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Peut-être construit à la place d'un premier hébergement noble dont il ne
reste pas de traces, le château de la Brulonnière est construit à partir de
1465, date à laquelle Guichard Brulon rachète les droits féodaux et les
droits de haute, moyenne et basse justice de la Tour-aux-Cognons (Civaux)
qu'il fait transposer sur son fief de la Brulonnière. Extrait des Lettres du
roi Louis XI, autorisant la fortification de la Brulonnière (juillet 1472).
Louys par la grâce de Dieu, Roy de France, "Scavoir faisons à tous présens
et advenir, nous, avoyr receue l'humble supplicacion de noustre cher et bien
amé Guischard Brulonn escuyer, seigneur de Plaisance, assis au comté de
Poictou, en la chastellenye de Montmorillon, et de la Bruslonnière, assis au
comté de la Basse Marche, en la chastellenye de Calaix, en la paroisse de
Peressac, contenant que puys un certains temps en ça, il a acquis de feu
Guyot de Sainct Savyn et de Mathelyn son fils, tous et chascuns les hommes,
subjects, cens, rentes, dommaine, droictz de justice et de guetz qu'ilz
avoient es paroisses dudict Peressac et de Moussac-sur-Vienne qui
vulgairement et d'ancienneté s'appelle la terre de la Tour-aux-Connions. Et
depuys pour ce que son houstel de la Brullonnière estoyt lieu noble, bien
ancien et tenu de notre très chièr et très amé cousin, le duc de Nemours, à
foy et hommage à cause de sa chastellenye dudict Calaix; la quelle chose
veue et à plain oye par noustre dict cousin, il luy donna congé de
fortiffier son dict houstel de la Brullonnière de murailles, murectes,
tours, cannonières, foussez, pontz-leviz, et autres fortifficacions et
emparements neccessaires a la fortifficacion de son dict houstel; et en
oultre lui donna congé et licence de lever ou faire lever semblables
fourches patibulaires que avoient fact et faisoient par avant lesdictz de
Sainct-Savyn en ladicte terre de la Tour-aux-Connions...
Et a ceste cause, a depuis icelluy supplyant faict de grands provisions de
matieres pour emparer et fortiffier son dict houstel, lequel il a encommencé
de fortiffier et emparer, mais ne vouldroict ne ouzeroyt proceder du tout a
icelluy fortiffier et emparer se, sur ce, il n'avoyt noz congé et licence de
ce faire. Doubtant que en ce et autres chouses dessus dictes noustre
procureur luy voulist, en temps advenir, donner aulcun trouble destourbier
ou empeschement. Et aussi que ledict supplyant et ses predecesseurs nous ont
tousiours bien et loyaulment servy en faict et nos guerres ou autrement, il
nous plaise sur ce luy impartir noustre grace et provision convenable. Pour
quoy, Nous, ces choses considerees et mesmement lesdicts congé et octroy de
noustre dict cousin de Nemours audict suppliant, de noustre grace specialle,
plaine et puissante auctorité royal, avons donné et orctroyé, donnon et
octroions, congé et licence de fortiffier sondict houstel de la Vrullonnière
de murailles, murectez, tours, canonnieres, fossez, pontz-leviz, boulevars
et autres fortifficacion et emparement de son dict houstel. Et aussi de
lever ou faire lever lesdictes fourches patibulaires en da dicte terre,
acquest et appartenance dicelle tout ainsy que y fasoient et avoient
accoustumé de faire par avant lesdictz de Saint-Savyn. Et aussi de
contraindre, ou faire contraindre, lesdicts hommes et subjects par ledict
suppliant acquis d'iceulx de Sainct-Savyn, a faire en icelluy houstel de la
Brullonniere semblable guet et payer tous autres droicts et debvoirs qu'ils
avoient acoustumé de faire payer a ladicte Tour-aux-Connions...
Les travaux sont achevés un peu après 1474. Le logis seigneurial est
construit à l'extrémité orientale d'une grande cour trapézoïdale protégée
par des tours dotées d'archères-canonnières et ceinturée de courtines. Bien
que prévues et autorisées par les lettres patentes du roi, l'existence de
fossés défensifs n'est pas établie. Le château subit des dommages lors des
guerres de religion: il est pillé alors que les troupes de l'amiral de
Coligny assiègent Poitiers et occupent les environs, dont Persac, à
plusieurs reprises. Après cette période de troubles, la famille de Nuchèze,
propriétaire depuis le début du XVIe siècle, procède à quelques
modifications sur le château, notamment en agrémentant l'étage de comble par
deux lucarnes sur consoles d'inspiration Renaissance. Un procès-verbal de
visite de 1653 mentionne, en plus des trois tours actuelles, l'existence
d'une tour en cul-de-lampe, peut-être située à l'angle nord-ouest. Il
indique également la présence de peintures dans une des chambres du deuxième
étage (désignée sous le nom de "chambre peinte") et d'une salle d'armes
située au premier étage de la tour sud-est, à côté de la salle haute du
château. La chapelle, séparant les deux salles du premier étage du château,
est également mentionnée. Vendu pour la première fois en 1669 à François Le
Maistre, conseiller du Roi au Parlement de Paris, le château n'est plus la
résidence principale du seigneur de la Brulonnière.
