. Le même type de
lucarne se retrouve sur l'autre pavillon, sur la travée de droite, puisque
ce pavillon comprend cette fois deux travées. L'autre travée comporte un
oeil-de-boeuf au rez-de-chaussée. Ainsi encadré, le corps principal du logis
est couvert d'un toit à croupe qui allie la tuile plate au centre et
l'ardoise sur les pourtours. La façade ouest, sur la cour, est ordonnancée.
Elle ouvre par cinq travées. La travée centrale est surmontée par une
lucarne identique à celles des pavillons. Cette travée comprend la porte
d'entrée, accessible par un perron dont les balustres sont faites d'un
empilement de briques plates roses. L'encadrement de la porte est mouluré,
de même que le linteau qui repose sur des. La façade est, côté parc, est
plus sobre, bien que rythmée de la même façon. Les pavillons sont éclairés
chacun par deux travées, sans lucarne. Le corps de logis ouvre sur le parc
par là encore cinq travées, avec une lucarne au-dessus de la travée
centrale. Celle-ci comprend une porte. A l'intérieur du logis, différentes
pièces étaient ornées de lambris. Une cheminée estimée de la fin du 17e
siècle, se trouvait dans le salon du pavillon nord. La cour qui s'étend à
l'ouest du logis était encadrée par deux ailes, toutes deux se terminant par
des pigeonniers ronds et à toit conique. L'aile sud, la seule encore en
place, est percée d'une porte charretière en plein cintre qui donne accès à
la seconde cour située au sud, celle de l'ancienne métairie. Les bâtiments
de celle-ci s'étendent au sud de cette seconde cour.
Entre le pigeonnier et la porte charretière de l'aile sud, on observe un
puits ménagé dans l'épaisseur du mur. Toutes les lucarnes du château sont
surmontées d'un fronton triangulaire. La lucarne centrale de la façade est,
côté parc, est surmontée d'une plaque de marbre encadrée par des ailerons à
volutes et elle-même surmontée d'un fronton triangulaire. Sur les deux
façades du logis, les baies des quatre travées latérales à l'étage sont
ornées d'un arc en chapeau de gendarme. Dans une des pièces du château, on
observait en 1978 un trumeau de glace pris dans des boiseries et portant une
toile peinte du 18e siècle. Elle représentait une scène de danse. Dans le
château se trouvait aussi une pierre sculptée dont la partie basse manquait,
et représentant des armoiries: un blason portant deux fleurettes, soutenu
par deux lions et surmonté par un heaume. Il s'agissait peut-être des
armoiries de Xavier Baron de Vernon, propriétaire de la Cigogne de 1769 à
1779. La date 1739 est inscrite sur le linteau de la baie centrale à l'étage
de la façade est du logis. La date 1853 est inscrite sur celui de la lucarne
centrale de la même façade. Les initiales entrelacées MD, celle de
Marchand-Duchaume, propriétaire au début du XIXe siècle, apparaissent sur
les garde-corps des baies d'étage des pavillons latéraux, côté ouest. La
date 1853 est inscrite sur la lucarne centrale de la façade est. Cette
lucarne porte aussi une plaque de marbre sur laquelle on peut lire:
PERIGRINI SUMUS SICUT PATRES NOSTRI, soit "Nous sommes de pèlerins comme nos
pères". (1)
Éléments protégés MH : les façades et les toitures du logis et des communs :
inscription par arrêté du 26 mai 1986.
château de
la Cigogne 86550 Mignaloux-Beauvoir, propriété privée, ne se visite pas.
Ce site recense tous les châteaux de France, si vous possédez des documents
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constatez une erreur, contactez nous. Propriétaire de cet édifice, vous
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A voir sur cette page "châteaux
de la Vienne" tous les châteaux répertoriés à ce jour
dans ce département. |
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