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Château de Saint Germain en Laye (Yvelines)
 
 

     Après n'avoir fait que de courtes apparitions dans la forêt de Saint-Germain au cours de leurs journées de chasse, les Capétiens prirent le parti d'y bâtir une résidence à leur usage; il y avait là, en effet, une position de valeur ; sa forte assiette ne pouvait manquer d'attirer l'attention, au point de vue militaire, de ces maîtres de l'Ile-de-France qui bataillaient chaque jour, pour ainsi dire, afin d'assurer leur autorité ou leur existence. Sous le règne de Louis VI le Gros, on trouve la mention d'une habitation royale à Saint-Germain. Ce palatium fut bâti vers les années 1122-1124; il allait être, après maintes transformations, comme la cellule-mère du château de nos jours. La résidence du fils et successeur de Philippe 1er n'avait pas le caractère d'un château de plaisance; c'était un château fort, un castellum. Sa partie maîtresse s'élevait à la place même où se dresse aujourd'hui, à l'angle nord-ouest du château, qui donne, d'un côté, sur le Parterre, et de l'autre, sur la place du Château, la construction massive qu'on appelle le donjon de Charles V. Car le château de Saint-Germain-en-Laye offre ce caractère fort curieux de cinq constructions qui, à travers les siècles, se sont superposées les unes aux autres, en se servant des mêmes fondations: Le château de Louis VI, qui a duré un peu plus de deux siècles, de l'année 1124 à l'année 1346, la dix-huitième du règne de Philippe VI de Valois; Le château de Charles V, qui a eu cent soixante-quinze ans d'existence, de l'année 1364 à l'année 1539, la vingt-quatrième du règne de François 1er; Le château de la Renaissance, oeuvre de François 1er et de Henri II, qui a duré environ cent quarante ans, de la fin du règne de François 1er à l'année 1680, sous le règne de Louis XIV; Le château de Louis XIV ou des Cinq Pavillons, transformé de 1680 à 1690, qui a duré tel quel pendant cent quatre-vingts ans environ, jusque sous le règne de Napoléon III; Enfin, le château actuel, dont la restauration a été commencée en 1864, sur l'ordre de Napoléon III, par l'architecte Millet, l'architecte Lafollye et terminée par l'architecte Daumet, en 1907, sous le président Armand Fallières. Divers actes officiels permettent de constater, à maintes reprises, la présence, au castellum de Saint-Germain-en-Laye, de Louis le Gros, et de ses descendants, Louis VII le Jeune, Philippe II Auguste, Louis VIII le Lion; mais, pour l'ensemble des cent deux années (1124-1226) sur lesquelles se répartit l'histoire saint-germanoise de ces quatre règnes, ils ne fournissent aucun renseignement digne d'être retenu, ni sur la disposition du château lui-même, ni sur le genre de vie qu'y pouvaient mener les rois capétiens et leurs serviteurs.
Avec le règne du fils de Louis VIII et de Blanche de Castille, c'est un chapitre tout nouveau qui s'ouvre dans l'histoire de notre château; et ce chapitre est encore vivant aujourd'hui dans sa beauté artistique, qui est demeurée à peu près intacte. En effet, les siècles ont respecté, mieux que les hommes, le bijou d'architecture qui est la chapelle du château de Saint-Germain. Dans le XIIIe siècle, qui est à divers points de vue le grand siècle, le siècle par excellence du moyen âge français, notre chapelle, malgré ses petites dimensions, tient une place d'honneur. Le grand-père de Louis IX, Philippe-Auguste, avait eu l'idée de faire bâtir, à côté des constructions militaires de Louis VI, un bâtiment destiné au service religieux des habitants du château. Au mois d'avril 1223, c'est-à-dire quinze mois environ avant sa mort, le vainqueur de Bouvines avait décidé d'édifier une chapelle "dans notre maison de Saint-Germain-en Laye", en l'honneur de la bienheureuse Vierge Marie. Chaque jour, on y prierait aussi pour le repos de l'âme de son père Louis VI et pour le repos de l'âme de sa mère Alix de Champagne. Les travaux en furent poussés avec rapidité; car elle était achevée dès le mois de juin 1238, alors que le fils de Blanche de Castille régnait depuis douze ans et qu'il était âgé de vingt-trois ans. La chapelle de saint Louis a traversé les siècles pour arriver jusqu'à nos jours, à peu près telle qu'elle était sortie des mains de son architecte. La même fortune n'est pas échue au château fort que Louis le Gros avait fait élever pour être une résidence royale; les premières années de la guerre entre Philippe VI de Valois et le roi d'Angleterre Édouard III, qui devait devenir la guerre de Cent ans, en virent la destruction complète. Les états généraux de 1317 avaient déclaré que les femmes et leurs descendants étaient inhabiles à succéder à la couronne de France. Le royaume des lis ne doit pas tomber en quenouille.