De nouvelles campagnes de restauration et de transformations sont réalisées
dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, à la demande des descendantes de
François Le Maistre, et plus particulièrement Anne-Geneviève puis
Anne-Nicole Le Camus. Les divers procès-verbaux de réparations dressés entre
1769 et 1772 montrent que la petite tour en cul-de-lampe a disparu, qu'une
maison de garde a été construite (dans le prolongement nord du château), et
que toutes les tours étaient couvertes de tuiles plates. Une des tours du
château accueille une prison au rez-de-chaussée, attribut de la fonction de
justice exercée par le seigneur. Le mur ouest de la cave est consolidé à
l'aplomb du mur pignon du cuvier qui se situe au-dessus et repose sur la
voûte. L'avenue d'ormes située au nord de la propriété, le long de la
grange, semble disparaître un peu après 1772, les arbres étant malades ou
abîmés suite aux ouragans de vent du mois d'août qui ont également endommagé
la toiture. Lors de l'établissement du cadastre napoléonien de 1811, le
château se développe déjà sur le plan qu'on lui connaît aujourd'hui, et
comprend 28 ouvertures imposables. D'après le plan, un imposant bâtiment
s'adosse à la courtine nord, près de la tour nord-ouest. Il s'agit sans
doute d'une grange-étable, à laquelle sont, peut-être accolés des toits. Le
long de la courtine sud se trouvait également un bâtiment, peut-être une
écurie, accolée au cuvier.
En 1818, le château et l'ensemble du domaine sont vendus à Jacques Marie
Laurens de la Besge qui entreprend d'importants travaux sur la partie
ancienne du logis seigneurial: de nouvelles portes d'accès direct au
rez-de-chaussée et au premier étage sont percées côté est, la tour sud-est
est agrémentée de fenêtres au premier et deuxième étage, et sur la façade
ouest, plusieurs fenêtres existantes sont agrandies, les traverses et
meneaux supprimés. Un pont en bois est construit depuis la porte du premier
étage de la façade orientale pour arriver jusque dans le jardin anglais.
L'ancienne maison de garde adossée sur le pignon nord du château est
intégrée à la partie médiévale et de nouvelles chambres et salons y sont
aménagés. L'un d'eux accueille un décor évoquant un petit théâtre, peut-être
aménagé pour jouer les pièces de divertissement évoquées par le vicomte
Emile de la Besge dans ses Souvenirs et récits de chasse. Les courtines qui
avaient sans doute déjà partiellement disparu au XVIIIe siècle, sont finies
de démolir, sauf une petite partie située au nord-ouest qui sert d'appui aux
nouveaux communs élevés de part et d'autre de la tour nord-ouest. Les
transformations se poursuivent au début du XXe siècle: l'escalier en bois
entre le premier et le deuxième étage de la partie nord du château est
agrandi (vers 1905) et le pont en bois menant vers le jardin est reconstruit
en béton (vers 1920). Aujourd'hui, les servitudes situées au nord-ouest sont
en grande partie démolies, y compris celles qui étaient encore visible en
1991-1992. Des mouvements de terrain ont entraîné un effondrement de la
voûte de la cave qui n'est plus accessible.
Le château de la Brulonnière se situe au nord-ouest du bourg de Persac, à
l'écart des habitations, entouré de prés, jardin, et bois. L'accès se fait
par un portail monumental en fer forgé situé au nord de la place de l'église
et donnant accès à une grande allée en partie arborée. Son édification en
bordure de coteau près des rives de la Grande Blourde lui confère une
position dominante à l'ouest. Les ruines des communs, qui prenaient appui
sur le mur d'enceinte, sont visibles du côté nord-ouest, envahies par la
végétation. Le château est construit en appareil régulier de moellons
dressés de calcaire mêlé à du silex, partiellement enduit. Les tours sont
couvertes de toits coniques en ardoise, le corps principal de l'édifice d'un
toit à deux pans couvert de tuiles plates. La tour d'enceinte nord-ouest
s'élève sur trois niveaux, celle du sud-ouest dispose d'un niveau
supplémentaire, en soubassement, dû à la rupture de pente. Ces tours sont
ajourées de baies à encadrements en cavet et de canonnières majoritairement
bouchées. Un cerclage en fer pour la sécuriser marque le soubassement de la
tour sud-ouest. Le logis seigneurial s'élève sur un rez-de-chaussée, un
étage carré, un étage de comble et un comble perdu. La déclivité du terrain
vers le sud-ouest a permis la création d'un étage de soubassement au sud de
la tour d'escalier.
L'édifice se compose d'un grand quadrilatère orienté sud-nord, flanqué de
trois tours circulaires, une hors-œuvre côté ouest accueillant l'escalier en
vis, une demi-hors-œuvre au milieu de la façade est (elle marquait la limite
septentrionale de l'édifice à l'époque médiévale) et la troisième située à
l'angle sud-est. La base des tours est et sud-est est talutée et accueille
des archères-canonnières. Plusieurs baies des trois tours ont une modénature
de style gothique (chanfreins, arcs en accolade, moulures en réglets).
