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Dès l'époque gallo-romaine,
l'emplacement approximatif du château de Migné-Auxances, en fond de vallée
et au bord de l'Auxance, a pu être occupé par une villa. Depuis sa
construction par une branche de la famille des seigneurs de Lusignan, vers
la fin du XIe siècle, le château connaît de nombreuses mutations de
propriété, accompagnées dans certains cas de reconstruction. Le donjon
carré, de conservation remarquable, ainsi que quelques parties remaniées du
château, témoignent encore aujourd'hui des phases médiévales de la
construction. Au Moyen Age, le seigneur y a droit de haute, moyenne et basse
justice et sa juridiction relève de la Tour de Maubergeon à Poitiers. Le
fief d'Auxances est aussi désigné par l'appellation "tour et forteresse des
Ances" en 1531. Devenu châtellenie en 1589, il est élevé en comté vers 1640
et le demeure jusqu'à la Révolution. Une première habitation fortifiée est
mentionnée dans une charte du XVe siècle comme étant l'œuvre du petit-fils
d'Hugues II de Lusignan, appelé Foucault, sire de la Roche, ayant vécu
durant la seconde moitié du XIe siècle. Foucault est le premier de la
dynastie des La Roche-Foucault qui reste propriétaire du domaine d'Auxances
jusqu'en mai 1434. Cette place fortifiée consiste, aux XIe-XIIe siècles, en
une tour carrée ou donjon de trois étages comme l'attestent les traces de
solives actuellement observables. Le rez-de-chaussée est alors accessible de
l'intérieur par le premier étage et de rares petites baies s'ouvrent à
partir du deuxième étage. Foulques de La Roche-Foucault étant sans
descendance, le château est vendu à Jean Rabateau, magistrat et seigneur de
La Caillère. Il comprend alors, outre le donjon ancien, une ou plusieurs
fausses-braies, des fossés et une basse-cour, mais l'état de l'ensemble se
dégrade. Pour y remédier Jean Rabateau obtient de Charles VI, le 15 octobre
1434, la permission de faire réparer et fortifier la tour d'Auxances ainsi
que ses abords. La seigneurie est transmise en dot à sa fille Denise dont
l'époux, Thomas de Vivonne, chevalier, seigneur de Fors et de Saint-Gouard,
devient seigneur d'Auxances en 1450.
Une vingtaine d'années plus tard, en 1472, la seigneurie d'Auxances est
vendue, en même temps que celle de Sigon, à Jean Mérichon. Ce nouveau
propriétaire est seigneur d'Uré et des Halles de Poitiers, chambellan du roi
Louis XI, et gouverneur de La Rochelle. Un acte adressé par le roi à Jean
Mérichon, en 1474, lui accorde de nouveau privilèges concernant le droit
d'usage et d'exploitation du bois ; le bénéfice qui en est tiré est destiné
à bâtir et édifier l'hôtel d'Auxances et les halles de Poitiers qui lui
appartiennent. Des deux propriétaires du XVe siècle, Jean Rabateau et Jean
Mérichon, on ne sait lequel a réalisé des travaux de grande envergure sur le
château. La surélévation du donjon, qui reçoit un quatrième étage surmonté
d'un chemin de ronde fermé sur mâchicoulis et une toiture en ardoise, est
plutôt attribuée à Jean Rabateau. Celui-ci fait également construire la tour
d'escalier au nord-est pour desservir tous les niveaux. Le colombier dans le
parc peut dater de cette époque puisque le droit de "fuies" est mentionné
dans l'acte de vente à Jean Mérichon. Une autre transmission en dot de la
seigneurie amorce le long règne de la famille de Montbron sur le domaine d'Auxances,
suite au mariage en 1561 de Guyonne Mérichon, fille de Jean, avec Jean de
Montbron. Un siècle plus tard, en 1660, le domaine est vendu à la famille
Derazes, seigneur de Verneuil, dont les armoiries figurent sur l'ouvrage
d'entrée du château. Cette famille noble compte de nombreux magistrats
exerçant à Poitiers.