C'est ainsi qu'en 1328, à la mort de Charles IV, le dernier des fils de Philippe le Bel, la couronne de France était passée à son héritier mâle le plus proche,Philippe de Valois. Édouard III, qui avait une parenté plus proche avec Charles IV, mais une parenté due à sa mère, n'avait point parlé alors de ses prétentions; une dizaine d'années plus tard, en présence des difficultés et des maladresses de Philippe VI, il prit, avec une singulière audace, le titre et les armes de roi de France. Ainsi le XIVe et le XVe siècle connurent une guerre atroce, dans laquelle la France aurait succombé sans l'épée de Duguesclin et la foi de Jeanne d'Arc. En 1346, Édouard III avait débarqué à l'extrémité du Cotentin. Le prince de Galles, qui devait se rendre célèbre sous le nom de prince Noir, fut chargé par son père de marcher sur Saint-Germain, Rueil, Saint-Cloud, pour faire croire à une attaque de Paris. Philippe VI sortit enfin de son immobilité et gagna à son tour la Picardie; ce fut pour y subir, le 26 août, le désastre de Crécy. Quant à la démonstration militaire du prince Noir, elle avait été marquée par une série de pillages et d'incendies; ce fut alors, vers le 15 août, que le château de Saint-Germain fut livré aux flammes et détruit mais la chapelle fut épargnée. Seule, la chapelle était restée debout. Ce n'était pas le vaincu de Crécy ni son successeur plus malheureux encore, le vaincu de Poitiers, qui pouvaient songer à relever les ruines de Saint-Germain. Après les règnes néfastes des deux premiers Valois, vint le règne réparateur de Charles V. De nombreuses constructions furent entreprises. Christine de Pisan, la femme poète et historien, rapporte, dans le Livre des faicts et bonnes moeurs de Charles V, que ce roi "fit rédifier notablement le chastel Saint-Germain-en-Laye". Il est fâcheux qu'elle n'ait donné aucun détail sur ces travaux; on peut, dans une certaine mesure, suppléer à son silence par ce qui reste de l'oeuvre de Charles V.