Certaines ont un décor particulièrement soigné: la porte située au sud de la
tour d'escalier est décorée d'un arc en triple accolade sommé d'un fleuron à
double rang de feuilles et accosté de deux pinacles. Les piédroits sont
décorés de colonnettes à chapiteaux sculptés de feuilles. Le tympan est orné
d'un blason portant le lion rampant des Brulon et le tout est couronné d'un
larmier très saillant. La fenêtre du deuxième étage de la tour de la façade
orientale est dotée d'un décor de gâble en accolade couronné d'un fleuron
semblable à celui de la porte de l'escalier. Les pinacles bordant le gâble
reposent sur des culots très abîmés mais représentant peut-être des animaux
fantastiques. L'appui de fenêtre est décoré de deux modillons à tête
humaine, encadrant le blason au lion rampant des Brulon. Bien que présentant
une grande homogénéité, les façades se décomposent en deux parties,
correspondant aux deux principales campagnes de construction.
Les travées d'ouvertures de la moitié nord du château sont alignées et ne
présentent pas de modénature particulière, hormis les feuillures accueillant
les contrevents. Celles de la moitié sud ne sont pas alignées et sont
décorées d'arcs en accolade (dont une accolade à trois pointes au
rez-de-chaussée de la façade ouest), appuis saillants moulurés, traces de
croisées dont les meneaux et traverses ont été supprimés. La façade ouest
présente quatre travées d'ouvertures au nord de la tour d'escalier et une
série d'ouvertures non alignées côté sud. Deux portes permettent l'entrée
depuis cette façade: une située au sud-ouest, dont le décor est similaire à
celle qui lui fait face dans la tour d'escalier. Il est accompagnée de
bas-reliefs animaliers, certainement des lions, disposés sur les coussinets
des piédroits. La seconde entrée se situe au nord-ouest, desservie par un
escalier droit à deux volées recouvert de végétation. L'étage de comble est
décoré de trois lucarnes passantes à fronton-pignon, en faux encorbellement
supporté par quatre consoles en triple talon. Trois acrotères sphériques
décorent les frontons triangulaires. Le tympan de la lucarne septentrionale
est orné d'un blason représentant un chevron accompagné en chef de deux
étoiles et en pointe d'un croissant (les armes de la Besge). Les deux autres
lucarnes sont décorées d'un motif pentagonal, et deux trous semblables à des
ouvertures de canonnières sont visibles sous les appuis saillants (quoique
disposés de manière irrégulière, il pourrait s'agir de remplois). Le pignon
sud présente une travée d'ouvertures presque en alignement.
Au niveau du comble perdu, on aperçoit une ouverture murée qui s'ouvrait au
ras du rampant. Les fenêtres des premier, deuxième et troisième niveaux sont
moulurées comme celles de la façade ouest. Du côté est, l'accès se fait
depuis une porte-fenêtre située au premier étage, par un pont en béton
menant au jardin. Plusieurs baies de dimensions différentes éclairent cette
façade, dont certaines moulurées. Au nord de la tour, comme pour l'autre
façade, les ouvertures s'agrandissent et s'alignent. L'étage de comble est
éclairé par deux petites lucarnes rampantes à croupe et des tabatières. A
l'angle sud-est, les anciennes latrines, construites dans un bâti couvert
d'un toit en appentis en rupture avec la rive, accueillent aujourd'hui des
toilettes, à chaque niveau. Dans la cour à l'ouest se trouve un pilier,
vestige d'un ancien portail, et les restes de la cave, autrefois surmontée
d'un cuvier qui prenait appui sur la voûte de celle-ci. Elle s'est effondrée
récemment suite à des mouvements de terrain. L'intérieur a connu de
nombreuses transformations lors de la création de la partie septentrionale
de l'édifice, et les circulations ont été modifiées pour permettre le
passage d'une partie à l'autre. Initialement, l'escalier en vis desservait
les étages où se trouvaient une grande chambre côté sud et une plus petite
côté nord, chacune communiquant avec une antichambre située dans les tours
sud-est et nord-est. Un second escalier en bois dessert les salons au nord
de l'édifice. Dans la salle basse trône une cheminée monumentale ornée du
blason des Brulon. Les salons parquetés sont décorés de corniches moulurées
en plâtre et pour certains de lambris d'appui. Un des salons est agrémenté
d'une alcôve, décorée à la façon d'un petit théâtre: la coupole en quart de
sphère surbaissé est soutenue par des pilastres carrés ornés de chapiteaux
corinthiens. Les rayons sont soulignés d'une frise et deux muses ailées sont
sculptées en bas-relief aux angles de l'entablement. La chapelle du premier
étage a laissé la place à un vestibule dont la grande porte en plein-cintre
donne sur le pont en béton menant de ce premier étage à l'ancien petit
jardin à la française, aujourd'hui disparu. (1)
château de la Brulonnière 86320 Persac, propriété privée, ne se visite
pas, mais une promenade dans le parc à partir de la grille située à côté de
l’église est possible.
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source des photos :
https://inventaire.nouvelle-aquitaine.fr
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