Du XVIe à la fin du XVIIIe siècle, des bâtiments sont construits autour du
donjon, certains encore visibles malgré les remaniements postérieurs. Après
le décès de Charles Alexis Marie de Razes d'Auzances en 1785, le château
reste en indivision entre son épouse et ses deux filles. L'une d'elles,
Marie Alexandrine de Raze, épouse de Cugnac, en devient ensuite
propriétaire. Un acte de 1805 précise que la propriété de Louis Philippe de
Cugnac comprenait le domaine d'Auxances (château et moulin), les métairies
de la Picoterie et de Limbre, le domaine de Verneuil (métairie et moulin) et
des domaines sur d'autres communes. Jules Emilien de Cugnac, son fils, vend
le château le 25 mai 1811 à Joseph Bernard Dupont, banquier et député de la
Vienne. En 1839, le domaine appartient à Charles Dupont et le plan cadastral
montre alors un édifice en équerre flanqué de quatre tours d'angle comme
aujourd'hui. Le donjon est à l'époque pris dans des corps de bâtiment qui
ont disparus. L'aile nord-est est bordée de douves sur deux côtés, avec un
pont-levis à l'extrémité sud-est. Des dépendances, à l'est, forment une
grande avant-cour dont il reste l'ouvrage d'entrée et une partie des
constructions qui lui sont accolées. La fuie au nord, dont il subsiste des
vestiges, est signalée. Ensuite le château passe entre les mains de
plusieurs propriétaires, dont le scientifique et inventeur Henri Coanda, de
1941 à 1957. Puis la communauté du Mont-Carmel de Poitiers, suite à la
cession de son couvent à l'université de Poitiers, acquiert la propriété
pour s'y installer. Des transformations sont entreprises entre 1958 et 1960,
sous la direction de Madeleine Ursault, architecte. L'aile nord-ouest est
prolongée en retour d'équerre par la construction d'un pavillon à usage
d'habitation et d'accueil. Des baies sont percées ou modifiées et, dans
l'aile nord-ouest, est aménagée une chapelle avec de hautes baies à vitraux.
Des galeries couvertes sont accolées au bâtiment principal côté cour. En
juin 1960, a lieu l'inauguration du monastère et les sœurs carmélites
s'approprient le donjon, exempt de remaniements, en lui donnant un nouveau
sens théologique.
Le château est situé en fond de vallée, en retrait du bourg de Migné, dans
une boucle de la rivière l'Auxances. Au Moyen Âge, il était donc isolé du
bourg et le donjon permettait de contrôler le passage à gué de la rivière.
Dans son écrin de verdure, l'édifice actuel, sans unité architecturale, est
constitué de bâtiments construits en équerre autour d'un haut donjon carré
décentré. Au nord sont les vestiges d'un colombier et, au sud, un ouvrage
d'entrée et des communs accolés. Le domaine est ceint de murs et de haies
arbustives et bordé, au nord-ouest, par la rivière. Le donjon de plan carré
comprend actuellement six niveaux. Chaque élévation est rythmée par trois
contreforts plats et des contreforts d'angle qui accusent tous un léger
retrait au-dessus du troisième niveau. Une large échauguette est en surplomb
au sud et une tour d'escalier est accolée au nord-est. Celle-ci présente des
vestiges de baies murées et des traces d'arrachement permettant de supposer
que le donjon était relié aux bâtiments qui l'entourent. Les quatre faces du
donjon sont percées de baies réparties sans ordre. Le premier niveau,
partiellement en sous-oeuvre, est dépourvu de fenêtre. Le deuxième niveau
présente une petite baie rectangulaire sur la face sud-ouest, mais à
l'origine il était aveugle. Le troisième niveau présente quatre petites
baies en plein-cintre, ébrasées à l'intérieur: deux symétriques sur la face
sud-ouest, une sur la face sud-est à gauche et une sur la face nord-est à
gauche. Au quatrième niveau est percé une petite baie rectangulaire récente
au sud-est. Le cinquième niveau a été remanié. Son mur nord-est est percé
d'une fenêtre à croisillon du XVe siècle, aujourd'hui presque entièrement
murée, et une baie rectangulaire s'ouvre au sud-est. Au sixième niveau se
trouve le chemin de ronde sur mâchicoulis ouvert de petites baies carrées et
de meurtrières intercalées, avec un décor de moulures et d'ornements
géométriques. La tour d'escalier, hormis sa partie comprise dans le chemin
de ronde, est percée de trois baies inégales dont l'une, murée, établissait
une liaison avec un autre bâtiment disparu. Les toitures coniques de
l'échauguette et de la tour se distinguent du couvrement central à quatre
pans. L'ensemble est couvert en ardoise. A l'intérieur les niveaux ont été
modifiés. Dans le rez-de-chaussée, un escalier en pierre descend vers un
couloir muré. Au troisième et au quatrième niveaux une cheminée est adossée
au mur nord-ouest. Le cinquième niveau communique avec l'échauguette sud et
au dernier niveau sous charpente sont, tout autour, les orifices de tir des
machicoulis.