L'angle nord-ouest du château actuel est occupé par un donjon, quadrangulaire, tout en pierre, à trois étages au-dessus d'un rez-de-chaussée. La façade du côté du parterre est percée de deux grandes fenêtres à chaque étage, soit en tout huit fenêtres; la façade du côté de la place n'a que deux étroites ouvertures au troisième. Cette construction massive, qui est couronnée par une petite tour et un clocheton, c'est le donjon même de Charles V. Le donjon lui-même a une hauteur de 32 mètres; le campanile, de 8 mètres. Le château de Charles V avait la forme d'un pentagone oblong et fort irrégulier, avec une cour intérieure ayant l'étendue de la cour actuelle. C'était un vrai château fort, de caractère avant tout défensif; les fondations, du moins du côté du sud-ouest, avaient une épais seur de 2,15 mètres; des fossés profonds l'isolaient de tous les côtés; des tours le flanquaient aux angles; un chemin de ronde, couvert en appentis, en faisait le tour dans les basses oeuvres, à hauteur de l'entresol, et masquait en partie la chapelle. L'ensemble de ces travaux se place dans les premières années du règne, vers 1364-1367; c'est la période de paix qui précéda la reprise de la guerre contre les Anglais. Le nom de Raymond du Temple a été indiqué comme celui de l'architecte des travaux de Saint-Germain. Charles V fit plusieurs séjours dans sa nouvelle résidence; il avait fait disposer le donjon pour la garde de ses archives et de son trésor. Au second étage, une grande salle carrelée, dont le sol était recouvert de nattes et les murs tapissés de tentures, formait son cabinet. En 1417, Jean sans Peur fit occuper le château par une garnison. Deux ans plus tard, après son assassinat, le roi d'Angleterre Henri V y établit un capitaine, John Grey. En 1434-1435, le capitaine de Saint-Germain était le fameux Jean Talbot. Enfin, en 1440, le connétable de Richemont recouvra d'une manière définitive le château de Saint-Germain; il avait été occupé pendant près d'un quart de siècle par les ennemis de la France, Bourguignons ou Anglais. Il ne semble pas que Charles VII ait jamais séjourné dans la résidence de son aïeul. Louis XI ne fréquenta pas davantage le château.
L'humeur voyageuse de Charles VIII le conduisit en Bretagne, puis à Florence, à Rome et à Naples; il ne fit que de rares apparitions à Saint-Germain. De même, son successeur Louis XII. Le plus notable séjour du Père du peuple à notre château eut lieu à propos du mariage de sa fille Claude avec le cousin de celle-ci, François, duc d'Orléans et comte d'Angoulême. D'Amboise, François partit "bien accompagné, et vint à Saint-Germain, qui est un fort beau château à cinq lieues de Paris, beau parc et belle chasse. Le 18 mai 1514, furent célébrées les noces en la chapelle de Notre Dame; il y avait dix mille hommes habillés aussi richement que le Roi ou que Monsieur d'Angoulême, qui était le marié". Sept mois et demi plus tard, les jeunes époux étaient roi et reine de France. François 1er avait vingt ans et trois mois; la reine Claude avait quinze ans et deux mois.
Le château de Charles V était avant tout une construction de caractère militaire. Aussi ne convenait-il pas au genre de vie que François 1er concevait. Puisque la position de Saint-Germain offrait de grands avantages, à cause de la proximité de la forêt, de la beauté du panorama, de la salubrité de l'air, il n'y avait qu'un parti à prendre: jeter à terre les constructions de Charles V et élever des constructions nouvelles, qui auraient le caractère d'un château de la Renaissance. Le 12 mars 1539, c'est l'année de la grande ordonnance de Villers-Cotteretssur la réforme de la justice, François 1er décidait les travaux pour un nouveau château à construire à Saint-Germain. "Comme nous avons advisé de faire desmolir et réédiffier certains corps d'hostel et faire plusieurs réparations en nostre chasteau de Saint-Germain-en-Laye et que d'icelles vous tiendrez le compte, nous vous commettons pour recevoir les deniers qui sont par nous ordonnez pour lesdites desmolitions, ediffices et réparations dudit Saint-Germain-en-Laye". Le service du contrôle devra "avoir l'oeil et regard à faire bien duement, promptement et diligemment besongner les maçons aux ouvrages, iceux pour suivre, solliciter et haster en la manière qu'ils puissent estre faits au plus tost que faire se pourra". Le 22 septembre 1539, l'entrepreneur Pierre Chambiges, "maistre des oeuvres de maçonnerye de la ville de Paris", signait le marché mais il mourut en 1544. L'entreprise passa à son gendre Guillaume Guillain et à l'associé de celui-ci, Jean Langeois. Les travaux duraient depuis huit ans quand François 1er mourut. Henri II les fit continuer d'après le plan primitif, sous la direction de Philibert de Lorme, qui reçut du roi, en 1548, les fonctions d'intendant de ses bâtiments. Cet architecte, à qui l'on doit la cour, en fer à cheval, du château de Fontainebleau, le château d'Anet et le palais des Tuileries, perdit sa situation dès l'avènement de François II.
Le Primatice le remplaça, en 1559, comme ordonnateur des bâtiments. On connaît les noms des intendants des travaux et contrôleurs qui eurent la haute main sur cette grande entreprise de démolition et de reconstruction; on a pu dresser la liste des maçons, charpentiers, couvreurs, menuisiers, serruriers, verriers, plombiers, etc., qui furent employés dans ces travaux. Mais une question demeure; quel fut l'architecte de Saint-Germain? Il semblerait que Pierre Chambiges a joué le rôle d'architecte conseil auprès du Roi qui avait eu la première idée de l'entreprise et qui ne cessa de s'y intéresser, c'est l'hypothèse qui offre le plus de vraisemblance. Commencés en 1539, les travaux étaient achevés, dans le gros oeuvre, en 1549; François 1er avait pu déjà jouir en partie des aménagements intérieurs. Ceux-ci furent continués sous le règne de Henri II, en même temps qu'on s'occupa de divers détails de décoration. Le tout était terminé vers 1555. Ainsi la construction de ce vaste pentagone de pierre et de brique avait demandé environ seize ans. Si l'on se rappelle que ces travaux se poursuivirent au cours des guerres contre Charles-Quint, que la France eut à subir en 1544 une invasion qui conduisit les Impériaux à Saint-Dizier, que Henri II, portant à son tour la guerre au dehors, fit, en 1552, la glorieuse conquête de Metz, de Toul et de Verdun, que le Hainaut, le Cambrésis et l'Artois étaient le théâtre d'hostilités continues, que la guerre faisait rage au delà des Alpes, comme l'attestent les souvenirs de Cérisoles sous François 1er et de Sienne sous son successeur, on estimera que les travaux ne durent souffrir que de courtes périodes de chômage jusqu'à leur entière exécution. Le compte a été fait des prix de construction. Pour les huit années du règne de François 1er, qui représentent la période la plus longue et la plus active, le total des travaux s'élève à deux millions cinquante mille francs, au taux de l'argent au XXe siècle.
Après avoir franchi la cour du Grand Commun, aujourd'hui place du Château, dont les bâtiments étaient réservés aux divers services, on pénétrait dans le château par l'entrée actuelle. Dans les fossés de cette façade, François 1er, grand amateur des sports, avait fait établir un jeu de paume. Le pont-levis et les piles du pont dormant par lesquels on accédait à la cour intérieure n'ont été mis en place qu'en l'année 1548. La "sauvage quadrature" de cette cour est due à cette raison que François 1er et Chambiges se sont servis, après avoir rasé l'édifice, des fondations mêmes du château de Charles V; ils s'en sont servis, tout en les renforçant, à cause du poids plus élevé qu'elles devaient soutenir. Quant à l'opinion, qui prétend voir dans la forme bizarre de la cour une sorte de D, qui serait une allusion symbolique à Diane de Poitiers, la favorite de Henri II, elle ne saurait se soutenir; elle a contre elle le fait même que l'emplacement des anciennes fondations a déterminé la forme générale du nouvel édifice, et cet autre fait que la cour était dessinée et la majeure partie des côtés construite avant le règne de Henri II et de la duchesse de Valentinois. Ici, à l'intérieur de la cour, sur quatre côtés, car le côté de la chapelle de saint Louis ne fut pas modifié, c'est un style uniforme; l'ensemble, qui a été exécuté par Chambiges et ses successeurs, est d'une unité et d'une originalité remarquables. La pierre sera employée pour les parties pleines des constructions et a brique pour les parties décoratives, comme les encadrements des ouvertures et les divers ornements. Quant aux trois tours de la cour intérieure avec leurs escaliers en vis et les coupoles de pierre qui les couronnent; quant aux grandes arcades du rez-de-chaussée et de l'entresol, qui soutiennent un premier étage avec balcon, surmonté lui-même d'un étage plus bas; quant aux contreforts très saillants qui, de bas en haut, séparent les ouvertures et qui portent des gargouilles; quant à la balustrade ornée de vases qui règne au sommet de l'édifice: il y a là une harmonie qui fait de cet ensemble architectural l'un des morceaux les plus décoratifs et les plus caractéristiques de la Renaissance française.