Le donjon est encadré par deux corps de bâtiment perpendiculaires. Celui qui
se trouve au nord-est est flanqué de trois tours. Deux encadrent le pignon
sud-est dont la partie centrale est plus récente. Ces deux tours présentent
une corniche à la base de leur toiture conique couverte en ardoise. Elles
sont percées d'une travée de trois fenêtres récentes alors que d'autres
fenêtres on été murées. La partie centrale du pignon présente une travée de
quatre fenêtres à meneaux, traverses et appuis saillants moulurés, avec un
décor sculpté au-dessus (imitant le style du XVe siècle). Des cartes
postales anciennes figurent des éléments aujourd'hui disparus: créneaux
d'ornement, élément saillant sur la tour gauche, pierres saillantes en
hauteur sur la tour droite et soubassement d'un pont-levis. La construction
de la partie centrale est postérieure à 1838, date du plan cadastral
signalant le pont-levis qui implique une ouverture entre les deux tours pour
entrer dans le logis seigneurial. L'élévation nord-est, couronnée par une
corniche, a été percée de sept travées de fenêtres vers 1960 pour éclairer
un sous-sol, un rez-de-chaussée surélevé et un étage carré. La partie
gauche, est plus haute et présente, outre une travée de baies, une petite
baie en plein-cintre aux premier et deuxième étages, rappelant certaines
baies du donjon. Le plan cadastral de 1838 atteste la présence de douves,
aujourd'hui comblées, devant cette aile nord-est, côté extérieur.
Dans l'angle saillant formé par les corps de bâtiment nord-est et
nord-ouest, se trouve une grosse tour percée d'une meurtrière et à deux
travées de fenêtres, couverte d'un toit conique avec souche de cheminée. Le
corps de bâtiment nord-ouest ouvrant côté rivière présente trois parties à
couvertures distinctes en alignement (la partie centrale légèrement plus
haute est couverte en tuile plate, les autres en ardoise) et une tour
d'angle à l'ouest. Il se compose d'un niveau de soubassement, d'un
rez-de-chaussée surélevé et d'un étage. La façade est rythmée par neuf
travées de baies, plus trois baies étroites et hautes à droite éclairant la
chapelle. Contre la partie centrale est un escalier droit à balustrade,
conduisant à une ancienne fenêtre convertie en porte. A gauche dans le
niveau de soubassement s'ouvre aujourd'hui une porte. A droite la tour
d'angle est percée de petites baies. A l'intérieur, la partie centrale est
desservie par un escalier en pierre et la partie sud-ouest a été transformée
en chapelle. En retour au sud-ouest se trouve le corps de bâtiment d'accueil
construit en 1960, à murs en moellons apparents et couvertures d'ardoise.
Les façades sur cour des deux corps de bâtiments perpendiculaires sont très
remaniées et une galerie de cloître a été accolée. L'extrémité est de l'aile
nord-est est débordante sur la cour et plus profonde que le bâtiment qui la
flanque. Cette partie présente une travée de baies et se compose d'un
rez-de-chaussée, avec une grande baie moderne en plein-cintre, et de deux
étages carrés. L'aile nord-ouest comporte une partie débordante sur cour,
avec deux contreforts plats en pierre de taille et une ornementation
géométrique, rappelant celle du donjon, à la base du toit. Sur des vues
anciennes on peut voir un oculus sur le mur sud et la poursuite de
l'ornementation géométrique vers le sud-ouest.
Au sud de la grande cour se trouve l'accès au domaine, avec un ouvrage
d'entrée constitué de deux tours présentant les mêmes créneaux d'ornement et
le même décor géométrique que ceux visibles sur le logis. Chaque tour
présente des meurtrières et des armoiries sculptée; celle de gauche est
percée d'une baie rectangulaire au rez-de-chaussée. Entre les tours s'ouvre
un portail en plein-cintre surmonté de créneaux portant d'autre armoiries
sculptées. L'arrière de chaque tour est tronqué et constitué d'un mur plat
couvert d'une toiture en tuile qui ne dépasse pas les trois-quarts de la
hauteur. L'arrière de la tour gauche est percé d'une travée de deux baies,
dont une porte large. A l'arrière de la tour droite est accolée un logement,
en rez-de-chaussée avec comble à surcroît, couvert en tuile. La façade
présente deux travées plus une porte centrale surmontée d'une croix peinte.
Les deux fenêtres du rez-de-chaussée sont remaniées avec un appui saillant.
Des dépendances sont accolées à l'arrière et dans le prolongement. Au nord
du château sont les vestiges d'un pigeonnier de plan circulaire et, à
l'ouest, ceux d'un pont enjambant l'Auxances.
Éléments protégés MH : le château, sauf partie classée : inscription par
arrêté du 18 février 1927. Le donjon : classement par arrêté du 10 février
1994.
château d'Auxances 86440 Migné-Auxances, propriété d'une association
cultuelle, visite des extérieurs uniquement.
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