La cour intérieure a une superficie de 1810 mètres; la hauteur des façades sur cour est de 22 mètres. Les façades extérieures du château, on ne parle pas de la façade de la chapelle, qui est demeurée sans changement depuis le XIIIe siècle (45 mètres, en y comprenant le pavillon sud-ouest), la façade de l'ouest du côté de la place du Château (60 mètres), la façade du nord, la plus longue, qui développe ses cent mètres du côté du parterre, avec sa loggia centrale correspondant au grand escalier, la façade de l'est (50 mètres), la plus petite, du côté de l'esplanade, la façade du sud (62 mètres), qui est longée par la rue Thiers, constituent, dans leur uniformité, un ensemble imposant, haut de vingt-sept mètres; mais elles n'ont pas, de la base au sommet, l'unité de style qui caractérise les façades de la cour. Ici, en effet, les architectes de François 1er et de Henri II ont superposé deux styles: dans les basses oeuvres, rez-de-chaussée et entresol, style féodal, d'aspect militaire; pour les deux étages supé rieurs, style de la Renaissance, le même que dans la cour. Le caractère féodal des basses oeuvres s'atteste par le chemin de ronde de l'entresol, qui était couvert par un toit en appentis et qui constitue "la Galerie blanche". Une grande nouveauté du château de François 1er et de Henri II, c'est qu'au lieu d'être couronné par des combles en ardoise, il était couvert par une énorme terrasse de pierre. Pour soutenir le poids de cette couverture de pierre, le dernier étage avait été voûté, et de grosses barres de fer avaient assuré la solidité des murailles. On accédait à la terrasse par le grand escalier, qui part de la cour intérieure dans le bâtiment nord. On arrivait ainsi à un vaste promenoir, qui couvre toute la surface des bâtiments, la chapelle exceptée, et d'où l'on a dans toutes les directions une vue illimitée; mieux encore que de la Terrasse classique, on peut contempler l'admirable panorama des forêts de Saint-Germain et de Marly, de la vallée de la Seine, du mont Valérien, de Saint-Denis et des collines qui ferment l'horizon.
En 1555, Henri II avait terminé au château de Saint Germain les travaux que son père avait entrepris seize ans plus tôt; à le regarder d'une manière générale, le château se présentait alors, dans son ensemble, à peu près tel que nous le voyons aujourd'hui. Philibert de Lorme, qui était intendant des bâtiments, jouissait alors d'un grand crédit auprès du Roi et de Catherine de Médicis; jusqu'ici, il avait conduit à bonne fin les travaux dont Pierre Chambiges avait donné le plan général, mais il était impatient de se signaler par une oeuvre qui serait sa création personnelle et qui flatterait en même temps l'orgueil du Roi et de la Reine. En avant de la façade orientale du château s'étendait une vaste esplanade, qui se terminait par un talus rapide, du haut duquel l'oeil embrassait un panorama magnifique. C'est là qu'il fallait bâtir une nouvelle résidence royale; elle aurait un caractère tout différent de l'autre. Les pro portions en seraient beaucoup plus petites; tout appareil militaire y serait supprimé; tout serait conçu pour la commodité et l'élégance. Ce serait, en effet, comme une maison de plaisance; le Roi et la Reine viendraient s'y reposer. Le Roi et l'architecte se mirent rapidement d'accord; un nouveau chantier s'ouvrait au Levant. Bien vite, on dit le Château Neuf, tandis que le château de François 1er fut appelé le Château Vieux. Dominant la Seine, deux avant-corps symétriques abritaient les appartements du Roi, au nord, et les appartements de la Reine, au midi, c'est-à-dire du côté du Pavillon Henri IV et du côté de la propriété privée qui porte le nom de Château Neuf, inscrit sur un cartouche de pierre au-dessus de la grande porte d'entrée. Le pavillon du Roi était relié au pavillon de la Reine par une grande salle, qui servait sans doute de salle des fêtes. Du côté du nord et du côté du sud, deux galeries couvertes, attenantes au pavillon du Roi et au pavillon de la Reine, formaient des promenoirs au dessus de la terrasse. La cour centrale, avec la succession de ses lignes courbes et de ses lignes brisées, avec la colonnade et la galerie qui l'entourait, offrait une symétrie très agréable à l'oeil. Philibert de Lorme parle aussi d'une grande galerie qui allait du pont de pierre du roi, dans le Château Vieux, à la façade ouest du Château Neuf.
Pendant les vingt années environ où Louis XIV fit à Saint-Germain des séjours plus ou moins prolongés, les architectes furent employés à divers travaux au Château Vieux et au Château Neuf. En 1663, François Le Vau, architecte ordinaire des chemin de ronde, par un large balcon de pierre; la balustrade et les consoles qui le supportaient étaient en fer forgé; des caisses de fleurs ajoutaient à l'élégance de ce nouveau décor. C'est alors que Charles Le Brun exécuta, sur les murs extérieurs du château, de grandes fresques, dont les traces ont disparu depuis longtemps. La Cour, telle que la comprenait Louis XIV, avec les innombrables services de la domesticité royale et de l'administration royale, était un organisme qui grandissait d'année en année; bientôt, il devint impossible de les loger dans le cadre trop étroit des bâtiments de la Renaissance. Louis XIV, approuva le projet de Mansart d'agrandir du Château Vieux. Commencés en 1680, les cinq pavillons demandèrent une dizaine d'années de travaux. Le pavillon I à l'angle nord-ouest, en avant du donjon, le pavillon II à l'angle nord-est, le pavillon III à l'angle sud-est, le pavillon V à l'angle entre la façade sud et la chapelle, le pavillon IV à l'angle sud-ouest, formaient cinq bras qui s'avançaient vers les divers points de l'horizon.
Chacun de ces pavillons représentait en moyenne trois pièces par étage; ce qui augmentait d'une manière très sensible la superficie du logement; mais, à voir, sur les estampes de l'époque, la réalisation de ce plan, combien le Château Vieux avait pris un aspect bizarre et déplaisant Quand on décida, sous le règne de Napoléon III, d'abattre les cinq pavillons de Mansart, pour rendre au Château bâtiments du Roi, frère de Louis Le Vau, celui-ci a construit le château de Vaux le Vicomte, l'hôtel Lambert, les pavillons de Marsan et de Flore aux Tuileries, travaillait à Saint-Germain. Il y était occupé, dit-il, à "débrouiller le chaos des logements et appartements des Châteaux Vieux et Neuf, plus mélangés et confus que les ouvrages de Versailles". La direction des travaux de Saint-Ger main lui appartint jusqu'à sa mort en 1676; c'est à partir de cette année que les comptes des bâtiments donnent le nom de Jules Hardouin-Masart. Il avait joint de bonne heure à son nom de famille le nom de son grand-oncle François Mansart, dont il avait été l'élève. A l'époque où les pièces du premier étage à l'angle nord-est du Château Vieux furent transformées pour devenir l'appartement du Roi, en 1668, on remplaça les appentis qui, dans le bâtiment de François 1er et de Henri II, couvraient le Vieux son aspect de la Renaissance, on constata que ces constructions n'avaient jamais été entièrement achevées. Le grand architecte-paysagiste Le Nôtre avait révélé son éclat à Saint-Germain par des travaux multiples, dont un est une oeuvre hors de pair. En 1663, Le Nôtre était à Saint-Germain, "avec plusieurs ouvriers, pour faire le parterre en face du bout de la grande galerie de l'appartement du Roi". Ces travaux donnèrent naissance au grand parterre. Pris en entier sur la forêt, il se composait de deux parterres à broderies, dont les buis et les fleurs avaient l'aspect d'un vaste tapis aux couleurs variées; disposés perpendiculairement à l'aile nord du château, séparés par une large allée centrale, ils aboutissaient à une vaste pièce d'eau, au delà de laquelle, dans la direction du nord, s'amorçait la route des Loges. En même temps que Le Nôtre créait au nord du Château Vieux un grand parterre avec une allée centrale, il en construisait un autre, à l'est du précédent, celui-ci d'un seul tenant; c'était un grand parterre à broderies, type classique du jardin à la française. Entre les deux parterres, un autre comblait le vide; de forme triangulaire, il comprenait trois bassins, encadrés dans des plates-bandes, ayant chacun un dessin particulier. La place du parterre aux trois bassins et du parterre voisin du Château Neuf avait été prise sur l'ancien jardin potager de François 1er.
Des deux châteaux royaux de Saint-Germain, il en est un, le Château Neuf, qui n'est plus représenté aujourd'hui que par un mur de soutènement, par quelques rampes, par une propriété privée sise en contre bas et appelée, sans grand fondement, semble-t-il, le pavillon de Sully, et enfin, sur la crête même du plateau, à l'amorce de la Terrasse, par l'hôtel et le restaurant connus sous le nom de Pavillon Henri IV. Habité d'une manière irrégulière pendant les séjours à Saint-Germain de la Cour de Louis XIV, le Château Neuf avait servi, à la fin du siècle, de logement à des officiers jacobites. Puis il semble qu'il ait été abandonné, c'est-à-dire voué à la destruction, du moins dans la partie des terrasses qui descendaient vers la Seine. La duchesse de Brancas en 1762, puis la duchesse de Beauvau en 1773 obtinrent de Louis XV qu'il leur fût cédé; mais l'une et l'autre reculèrent devant les frais de réparation que réclamait le mauvais état des bâtiments. Vint la Révolution; elle acheva de tout détruire. Les terrains du ci-devant Château Neuf furent confisqués, comme biens d'émigrés. Divisés en lots, ils furent vendus aux enchères, de l'an IV à l'an VII; la vente produisit 117.505 livres. Un quartier nouveau, le quartier de Médicis, se bâtit peu à peu sur les terrains du Château Neuf; on y traça les rues du Château-Neuf (aujourd'hui rue Thiers), des Arcades, de Médicis, de Sully... Depuis l'achèvement des cinq pavillons de Mansart, vers 1690, le Château Vieux n'avait reçu aucune modffication; les architectes s'étaient bornés à de simples travaux d'entretien. Cependant une révision totale eût été nécessaire, mais les crédits se faisaient de plus en plus rares, et la grande bâtisse, qui avait connu dans les âges antérieurs une vie intense, fut à peu près laissée à l'abandon. Ce n'était pas la Révolution qui allait entreprendre des travaux de restauration dans l'ancien château des Valois et des Bourbons; elle se borna à en modifier l'usage. Alors qu'elle donnait à la commune le nom de Montagne du-Bon-Air (décret de la Convention du 1er novem bre 1793), elle transformait le Château Vieux en prison pour les suspects.
La place ne manquait pas pour y entasser tous ceux qui provoquaient la méfiance du régime nouveau. Les suspects, enfermés dans leurs cellules, pouvaient entendre les chants de mauvais augure. A un moment, il fut question d'établir la guillotine à l'intérieur même du château, dans l'intérêt de la Nation; on aurait économisé ainsi les frais de transport à Paris des con damnés à mort; le projet ne fut pas exécuté. Enfin, des jours meilleurs revinrent. Sous le Consulat, le château se transforma en un château-hôpital. L'Empire y ouvrit en 1809 une École spéciale militaire de cavalerie, qui dura jusqu'en 1814; un million fut dépensé pour les réparations les plus urgentes. Napoléon fit une visite à l'improviste à l'École, le 14 avril 1812; il ne cacha pas le mécontentement que lui avaient causé des défauts d'installation et aussi l'insuffisance de la discipline. Qu'allait faire la Restauration? Elle continua la tradition de l'Empire. Deux compagnies de gardes du corps, la compagnie de Gramont et la compagnie de Luxembourg, furent casernées au château. Dans l'ancien appartement de Louis XIV était logé un officier général, qui avait le titre de gouverneur du Château royal de Saint-Germain-en-Laye. Tel fut Boson-Jacques, comte de Talleyrand-Périgord, le plus jeune frère du prince de Talleyrand; il était devenu lieutenant général sous la Restauration. Il prit au sérieux ses fonctions de gouverneur; résidant au château, il se rendit compte que sa restauration s'imposait, si l'on ne voulait pas prévoir le pire. En 1826, il adressa une lettre à la Quotidienne sur les travaux qui intéressaient "ce respectable monument, berceau de nos rois". A sa mort (28 février 1830), l'état était toujours le même, s'il n'avait pas empiré. Le gouvernement de Charles X avait d'autres soucis.
En 1832 le duc d'Orléans et son frère le duc de Nemours, colonel d'un régiment de lanciers en garnison à Saint-Germain, donnèrent un bal dans la grande salle du Château; mais ce fut une fête sans lendemain. On revint à l'idée d'employer le château de la Renaissance à des fins utilitaires, qui n'avaient rien de reluisant. Le meilleur moyen d'empêcher l'oeuvre architecturale de la Renaissance de périr tout à fait, de la mettre à l'abri des dégradations futures, c'était de lui enlever son caractère d'habitation, soit pour des membres de la famille régnante, soit pour une administration d'État, et de lui donner le caractère d'un musée. Par le décret du 8 mars 1862, l'empereur Napoléon III approuva "la création, au château de Saint-Germain-en Laye, d'un Musée d'Antiquités celtiques et gallo romaines, qui sera placé dans les attributions de la direction générale des Musées impériaux". Si les antiquités celtiques et gallo-romaines ont eu l'honneur inattendu de sauver de la ruine l'ancien château des Valois, c'est que Napoléon III avait entrepris d'écrire l'Histoire de César. Pour pouvoir suivre les campagnes du conquérant de la Gaule, il avait fait entreprendre de grandes fouilles en Bourgogne, dans la région d'Alise Sainte-Reine, l'antique Alésia, qui avait vu la résistance suprême de Vercingétorix. Des antiquités celtiques et gallo-romaines avaient revu ainsi la lumière du jour; en vue de les empêcher de périr et d'en faire un objet d'enseignement, on leur assigna, comme lieu d'asile, le château de Saint-Germain. Eugène Millet, architecte des Monuments historiques, fut chargé de préparer un projet de restauration, d'après l'utilisation qu'on avait décidée. Après une inspection minutieuse, il soumit à la commission des Monuments historiques deux projets: ou reprendre l'oeuvre de l'architecte de Louis XIV et la parfaire dans tous ses détails, ou la détruire en entier pour rendre au château l'aspect que lui avaient donné les architectes de la Renaissance. La commission s'arrêta, avec raison, au second projet; il avait un double avantage: débarrasser le château de ses cinq grosses verrues, c'était lui restituer sa belle ordonnance du XVIe siècle; c'était aussi rendre à la lumière, en dégageant la chapelle, un bijou architectural du XIIIe siècle. C'est ainsi que le dernier des cinq pavillons de Mansart, fut démoli en 1900. (1)

Éléments protégés MH : le Château Vieux : classement par liste de 1862. Le pavillon de la Muette, dans la forêt domaniale: classement par arrêté du 7 avril 1921. L'ensemble du domaine national : classement par arrêté du 8 avril 1963. (2)

château de Saint Germain en Laye 78100 Saint-Germain-en-Laye, tel. 01 39 10 13 00, Musée des Antiquités Nationales, ouvert au public tous les jours, sauf le mardi, de 10h à 17h15.


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(1      Le château de Saint-Germain-en-Laye par Georges Lacour-Gayet (1856-1935). Éditeur: Calman-Lévy, Paris (1935).
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      source : 
https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/

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(IMH) = château inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, (MH) = château classé Monument Historique
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